Reste encore
Auteur: Thera
Genre: romance, drame, Sam/Jack pairing
Saison:avant la saison 8 puisque Jacob est encore en vie
Spoiler:aucun
Rating: K
Disclaimer : La série ainsi que les personnages ne m'appartiennent pas. Je ne tire aucun profit de cette fic.
Note de l'Auteur : Cette fic a été écrite depuis un moment déjà sans que je ne l'ai jamais publié. Je ne sais pas vraiment d'où met venue cette fic, et finalement elle pourrait tout aussi bien « s'appliquer » à d'autres personnages…
J'espère ne pas avoir été trop…je ne sais pas…que ça ne fasse pas trop « guimauve » quoi lol
Merci à Céline ma bêta reader
Je ne sais pas exactement quand tout cela a « dérapé », quand mes émotions ont eu raison de moi. Quelques jours, quelques mois, le jour de notre première rencontre ? C'est difficile à dire...
Les craintes je les ai toujours eu au fond de moi. J'ai appris à vivre avec, je m'en suis accommodée peu à peu. J'ai su vivre avec la peur oppressante de le voir m'être arraché. Quelque part j'y étais contrainte, les risques pris au cours des missions sont tels que j'ai du apprendre à apprivoiser ces craintes.
Mes peurs se sont apaisées quand il a cessé de partir en mission, pour moi ce fut un profond soulagement. Et mes peurs de le perdre se sont à nouveau adoucies à la naissance de nos enfants. Notre vie changeait et quelque part je gagnais une certaine confiance en ce que nous vivions, une foi en la vie. Cette pensée d'invincibilité de notre couple, de notre vie...
Cela semblait si fort, si inébranlable.
Pourtant j'ai souvent imaginé le pire, des scénarios effroyables…
Pourtant…
Je n'avais jamais pris conscience de ce que pouvait être réellement le « pire » jusqu'à ce qu'il entre dans nos vies avec une brutalité harassante, jusqu'à ce que j'y sois confrontée...
Et quand cela arrive, vous êtes surpris de la violence et de la dureté de la situation…
Et d'un coup c'est tout votre monde qui se met à changer. C'est fou comme le rapport aux choses change. On relativise tout à coup tout, on prend conscience que chaque seconde à son importance, que chaque pas que l'on fait est décisif.
Une situation qui a engendré en moi une peur d'une violence que je n'aurais jamais soupçonnée, ce sentiment ne me quitte plus, depuis quelques semaines déjà. Depuis ces quelques semaines où je suis là.
…où je suis là…
« là »
Le parking de l'hôpital est d'un calme plutôt étonnant pour cette heure-ci, hier encore les ambulances défilaient dans un vacarme de sirène effrayant. Et là tout est calme, presque reposant, apaisant aussi. Je suis forcée de reconnaître que la chambre l'est. Le lieu est étrangement serein.
Est-ce qu'il ressent la même sensation ?
Je me retourne à demi pour l'observer. Il est si pâle allongé dans ce lit.
Il est, comme toujours, impassible pendant que les deux infirmières s'affairent autour de lui pour les soins du matin. Je prends tout à coup conscience qu'elles ne m'ont pas prié de sortir pour effectuer les soins de Jack. Après avoir essuyé plusieurs refus, elles ont du juger que ma décision était ferme, je ne comptais pas bouger de cette chambre. Je ne suis pas n'importe quel visiteur, je suis sa femme ! En tant que telle je ne veux pas le quitter. Et encore moins pour me retrouver dans ce long couloir au dehors. C'est trop angoissant !
Dans cette chambre, l'angoisse est présente…mais il est là au moins.
Il fixe le plafond. Tel que je le connais il cherche à se libérer de ce sentiment de frustration. Il ne supporte pas d'être assisté, il aime une certaine indépendance, il a toujours bénéficié d'une liberté dans tout ce qu'il faisait. Tout ça est dur pour lui, je le ressens si bien. Il parle peu mais son corps exprime tellement, la souffrance bien sûr mais aussi sa colère, un sentiment d'injustice aussi.
Cela fait quelques minutes que mes yeux le cherchent, il aurait déjà du tourner la tête vers moi, fixer son regard dans le mien et m'adresser un tendre sourire. Au lieu de ça, le plafond semble avoir trouvé un certain intéressement aux yeux de Jack.
Finalement c'est moi qui bats en retraite, je me remets à la contemplation du parking tout en appuyant à nouveau ma main sur la vitre froide.
Que quelqu'un passe ! Qu'il me voit ! J'ai tellement besoin d'aide...
Je regarde furtivement ma montre. Il est 10h17. C'est étrange, il devrait déjà être là. Il n'y a même pas sa voiture. Je sens les battements de mon coeur s'emballer, c'est incontrôlable, je suis prise de panique. Où diable est-il ? Que fait-il ?
L'idée qu'il puisse être arrivé quelque chose à ELLE me traverse l'esprit...
J'ai envie de me retourner, et de dire à Jack que le retraité qui vient voir sa femme tous les matins à 10H n'est pas là. Que ce n'est pas normal, que cela ne présage probablement rien de bon...
Je tente de reprendre une respiration normale, je suis tellement émotive ces derniers temps. Depuis des semaines, cet homme grisonnant, la soixantaine venait tous les jours...jusqu'à ce matin. J'ai le sentiment qu'il ne reviendra pas, c'est probablement fini pour elle. Je ne connaissais pas cet homme, je ne lui avais jamais parlé, mais je suis certaine qu'on partageait la même peine, la même souffrance. On était étrangement liés, dans la même douleur.
J'ai l'intime conviction que je ne le reverrais plus.
Je me retiens encore une fois de conter cette anecdote à Jack, je ne peux pas le confronter à la mort des autres. Ce doit être si dur d'avoir à affronter la sienne.
Il m'a si souvent comparé à cet homme veillant sa femme...
Ses yeux se sont fermés, sa respiration est lente et régulière. Il dort. Ca a presque un côté rassurant !
Je rapproche ma chaise du lit le plus silencieusement possible, et je continue de l'observer. Si j'étends à peine ma main, mes doigts peuvent effleurer les siens. Mais ma main ne bougera pas, j'ai trop peur de le réveiller, il s'apercevra alors que je me suis approchée. Alors il s'enfermerait dans sa colère et mettrait un fossé entre nous. Il est très irritable depuis quelques temps, il ne souhaite en aucun cas ma pitié, comme il dit. Il ne veut pas de la tendresse que j'ai à lui offrir, il la perçoit comme un sentiment de compassion et il n'aime pas ça.
Je sais qu'en instaurant une certaine distance entre nous, il cherche à me protéger. Mais il fait fausse route, ce n'est pas moi qu'on doit protéger. C'est lui. LUI de cette foutue maladie, de cette mort qui le guette. Et il voudrait que je prenne de la distance…Nous ne sommes que des acteurs impassibles devant ce qui se produit, nous le perdons !
C'est étrange c'est peut-être la première fois que je m'impose cette «évidence » sans me jeter contre lui, sans pleurer et l'étreindre à m'en étouffer. Je suis parvenue à me construire une sorte de carapace, probablement à force qu'on me répète et me suggère d'être forte. Probablement aussi à force qu'il me rejette. Mais on ne s'accommode pas à la mort, bien plus quand c'est de votre mari dont il est question.
Cette distance qu'il s'efforce de mettre entre nous m'effraie totalement. Il est de nature tellement impulsive que j'ai pris une certaine réserve à le toucher, à lui parler comme on le faisait avant, j'ai abandonné peu à peu notre complicité, sous sa silencieuse demande. Je ne sais pas si je fais bien d'aller dans le sens qu'il souhaite plus ou moins, je n'ai guère le choix, seulement je ne veux pas qu'il se braque, il a tellement de mal à accepter que je le vois dans cet état. Lui qui se veut si fort pour moi. Je crois que c'est le plus dur pour lui, bien plus que la mort elle-même.
J'ai la sensation qu'il ne craint pas réellement la mort. Non ce qui l'effraye c'est de nous laisser seuls, de partir en sachant qu'on sera plus que meurtris par sa disparition.
Alors il veut nous écarter, m'écarter, pour qu'on cesse de s'attacher à lui, c'est pour ça qu'il adopte une attitude froide et dure. Il n'est pas idiot, il sait que la distance n'enlève en rien l'attachement qu'on porte aux autres. Mais il veut essayer juste pour être sûr, si jamais cela portait ses fruits, il partirait sereinement en se disant que tout irait bien pour nous.
Mais moi je ne veux plus subir cet éloignement, je veux être chaque instant à ses côtés, profiter de lui.
Jusqu'à ce qu'il aille mieux ou jusqu'à ce qu'il disparaisse?
Je ne sais plus vraiment si je dois tenter d'accepter ce qui semble être l'inévitable ou continuer à me battre.
Je me sens seule, je me sens perdue.
Que quelqu'un m'aide !
C'est une nouvelle et étrange routine, dont j'aurais aimé faire l'impasse.
Comme chaque matin, je suis à nouveau dans cette chambre d'un calme olympien.
Quand je suis arrivée il dormait encore. J'ai fais les cent pas à attendre son réveil, j'avais cette folle envie de me jeter contre lui. Je me suis finalement ravisée.
Aujourd'hui je suis plus sereine que d'habitude, c'est probablement son visage apaisant qui me fait cet effet là. Je ne saurais dire pourquoi son visage semble plus serein ce matin, mais c'est pour moi comme une bouffée d'air.
J'ai fini par m'asseoir sur le bord du lit et je lui ai pris avec douceur la main. Il n'a pas bronché, son sommeil n'est plus aussi léger qu'auparavant, et les sédatifs n'arrangent rien.
Depuis quelques minutes déjà, ses yeux se sont mis à papillonner, il a bougé légèrement. Je sais qu'il est à présent réveillé, et il sait que je l'observe caressant doucement sa main terriblement froide.
Il ouvre enfin ses grands yeux marrons sur moi. Son regard est terne, presque sans vie même s'il essaye d'y mettre du sien, il manque cette étincelle. Ses yeux contrastent étrangement avec la sérénité qu'il dégageait endormi. Son regard semble loin. Ses lèvres se courbent lentement en un petit sourire. Je lui rends volontiers en luttant pour retenir mes larmes. Il n'a pas besoin de ma faiblesse, je dois m'empresser de la dissimuler.
« Comment te sens-tu? »
« Groggy comme d'habitude » me répond-t-il en fermant brièvement les yeux.
Il me semble alors que cela fait trop longtemps qu'on ne s'est pas parlé, même pour une conversation banale. Cela me semble si loin la dernière fois où j'ai entendu le son de sa voix.
Sa voix est à présent rauque et brisée, rien de comparable avec son timbre chaud et séduisant. Cette voix qui avait le pouvoir de me faire frissonner, de m'émouvoir, de me faire rire aussi.
C'est amusant comme j'emploie si souvent le passé quand j'évoque quelque chose de notre vie avant ces quelques semaines. Amusant ? Non c'est plutôt navrant !
Jack a du sentir mon moment d'absence, il sert un peu plus ma main dans la sienne pour me faire revenir à lui. Cette pression de la main est inattendue et je la ressens dans tout mon corps comme une vibration. Il sembla avoir tout à coup peur que je lui échappe, mais n'a-t-il jamais songé que c'était lui qui est en train de me quitter ?
« Et toi ça va ? » me demande-t-il.
«Ca va ne t'inquiète pas »
« Depuis quand n'as-tu pas dormi correctement ? Tu as de magnifiques cernes ! »
« J'étais sûre que cela te plairait » lui répondis-je en riant.
Son autre main m'effleure le visage, jusqu'à tracer la courbe de mes cernes. Depuis quand ne m'a-t-il pas touché de la sorte ? Encore une fois il me semble une éternité.
Sans le vouloir vraiment mon corps s'est raidi à la sensation de ses doigts sur ma peau. Je voudrais sentir ses mains partout sur mon corps. Mais à quoi joue-t-il ? Hier encore il me repoussait et aujourd'hui il semble revenir à moi ? Je ne supporterais pas de le perdre, je ne supporterais pas qu'il me repousse à nouveau.
Mes yeux se ferment comme ses doigts effleurent mes joues.
Je veux qu'il reste, je veux que ses mains restent à jamais sur mon corps…j'en ai tellement besoin.
Reste encore !
Ne pleures pas Sam, surtout ne craques pas, pas devant lui. Tu dois être forte ! Rappelles-toi !
C'est comme s'il avait entendu mes sermons.
« Laisses aller Sam, ça va aller » me murmure-t-il comme sa main se fait plus tendre sous mes traits.
Je rouvre lentement mes yeux pour les planter dans les siens, je le supplie du regard. Non qu'il ne me laisse pas faire ça. Je ne veux pas m'effondrer devant lui, ce n'est pas juste.
Je sens les premières larmes se déverser sur mon visage, je ne pourrais pas les réfréner plus longtemps.
Finalement je me gave du peu de courage qu'il me reste, je retire gentiment sa main de mon visage et j'essuie énergiquement mes larmes.
« Ca va je t'assure, je suis juste fatiguée » lui dis-je d'un sourire pour le convaincre.
Je sens ses yeux me détailler, m'analyser. Il veut comprendre. Comprendre pourquoi il est si difficile de me laisser aller contre lui, pourquoi il m'est trop dur de m'effondrer devant lui. Pourquoi il est si dur de le laisser m'aimer avec cette féroce appréhension de la mort. Il ne comprend pas que cela n'est pas juste, que c'est à lui de s'effondrer, à lui de crier sa souffrance, à lui de me laisser l'aimer…
C'est LUI qui a besoin d'aide.
Je reprends finalement un peu de ma contenance.
« Je ne pourrais pas venir cette après-midi, je dois m'occuper des enfants, papa les a déjà gardés ce matin et puis… »
« Et puis tu as mieux à faire que de rester ici » termine-t-il pour moi.
« Jack, tu sais bien que… »
« Chut » me stoppe-t-il d'un doigt.
Il se relève difficilement sur ses avants bras, et sa main emprisonne à nouveau mon visage. C'est alors que je sens ses lèvres sur les miennes. Le contact est désespéré. C'en est déconcertant !
« Je reviens ce soir » lui dis-je.
Il me sourit pour unique réponse. Que nous arrive-t-il ? Où est passé notre soif l'un de l'autre ?
Avant de sortir je lui souffle ce qui me brûle les lèvres malgré les circonstances. J'ai tellement peur qu'il croit en une sorte d'adieu par ces mots. Mais il n'en est rien, bien au contraire c'est peut-être la seule marque d'espoir dont nous avons besoin.
« Je t'aime »
« Je t'aime » me répond-t-il assez fort pour que je l'entende.
Je le supplie intérieurement de ne pas me quitter depuis des semaines et c'est moi qui m'en vais.
Je t'en prie, reste encore…
J'ai toujours pensé que le pire avait été surmonté, que nous avions survécu à toutes les épreuves qui s'étaient mis en travers de notre chemin. Qu'à présent, nous étions unis pour le meilleur, je croyais que nous avions déjà vécus le pire.
C'était d'une naïveté !
J'essaye de trouver une justification à tout ce qui nous arrive. Quelque chose qui puisse non pas légitimer, mais tout du moins justifier tout ça. Pourtant même si je trouvais réponse à mes questions, rien de changerait, ça n'allégerait rien. Mais peut-être que les choix que nous avons fait n'ont pas constamment été les bons, que nous nous sommes trompés de direction parfois.
J'ai beaucoup repensé à ce qui s'est passé avec la Tok'ra, il y a 3 ans de cela. Je me dis que nous aurions du faire tout notre possible pour les retenir.
Mon père dit que les jeux étaient fait d'avance, qu'il devait en être ainsi.
Je ne songe pas vraiment aux nécessités de l'alliance entre la Terre et la Tok'Ra, mais plutôt au fait qu'un symbiote pourrait encore sauver Jack.
Si cela était encore possible, en voudrait-il seulement ? J'en doute.
Et puis, c'est stupide mais cette nuit je n'ai pas pu m'empêcher de penser aux réalités alternées et à tout ce que nos doubles avaient vécu. Ce fichu fatalisme ! Quand j'en ai parlé ce matin à Teal'c, il m'a fait part de son scepticisme face à ma « théorie ».
En fait cela n'a rien d'une théorie, c'est plus une triste constatation. La constatation que notre couple était voué à l'échec dans au moins deux réalités.
Teal'c m'a rassuré en me disant que le « sort » des quelques centaines d'autres réalités n'étaient pas à coups sûrs similaire aux deux auxquelles nous nous étions frottées.
Il a probablement raison et puis il m'a conseillé de ne pas reposer mes espoirs sur des réalités qui ne sont pas les notre. De croire en nous et en la vie, et de se battre pour nous. Après toutes ces années, il arrive encore à me surprendre par son calme et sa sagesse.
Il m'a redonné un peu l'espoir. Il semble me comprendre et je crois qu'il sait le secret que je m'efforce de cacher. Mais il ne dit rien comme à son habitude. Il se contente de veiller sur moi, sur nous.
Toujours aussi avenant !
Toujours les mêmes mots, les mêmes évidences qui reviennent avec la même violence et la même souffrance.
La maladie progresse, et tous semblent résignés.
Chacun se fait à l'idée que…
Comment peuvent-ils seulement l'envisager ne serait-ce que l'espace d'une seconde ? Je ne veux pas, je ne peux pas, pas maintenant, pas comme ça. C'est d'une criante injustice. Il ne peut pas partir, il n'en a pas le droit. Pas après m'avoir tant donné, pas après m'avoir tant aimé.
J'ai l'impression d'être seule à me battre parfois. Chacun semble si docile face à ce combat, tout ça est déstabilisant. Dans leurs discours se mêlent à la fois espoir et conseils sur l'accompagnement de fin de vie pour que tout se passe au mieux. Ils espèrent, sans trop y croire ou alors ils souhaitent seulement que les souffrances de Jack ne soient pas longues.
Ils agissent tous comme si la partie était déjà finie, le soldat est à terre, c'est la fin. La guerre est pour eux finie, ils rendent les armes. C'est comme si ils le condamnaient.
S'ils abandonnent la bataille, qu'on me laisse encore combattre…
Je ne peux pas renoncer. J'aimerais tant qu'ils comprennent enfin. J'ai vécu une bonne partie des années où j'ai connu Jack avec cette peur au ventre. La peur de le perdre !
J'avais depuis peu oublié mes craintes.
Et elles refont surface, si je les laisse me dominer je suis perdue.
Si je me perds, je le perds aussi…
Je sais qu'ils essayent de me préparer à ce qu'ils croient inévitable. Tous semblent me crier de me réveiller, qu'un beau matin il ne sera plus à mes côtés. Je ne veux pas l'abandonner. J'ai besoin de croire, de m'accrocher à un espoir, même s'il est éphémère.
Je suis peut-être crédule mais je l'AIME. Qu'on me laisse seulement l'aimer comme je l'entends.
Je ne veux pas de cette réalité qui essaie de s'imposer à nous. Ce n'est pas cette foutue maladie qui décidera pour nous. Je désire que nous soyons encore maîtres de nos vies.
Ils me croient probablement tous folle parce que eux se sont résignés...
Parce que eux ont peur de défier la mort, s'ils arrivaient seulement à comprendre que le combat ne cesse pas, qu'il faut de l'ESPOIR à Jack pour qu'il trouve la force de se battre !
Si seulement…ils savaient pourquoi je me dois de ne pas abandonner.
Si seulement…
Un parfait exemple de cette résignation. Il y a 2 jours Sara O'Neill est venue rendre visite à Jack. Cela faisait bien longtemps que nous ne l'avions pas revue. En fait nous nous n'étions pas revus depuis la naissance de Paul, cela va bientôt faire 2 ans. Ce n'est pas sa visite en elle-même qui m'a le plus gêné c'est la portée de sa venue.
Elle est venue voir Jack parce qu'il est dans un état critique. Un peu comme si c'était leur dernière entrevue. Je ne sais pas ce qu'ils se sont dits pendant les deux heures où Sara a pris ma place sur cette chaise étroite. Ils ont probablement évoqué leurs années ensemble, Charlie, leur inévitable séparation…
Toute une nostalgie dont Jack n'a pas vraiment besoin en ce moment.
Quand j'ai croisé Sara dans le couloir de l'hôpital, elle m'a serré fort dans ses bras, en me répétant les mots d'encouragements que je ne cesse d'entendre à longueur de journée. Elle a du me trouver froide dans mon attitude, car je n'ai pas bronché. C'est un comportement que j'ai décidé d'adopter depuis ces dernières semaines, une sorte d'impassibilité. Je ne peux pas me permettre de craquer à chaque fois, je dois être forte, me battre contre cette mort qui le guette…si je me laisse aller alors ce serait comme si j'accepte qu'il s'en aille.
Aucune chance !
Sara m'a proposé aussi de garder les enfants si j'avais besoin. Cette femme a définitivement le coeur sur la main, elle est d'une rare générosité. Je sais pourquoi Jack l'a aimé et l'aime encore probablement. Je me demande si j'aurais été capable de proposer ce qu'elle a fait. Il faut mettre beaucoup de choses derrière soi notamment une certaine jalousie et rancoeur. Elle doit vraiment avoir aimé Jack…
J'ai trouvé Jack les larmes aux yeux en entrant dans la chambre. Et je ne sais toujours pas si la visite de Sara est une bonne ou mauvaise chose pour lui. Il semblait si bouleversé que je n'ai pas su quoi faire. Je me suis contentée de lui prendre la main et de la serrer doucement.
Que devais-je faire ? J'avais peur de tomber dans ce trou sans fin et de l'entraîner avec moi dans ma chute. Alors j'ai gardé le silence jusqu'à ce qu'il s'endorme enfin. Dans le sommeil, il trouve probablement une certaine paix.
