Avertissement : J'avais déjà publié cette aventure en 8 chapitres sur le Forum du jeu de rôle gratuit Mass Effect: Nouvelle Ère. Dans la droite ligne de l'univers dérivé tel que remanié dans ce jeu, l'aventure qui va suivre met en scène un Groupe d'Enquête, Infiltration & Sécurisation Trans'espèce (GEIST), unité très spéciale arpentant la galaxie pour le compte du Conseil, quelques vingt années après la destruction des Moissonneurs. Donc, pas ou peu de personnages de l'univers officiel; en lieu et place, de nouveaux héros à découvrir, issus d'espèces bien connues, employant des équipements bien connus sur des mondes bien connus par les fans du fabuleux univers développé par Mr Drew Karpyshyn et par Bioware.
Une Saison 2 déjà scénarisée est actuellement en cours de rédaction...
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Épisode 1: La flamme d'un héros
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Flux d'Arcturus – Système Euler – Planète Benning –
Sur le site d'une raffinerie à l'abandon –
Par une nuit très illuminée !...
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-–- Embuscade! avait hurlé Guerdan. Par la Déesse, abritez vos culs où vous pouvez! Ces bâtards nous canardent de partout!
Dès les premiers tirs, la Spectre asari avait déployé une puissante barrière biotique, une aura bleutée contre laquelle semblaient s'écraser les rafales ennemies. Tandis qu'elle attirait le feu sur elle, les quatre autres membres de son unité, Damon, Serval, Feylin et Lenks, s'étaient égayés et jetés derrière les abris les plus proches, non sans avoir vu leurs boucliers cinétiques sérieusement entamés par quelques balles perdues. Tous avaient activé leur module de vision nocturne depuis qu'ils avaient quitté leur navette, posée en bordure de la raffinerie désaffectée. L'amélioration optique leur avait permis d'identifier leurs adversaires: des Soleils Bleus, une redoutable organisation mercenaire lourdement armée et extrêmement disciplinée, composée de Butariens, Humains et Turiens en armures standardisées bleues et blanches. Les Soleils Bleus s'étaient retranchés au sommet de trois des tours de la raffinerie à ciel ouvert, couvrant en hauteur tous les angles autour de la position des agents; et a priori, ils disposaient de plusieurs drones d'assaut et d'au moins un lance-missile portable!
Tout n'avait pourtant pas si mal commencé, se rappelait Guerdan. Quatre jours plus tôt, sa petite équipe d'agents de terrain avait quitté la Citadelle; on les avait envoyés enquêter sur d'inquiétants détournements d'élément zéro, constatés sur un grand nombre de sites d'extraction d'Eldfell-Ashland Energy. Mis bout à bout, ces larcins représentaient d'importantes quantités de ce minerai stratégique; et surtout, ces actions simultanées semblaient faire partie d'un dangereux plan d'ensemble concerté. Les recoupements des détournements par date et importance avaient d'abord orienté l'équipe vers le secteur du Flux d'Arcturus, puis avaient désigné le monde de Benning en tant que plaque tournante.
À Joughin, la capitale planétaire de la petite colonie, les enquêteurs avaient remonté quelques pistes jusqu'à un précieux intermédiaire butarien. Un faux cul de première, oui, avait immédiatement songé Guerdan. Ce type disait pouvoir leur faire rencontrer moyennant finances un ancien comptable humain d'Eldfell-Ashland, prêt à leur communiquer les irrégularités qu'il avait relevées dans les bilans de la raffinerie d'hydrogène où il avait travaillé. Celle-ci était en cessation d'activité récente, suite à une série d'accidents mortels doublée d'une faillite frauduleuse, apparemment liées au trafic généralisé d'ézo chez EAE. C'est sur ce site désaffecté qu'il connaissait bien, dans une région désertique à plus de 400 kilomètres de Joughin, que l'homme se sentant traqué avait dissimulé le DSO renfermant les preuves. Et c'est là que par l'intermédiaire du Butarien, il avait donné rendez-vous aux enquêteurs – de nuit, par souci de discrétion.
Guerdan avait trouvé la traque trop facile; et pour reprendre ses mots exacts, tout ça puait le piège à en dégueuler! Ses quatre agents, eux, ne s'étaient pas sentis mécontents que pour une fois, une de leurs enquêtes n'exige pas son lot de bagarres, d'acrobaties, et d'interrogatoires mouvementés. Mais cette fois encore, les faits avaient donné raison à la très longue expérience de terrain de la Spectre asari. Et maintenant, leur mission risquait bien de prendre fin ici, par une nuit sans lune, sur une friche au milieu de nulle part. S'ils sortaient vivants de ce merdier, il allait falloir retourner à Joughin dire deux mots à cet enfoiré d'indic à quat'z'yeux...
Pour l'heure, Guerdan s'échinait à maintenir tant bien que mal sa barrière biotique mise à rude épreuve par l'intensité du feu ennemi, tout en pestant très vertement contre le brouillage des Soleils Bleus qui l'empêchait de contacter sa frégate de soutien. Si le halo bleuté autour d'elle parvenait à bloquer efficacement la plupart des projectiles légers, elle n'avait survécu au tir d'une roquette ML-77 que grâce au sacrifice d'un des drones de l'équipe, qui avait intercepté le missile en se plaçant sur sa trajectoire. Feylin, l'autre Asari du groupe, tentait de se faire la plus petite possible dans les débris hachés des piles de caisses où elle s'était jetée dès les premiers tirs. Sa spécialité de charge au contact renforcée de puissance biotique était sans utilité face à des adversaires retranchés en hauteur. Elle se contentait donc de lancer sans conviction quelques déchirures, sans grand effet contre des tireurs bien protégés.
Lenks, l'ingénieur galarien, avait déjà sacrifié ses deux drones légers; et ses puissants boucliers cinétiques venaient juste d'être saturés par des impacts en rafales lorsqu'une dernière balle l'avait atteint entre le cou et l'épaule. La légèreté de son armure technique et sa faible constitution rendaient toute blessure dangereuse pour lui. Mais pour un échalas cartilagineux, Lenks était un dur à cuire qui en avait vu d'autres. Il s'était appliqué une dose massive de médigel, et récupérait un moment à l'abri d'un engin de chantier; il serait bientôt prêt à reprendre du service. En attendant, l'ingénieur reconfigurait son Omnitech, qui venait de déjouer une tentative ennemie de prise de contrôle à distance.
Retranchés ensemble dans un solide abri modulaire, Damon le Sniper humain et Serval le Franc-tireur turien, tous deux tacticiens confirmés, avaient déjà établi la moins réjouissante des évaluations de leur situation désespérée. Ennemis disposés en position dominante sur trois fronts, couvrant tous les angles; armes lourdes, supériorité technologique évidente; pas de communications radio, pas d'axe de progression couvert, pas de voie de retraite vers la navette; en conclusion: l'équipe était condamnée!
Serval se souvint tout à coup du briefing de mission, et surtout du repérage des lieux sur l'holo 3D projeté par Lenks. Deux des colonnes de traitement des gaz volatils n'avaient pas été purgées avant la fermeture précipitée de la raffinerie, et l'une d'elles était justement la tour au sommet de laquelle s'était retranché le peloton d'armes lourdes des Soleils Bleus. Depuis sa position, un mur de sécurité bétonné empêchait le Turien d'avoir une vue directe sur la base du dangereux réservoir; mais un plan, une idée folle, commençait à germer dans son esprit. Il jeta un regard en direction de Feylin tapie dans les vestiges de son bastion précaire: le peu qui restait des caisses qui protégeaient encore la pauvre Asari ne tarderait pas à voler en éclats. Affermi dans sa résolution, le Franc-tireur s'empara brusquement du lance-grenade M-100 que son compagnon humain avait détaché de son armure, et posé au sol pour mieux se concentrer sur son fusil de précision. Le Sniper était alors en train d'abattre son deuxième drone ennemi.
-–- Excuse-moi Damon, je t'emprunte ça. Je ne peux pas te promettre que je te le rapporterai...
-–- Bordel, Serval! Qu'est-ce que tu fais!?
-–- Je fais ce qui doit être fait, petite tête d'Humain... Nous les Turiens, on fait toujours ce qui doit être fait. Tu diras à Feylin que... Tu lui diras, quoi...
Et sur ces derniers mots, Serval activa son camouflage optique et s'élança dans la nuit hors de l'abri de chantier, lance-grenade en mains, en direction de la principale position des Soleils Bleus.
Comme il s'y était attendu, son écran d'invisibilité ne survécut pas longtemps au milieu de la grêle de projectiles qui emplissait l'air ambiant. Au premier impact, son camouflage se désactiva et le dévoila aux yeux de tous, cible parfaite. Tous les tirs des Soleils Bleus se concentraient à présent sur lui. Mais le Turien n'appartenait pas pour rien à une espèce particulièrement véloce, apparentable aux anciens Raptors terriens: son sprint était ébouriffant, et ses brusques changements de direction laissaient se perdre dans le vide la plupart des rafales qui lui étaient destinées. Quelques balles parvinrent pourtant à s'écraser sur sa barrière cinétique. C'était justement afin de tenir quelques secondes de plus que le Franc-tireur avait surchargé ses boucliers avant d'entamer sa course folle. Grand Esprit, juste quelques secondes de plus!
Les boucliers de Serval lâchèrent pile au moment où il atteignit l'angle du mur de béton, et se retrouva devant la colonne de gaz au sommet de laquelle s'étaient établis les Soleils Bleus. Alors qu'il épaulait le lance-grenade, le Turien adressa mentalement une très courte invocation à l'esprit de son unité, sa petite fratrie d'armes. Toute sa volonté se concentra dans ce tir, le dernier et le plus important de sa vie. Un seul projectile lui suffit à atteindre son but: la grenade détonante s'écrasa pile entre les deux conduites qu'il visait.
Dans un fracas de tonnerre, un pilier de feu déchira la nuit, avant de se disperser en altitude en un panache de flammes bleues. La déflagration pulvérisa le mur de protection derrière lequel avait disparu Serval. Mais cet obstacle réussit à atténuer suffisamment le souffle pour en préserver les agents au sol. Il ne protégea pas en revanche les mercenaires postés en hauteur sur les autres tours: plusieurs d'entre eux furent soulevés par-dessus les rambardes et projetés dans le vide.
Le cataclysme avait volatilisé tout un pan majeur du dispositif des Soleils Bleus. Le commandant d'unité, le tireur missiles, l'opératrice drones, le hackeur... Tous ces éléments clés du groupe ennemi étaient en train de redescendre lentement du ciel nocturne par petits morceaux incandescents. Les mercenaires réduits en nombre n'occupaient plus désormais que deux fronts disjoints, et leurs tirs croisés laissaient maintenant ouverts plusieurs angles morts. Le brouillage des communications avait disparu. À présent, les cartes étaient rebattues. À présent, les agents du Conseil avaient une chance de l'emporter.
Médusés, les Soleils Bleus survivants avaient cessé de tirer. Alors dans le silence retombé après le roulement de l'explosion, on put entendre le hurlement de désespoir d'une Asari:
-–- Servaaaaal !
