Le garçon qui vient au café tous les jours est jeune, mais son visage, marqué par des soucis anciens et même actuels, a perdu de sa prime vitalité. Ses cheveux blonds se sont, depuis l'époque où il était en couverture de tous les journaux (oh, pas seul, mais dans le fond, et c'était déjà bien), considérablement éclaircis et ternis. Ils bouclent dans sa nuque, avalés par l'écharpe nouée autour de son cou qui engloutit la quart de son visage sérieux. Il reste des heures, dans le café presque vide, toujours au même coin de bar reculé et isolé, promenant parfois ses yeux marrons sur la foule entassée dans la pièce.

Le garçon qui vient au café tous les jours ne regarde personne vraiment, ne parle jamais réellement, et ne fait pas d'autre geste que celui de tapoter, du bout de sa cuillère, sur le rebord de sa soucoupe, et certain jours, celui d'écrire, sur un ticket, un vieux bout de papier ou un carnet de cuir. Il ne boit jamais d'alcool, juste un cappuccino long, qu'il sirote en silence, le faisant durer près d'une heure, avant d'en commander un autre.

Personne ne saurait rien de lui s'il n'avait pas été le batteur d'un groupe extrêmement populaire quelques années plus tôt –4 ans, pour tout vous dire. Un jour, il y a un an environ, il est venu s'asseoir sur l'un des tabourets de bar, depuis l'ouverture jusqu'à la fermeture, dans ce petit café coincé dans une impasse sans histoire, où il ne traîne que quelques habitués qui se comptent sur les doigts de la main. Il en fait partie, désormais.

Le premier jour, quand il était entré, le patron du café avait laissé tomber la tasse qu'il tenait, et les deux grand-pères dans le fond de la salle avaient cessé leurs marmonnements un instant, avant de recommencer de plus belle, entrecoupant leur bavardage de regards nerveux en direction de Gustav.

Le lendemain, il y avait trois jeunes filles dans le café, sirotant leurs diabolos grenadine. Le batteur ne les avait pas regardées. Il s'était assis, simplement, et avait bu une gorgée de son cappuccino, les yeux dans le vague.
Au bout d'une trentaine de minutes, une des adolescentes s'était approchée timidement, et avait demandé d'une petite voix s'il pouvait lui dédicacer l'album qu'elle lui tendait. Il l'avait regardée, hagard, un peu apeuré, avant de signer, d'un geste lent. Les deux autres filles étaient venues, avec un poster et un CD, et l'avaient chaudement remercié et lui avaient donné tous leurs encouragements.

Il avait souri, légèrement, détaché de tout.

Par la suite, il y avait eu quelques autres fans qui avaient demandé des dédicaces, de temps en temps, mais rien de plus. Il n'y avait plus de fans acharnés, violents et dangereux, et plus beaucoup de fans tout court, de toute façon. Les groupies hystériques, elles étaient désormais à chaque intervention publique des jumeaux, à chaque conférence de presse, en train d'attendre à l'extérieur des bâtiments, hurlant des insultes et des reproches déçus. Elles avaient oublié Gustav –et Georg-, si tant est qu'elles aient jamais su qu'ils existaient.

On lui demandait, parfois, ce qu'il pensait de ce que les jumeaux étaient devenus. Il ne répondait pas. Ils n'étaient rien devenus, ils n'avaient jamais changé. On lui demandait ce qu'il pensait de leurs brèves apparitions télévisées, filmés de façon sccadée, à la sortie d'une conférence de presse, souriant effrontément à la caméra.

Bill était d'ailleurs apparu assez récemment, ses mèches blanches devenues rouges, dans ses cheveux noirs trop longs, tombant sur ses omoplates, noués en une queue de cheval qui libérait quelques mèches encadrant son visage toujours jeune, fin et maquillé. Tom était à ses côtés, ses dreads détachées recouvertes de la capuche de laine de la veste qu'il portait. Ils étaient vêtus simplement, slim, chemise et veste de velours côtelé pour l'un ; jeans, teeshirt et gilet épais pour l'autre. Leurs paroles, leur attitude, leur personne, c'était suffisant pour nouer l'estomac de Gustav et déchaîner les foules.

Une fois de plus, on leur avait fait répéter que, oui, ils avaient couché ensemble, comme on les en accusait. Tom, pointant son jumeau puis lui-même, avait déclaré, serviable :
« Vous voulez qu'on vous montre ? »

Ils s'étaient fait huer, Tom toujours souriant, les yeux brillants de malice alors que les journalistes poussaient des récriminations outragées et posaient tous des questions en même temps.
Et Bill, à côté, riait à gorge déployée.

C'était souvent comme ça, depuis que les deux Kaulitz avaient été accusés d'inceste. Les images de la première conférence de presse qui avait suivi l'accusation tournaient encore dans la tête de Gustav. Les micros levés, les flashs, la question qui résonne dans le silence soudain, et la silhouette de Bill, son expression enfantine et étonnée, presque amusée, décalée, comme il se penche vers le micro, écartant deux pans de cheveux, avant d'ouvrir la bouche et de prononcer la phrase qui signera leur perte.

Elle est encore ancrée dans la mémoire de Gustav, profondément, et c'est comme si Bill avait annoncé leur chute, avec une phrase innocente et totalement vraie, c'est comme s'il avait, juste par sa voix, ouvert l'abîme dans lequel il se sont plongés, lui et Tom, avec un délice sans nom.

Le batteur ne les comprend pas, et il n'essaie pas. C'est leur vie privée et c'est eux que ça regarde.

Ils n'en n'avait jamais parlé tous les quatre, simplement conscients que c'était quelque chose d'inéluctable, que la relation des jumeaux et leur caractère impulsif ne pouvait pas être changé. Durant plus de 7 ans, ils ont joué ensemble, et c'est déjà bien.
Il a passé 7 ans derrière sa batterie, les bras parcourus de frissons et la tête pleine de musique. Il a passé 7 ans à leurs côtés, et encore plus aux côtés de Georg Listing.

Quand il repense à Tokio Hotel –le groupe qui ne s'est jamais séparé, qui ne s'est jamais éclaté, qui n'a jamais cessé d'être sur le devant de la scène, mais dont on ne parle plus du tout de la musique, du bassiste et du batteur- il revoit la silhouette musclée de son ami, l'ombre de sa Sandberg, son sourire franc, ses cheveux épais ramassés en queue de cheval, sa façon d'arracher son élastique avant les concerts, son rire, la rugosité si légère de ses joues, le renflement sous son menton, et son corps, et son âme, lui tout entier.

Il y a tant de choses comme celles-çi qu'il n'a pas pu emprunter quand leurs chemins se sont séparés. Le bruit singulier des santiags de Bill sur le plancher d'une scène, la manie de Tom de mordiller son médiator quand il écrit une mélodie, et celle de Georg d'annoter ses partitions de dessins et graffitis stupides. Des gestes, des mots, des expressions, leurs délires passagers et leurs idées de chansons, leurs paris oubliés et leurs moyens de chantage. Bill et Tom, leur insolite relation. Ils sont tellement présents, et pourtant, ils échappent à tous. Georg a disparu, si loin, mais Gustav le sait proche, il le sent, un petit chatouillement dans l'estomac qui lui fait sentir, comme un pressentimment, que le bassiste est là, avec son cortège d'habitudes, de vides à combler et de quoi combler ses vides à lui.

Un jour, il est assis comme à son habitude, sur son petit tabouret attitré, sa tasse presque vide. Il retourne dans sa tête blonde ses éclats de pensées, tous les murmures de sa conscience. Il n'entend que vaguement les bruits étouffés de la rue éloignée, et les allées-et-venues du café passent inaperçues pour lui. Ce n'est que quand il sent une odeur plus que familière que son cœur bondit. Sa main tremble brièvement sur le zinc, et il ne veut même pas regarder l'homme qui commande un café serré, à quelques pas de lui.

Il entend sa voix ensommeillée, et devine les cernes qui doivent creuser son visage, les courbatures de son corps ; le parfum qu'il porte est toujours trop fort, et c'est ce genre de parfum qui laisse sur les vêtements, les draps et les murs une fragance marquée, présente, envahissante.
Gustav se laisse envahir et les images reviennent, confuses, douces, brèves. De deux corps qui se mêlent et qui gémissent, de fous rires dans un studio d'enregistrement, de regards entraperçus entre deux mouvements, de café brûlant à l'aube, bercés par les cahots du bus, de secrets, d'années mortes.

Les pièces tintent entre ses doigts, lorsqu'il les attrape dans sa poche, devant s'y reprendre à plusieurs reprises avant de réussir à les saisir et à les poser à côté de sa tasse. Il avale rapidement la dernière gorgée de café, et lorsqu'il repose le récipient sur la soucoupe, le bruit n'échappe pas au cafetier qui, tout en tendant sa boisson à l'autre client, lui sourit et lui demande :
« Vous avez fini ? Je vous en prépare un autre. »

Gustav ne répond rien. Les yeux verts se sont posés sur lui. On dirait qu'il a vu un fantôme, la bouche entrouverte, la lèvre inférieure tremblante comme il se lève de son tabouret, son regard écarquillé planté dans celui, identique, de l'homme qui lui fait face.

Il ouvre la bouche pour dire quelque chose, et alors, la seule chose que Gustav trouve à faire est de s'enfuir en courant.

Il pleut dehors, mais peu importe. Il remet machinalement sa capuche sur sa tête, et court, le plus vite possible, jusqu'à son petit immeuble. Il y a une voix qui crie derrière lui, une douleur sourde à son côté droit, mais il court, jusqu'à s'engouffrer dans l'entrée de l'immeuble, glissant sa clé dans la serrure avant de monter les marches quatre à quatre.

Lorsqu'il claque la porte derrière lui, une boule douloureuse s'est formée dans sa gorge, et un point de côté cisaille son flanc. Les images tournent dans sa tête ; le corps viril, un peu râblé, les cheveux attachés en queue de cheval, les yeux si verts et si ternes pourtant, le regard profond et présentement halluciné, les lèvres qui s'ouvrent…

Gustav n'avait que de bons souvenirs, ou du moins de douces réminescences de lui, un peu mélancoliques, mais il n'avait jamais pleuré son abscence, parce qu'il savait qu'il n'aurait pas pu s'arrêter avant d'être vidé de toutes ses larmes. Il se disait qu'il ne lui manquait pas, qu'il ne l'aimait plus que comme on aime un fiancé absent depuis longtemps, comme on porte le deuil d'un être aimé.

Et maintenant, il est prostré dans l'entrée de son petit appartement, regardant la porte comme si elle venait d'une autre planète.

Il y avait des pas qui montaient doucement dans la cage d'escalier mal insonorisée, devenant de plus en plus forts et de plus en plus rapprochés, au fur et à mesure que l'on approchait de son appartement. Son cœur rata un battement quand le bruit s'arrêta, tout proche, et que l'on commença à frapper à sa porte, de façon régulière, puis plus fortement et de façon plus saccadée.

Les coups résonnent dans sa tête.

Ils se répercutent dans chaque parcelle de son corps, s'accordant aux battements désordonnés de son cœur.
A pas lents, Gustav s'avance vers la porte. La chaîne de sûreté tremble, et il se rend compte que ses doigts font de même lorsqu'il l'ôte. La porte grince lorsqu'il l'ouvre, et les coups stoppent.
Il ne reste plus que son cœur, résonnant à ses propres oreilles.

Georg est dégoulinant de pluie, et de ses cheveux attachés s'échappent quelques mèches qui viennent se coller à ses joues mouillées. Ses yeux verts sont écarquillés, troublés et pleins d'incompréhension. Une goutte d'eau glisse d'une mèche folle, coule sur son front, ses cils –il ferme un œil-, sa joue puis ses lèvres. Georg passe sa langue sur la goutte froide, et s'avance d'un pas.

Gustav ne peut pas bouger. L'odeur trop forte d'after-shave du bassiste et son image ont bloqué ses pensées. Il laisse Georg s'avancer vers lui et refermer la porte. Le claquement gifle son esprit, et il tend la main. Il touche le daim rêche de la vieille veste trempée de Georg, et la fait glisser le long de ses bras ; elle retombe lourdement sur le sol.

Les doigts de Georg viennent à leur tour se glisser sous le pull épais de Gustav, froids, si froids lorsqu'ils touchent enfin la peau sous le tee-shirt du batteur, tandis que ce dernier défait les boutons de la chemise du bassiste, qui lui colle à la peau. Puis leurs mains, sans hésitation, vont déboutonner leurs pantalons, alors qu'ils ôtent leurs souliers.

Il n'y a ni hâte ni excitation dans leur geste, ni lenteur ni hésitation. Pourtant, leurs cœurs battent furieusement dans leurs poitrines, lorsque, enfin nus, il se collent l'un à l'autre. Le corps de Georg est froid et humide, secoué d'un frisson quand leurs lèvres et leurs sexes se rencontrent.

Leurs yeux ouverts ne se lâchent pas, regards plantés l'un dans l'autre, même quand leurs bouches s'effleurent, sans vraiment s'embrasser, sans même se caresser, comme le font leurs mains qui touchent leurs corps nus, passant et repassant sur les parcelles de peau qu'ils ont autrefois si longuement et si souvent touchées.

Quatre ans, pense Gustav alors que les mains de Georg remontent à son visage, enserrant ses joues, le contact froid l'électrisant. Son souffle s'étrangle, et il se rend compte, quand le pouce du bassiste chasse les larmes de ses pommettes, qu'il est en train de pleurer.
Il glisse sa langue dans la bouche de Georg, touchant la sienne, si chaude, et regarde ses yeux se fermer avant de faire de même.

Dans le noir complet et contre les lèvres de Georg, ses sanglots redoublent et ses mains se nouent derrière la nuque de son aîné. Il sent l'étreinte se resserrer sur ses reins, l'entend gémir dans sa bouche quand leurs sexes se touchent.

Le baiser est devenu désespéré, amer de rancœur et de désir refoulé au fil des années. Les mains de Gustav pressent de chaque côté du cou de Georg, les ongles du bassiste griffant ses reins et l'approchant encore plus près de lui.

Leurs jambes tremblent et leurs langues se battent, leurs bouches s'entrouvrent parfois pour laisser échapper un gémissement sourd. Un léger cri monte de la gorge de Gustav lorsque son corps cède sous les tremblements et qu'il tombe, entraînant Georg avec lui.
Ils chutent dans le tas désordonné de leurs vêtements, et échangent un bref regard avant de s'embrasser fiévreusement à nouveau.

Les lèvres de Georg vont glisser dans son cou, sur sa gorge. Gustav gémit et ses bras enlacent le dos du bassiste, ses doigts caressant les vertèbres et les muscles contractés, les mèches mouillées de Georg glissant sur son sternum lorsqu'il lèche du bout de la langue les clavicules du batteur. Le toucher est électrique, envoyant dans le creux du ventre de Gustav des décharges de plaisir.

Georg l'embrasse, et il se rend compte que ça lui avait terriblement manqué. Ses sanglots forment une boule douloureuse dans sa gorge, apaisée légèrement par la caresse de la bouche du bassiste qui suce sa gorge, sa pomme d'Adam, chassant ses larmes des doigts avant de laisser ses mains glisser de chaque côté du visage de Gustav.

Le batteur ouvre les yeux, et il ne voit le visage de Georg qu'à travers un brouillard flou. Son regard assombri par l'envie balaie le corps de Gustav, de manière désordonnée, avide, le dévorant littérallement. Le blond, avec un gémissement plaintif, se relève sur ses coudes.

Ses lèvres baisent fiévreusement le coin de la bouche de Georg, puis, inclinant la tête, il l'embrasse, la machoîre tremblante, le corps tendu. L'autre, approfondissant leur baiser, le rallonge sur le dos. Ils s'embrassent avec langueur et tendresse, leurs langues se mêlent et se caressent, leurs mains fouillent leurs cheveux. Ceux du bassiste sont humides encore entre les doigts de Gustav, et il parcourt son dos, ses reins, se posant sur ses hanches et rapprochant leurs bassins, les collant l'un à l'autre.

Ils gémissent, lorsque leurs sexes durs se touchent, Georg embrassant à nouveau le corps du batteur, avec plus d'ardeur, les mains de ce dernier rapprochant sa tête, crispées dans ses mèches emmêlées.

La douleur présente dans sa gorge palpitante a presque disparu maintenant, se concentrant dans son érection pressée contre celle de Georg, dont le corps frotte contre le sien quand il glisse contre lui, déposant ses lèvres sur son ventre, sa langue jouant sur ses côtes, ses mains contre ses flancs chauds.

Gustav ne se rend plus compte de rien. Il ne sent plus leurs vêtements, formant un matelas inconfortable sous eux, il ne se rend plus compte qu'ils sont allongés dans le couloir de son petit appartement, sur le sol froid, il ne se rend plus compte que les jumeaux sont toujours en fuite et qu'ils ne devraient pas être là, à faire l'amour, perdus dans leur monde de plaisir et de sensations. Il ne se rend plus compte de rien, qu'ils ne sont plus rien –il renait sous les mains de Georg, sous son souffle et ses baisers.

La bouche du bassiste est enfin descendue à son sexe, qu'il embrasse avec une lenteur insupportable. Gustav ne contrôle plus ses gémissements et il prononce leurs premiers mots depuis que Georg a passé la porte de son appartement.

« Georg. »

Sa voix est étranglée et basse, et il ne la reconnaît pas. Le bassiste relève ses yeux vers lui, sans s'écarter du membre chaud et dur du bassiste, sur lequel il fait glisser ses lèvres humides. Gustav halète, soulevant ses hanches alors que Georg passe sa langue sur le gland.

« Georg. »

Il gémit, chuchote des mots incompréhensibles, ses paupières papillonnent et il murmure :

« Je ne veux pas. Ne fais pas ça. »

Aussitôt, le plus vieux se détache et lui, et lorsqu'il se redresse, Gustav sent son cœur rater un battement, mais le bassiste se contente de se placer à genoux au-dessus de son aine, effleurant simplement l'érection du batteur. Georg ferme brièvement les yeux, les rouvre pour les planter dans ceux de Gustav, dont il saisit la main avant d'en embrasser chaque doigt.

Au début légers, ses baisers deviennent humides, pour qu'à la fin, il suce dans sa bouche les doigts tremblants du blond, les rendant tièdes et mouillés de salive. Puis Georg guide la main vers son entrejambe, et, se penchant légèrement en arrière, il chuchote doucement :

« Alors, viens en moi. »

Il amène les doigts de Gustav à l'intérieur de lui, gémissant quand ils le pénètrent. Le batteur, subjugué par le visage, et le corps entier, abandonnés au plaisir et à lui-même, commence à bouger lentement ses doigts en lui, détendant le bassiste, le faisant souffler et gémir son nom.

« Comme ça, » fait Georg, dans une plainte qui monte de sa gorge. « Juste comme ça. Encore. »

Au bout de quelques instants, l'aîné ploie vers l'avant, ses mains de chaque côté de la tête de Gustav, les bras tendus. Le batteur retire ses doigts, et les laisse glisser le long de la cuisse de son amant, avant de les poser sur sa hanche, l'accompagnant alors qu'il s'empale lentement sur son sexe tendu.

La chaleur brûlante de Georg l'englobe peu à peu, le faisant se fondre doucement en lui, et un long gémissement s'échappe de ses lèvres. Le bassiste inspire et expire bruyamment, les yeux rivés sur un point invisible, son torse se soulevant et s'abaissant au rythme de sa respiration. Ses cheveux sont presque entièrement échappés de la queue de cheval, emmêlés et collés par la sueur, certains fils chatains glissés entre ses lèvres entrouvertes. Les mains de Gustav errent, sur ses muscles tremblants, et ses yeux fouillent son visage, mémorisant les traits et expressions qu'il connaît déjà par cœur.

Lorsqu'il est entièrement entré en lui, il caresse les reins de Georg, entre deux halètements, savourant l'étroitesse de son corps tout contracté autour de son érection, comme un étau de chair, et attend un geste du bassiste qui lui indiquerait qu'il peut bouger.

Peu à peu, Georg se détend, et se redresse légèrement, sourit légèrement, un peu fébrile, et remet une mèche de cheveux derrière son oreille. Ils sont bien, là, collé l'un à l'autre, l'un dans l'autre, ne faisant plus qu'un. Leurs lèvres se cherchent, alors que Gustav inverse leur position, allongeant le bassiste sous lui, et s'enfonçant profondément en lui. Ils s'embrassent brièvement, leurs langues se mêlant hors de leurs bouches, essayant désespérément de respirer normalement, leurs cœurs battant à tout rompre dans leurs poitrines.

Enfin, Gustav commence à se mouvoir, allant et venant dans le corps chaud qui est là, tout autour de lui, dans ses bras et contre ses lèvres, dans son cœur et dans sa tête. Les jambes de Georg entourent ses hanches, ses doigts crispés dans les boucles blondes, jusqu'à lui faire mal, mais il ne s'en rend même pas compte, accélérant ses coups de reins, écoutant le souffle du bassiste devenir de plus en plus haché, son sexe dur entre eux deux pulsant douloureusement.

« Gustav », gémit l'aîné d'une petite voix, et le batteur n'y tient plus. Il laisse courir une main le long du ventre de Georg, avant de toucher son érection déjà humide de liquide séminal. Ses doigts la parcourent un instant, puis l'aggripent. Il commence à pomper vigoureusement, lui arrachant un cri.

Les jambes de Georg se resserrent autour de lui, alors qu'il éjacule dans sa main, et quelques secondes plus tard, il jouit, enfoncé profondément à l'intérieur du bassiste, le souffle coupé, leurs battements cardiaques se mêlant en un rythme désordonné, leurs lèvres n'arrivant même plus à s'effleurer.

Alors qu'il s'apprête à se retirer, Georg se blottit contre Gustav, et bouge légèrement ses jambes tremblantes contre les siennes, avant de murmurer dans un souffle rauque :

« Reste. Juste un petit peu. »

Ils reprirent leur souffle ainsi, serré l'un contre l'autre, leurs mains passant en gestes affaiblis sur leurs joues rougies, sans vraiment se regarder, simplement conscient de la présence de l'autre.

C'était tout ce qui importait.