Hello tout le monde,
Comme il s'agit d'une ancienne fiction que je reposte après pas mal d'années, je n'ai pas pris le temps de découper l'histoire en chapitres. Le format est donc un peu compact, mais j'espère que ça ne vous empêchera pas d'apprécier l'histoire. Bonne lecture!
Ou Les garçons sont préférables aux filles
Le F4, ou « Bon sang, mais il n'y a que des gosses de riches dans ce pays ou merde ?! »
Pourquoi ?
Pourquoi ?
Pourquoi ?!
C'était la question que je me posais du matin au soir, qui me martelait l'esprit à chaque fois que j'allais à mon lycée. Je m'en serais presque arraché les cheveux tellement cette question, je me la criais dans la tête. Jamais je ne comprendrais. Pourquoi est-ce que mon tuteur, qui ne roulait déjà pas sur l'or, m'avait envoyé dans ce lycée de riches ? De petits bourges qui à la moindre occasion s'empressaient de montrer aux autres leur nouvel article de marque, leur montre Rollex, leur sac Dior, leurs bijoux en or qui coûtaient sans doute plus que toute ma chambre entière, plus mes économies, et peut-être même celles de Iruka… Comment se faisait-il qu'il ait réussi à m'envoyer dans cet enfer de gosses fortunés ? D'où l'avait-il sorti l'argent d'ailleurs ? Je continuais à me le demander. Il avait peut-être gagné à la loterie dans mon dos, ou alors il se faisait entretenir par l'épouse d'un homme d'affaire et il jouait à cause de moi le rôle de l'amant pour être sûr de pouvoir me payer mes études. Haha, il ne fallait pas rêver. Je savais très bien d'où venait l'argent payant le Lycée Konoha puisque nous mangions des ramens bon marché tous les jours. Enfin, je n'allais pas m'en plaindre, après tout, c'était bien ce que je préférais.
Quoi qu'il en soit, même si à nous deux, puisque j'avais un petit travail en dehors du lycée, nous arrivions à payer les frais de cette école prestigieuse, j'étais sûr que jamais je ne m'y sentirais à ma place. Comment l'être, alors que ces jeunes étaient si… superficiels ? Ils ne connaissaient rien de la vie à part leur petit paradis rose. Quoi qu'ils veuillent, ils étaient sûrs que leurs parents le leur achèteraient, pour peu qu'ils le leur demandent. Ils ne se rendaient pas compte de la valeur de l'argent, ni même de celle de la vie. Ils n'avaient sans doute jamais connu la difficulté, à part peut-être quelques uns ayant été victime du divorce de leurs parents, qui ont sans doute dû s'entretuer pour le partage des biens, j'en étais certain. Après tout, plus on possédait, plus on était matérialiste et égoïste. Je n'en avais encore jamais vu d'exception. Pas que je souhaitais leur malheur…
Je poussai un soupir, affalé sur ma table pendant que le prof nous parlait de sa matière on ne peut plus passionnante. J'en avais marre. Je n'attendais plus qu'une seule chose, c'était que cette putain de sonnerie retentisse.
Une boulette de papier rebondit sur ma table dans un froissement discret. Je fronçai mes sourcils fins avant de passer dans un air nonchalant ma main dans mes cheveux blonds ébouriffés. Je jetai un coup d'œil au garçon à côté de moi, et il me fit un sourire digne des pubs colgate, ou au choix des dents de la mer. Quoique, il me faisait plutôt penser à un vieux clébard qu'à un requin.
Je pris donc le papier, et le dépliai sans plus de cérémonie, me foutant un peu du fait que je fasse du bruit. Je lus rapidement :
On sort ce soir ? PS : écoute le cours ! j'ai pas l'intention de prendre des notes, je suis crevé.
Il n'était pas culotté celui-là… Rapidement, je griffonnai une réponse, tant pis si mon écriture ne ressemblait à rien et si je faisais des fautes (ce que je ne fais jamais) :
On bosse ce soir je te le rappelle ! Et démerde-toi pour les notes, t'es pas le seul qui aimerait pioncer.
Je lui renvoyai la boulette, et fis en sorte de la lui lancer à la tête juste pour l'énerver. Il grogna un peu (un chien vous dis-je), et lut vite à son tour. Je l'entendis pousser un juron, sans doute déçu de ne pas pouvoir aller briser des cœurs comme il a l'habitude de dire. L'espoir fait vivre, il n'a jamais eu de succès avec les filles.
Cette pensée me fit rire, et un claquement de langue désapprobateur se fit entendre. Je me tournai à ma gauche cette fois, et considérai la jeune fille qui me lançait un regard empreint de reproche, sans doute de ne pas être aussi attentif qu'elle au cours. Mais ce n'était pas de ma faute ! Le premier qui dit que les mathématiques sont passionnantes se prend un pain dans la tête, et un très chaud. Je détestais cette matière.
Mon regard caressa avec lenteur les jambes de la jeune fille, longues, fuselées, à peine dorées par le soleil. J'étais prêt à parier qu'elles étaient bien plus douces que celles de mes précédentes copines, mais j'aurais trop peur d'aller vérifier : j'étais certains de me faire tabasser jusqu'à ce que mort s'en suive.
Sa taille gracile était élégamment enserrée par la veste obligatoire du lycée, d'un rouge presque pourpre, mais celle-ci laissait malgré tout entrevoir un décolleté que j'aimerais bien aller voir de plus près. Si seulement je pouvais. Je terminai par son jolie visage, aussi gracieux que son corps, éclairé surtout par ses magnifiques yeux verts. De vraies émeraudes, et c'était facile de vous perdre dedans, je le savais, j'en avais déjà fait l'expérience plusieurs fois. Malgré tout, la seule chose qui pourrait peut-être vous refroidir chez cette demoiselle, c'était ses cheveux. D'un rose clair, que je trouvais ravissant mais que certains détestaient au premier regard. Pour ma part, je trouvais que cette couleur collait parfaitement au personnage. Romantique, douce si vous ne la mettez pas en colère (dans ces cas-là, la couleur qui lui aurait été serait le rouge, pour le sang que vous vous apprêtez à verser). Cela allait même avec son prénom : Haruno Sakura, comme une fleur de cerisier. Elle sentait d'ailleurs de la même façon… oulah, je m'égare.
Enfin, cette jeune demoiselle, je la connaissais depuis que j'étais en maternelle. Je pense que je ne vous étonnerais pas si je vous confie qu'à cette époque, j'étais amoureux d'elle. Ça a duré jusqu'à la primaire d'ailleurs, ainsi qu'au collège, période où j'ai enfin eu le courage (ou plutôt les couilles) de me déclarer. Euh… je ne vous raconterai pas ce râteau qui m'a laissé des séquelles plus ou moins profondes, mais le plus important, c'était que malgré tout, nous étions toujours de bons amis. Je dirais même que cela a renforcé nos liens. Nous avons donc passé ensemble (avec Kiba aussi, mon chien de compagnie) le concours d'entrée de ce lycée, et elle m'a aidé à réviser. Oui, elle est aussi studieuse. Décidément, cette fille n'a aucun défaut. Ah, si, sa colère vite déclenchée, et aussi le fait que ses parents arrivent à payer l'école sans devoir manger des pâtes tous les jours.
Je poussai un long soupir, regardant Kurenai-sensei nous parler de ces formules trigonométriques. A cet instant, je me tâtais entre : faire un bon petit somme, pour dire de rattraper mes folies de la nuit dernière, ou écouter un peu, pour ne pas devoir ensuite supplier Sakura de me refaire les cours en différé. Avec courage, j'allais opter pour la deuxième solution quand nous entendîmes un bruit de pas de course dans le couloir. C'est pas vrai qu'on allait encore y avoir droit…
J'eus la confirmation quand une voix criarde se mit à hurler dans les couloirs, réveillant deux élèves qui dormaient sur leur table et interrompant tous les prof du lycée faisant classe :
- Un carton rouge ! Un carton rouge a été donné à Aoi Teruki de la classe 1-B ! Un carton rouge !
Notre professeur soupira d'agacement avant de dire d'un ton résigné :
- Allez-y.
Tous les élèves de la classe se levèrent avec empressement, le crissement de leur chaise se répercutant sur les murs nus de la classe. Je restai un peu assis sur ma chaise, tout comme Saura et Kiba. Notre rangée de trois chaises ne bougea pas, agacée par ce crique qui durait depuis bientôt trois ans.
- Dîtes, qu'est-ce qu'il se passe ?
Je me tournai vers la deuxième blonde de la classe. Karin, une nouvelle de ce mois-ci. La pauvre devait encore ignorer être plongée dans un enfer. Ah non, elle y vivait depuis qu'elle était gosse. Malgré tout, elle n'était peut-être pas aussi putréfiée que les autres. A vrai dire, je l'ignorai, ne lui ayant encore jamais adressé la parole. Elle, elle m'observait en attendant une réponse, un peu penchée vers moi, me fixant de son regard que je devinais obstiné. Sakura se leva, commençant à lui expliquer ce qui se passait. Kiba et moi nous levâmes à notre tour, et tous les quatre, nous sortîmes du couloir vide. A loin résonnaient les cris des élèves. Je ne doutais pas qu'ils avaient attrapé le pauvre Teruki.
- Raah, pourquoi faut-il qu'on bosse encore ce soir ? T'en as pas marre de bosser en semaine Naruto ? se plaignit mon ami.
Inuzuka Kiba, mon meilleur ami depuis le collège. Avec Sakura, nous formions un trio d'inséparables. C'était ceux qui comptaient sans doute le plus pour moi, malgré mes nombreux amis. Eux, je savais que je pouvais leur faire confiance les yeux fermés. Leur confier ma vie ne serait pas un problème, c'est vous dire.
Je le vis secouer la tête comme un chien lorsqu'il est mouillé, et il plissa le nez, ce qu'il fait toujours lorsqu'il est énervé. Sur chacune de ses joues étaient tatoués un triangle rouge, comme pour tous les membres de sa famille, ce qui était encore un mystère pour moi. Il était un peu petit, je trouvais, même si il ne faisait que quelques centimètres de moins que moi. Peut-être parce que j'étais un peu plus large que lui, à peine, mais assez pour qu'on le remarque. Mes muscles avaient beau être fins, ils étaient bien présents.
Mes yeux bleus le scrutèrent, et je lui répliquai :
- Je te signale qu'on travaille dans un pub, alors tu auras tout le temps de draguer la gent féminine qui viendra s'installer au bar. Et en plus, sortir en semaine, ce n'est pas forcément mieux que bosser.
- Mais je voulais aller en boîte, je suis certain que la nana que j'ai vue hier y sera encore ce soir. J'ai un ticket avec elle, j'en suis certain…
Ça sentait le déjà-vu.
- Tu as toujours des tickets, grimaçai-je tandis que nous descendions les marches. Et pourtant, tu es toujours aussi célibataire.
- HEY ! cria-t-il en m'envoyant un coup sur la tête.
Je laissai échapper un hoquet de surprise, mais quand je voulus répliquer, une voix me coupa dans mon élan :
- TU VEUX DIRE QU'ILS VONT LE FRAPPER ?!
- Oui, c'est le principe des cartons rouges, confirma Sakura qui avait sursauté sous le haussement de voix. Si tu en reçois un, tu deviens le souffre-douleur des élèves jusqu'à ce qu'il soit révoqué ou que tu changes d'école.
- Ou encore que quelqu'un devienne la nouvelle cible, ajoutai-je d'un air sombre.
- Ouais, mais ça faisait un petit moment que c'était pas arrivé, non ? dit Kiba quand nous arrivâmes au self, là où tous les élèves étaient regroupés.
Les cris et exclamations de la foule étaient tellement forts que nous dûmes hausser d'un ton pour nous comprendre. Ils applaudissaient, et scandaient tous la même chose : F4.
- Le F4 ? C'est qui ? demanda Karin avec curiosité.
- La bande de petits bourges la plus chiante que je connaisse, l'informai-je d'une voix légère.
Et au même moment, les quatre garçons apparurent à l'entrée du self.
Le premier, Hyuuga Neji. Grand, froid, de longs cheveux noirs qui lui balayaient le dos au fur et à mesure de ses pas, même si le plus étrange chez lui étaient ses yeux si pâles qu'on les croiraient blancs. Il était le fils d'une des familles les plus riches du pays. Son père était à la tête d'une entreprise automobile qui avait des points de vente dans le monde entier, et tous les modèles se vendaient comme des petits pains à ce qu'on disait. Des petits pains qui coûtaient autant que la peau de mes fesses. Il était connu au sein du groupe principalement pour son goût accentué des femmes, mais pas n'importe lesquelles : les femmes mariées. Beaucoup disaient qu'ils s'amusaient à les séduire l'alliance à la main, et qu'il les quittait quand la bague quittait de leur doigt. En gros, quelqu'un qui faisait ce qu'il voulait et qui se moquait bien des sentiments des autres. On savait juste que la seule personne qui arrivait à peu près à lui soutirer des réactions humaines était sa cousine, Hyuuga Hinata. Une fille fragile, plutôt innocente, et mignonne dans son genre, même si celui-ci n'était pas vraiment le mien. Je préfère les filles plus dynamiques, sûres d'elles et plus séductrice. Il paraîtrait que celle-là tombe souvent dans les pommes…
Le deuxième, un jeune homme du nom de Saï. Ses cheveux courts et bruns mettaient en avant son visage fin, que beaucoup de filles trouvaient « craquants ! » avec leurs voix aigues stupides. Je devais dire qu'il me faisait froid dans le dos, toujours à sourire pendant qu'il vous sortait des phrases flippantes. Personnellement, je ne l'aimais pas trop celui-là (parce que j'en aimais un ?), il paraissait vraiment trop faux. Même ses sourires étaient forcés, on aurait dit une machine, un robot. Il n'avait rien d'humain. Je crois que si j'avais dû un jour me retrouver seul en sa présence, je me serais enfoui à toutes jambes, tant pis pour mon ego.
Vient ensuite Subaku no Gaara, le seul garçon dans le groupe dont les cheveux n'étaient pas noirs, autant dire qu'il détonnait avec sa coupe d'un rouge sang. Il était le fils d'un chef d'entreprise célébrissime dans le domaine de l'informatique. Il était sans doute le plus calme du groupe, mais on ne savait pas vraiment si ce calme était paisible, ou plutôt du genre dépressif… Je vote pour le second choix, ce garçon avait l'air perturbé. Pour autant, c'était celui qui prenait le moins part aux idioties du F4, comme le carton rouge. Il se foutait tellement du reste du monde que même ça lui passait par-dessus la tête. Peut-être qu'il se sentait supérieur aux autres ? Non, ça, c'était plus pour le dernier du groupe…
Je laissai mon regard sceptique glisser sur les quatre garçons qui avançaient parmi les élèves avec une aisance et une confiance en soi étonnante. Ils ne se prenaient vraiment pas pour de la merde, et pourtant, ils étaient loin d'être mieux que nous. Sauf que eux, l'argent leur sortait par tous les trous. Désolé pour ma vulgarité, mais c'était exactement ça. Surtout pour le dernier, le pire des quatre, leur chef, Uchiha Sasuke.
Élancé, des muscles moulés par une chemise et une veste style costard, les mains dans les poches et le regard droit et fier, il devait être celui que je détestais par-dessus tout. Son orgueil était plus grand que l'Himalaya, et il était plus glacé que l'iceberg qui avait fait couler le Titanic. Il dépassait de loin les trois autres, même le Hyuuga faisait pâle figure à côté. Celui-là… il émettait une aura écrasante quand il passait à côté de vous. En plus, il n'était pas quelqu'un de loquace, il préférait vous laisser dans un silence glacial avant de vous sortir une unique phrase qui vous laissait bouche bée tellement elle vous faisait comprendre que vous lui étiez inférieur. Enfin… c'est ce que beaucoup disait. Je l'avais vu à l'œuvre une ou deux fois, et c'était vrai que je n'aurais pas voulu être à la place de celui qui était en face de lui. Et le pire était que, malgré cela, il héritait d'un succès incroyable auprès des filles du lycée. Elles étaient toutes à genoux devant lui, un vrai harem ! En même temps, il fallait reconnaître que ce type n'était pas dans le genre moche. Il avait une peau opaline vraiment très claire, je trouvais que cela lui donnait un air précieux. Et autant sa peau était pâle, autant ses cheveux étaient d'un noir de jais. Ils étaient coiffés tout en piques, certaines mèches obscurcissant son visage pour lui en cacher une partie, faisant hurler ses fans hystériques. Je me demandais combien de pots de gel il utilisait tous les matins pour obtenir une coiffure pareille. Mais ce qui m'énervait le plus, c'était son visage, parfaitement symétrique. Ses traits fins lui donnaient presque l'air d'une fille, enfin, presque, parce que son visage gardait constamment un air sérieux et grave, sauf quand il prenait ce rictus qui signifiait : « tu es un être inférieur, dégage ». Ses lèvres pâles et légèrement pleines faisaient le plus fantasmer les filles. Sakura m'avaient même raconté que certaines avaient tenté de lui faire boire des trucs bizarres pour qu'il s'intéresse à elles, ce que j'avais trouvé vraiment pitoyable. Mais je n'avais rien dit, je ne disais jamais rien de toute façon. Cela contredisait fortement mon caractère, mais je m'exhortais toujours au calme. Cela n'allait durer que trois années, trois années bloqué dans ce lycée de mes deux… alors pourquoi rechercher la bagarre ? Je ne rêvais que de ça, de lui dire ses quatre vérités et de lui lancer mon poing dans la tête, mais pourquoi faire ? Je faisais de mon mieux pour les ignorer, et me fondais dans la foule en priant pour que les mois qui restaient défilent à toute allure. La coupe était bientôt pleine, mais je tenais le coup. Cela étonnait mes deux amis, m'ayant connu pour mes frasques violentes en primaire et au collège, mais ils respectaient mon choix.
Les quatre garçons passèrent bientôt devant nous, et je fixai leur chef avec une lueur écoeuré dans les yeux, je le détestais purement et simplement. Apparemment, je le regardais avec un peu trop d'intensité, car il se tourna dans notre direction, me considéra à peine une seconde avant de détourner les yeux, n'ayant même pas cillé. Les quatre autres passèrent avec une indifférence identique, et ils allèrent s'installer sur les chaises au bout de la salle, celles que les élèves avaient installées pour eux. Ils me faisaient pitié à vouloir s'attirer leurs faveurs comme des abeilles autour de leur reine. Peu après, un élève fut jeté dans au milieu des lions affamés. Ses lunettes étaient à moitié tombées de son nez, et il regardaient autour de lui frénétiquement, paniquant en voyant tous leurs yeux de hyènes figés sur lui. Le pire fut quand le silence se fit aussi brutalement qu'un coup de tonnerre. Tous les regards se dirigèrent vers une seule personne. Uchiha Sasuke venait de se lever.
- Qu'est-ce qu'il a fait pour mériter ça ? Le pauvre…
Le murmure de Sakura attira l'attention d'un élève devant nous qui se retourna, et chuchota avec rapidité :
- Il paraît qu'il aurait dit à tout le monde que le F4 n'était qu'une bande de cons, et qu'il aurait bien aimé foutre une raclée à leur chef. Apparemment, son souhait va être exaucé…
Imprudent, même si il avait dit tout haut ce que tout le monde avait dit tout bas. Ne pas intervenir, ne pas chercher les ennuis…
- Tu veux me frapper il parait ?
La voix résonna dans la salle, claquante, impressionnante malgré son timbre rauque et chaud. Je vis certaines filles échanger des regards presque amoureux, et je me retins de vomir. J'eus droit à un coup de coude de Kiba qui m'avait entendu faire un hoquet dégoûté.
- Eh bien, vas-y.
Sasuke leva les bras, semblant attendre que l'autre se décide à bouger. Mais il semblait pétrifié, et j'étais étonné qu'il ne soit pas déjà en train de le supplier de l'épargner comme si il avait été son bourreau.
Au bout de quelques secondes, le sourire sadique de Sasuke apparut.
- Ça y est, murmurai-je, les coups vont pleuvoir.
Et effectivement, à peine avais-je dit ça que le poing de Sasuke vint s'écraser dans le ventre de Teruki face à lui. L'adolescent sembla ne plus pouvoir reprendre sa respiration, et avant qu'il ne fasse quoi que ce soit, un autre coup lui percuta la joue avec rapidité. Il n'y avait pas à dire, il savait se battre quand l'adversaire ne lui rendait pas les coups. Mais je me demandais ce qu'il valait si on lui répliquait…
L'élève tomba au sol, gémissant de douleur tout en se tenant le ventre, une simple forme agonisante par terre.
- Je crois que t'as compris où était ta place.
La voix de ce Uchiha était vraiment glacée, tranchante, et les filles poussèrent des exclamations. On remarqua à peine que l'un des F4, Gaara, s'était levé de son siège pour traverser la foule. Je remarquai vite que le geste par contre ne plus pas au brun de glace. Mais quand le jeune homme arriva à notre hauteur, je fus certain que son regard presque turquoise s'était dirigé dans notre direction. Il croisa même le mien, et on s'observa un instant avant qu'il ne disparaisse de la salle. Peu de temps après, ce fut tout le groupe de jeunes riches qui sortit, encore acclamé par le reste des élèves. Pour ma part, je regardai mes deux amis, et nous tournâmes les talons pour quitter la foule des jeunes en délire.
Chapitre 2 : Première confrontation.
Je sortis avec rapidité des bouteilles de bière, les ouvris d'un geste d'habitué à l'aide d'un décapsuleur avant de les poser sur un plateau avec leur verre. D'une main sûre, je soulevai le tout avant de m'éloigner du bar et de slalomer entre les tables des clients pour arriver à la numéro six. Je servis les consommations avec mon sourire de professionnel, déposai aussi l'addition et retournai d'un pas tout aussi vif à côté de Kiba qui lavait des verres avec des gestes lents, presque langoureux.
- Qu'est-ce que tu fais ? Tu penses à ton soi-disant ticket loupé pour essuyer des verres de cette façon ?
Il sembla piqué de ma remarque car il répliqua bien vite :
- Ce n'était pas un soi-disant ticket, j'ai dansé trois fois avec elle.
- Et quoi ? Elle t'a fait comprendre qu'elle voulait te revoir ?
- Elle m'a dit que… je ressemblais à son petit frère.
- Ah oui, ça c'est une promesse de nuits de sexe enflammées, ricanai-je en préparant une nouvelle consommation.
- Oh, ça va, ne te fous pas de moi ! Tu vois ce qui m'énerve avec les filles, c'est qu'elles font trop de cinéma, même en boîte. On ne sait jamais si on leur plait, ou si elles sont gentilles pour mieux nous envoyer bouler après.
- Ouais, ça dépend lesquelles aussi. Celles-là, c'est plus celles qui sont du genre à te manipuler pour se foutre de toi.
- Nous au moins les mecs, on envoie quand même des signaux bien plus flagrants, poursuivit-il, s'enflammant tout seul. Je veux dire, elle le sente à notre regard qu'on est attiré par elle.
- Oui, c'est sûr, dis-je, parlant sans vraiment l'écouter.
- On essaie d'avoir le plus de contacts avec elle possibles !
- C'est clair…
- On leur chuchote des trucs à l'oreille pour les émoustiller bien comme il faut.
- Je suis totalement d'accord.
- On est galant avec, enfin, tu vois le truc, quoi. Toi, tu fais quoi d'habitude déjà ?
- Ouais, t'as raison…
Je continuai à préparer le cocktail demandé par une demoiselle dans le fond quand je fus soudainement surpris par le manque de fond sonore. Ah, oui, Kiba avait arrêté de parler. Je me tournai vers lui, le considérant avec des sourcils froncés.
- Bah quoi, j'ai dit que j'étais d'accord.
- D'accord à quoi ? fit-il en croisant les bras sur son torse.
- Euh… que les mecs envoient des signaux plus flagrants… ? tentai-je avec un petit sourire.
- Merde, c'était il y a cinq minutes ça ! s'exclama-t-il en lançant son torchon sur le bois du comptoir. Tu vas me dire que t'as rien écouté ?
- Si, vite fait, mais je te signale qu'on bosse là ! rétorquai-je en lui montrant mes préparations en cours.
- On s'en fout, le patron est dans l'arrière salle !
- Ou juste derrière toi Inuzuka, parla une voix bourrue.
Kiba tressaillit, n'osant même pas se retourner. Il prit alors mon plateau fin prêt, ainsi que ma commande, et s'en alla en disant :
- Merde Naruto, j'ai pas que ça à faire que t'écouter !
Et il détala, comme un chien la queue entre les pattes. Je marmonnai un « lâche » entre mes dents avant de me tourner vers le patron, du nom de Jiraiya. Je pouvais difficilement rivaliser avec son mètre quatre-vingts dix, et sa stature digne d'un grizzly, sans vouloir aucunement le vexer. Ses longs cheveux blancs pendaient dans son dos de façon hirsute, digne du Hagrid des Harry Potter. Il me regardait avec l'air ravi que l'on affiche quand on a pris quelqu'un la main dans le sac.
- Alors Uzumaki, on préfère papoter comme une fille plutôt que de servir les commandes aux clients.
- Ma commande est parti avec…
- C'est ça, m'interrompit-il en riant. Remets-toi au travail, au lieu de parler de… de quoi d'abord ? Qu'est-ce qui est plus important que le boulot que tu risques à tout moment de perdre si je ne t'en juge pas digne ?
- Des filles que Kiba n'arrivera jamais à avoir.
- Je t'ai entendu ! grogna celui-ci en revenant de la table huit. Je te jure que celle-là, elle était plus que d'accord !
- Tu en es sûr ? demanda le patron en ayant subitement l'air plus que intéressé. Et elle était comment cette demoiselle, est-ce qu'elle avait de gros…
Il montra ses pectoraux d'un air béat, plaçant ses mains à une distance que je jugeai impossible pour la poitrine normale d'une fille, à moins qu'elle ne veuille s'étouffer dedans dans son sommeil ou s'en servir comme oreiller. Kiba me regarda avec l'air de dire que Jiraiya était dingue, mais répondit quand même, après tout, il ne lui avait pas fait de remarques sur son manque de travail…
- Non, plutôt dans les… 90 B, je dirais.
- Parfait, commentai-je.
- C'est tout ? tonna notre patron. Tu n'as pas l'air bien difficile comme garçon ! Si tu veux, je pourrais t'apprendre deux ou trois astuces pour choper les petites demoiselles qui en valent vraiment la peine, lança-t-il en nous faisant un clin d'œil.
Il fallait savoir que Jiraiya avait ouvert son pub grâce à l'argent qu'il avait gagné en vendant des livres qu'il avait écrits, et qu'il continuait toujours de faire d'ailleurs. Des livres pervers, sans aucune intrigue à part : « Je t'aime, tu m'aimes, nous pouvons donc copuler ! ». Un ramassis de bêtises, mais le pire, c'était que notre patron était l'auteur préféré de notre professeur de sciences naturelles, Kakashi-sensei. Mon patron nous avait forcés à en lire un chacun au moins, pour nous, je cite : « apprendre les choses de la vie, les vraies ! ». Tout ce qu'il a eu en échange fut que maintenant, je l'appelais « le pervers » dans son dos.
- Tu vas voir mon petit gars, avec mes astuces, les filles deviendront dingues de toi !
- Et vous faites quoi ? Vous leur glissez une substance illicite dans leur verre pour qu'elle s'imagine Brad Pitt quand vous les bécotez ? lui lançai-je, mordant ma lèvre pour ne pas rire.
Derrière le pervers, Kiba me faisait de grandes signes de mains, et je pus lire sur ses lèvres : mauvaise idée, mauvaise idée ! Mais je ne me dégonflai pas, car je savais que malgré tout ce que je pourrais dire, Jiraiya ne me congédierait jamais. Ile me connaissait depuis que j'avais neuf ans, quand Iruka m'avait pris sous son aile. Et lui, tout comme sa femme Tsunade, me considérait comme leur petit-fils. N'ayant jamais eu ni vrais parents, ni grands-parents, c'était eux ma famille. Donc je pouvais aisément me permettre de faire quelques remarques, je ne craignais rien, à part deux ou trois coups. Mais solide comme j'étais, c'était une menace vraiment futile…
Contrairement à ce à quoi s'attendait Kiba, notre patron éclata de rire et, se rapprochant de moi, encercla ma tête de l'un de ses bras pour frotter mes cheveux de son poing. Je poussai une ou deux exclamations, tous les clients devaient regarder par ici, mais je ne parvins pas à me défaire de sa poigne de géant.
- Ecoute-moi bien microbe, scanda Jiraiya en cessant ses douces caresses sur mon crâne (jamais je n'avouerais avoir mal). Malgré tout ce que tu pourras tenter, tu n'arriveras jamais à la cheville de Jiraiya, le maître enchanteur de ces demoiselles, celui dont les frasques passées ne se comptent même plus tellement elles sont nombreuses.
- Oui mais… comme vous…dîtes, elles sont… passées vos frasques ! haletai-je en tentant de me dégager.
D'un coup bien précis sur son flanc, je parvins à le faire suffisamment rire pour qu'il desserre sa prise. Je m'écartai d'un mouvement brusque, atterrissant sur le bar, faisant trembler dangereusement les bouteilles d'alcool alignées en guise de décoration.
- Depuis que Tsunade Baa-chan vous a passé la corde au cou, vos méthodes ont vraiment dû perdre de leur efficacité !
- On parie que non ? Vous n'aurez qu'à les essayer à l'une de vos soirées de petits merdeux, et vous m'en direz des nouvelles. De toute façon, qu'est-ce que ça changera ? Avec ou sans, vous êtes incapables de draguer les petites demoiselles.
Il partit d'un grand rire gras, et j'en profitai pour jeter un œil à Kiba. De toute manière, lui, dès que parlait de filles, il ne savait plus réfléchir. Je ne fus donc pas étonné de le découvrir subitement intéressé par la méthode magique de Jiraiya, et ses yeux de merlan frit me regardèrent avec l'air de dire qu'il ne fallait pas laisser passer ça. Je levai les yeux au ciel, mais quand le patron se tourna vers nous pour savoir si nous étions finalement intéressés, je hochai la tête.
- Un peu plus poliment je te prie, mes conseils se méritent gamin !
- Oh ça va, marmonnai-je.
Je poussai un soupir avant de joindre les mains de mauvaise grâce, et débitai d'une voix plus aigue que d'ordinaire.
- Ô grand maître Jiraiya, nous vous supplions de nous apprendre comment capturer des femelles dans notre filet !
- Si Sakura t'entendait parler comme ça, tu aurais eu droit à un coup de poing, se marra mon ami.
- Ouais, bah elle n'est pas là pour l'instant… Alors, vous vous décidez ou pas ? me retournai-je vers le patron.
- Okay ! Alors ouvrez vos escourdes les jeunes.
Il s'approcha de nous, et commença à parler du ton de la confidence.
- De un, un ferrage s'impose. Vous analysez votre proie, étudiez rapidement son caractère et ses réactions. Il faut toujours savoir à quoi s'attendre… De deux, cria-t-il presque en faisant le V de la victoire, il faut savoir la flatter en douceur, assez pour qu'elle ait envie d'en entendre plus, mais pas trop, sinon vous serez trop lourd, ça la ferait fuir… De trois ! continua-t-il en ajoutant son annulaire. Soyez légèrement protecteur avec elle, faîtes la s'imaginer que vous êtes le type parfait, le beau prince sur son cheval blanc. Ouvrez-lui les portes, dégagez-lui le passage en allant sur la piste de danse… Mais tout ça en restant cool bien entendu. Enfin, en quatre, tentez une approche physique. Des contacts furtifs au début, qu'elle croit qu'elle les imagine, que vous n'avez pas fait exprès… ça les rend folles en général ! Puis allez-y un peu plus franchement : caressez-lui la main du bout des doigts en la fixant dans les yeux, murmurez lui des choses à l'oreille en prenant bien garde à l'effleurer de vos lèvres, prenez-la doucement par la taille, frôlez ses bras nues. Avec ça, vous pouvez être sûrs qu'elle viendra en demander plus. Tout est dans la finesse les jeunes, la finesse !
Je le scrutai encore un peu de mes yeux perplexes, me mordant l'intérieur de la joue avant de regarder furtivement mon ami. Lui avait l'air subjugué.
- O-ok, je crois que j'ai tout bien compris, acquiesça-t-il avec ferveur. Merci patron, merci, merci…
Il continuait d'hocher la tête comme si il venait faire la découverte du siècle, et je pouvais voir au-dessus de sa tête une bulle où il s'imaginait sans doute entouré de filles qu'il avait réussi à choper grâce aux merveilleuses techniques made in Jiraiya.
- Ouais, bah pour ma part, je ne trouve pas que ça diffère vraiment de ce qu'on fait d'habitude.
- Sauf que vous, vous y allez comme des bourrins, c'est toute la différence, chantonna Jiraiya. Maintenant, vous pouvez vous remettre au boulot ! Vous me remercierez plus tard…
Il s'en alla en sifflotant, et quand il disparut, Kiba se tourna vers moi avec un regard émerveillé.
- J'applique ses règles dès qu'on retourne en boîte !
- Comme on dit, l'espoir fait vivre…
Il grogna un peu à ma remarque moqueuse, mais ne put répondre car un type appelait un serveur depuis quelques minutes déjà, et qu'il perdait patience.
Quand il revint, je m'occupais de préparer une nouvelle rasade de café, on allait en avoir besoin pour tenir ce soir.
- N'empêche, tu n'as jamais trouvé que le F4 était… frustrant ? demanda mon ami.
Je faillis rire devant le fait qu'il était sans doute le type le plus bavard que je connaissais, mais me contentai de lui demander :
- En quoi ? Leur famille fait des donations énormes à l'école. Moi aussi je trouve ça exagéré, surtout le fait que même les profs ne peuvent aller à leur encontre, mais qu'est-ce que tu veux qu'on y fasse ?
- Personnellement, ça me met en rage ! Rien que le fait qu'ils ne portent pas d'uniforme est injuste…
- Il doit être trop moche pour eux, proposai-je en riant.
- Peut-être bien. Ce qui est sûr, c'est que celui que j'aime le moins, c'est bien leur chef. Il se prend pour le dictateur du lycée !
Une paire d'yeux d'un noir glacial s'infiltra dans mon esprit, mais je la chassai bien vite.
- Uchiha est le dictateur de notre lycée, déclarai-je d'un ton morne. C'est une fatalité. Dommage que sa scolarité se passe en même temps que la nôtre.
- Je trouve ça étonnant d'ailleurs que tu ne réagisses pas, lança soudain mon ami d'un ton plus sérieux. Quand on était au collège, tu te battais tout le temps, dès que tes amis étaient en jeu. Tu n'avais pas la langue dans ta poche…
- Je n'ai pas la langue dans ma poche ! m'écriai-je en me tournant vers lui. C'est juste que… les choses sont différentes. Crois-moi, ça me ferait bien plaisir de lui défigurer son visage de bellâtre, mais… à quoi ça m'avancerait de chercher des ennuis maintenant quand ils ne nous restent que quelques mois à tenir ? Je n'en vois pas l'intérêt.
- Ouais, je peux comprendre. Enfin, tant qu'ils ne s'attaquent pas à nous, tout va bien !
- T'as tout compris.
Je partis alors servir un autre client, pestant encore contre ce satané lycée qui me rendait si malheureux.
Malgré tout, je l'avais voulu, cette entrée dans ce lycée, dès les portes ouvertes qui avaient été organisées à ma dernière année de collège. Parce qu'il y avait eu… cette femme. Uehara Konan. Je n'avais jamais vu une femme comme elle, et je ne parle pas seulement de sa beauté, même si ses cheveux d'un mauve profond entourant avec douceur son beau visage m'avaient un peu séduit. C'était surtout son charisme, son aura de félicité quand elle nous souhaitait à tous la bienvenue qui m'avait plu et impressionné. Cette femme paraissait si confiante, si fière, d'un charisme incroyable… que j'en avais été un peu perturbé. Elle m'avait fait plus d'effet que quiconque jusqu'à maintenant, m'avait laissé totalement admiratif. C'était sans doute grâce à elle, en plus de mes deux amis, que j'arrivais à fermer ma gueule et à continuer à endurer les idioties de ce F4. C'était une ancienne élève de ce lycée, et quelques années plus tard, c'était devenue une femme accomplie, qui habitait en France aujourd'hui. Elle m'avait même donné une voie que j'allais sans doute suivre : le droit. Je pensais, à cause de son influence, devenir avocat, comme elle. Pour vous dire à quel point elle m'avait influencé.
- Ouah, Naruto ! s'exclama Kiba en considérant ce que j'avais sorti de son emballage. Je ne savais pas que tu étais… le descendant d'une grande lignée de samouraïs !
Sakura se mit à pouffer dans sa serviette alors que je leur tirai la langue. Ma maturité résistait à vraiment toutes les épreuves. Je tentai de les ignorer en relevant la tête d'un air boudeur, même si ils avaient un peu raison. Mais c'était la faute d'Iruka ! Il avait insisté comme un dément pour m'emballer mon repas dans un obentô digne de la famille royal, d'un bois sombre et brillant, où étaient dessinées quelques gravures anciennes. Et dans ce restaurant scolaire où les plats sur le tableau d'affichage étaient écrits en français pour souligner le chic de la chose, je faisais un peu tâche… Mais que nenni ! Ce n'était pas ça qui allait me refroidir ! Le repas de Kiba était bien emballé dans une boîte d'un rose encore plus fuschia que les cheveux de Sakura, ce qui était très viril. Il n'avait donc vraiment rien à me dire. Quant à Sakura, son obentô était tout simple, mais ce qui était à l'intérieur me faisait littéralement saliver. C'était une excellente cuisinière.
- Peu importe le contenant ! répliquai-je d'une voix forte. Le plus important, c'est le contenu. Et je suis sûr que je vais vous épater. Iruka m'a préparé des crevettes pour aujourd'hui. Alors… admirez ! m'exclamai-je en ouvrant la boîte.
Mais la seule chose qui en résulta fut un silence. Consterné pour les autres, abasourdi pour moi. Nous nous penchâmes tous les trois au-dessus du repas, sourcils froncés.
- C'est des crevettes ? demanda Sakura.
- On dirait des langues de chats, se marra Kiba en tentant de garder contenance devant mon air déçu.
- Ou des piments, renchérit Sakura.
- Mais certainement pas des crevettes, conclut Kiba. Ça n'en a même pas la couleur !
- Roh, ça va, grognai-je en guise de réponse.
Je pris mes baguettes, et avec précaution, remuai les petites choses desséchées qui constituait une grande partie de mon repas. Ce n'était vraiment pas drôle d'être un roturier.
- Au fait Naruto, on parie combien qu'après le cirque des F4 hier, tu es allé dans l'escalier de secours !
- Hein ? C'est quoi cette histoire ? demanda Sakura avec curiosité.
- Comment tu sais ?! m'exclamai-je en même temps qu'elle.
- Parce que je t'ai vu y aller la dernière fois. Et tu sais ce qu'il fait Sakura ? Il frappe contre les murs comme un enragé, après, il fait ça…
Il prit une grande inspiration, et se mit à crier en plein milieu du self :
- C'EST INCROYA-grubl.
Je le fis taire en mettant une main sur sa bouche, l'intimant au silence d'une voix gêné, un peu rouge. Mais juste pour me faire lâcher ma prise, il commença à baver dans ma main comme un gamin, et je la retirai aussitôt, grimaçant de dégoût, l'essuyant de suite sur mon pantalon.
- Espèce d'idiot, lui lançai-je. On n'a pas idée de crier comme ça dans le self…
- Il fait vraiment ça ? s'étonna Sakura en se tournant vers Kiba, m'ignorant complètement.
- Tu peux en être sûre, à chaque fois que le F4 fait des siennes.
Elle éclata de rire, et me dit en continuant à se marrer :
- Tu es vraiment bête mon pauvre Naruto !
Je marmonnai deux ou trois choses dans ma barbe, et décidai de les ignorer pendant au moins deux minutes, sachant que je n'étais pas capable de tenir plus longtemps sans parler. Mais des éclats de voix attirèrent mon attention un peu plus loin, et je tendis le cou. Karin, la nouvelle de notre classe, était en train de se faire molester par deux ou trois garçons. Apparemment, ils souhaitaient l'inviter à manger avec eux, mais elle refusait d'une voix un peu paniquée.
- Hé, Karin ! m'écriai-je assez fort pour attirer son attention.
Elle se tourna vers moi comme si j'étais sa bouée de sauvetage. D'un signe de main, je l'invitai à manger avec nous. Son visage se détendit perceptiblement, et elle s'éloigna bien vite des trois adolescents pour poser son plateau sur notre table, soulagée. Elle s'installa en face de moi :
- Merci Naruto-kun, je… je ne suis pas aussi familière avec les garçons. Je ne savais pas quoi leur dire pour qu'ils me laissent tranquille.
- Ça se comprend, la rassurai-je, les garçons de ce lycée n'abandonnent jamais, étant donné que d'habitude ils ont tout ce qu'ils veulent…
Elle acquiesça doucement, mais quand je fis apparaître le deuxième étage de mon obentô, elle poussa un cri choqué :
- Mais c'est moisi !
J'abaissai vite mon regard sur mes onigiri décorées avec des algues de couleurs différentes. Sakura et Kiba rigolaient dans leur coin, amusés que mon repas ne soit décidément pas le bon aujourd'hui. Je pris donc une boulette de riz dans ma main, et la tendis à la jeune fille devant moi. D'un geste nerveux, elle repoussa sa chevelure rousse et remit correctement ses lunettes sur son nez avant de prendre en main ce que je lui tendais.
- Ce sont des algues, la rassurai-je, amusé. Goûte, tu verras, c'est bon.
De façon hésitante et sous nos trois regards fixes, elle en prit une minuscule bouchée, me donnant l'impression que je la forçais à avaler un ver de terre ou ce genre de choses véritablement délicieuses… Mais quand je la vis brusquement relever son regard vers moi, surprise, je sus que j'avais gagné.
- C'est délicieux, s'étonna-t-elle.
- C'est vrai ? souris-je. Tant mieux.
Elle rougit un peu, et nous continuâmes à manger en entamant une conversation en bonne et due forme. Comme je m'en étais douté vu la tête qu'elle avait tirée en découvrant mon repas, Karin n'était pas issue d'une famille pauvre, loin de là. Sa timidité contrastait étrangement avec ses cheveux de feu auxquels on aurait plutôt attribué un tempérament plus vif, mais elle se révélait plutôt calme. Elle souriait souvent, éclairant à chaque fois son visage, et en voyant le regard de Kiba à côté de moi, je me dis que peut-être il avait envie de tenter sa nouvelle technique de séduction avec elle.
- Mais… vous travaillez vraiment après les cours ? fit-elle d'une voix horrifiée.
- Il faut bien qu'on continue de manger tout en payant le lycée, plaisantai-je.
- Mais tu n'auras qu'à venir nous voir Karin, lança Kiba en sautant sur l'occasion. Je t'offrirai un cocktail de mon cru, tu verras, tu adoreras !
- Et tu n'auras qu'une chance sur deux de finir avec une indigestion, la rassurai-je avec un sourire moqueur.
Elle éclata de rire, et recula sa chaise pour aller poser son plateau maintenant qu'elle avait fini de manger. Mais à peine fit-elle un pas qu'elle percuta avec force quelqu'un, renversant le reste de son verre de jus d'orange sur ladite personne. Mais quand ses yeux se relevèrent, elle se glaça d'horreur.
La salle plongea dans un silence angoissant, tous les yeux rivés sur Sasuke Uchiha et sur sa chemise blanche sans doute hors de prix recouverte d'une large tâche jaunâtre. Plus personne n'osait prononcer le moindre mot, attendant la sentence du bourreau.
- J-je suis d-désolée ! J-je… je vais payer les frais d-de…de lavage, bégaya Karin, plus pâle qu'un mort.
Ses yeux fixaient avec terreur le visage de marbre et étrangement calme du jeune homme qui la dominait de toute sa hauteur, l'écrasant littéralement de son regard.
- Les frais de lavage, répéta-t-il. Tu te fous de moi ?
Sans prévenir, il arracha avec violence sa chemise de son dos, des boutons tombant au sol alors qu'il la lui balança au visage, la faisant crier quand elle retomba en arrière sur sa chaise.
- Calme-toi Sasuke, tenta d'une voix profonde Neji à côté de lui. Tu ne vas quand même pas frapper une fille aussi mignonne ?
Il s'approcha de Karin et caressa sa joue tremblante comme si elle n'était qu'un objet qui leur faisait un peu passer le temps. Cela me dégoutta littéralement. Je fixai leur chef. Il ne lui restait qu'un marcel noir sur le dos, dévoilant les muscles tendus de ses bras et sa peau parfaitement claire et lisse. Sa respiration rapide soulevait sa poitrine finement musclée, et je voyais à sa posture nerveuse qu'il tentait de contrôler sa colère. Mais le pire, c'était bien ses yeux. Il y avait tellement de mépris dedans que quiconque les croisait avait l'impression d'être un être inférieur. La tension qui émanait de lui avait rendu la salle si lourde que je commençai à avoir trop chaud. Mes poings tremblaient contre mon corps alors que j'observais leur « spectacle ».
- Dommage que tu sois si jeune, continua Neji dont la voix légère semblait irréelle tellement elle contrastait avec l'ambiance insupportable. Tu pourras revenir me voir quand tu auras pris une dizaine d'années, tu seras juste à mon goût.
- C'est vrai, Sasuke, renchérit Saï en faisant un de ses sourires froids qui devait lui sembler rassurant, tu ne devrais pas t'énerver comme ça contre cette fille. Tu te doutes bien qu'elle n'a pas fait exprès…
Mais l'autre ne leur répondit pas, son regard toujours fixe et dur.
- Je commence à avoir froid, dit-il enfin de sa voix grave et particulièrement sombre.
Ses deux amis se tournèrent vers lui, et voyant son expression, haussèrent les épaules avec indifférence pour se reculer, lui laissant le passage. Karin s'était recroquevillée sur elle-même, et je voyais qu'elle était à deux doigts de craquer.
- Peut-être que je vais tomber gravement malade par ta faute ? continua-t-il en faisant apparaître un de ses sourires de glace. Qu'est-ce que tu vas faire si je tombe malade, moi, Uchiha Sasuke, l'héritier de la plus grande compagnie financière du Japon, par ta faute ?
Il s'approcha lentement d'elle, la toisant de toute sa grandeur.
- Tu n'as jamais pensé à l'avenir de ton pays ? articula-t-il doucereusement. Tu n'as jamais réfléchi aux conséquences de tes actes ? Réponds-moi quand je te pose une question ! hurla-t-il soudain.
- ARRETE !
Il se stoppa, étonné, et se tourna avec une lenteur toute calculée vers moi. Je m'étais relevé sans m'en rendre vraiment compte, le souffle court, et lui faisais face. Il était un peu plus grand que moi, mais j'étais le plus large de nous deux, même si c'était à peine perceptible. Je le fixai de mon regard déterminé, et répétai d'une voix calme, contrôlant les tremblements que je pourrais laisser échapper.
- Arrête… s'il te plait. Tu vois bien qu'elle n'a pas fait exprès, non ? A quoi ça t'avance de la harceler comme ça ?
Tout le monde retenait son souffle, sauf Sakura qui était complètement paniquée près de moi. La connaissant, elle devait hésiter à me faire rasseoir de force. Mais je poursuivis, tentant de ne pas me laisser impressionner par la personne au cœur de pierre face à moi.
- Elle a dit qu'elle était désolée et, en plus de ça, elle va te rembourser. Ça ne te suffit pas ?
La tension dans le corps du jeune homme face à moi se fit de plus en plus forte au fur et à mesure que la haine transparaissait dans son regard. Il se rapprocha de quelque pas de moi, ses chaussures claquant sur le parquet en bois. Il se stoppa à une vingtaine de centimètres de mon visage, ancrant son regard menaçant dans le mien. Ses yeux étaient vraiment des gouffres froids, et je me doutais que ce ne devait pas être difficile de sombrer dedans. Je déglutis, mais gardai mon visage relevé. Le temps sembla se suspendre avant qu'il ne me contourne finalement, sous le soupir soulagé de Sakura, pour sortir du self sans un regard de plus pour nous. Le reste du F4 le suivit, et le seul qui n'était pas intervenu, Gaara, plantant son regard dans le mien. Curiosité ? Intérêt ? Indifférence ? Je ne parvins pas à lire son expression. Il disparut aussi vite que les autres.
Je relâchai enfin la tension dans mes muscles, et me dirigeai aussitôt vers Karin, m'assurant qu'elle allait bien. Kiba me donna une tape sur l'épaule, mais son regard était troublé. Il savait aussi bien de moi ce qui risquait d'arriver.
Ce que je venais de réaliser était fou, et j'étais la première personne du lycée à avoir osé le faire. J'avais tenu tête à Uchiha Sasuke, et c'était un miracle que cela n'ait pas fini en une bagarre violente et généralisée. J'étais fier de l'avoir fait, même si une certaine tension restait présente en moi. J'avais enfin réagi comme j'avais toujours voulu le faire, comme mon caractère combatif m'ordonnait de faire, mais je ne me faisais pas d'idée sur la suite des évènements. Malgré tout, toute la journée j'avais prié. Le soir, quand j'étais rentré chez moi, mon tuteur qui m'avait accueilli me trouva trop calme. Prétextant avoir eu une journée fatigante, j'avais sauté le repas pour aller directement dans ma chambre. J'y avais pensé toute la nuit, j'avais revu sa posture menaçante et son regard qui ne pardonnait pas. Malgré tout, j'avais continué à prier tous les dieux et les saints que je connaissais.
Le lendemain, quand j'arrivais au lycée, je me dirigeai avec un regard sombre vers mon casier. C'était l'heure de vérité. Le hall était vide, j'étais presque en retard. Ma main hésitante se leva, et d'un geste rapide, j'ouvris mon casier. La porte s'écarta dans son grincement habituel, et devant moi apparut le carton rouge du F4.
Chapitre 3 : Les hostilités commencent
Mon entrée dans la classe jeta un froid qui fit taire tous les bavardages. Ignorant le regard des autres, je m'avançai jusqu'à ma place. La nouvelle de mon carton rouge avait déjà été annoncée, je savais donc ce qui m'attendait. Pour autant, je n'avais pas l'intention de leur donner satisfaction, il n'était pas question que je fuie devant eux. Je n'étais pas de ceux qui se mettaient à courir, jetant l'éponge avant même d'avoir essayé de se battre. J'avançai donc entre leur rang serré, jouant un peu des coudes entre eux pour qu'ils me dégagent le passage, et constatai que trois choses étaient absentes : Kiba, Sakura, et ma table. Je ne tressaillis même pas, regardant la place vide où se tenait auparavant mon bureau avec un visage sans expression. J'entendis quelques rires dans la salle, mais ne les écoutai pas.
- Qui est-ce qui a fait ça ? grondai-je, les regardant de mes yeux furieux.
- Si tu crois qu'on va te répondre, lança un garçon sur ma gauche, un sourire stupide collé à ses lèvres.
Je me précipitai vers lui, et l'empoignai par le col, le soulevant un peu brusquement en le ramenant vers moi. Il parut étonné par mon agressivité soudaine, et ne chercha même pas à se défendre, me fixant de ses yeux grands ouverts.
- Où ? lui demandai-je de ma voix menaçante.
- Là où est ta vraie place, me répondit une autre fille, se marrant ensuite avec ses copines à côté d'elle.
Je relâchai le gars, le laissant tomber sur le sol à la façon d'une loque, et sortis en prenant mes affaires. Je descendis les marches avec une colère contenue, mais passant devant des portes vitrées donnant sur l'extérieur, je me stoppai. Mes dents grincèrent alors que je pensais avec force : de vrais démons ! Marmonnant quelques insultes bien senties dans ma barbe, je sortis dehors pour trouver ma table… au milieu des poubelles. Je posai mon sac par terre, et entrepris de la sortir des sacs à ordure pour ensuite la remonter. Mais à peine avais-je commencé à l'extraire qu'il se mit à pleuvoir… des épluchures de légumes. Je sentis une feuille de salade s'immiscer dans mon col d'uniforme quand des rires idiots retentirent au-dessus de moi. Je reculai un peu pour observer les élèves penchés aux fenêtres, riant de voir des morceaux de carottes dans mes cheveux. Je secouai un peu la tête quand sans prévenir, le gars me lança la poubelle qu'il venait de vider. Je l'évitai sans problème, mais la colère se faisait de plus en plus grande. Je m'apprêtai à répliquer quand j'entendis en provenance de l'intérieur de l'établissement :
- Kiba ! Je l'ai trouvé !
Sakura se précipita à mes côtés, m'inspectant rapidement pour voir si j'allais bien. Se mordant la lèvre, elle leva la main pour retirer un dernier morceau de légume de mes cheveux. Ses doigts dérivèrent sur ma joue qu'elle caressa de façon maternelle, me disant :
- Dès qu'on a entendu que tu avais un carton rouge, on a essayé de te trouver dans le lycée. Désolée d'arriver si tard.
- Pas grave, de toute façon, ce n'est pas leurs stupidités qui pourront me faire plier.
D'un geste brusque, car malgré tout énervé, je dégageai ma table pour la porter à bout de bras. C'est à ce moment que Kiba arriva. Il ne me dit rien, mais l'expression de son visage parla pour lui. Il était désolé, et en même temps, je savais qu'il me soutiendrait quoi qu'il en coûte, même si il devait y passer lui aussi. Je me contentai de hocher la tête à son attention, on se comprenait sans mots, et après qu'il ait pris mes affaires au sol, nous nous dirigeâmes vers notre salle de classe.
Ce n'était que la première journée, la première, et je n'en pouvais déjà plus. Ce n'était pas les rires incessants qui me gênaient plus que ça, ni le fait que les élèves me bousculaient dès qu'ils le pouvaient, ou encore qu'ils me lançaient tous en même temps des boulettes de papier quand le professeur avait le dos tourné. Non, ce qui eut raison de moi, se passa juste après le self.
J'avais laissé Sakura et Kiba finir de manger tranquillement, parce que je ne supportais plus d'entendre les élèves piailler autour de moi. Même si j'arrivais à garder un minimum de patience, espérant qu'ils se lasseraient rapidement sans que je n'aie besoin de me mettre à sécher les cours. Je n'allais pas jusqu'à vouloir qu'une autre personne reçoive le carton rouge, encore heureux, et je n'étais pas non plus affecté au point d'aller présenter mes excuses au tyran. Ça, il n'en était strictement, mais alors strictement pas question. Déjà, ma fierté m'empêchait d'aller le supplier, et en plus, ce n'était pas à la victime d'aller s'excuser auprès de son bourreau. Lui et son ego pouvait aller se faire voir. Je n'avais pas l'intention de l'énerver plus que ça, mais lui dire que j'étais désolé ? Je n'étais pas quelqu'un d'hypocrite, et encore moins avec les personnes que je ne pouvais pas sentir.
Je marchai dans les couloirs presque vides à cette heure de la journée, et arrivai dans une allée extérieure pour prendre un peu l'air. C'est alors que j'aperçus devant moi une certaine personne : Karin. Je la hélai avec toute la discrétion qui me caractérisait, et elle se retourna vers moi, surprise. Je commençai à avancer vers elle pour lui parler quand soudainement, elle détourna vivement la tête et s'en alla d'un pas vif, ne me regardant même pas dans les yeux. Je restai statufié sous l'étonnement, n'arrivant pas à croire, à assimiler le fait que la personne que j'avais secourue me fuie de cette façon. J'étais dépité, pire que ça, j'étais en train de souffrir pour rien. Mais je n'eus pas le temps de m'apitoyer plus sur mon propre sort quand quelque chose de gelé s'effondra sur moi. De l'eau. Ses sillons dégoulinèrent dans ma nuque, s'infiltrant à l'intérieur de mes vêtements, glaçant mon corps et mon cœur. Je repoussai les mèches trempées m'obstruant la vue, un frisson me parcourant. Des éclats de voix retentirent près de moi, et des silhouettes se plantèrent face à moi.
- Eh ben, eh ben… même elle, elle te fuit, tu dois vraiment avoir la peste…
Je fixai mes interlocuteurs avec un regard haineux. Suigestu, Tenten et Kin. Trois fervents admirateurs du F4, je ne pouvais pas tomber sur mieux. Le seul garçon de leur groupe avait un seau à la main. Ses lèvres fines dévoilaient ses dents pointues, lui donnant un sourire carnassier. Quant aux deux filles, leur visage maquillé me faisait penser à de vulgaires pantins, mais des pantins cruels qui se jouaient de ce qui me faisait mal. Apparemment, être riche empêchait d'avoir un cœur, ou alors il était en or, et aussi froid que la pierre.
- Tu t'es sacrifié pour rien apparemment, renchérit Tenten en se retenant visiblement de rire. Elle n'est même pas reconnaissante, c'est dommage, hein ? Mais de toute façon, pas besoin de remercier quelque chose qui s'apparente plus à un animal qu'à un humain. Je ne sais pas trop à quoi me font penser tes espèces de cicatrices… Un phoque peut-être ?
- De toute façon, un pauvre dans ton style ne devrait même pas avoir sa place dans cette école, ce n'est pas plus mal que ce soit tombé sur toi. Tu fais aussi tache d'une merde sur une pelouse, ajouta Suigetsu.
Mes yeux restaient ancrés dans le regard bleu gris de mon opposant. Sa face moqueuse me démangeait sérieusement le poing, mais je ne devais pas aggraver mon cas. Mais celui-ci n'était-il déjà pas désespéré ?
- Il ne te reste plus qu'une chose à faire, conclut Kin d'une voix hautaine. Tu dois dégager d'ici. Allez, file ! répéta-t-elle en me faisant un geste de la main humiliant devant le visage, claquant des doigts comme on l'aurait fait avec une bête.
Ils partirent tous les trois d'un éclat de rire bruyant, grotesque, qui me fit tourner la tête. Sans même me retourner, je m'éloignai d'eux, battant l'air de mes jambes, retournant vers les profondeurs du lycée, vers le seul endroit où je pouvais encore faire éclater ma haine sans rien craindre. Je courus presque vers l'escalier de secours, et ouvris la porte d'un mouvement si brusque qu'elle percuta le mur. Je descendis les quelques marches menant au balcon et, appuyant mes mains contre la surface rugueuse de la pierre, je me penchai vers le sol. Ma respiration précipitée s'échappait bruyamment de mes lèvres, sans que je ne puisse la retenir. Et sans prévenir, mon poing s'écrasa contre la pierre. La douleur traversa à peine mes phalanges, j'en avais presque besoin pour ne pas craquer, pour penser à autre chose qu'à ses insultes gratuites et dégradantes.
Ce fut un coup qui partit, puis un autre, encore un autre alors qu'un cri naissait dans ma gorge. Un cri de colère, de rage, grave et presque animal. Une insulte, un coup, mes yeux étroitement fermés pour retenir les larmes qui menaçaient de couler. Mes mains douloureuses claquaient contre la pierre en bruits secs et eux-mêmes blessants. J'aurais tous voulu les frapper, leur faire ressentir le mal qu'il me faisait en leur rendant au centuple, cogner leur visage inhumain jusqu'à ce que leur sourire moqueur disparaisse. Je voulais qu'ils souffrent.
Au bout de quelques minutes, je parvins à me calmer, ne restant que mon souffle haché. Je me pris ma tête entre mes mains, prenant appui contre le rebord. De ma peau égratignée perlaient quelques gouttes de sang, une éraflure que je portai rapidement à mes lèvres.
- S'il te plait… arrête ça.
Je relevai aussitôt la tête, et fis volte face vers la personne à la voix profonde qui venait de parler. Je ne réussis à formuler aucun mot quand elle se releva des marches, et les remonta lentement pour s'arrêter à la petite plate-forme où je me situais. L'appréhension m'envahit peu à peu, mais la fureur circulant encore dans mes veines m'empêchait d'abaisser le regard devant la personne qui me faisait face : Gaara.
Il s'accouda au balcon et se mit à observer l'horizon, comme si je n'existais pas. Tout comme les autres membres du F4, il ne portait pas d'uniforme, mais un ensemble dans les tons rouge et noir, sang et ténèbres. Son regard turquoise fixait le vide devant lui, sans aucune expression. Ses traits impassibles ne changeaient jamais, je ne l'avais jamais vu sourire. De par ma curiosité, je me demandais pourquoi il était toujours comme ça, mais après tout, je m'en foutais ; il était comme les autres.
- C'est toi… qui te défoules toujours ici.
Ce n'était pas une question, mais bien une affirmation. Je ne lui répondis même pas, fronçant les sourcils en attendant la suite des évènements. S'il était là à chaque fois que j'avais une de mes crises anti-F4, alors il savait parfaitement ce que je pensais des personnes comme eux.
- Tu pourrais éviter de le refaire ? Cet endroit… c'est le seul lieu où je peux rester tranquille.
Je restai coi devant sa demande, que je trouvais déplacée. Mais encore une fois, je n'avais pas mon mot à dire. Je devais juste… obéir, comme le reste de l'école, face à leurs caprices. Je les détestais tous.
Avec lassitude, je tournai les talons. Ma démarche était lente, fatiguée, et un soupir s'écoula de mes lèvres sans que je ne le retienne. Mais quand j'arrivais à la dernière marche, j'entendis :
- Il finira par se lasser.
Je me retournai avec surprise pour le voir me rejoindre de sa démarche souple et nonchalante. Une nouvelle fois, il s'arrêta à côté de moi, mais cette fois-ci, il me regarda. Son visage était à la hauteur du mien.
- Sasuke finit toujours par se lasser, ajouta-t-il de son même ton monocorde, comme si rien ne pouvait le retirer de ses pensées sombres.
Et sans me laisser le temps de dire quoi que ce soit, il remonta les dernières marches et me laissa seul. J'attendis encore quelques secondes en silence, et m'en allai à mon tour.
Quand je rentrai chez moi le soir, je me sentais déjà plus léger. Etrangement, les paroles de Gaara m'avaient soulagé, même si il n'avait pas dit grand-chose. Mais c'était justement ça que j'avais apprécié. Ce gars était connu pour se foutre de tout, un désintérêt total de tout ce qui l'entourait. Et pourtant… on ne va pas dire qu'il m'avait réconforté, mais presque. En tout cas, à moi, ça me suffisait amplement. Il en fallait beaucoup pour me démoraliser, et un rien pour que tout aille mieux. Et ce rien s'était passé.
Mais dans ma bonne humeur retrouvée, je n'avais pas remarqué que derrière moi, quand je rentrai chez moi, une large voiture noire aux vitres teintées passait aussi par là, et ce n'était pas par hasard.
J'étais à l'heure ce matin là, et quand j'arrivais dans le hall, quelques personnes étaient encore présentes. Voyant que Sakura ou Kiba n'étaient pas parmi eux, je me dirigeai rapidement vers mon casier pour déposer mon panier repas. Mais quand j'ouvris la porte, je me reculai aussitôt, stupéfait, alors que des cris retentissaient autour de moi. Je trébuchai et tombai sur le sol, mes yeux grands ouverts. Des sifflements se firent entendre, et je fixai avec un étonnement et un dégoût visible la dizaine de serpents qui rampa hors du renfoncement, sortant de mes affaires et tombant au sol dans des bruits visqueux. Ils allaient loin, très loin.
- Merde, qu'est-ce que c'est que ce cirque ? murmurai-je, abasourdi.
C'est alors que j'aperçus des ombres devant moi, et me retournai, découvrant quatre garçons aux visages fermés. Je ne les connaissais pas, mais leurs silhouettes agressives me faisaient comprendre que eux avaient une dent contre moi.
- C'est vous qui…
Mais ils ne me laissèrent pas finir, et me relevèrent de force, me traînant à leur suite. Je commençai à me débattre, tentant de me dégager de leur prise. Mais celle-ci se raffermit, et l'un d'entre eux me frappa à la tête. Je retins avec peine un gémissement de douleur quand ils me lancèrent au milieu d'une salle : la cuisine du lycée. Je me retournai vers eux, frottant ma tête de ma main.
- Vous délirez ou quoi ? Qu'est-ce qui vous prend bordel ? m'écriai-je, furieux.
L'un d'entre eux fit un signe de tête aux autres, et c'est quand ils m'encerclèrent que je sus que j'étais mal barré. Ma respiration s'accéléra quand je serrais mon poing, prêt à me défendre. Mais ce qu'ils firent me désarçonna tellement que pendant un instant, de trop, je ne fus pas capable de réagir.
Ils m'attrapèrent tous les quatre, et me plaquèrent contre un des murs. Deux d'entre eux me tenaient les mains, pour être sûrs que je ne me défendrais pas. Sur le coup, je grognai un peu, tentant de me dégager mais je n'y parvins pas. J'attendis alors la ruade de coups, qu'ils me frappent parce que c'était ce qui était fait à tout ceux qui avaient reçus le carton rouge. C'était ça qu'ils faisaient normalement : le frapper, l'humilier devant tout le monde pour qu'il ait si honte que plus jamais il ne remettra les pieds à l'école. C'était ce que j'attendais, avec appréhension mais résignation. Jusqu'à ce que je ne sente une main sur la ceinture de mon pantalon.
Mon esprit tourna à toute allure, en même temps que je commençais à paniquer.
- M-merde ! Mais qu'est-ce que vous faites ?!
Je tentai de me débattre encore plus fort, gigotant en tout sens, de plus en plus effrayé, jusqu'à ce qu'un coup n'atterrisse en plein dans mon ventre. Mon souffle se coupa sur le coup, me faisant m'abaisser. Je sentis alors que mon pantalon était ouvert. Mes yeux s'agrandirent de pure terreur.
- LACHEZ-MOI !
Je me mis à hurler d'autant plus fort, la panique totalement présente dans mon sang, glaçant mes muscles. Leurs mains se resserrèrent, j'entendis des éclats de voix mais ne comprenais plus rien. Ma tête tournait, et je savais que la nausée n'était pas loin. C'était la première fois que j'avais aussi peur, et cette peur se répandait comme un poison dans mon corps. Je ne voulais pas même imaginer ce qui allait suivre, je continuais de tenter de les frapper, mais tout ce que je reçus fut une autre gifle sur ma joue.
- Qu'est-ce que vous faites ?
Le temps parut s'arrêter, alors que les types cessaient de bouger. Sans hésiter, je me dégageai de leur prise pour de bon, et titubai vers l'arrière jusqu'à rencontrer la fenêtre dans un bruit sourd. Mon corps était parcouru de spasmes, mon front couvert de sueurs froides. Je regardai sans réaliser à ma droite ce que les quatre mecs fixaient avec des yeux pareils.
Quelqu'un était allongé sur le plan de travail, les bras repliés sous la tête, fixant le plafond comme si cela avait été le ciel.
- C'est… c'est Uchiha-san qui nous a demandé de nous occuper de lui ! expliqua l'un des élèves, faisant de larges mouvements de bras.
Gaara tourna la tête dans leur direction, et dans un soupir, se redressa pour se remettre debout. Il remit en place ses vêtements froissés tout en leur ordonnant de sa voix posée :
- Dégagez de là.
- Mais si on ne le fait pas, il va nous…
- Dégagez je vous dis, l'interrompit-il avec un bruit de langue agacé. Je m'en occuperai.
Voyant que les types ne bougeaient pas, il releva son regard vers eux. Et il était si froid, si noir, que les autres n'eurent plus le choix, sinon c'était eux qui allaient y passer. Alors ils sortirent très vite de la salle, claquant la porte derrière eux. Mes muscles choisirent ce moment pour me lâcher.
Je tombai brutalement au sol, ressentis pourtant à peine la douleur dans le bas de mon dos. Avec des gestes fébriles, je refermai mon pantalon, rebouclant ma ceinture. Je me rendis alors compte à quel point ma respiration était bruyante. Je passai mes mains sur mon visage, constatant vaguement qu'il était humide au niveau des joues. Ma vue trouble se posa sur Gaara qui avait pris une chaise pour s'asseoir à côté de moi, même si son esprit semblait encore ailleurs.
Je tremblais, je tremblais de façon convulsive, je n'arrivais pas à m'en empêcher. Je me mordis le poing jusqu'au sang, remontant l'un de mes genoux contre moi pour y poser ma tête. Je ne voulais même pas formuler en pensée ce qu'ils avaient failli me faire, c'était tellement… Comment pouvait-on ordonner à des types de faire ça à quelqu'un, juste parce qu'il vous a dit « stop » ? De longues secondes passèrent, sans que la peur ne diminue enfin.
- L'escalier de secours est occupé, dit Gaara. Quelqu'un est en train de le nettoyer.
Je tournai mon visage vers lui, le fixant de mes yeux perdus. Finalement, j'entrouvris les lèvres, mais ma voix vacillait trop. Je me contentai d'un murmure.
- Me…merci…
- Ne te fais pas d'idée, contra-t-il pour autant, me fixant enfin. C'est juste que je n'aime pas leur manière de s'y prendre.
Il se leva alors, et pour la deuxième fois en deux jours, me laissa seul. Il me fallut bien plus de temps que la veille pour me reprendre, et quand j'arrivai en cours, la deuxième heure venait de commencer.
Chapitre 4 : Déclaration de guerre
Je marchais de long en large dans la pièce, tenant mon téléphone serré entre mes doigts crispés. Je ne demandais qu'une chose : pouvoir perdre pour de bon mon sang-froid légendaire pour frapper jusqu'à épuisement ces cloportes incapables. Je n'étais pas complètement furieux, non, et j'avais justement bien trop de fierté pour me laisser aller de cette façon à mes sentiments, quels qu'ils soient. Cependant, il était vrai que cette fois-là, je n'aurais pas demandé mieux que de les attraper par la nuque pour les ruer de coups au sol, tout en leur hurlant ma colère. Ma main libre cramponna le dossier de chaise face à moi, si fort que mes jointures déjà blanches d'habitude semblèrent se vider de leur vie. Je me mordis la lèvre dans un effort de contrôler ma voix, même si j'étais sûr de les faire se pisser dessus si je me mettais réellement en colère contre eux. Ils y avaient déjà goûté la veille. J'avais suivi cet imbécile heureux, ma nouvelle cible, quand il rentrait chez lui pour vérifier que tout se passait bien comme je l'attendais. Et ça avait été loin d'être le cas. Il n'avait même pas paru affecté, comme si il était rentré d'une journée normale de cours. Je ne pouvais pas l'accepter. Ces quatre élèves s'en étaient bien rendus compte, surtout quand j'avais écrasé mon poing dans leur ventre, l'un après l'autre. Je leur avais donné l'ordre de lui pourrir la vie aujourd'hui, de l'affecter suffisamment pour être sûr qu'il m'implorerait le lendemain à genoux. Mais ils avaient encore une fois échoué, et je ne risquais pas de voir le microbe se prosterner demain.
- Uchiha-sama ? murmura la voix tremblante au bout du fil.
Je savais que je l'effrayais, et tant mieux : tant qu'ils me craignaient, ils me respectaient. Et c'était ce que j'aimais, qu'on me respecte, et qu'on obéisse aux ordres.
- Comment ? fut la seule chose que je parvins à lui demander sans pour autant éclater purement et simplement.
- Gaara-san est intervenu avant qu'on lui fasse réellement peur, expliqua-t-il très vite, pensant sans doute que ma colère se dirigerait finalement vers l'autre. On s'apprêtait à lui porter le coup de grâce quand il nous a dit de partir. On… on lui a expliqué que c'est vous qui nous aviez dit de nous occuper de lui, mais il ne voulait rien entendre et on…
Je lui raccrochai au nez, ne daignant même pas lui adresser à nouveau la parole. Il ne le méritait pas. J'enfilai mon portable dans ma poche, passant ma main dans mes cheveux ébènes. Gaara allait entendre parler de moi, ça, je pouvais vous l'assurer. Déjà qu'il ne cesse de partir quand le F4 était à l'œuvre m'agaçait profondément, mais qu'en plus il intervienne dans ces affaires-là, je ne pouvais pas le tolérer.
Un bruit de porte sur ma droite m'interrompit dans mes pensées. Mon regard froid se tourna vers le bruit de pas, et mon menton se releva très nettement. Mon orgueil était encore plus important à mes yeux quand lui était dans la pièce.
Il finissait une conversation avec un partenaire américain. Sa voix résonnait dans toute la pièce, et ses chiens de gardes le suivaient bien docilement, comme de beaux toutous. Quand il eut enfin raccroché, il se tourna vers moi et son expression ne changea même pas alors que cela faisait presque six mois. Six mois qu'il ne m'avait pas parlé.
- Tu es là ? se contenta de me dire Uchiha Fugaku.
- Apparemment, pourquoi ? La pièce n'est pas assez grande pour deux ? ironisai-je.
Ce salon équivalait à plus de deux salles de classe.
Ebisu, le secrétaire de mon père, annonça d'une voix formel que le repas allait être servi dans la pièce d'à côté. Je précédai mon père, décidant de l'ignorer. C'était ce qu'il y avait de mieux à faire, rien n'était assez bien pour lui. A part peut-être …
La table devait faire cinq mètres de long, pour deux personnes, et nous étions l'un en face de l'autre. Autant dire que je ne voyais même pas ce qu'il avait dans son assiette. Mais mon géniteur aimait particulièrement cette ambiance strict et impersonnelle, comme lorsqu'il dînait avec ses partenaires. J'avais l'impression d'être comme eux, un être qui pourrait lui servir d'une manière ou d'une autre plus tard, mais qui se devait de rentrer dans le rang. Quelle différence entre son fils et ses collaborateurs ? Aucune, sauf l'ADN. Et aussi cette froide distance qui était devenue pour moi aussi la seule façon de communiquer avec le reste du monde. La seule chose qu'il m'aura apprise.
Ses hommes de mains étaient disposés autour de nous, regardant leurs maîtres manger comme de braves animaux de compagnie. Mon père me fixait, sans rien dire. Il me jaugeait, m'observait, cherchant une faille dans mon apparence parfaite, parce que je la travaillais cette perfection. Le résultat était juste… parfait. De ce fait, aucun mot n'était échangé, il y avait juste cette sensation d'être épié, comme un animal dans sa cage. Mais je m'y étais habitué depuis le temps, comme si c'était nouveau pour moi ! En tant que cadet, je n'avais pour le moment qu'un seul devoir : être irréprochable, supérieur, faire honneur à mon nom et à ma famille. Parce que nous, nous étions supérieurs. Les Uchiha se devaient d'être parfait, pour marquer encore plus cette différence entre nous et les autres. C'était le discours que j'entendais, inlassablement, à la moindre erreur. Je le connaissais par cœur au final, l'ayant entendu encore et encore. A la fois je le trouvais ridicule, à la fois une partie de moi y croyait.
Supérieur…
Mon père posa avec bruit sa fourchette sur la table. Il regarda Ebisu, son secrétaire particulier, et ordonna :
- Le cuisinier, maintenant.
L'homme qu'il avait interpellé s'inclina légèrement avant de sortir de la salle. Le silence continua, persista, seuls mes propres bruits de mastications venaient le troubler, mais à peine. Le son était léger, aucunement dérangeant.
Irréprochable…
Le cuisinier, dans son uniforme de travail d'un blanc impeccable s'inclina à son tour devant mon père, alors qu'Ebisu reprenait sa place.
- Vous m'avez demandé, Uchiha-sama ?
- Vous êtes remercié, dit seulement mon père.
Le cuisinier, troublé, hésita un instant sur le sens de la phrase de mon père : celui qu'il souhaitait avoir compris ou celui qui l'effrayait à l'idée de l'avoir compris. Mais quand le chef de maison poussa son assiette en disant qu'on pouvait jeter ces ordures, l'employé sut. Continuant de manger, je regardai avec indifférence les épaules de l'homme se voûter, alors que Fugaku Uchiha regardait déjà ailleurs. L'affaire était close pour lui, elle avait été réglée de manière nette et précise. Tranchante comme une lame. Il reposa ensuite son regard sur moi pendant qu'on emmenait l'homme, et je fis comme si je ne l'avais pas remarqué. Ses yeux me brûlaient, mais je continuai mon repas calmement, ignorant le test muet et le regard perpétuellement en attente de la moindre erreur. Mais dès que j'eus fini, sans même m'excuser, je me levai et m'apprêtai à sortir de la pièce.
- Ton frère à ton âge avait des choses plus importantes que les sorties dans la tête.
Je me stoppai, sans pour autant me retourner. Ma mâchoire se serra d'elle-même, mes poings se crispèrent.
- Je ne suis pas et ne serai jamais Itachi.
Puis sans rien ajouter d'autre, je sortis de la pièce.
Une vingtaine de minutes plus tard, j'arrivais à l'Eros Club. Je descendis de ma voiture sans laisser au chauffeur le soin d'ouvrir la porte. De mon pas souple, malgré mon irritation, je dépassai la longue file attendant d'entrer dans la boîte pour me diriger directement vers les portes. Quelques exclamations mécontentes, peut-être même une ou deux insultes, retentirent à mon passage. Un seul de mes regards suffit à faire taire les protestataires. Quand j'arrivai à l'entrée, le videur, un dénommé Hoshigaki Kisame, un proche de mon si grand frère Itachi, me laissa entrer avec un sourire amusé. Il avait vu mon visage, avait tout de suite compris l'humeur dans laquelle j'étais. Je pénétrai dans le club.
Les spots de couleur et les flashs soudains de lumière étaient la seule source d'éclairage sur la piste de danse. Une marée humaine se déchaînait sur le son électro, criant à qui mieux mieux, buvant des verres aux couleurs fluorescentes. Cet endroit était partagé en deux établissements. D'un côté, la boîte de nuit, ouverte aux majeurs uniquement, de l'autre, un endroit beaucoup moins convenable, moins connu aussi.
Je traversai rapidement la salle en direction du bar, évitant le plus possible que les gens me touchent, ce qui n'était pas aisé vu leurs déhanchements exagérés et pitoyables. Je surprenais des coups d'œil, des bouches humidifiées nerveusement à mon passage, des cheveux recoiffés, des gloussements, mais je m'en contrefichais. J'en avais l'habitude. J'étais beau, et je le savais parfaitement. Je savais que ma peau laiteuse leur donnait envie de me lécher tout entier, je savais qu'ils auraient aimé plaquer mes lèvres froides contre les leurs, impatientes, tout en me retenant par mes cheveux charbon. Je connaissais leurs envies à mon égard, c'était un effet que je provoquais à chacun de mes passages, partout. J'exécrais cela.
Leurs regards lubriques posés sur moi me donnaient la nausée, leurs mains moites et puantes m'écoeuraient de la même façon que la merde. Je détestais les contacts, plus que tout. Je détestais sentir le corps des gens proche du mien, sentir leur odeur, leur sueur, les regarder s'imaginer que j'étais dans leur lit, sur eux, les voir me déshabiller mentalement, homme et femme. Les seules fois où je supportais les contacts d'étrangers, c'était quand mon poing entrait en contact avec leur joue. Autrement, les éviter était devenu pour moi une nécessité. Je ne supportais que peu de personnes, et même celles-là m'agaçaient parfois. Misanthrope ? Vous pouviez le dire oui.
Les types baraqués gardant la porte noire en métal à côté du comptoir s'écartèrent d'un même mouvement à mon arrivée, l'un d'eux me l'ouvrant. Je montai les marches avec agilité et rapidité, et passai le dernier barrage avant notre salle réservée. Quand j'entrai dans la pièce aux lumières tamisées, aux murs recouverts de velours violet sombre, aux larges canapés pourpres et au bar disposé au fond de la pièce, je me détendis un peu. Mais cela fut de courte durée quand je vis que la personne que je souhaitais voir n'était pas là.
- Regarde ce que j'ai pour toi Neji-kun !
Je tournai mon regard vers une des tables près de la fenêtre côté boîte de nuit. On pouvait voir à travers la grande vitre la scène où était le DJ, les gens « dansant », la boule à facettes fixée au plafond.
Neji déplia le papier, et même si je ne pouvais lire de ma place, je savais de quoi il s'agissait. Un rictus moqueur étira légèrement mes lèvres ; cette femme s'était faite avoir, comme toutes les autres. Mon ami lui faisant face lui sourit de toutes ses dents et se releva légèrement pour l'embrasser malgré la table les séparant.
- On a vraiment passé du bon temps ensemble, lui dit-il. Merci, c'était vraiment génial.
- Hein ?
Puis avant qu'elle ne réagisse, il lui avait pris le bras pour la traîner vers la sortie. Je partis m'asseoir sur un des fauteuils, face à Saï lui aussi occupé avec une demoiselle, pendant que Neji confiait la femme criante, suppliante, aux videurs, leur ordonnant de la sortir comme il l'aurait fait pour un sac poubelle. A peine la porte fut-elle fermée qu'il était déjà assis à côté de moi, satisfait.
- Vraiment Neji, commença Saï avec un sourire froid, ça ne se fait pas de traiter les femmes de cette façon.
- Moi au moins, je ne sors pas avec sept en même temps.
La jeune fille dans les bras de Saï se redressa et le regarda, une lueur colérique dans les yeux.
- Sept filles ? ça veut dire quoi ? On n'est pas censé sortir ensemble ?
- Nous ? Mais pas du tout. Tu me sers juste à passer le temps de façon sympathique, répondit-il comme si cela paraissait évident.
Pendant un instant, la demoiselle beaucoup moins câline d'un seul coup resta la bouche ouverte, stupéfaite. Et sans rien dire, elle prit son sac à côté d'elle et sortit, furieuse. Saï ne tenta même pas de la retenir et se tourna vers Neji.
- A cause de toi, il ne m'en reste plus que six…
- Ce n'est pas de ma faute si tu manques à ce point de tact.
- Je ne manque pas de tact, je dis les choses telles qu'elles sont. Pourquoi devrais-je mentir ?
- Parce que parfois, mentir ça permet de…
- Ça suffit, les interrompis-je, agacé par leur discussion.
- Tiens, Sasuke ! fit Saï, paraissant me remarquer seulement maintenant. Tu es tellement silencieux que je ne t'avais pas vu.
Je tapai du poing contre la table basse, et ses yeux s'agrandirent un instant, surpris. Neji mit son bras autour de mes épaules, mais je me dégageai, agacé.
- Oh, du calme ! Qu'est-ce qui te prends, t'es bien énervé ce soir…
- Où est Gaara ?
- Gaara ? Il n'est pas venu, répondit le brun aux cheveux courts. En même temps, il est doué lui aussi pour se faire oublier quand il en a envie.
Saï ne remarqua même pas mon regard noir, trop occupé à s'appliquer à sourire presque naturellement.
- Pourquoi, tu as un problème ? s'enquit Neji.
Je me relevai un peu brusquement, et me dirigeai vers la deuxième vitre de la salle, celle donnant sur la deuxième activité du club. J'observai un instant les filles qui se déhanchaient à l'aide de barres métalliques sur la scène, pour certaines à moitié nues. Les serveuses aux tenues aguicheuses voyageaient entre les tables des clients, un sourire forcé sur leurs lèvres que je devinais d'un rouge sang.
- Il a gâché un de mes plans, les informai-je de ma voix grave, contrôlée.
- Et alors, c'est si grave que ça ? demanda Saï.
Mais le regard que je lui offris en guise de réponse suffit à faire disparaître ce sourire véritablement débile qu'il affichait quasi vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
- Je crois… qu'une petite partie de billard s'impose ! lança Neji d'une voix enjouée en se relevant.
Il me fit alors un signe de la tête et j'acquiesçai. Deux minutes plus tard, nous étions dans le sous-sol désert du club, Neji et Saï commençant une partie à deux à la lumière faible des lampes au-dessus de leurs visages à la peau claire.
- Alors, c'est quoi ton problème ? fit le premier.
- Mon problème ? C'est l'espèce de blondinet qui me tient tête ! m'exclamai-je en plaquant mon bras contre le mur.
La musique nous parvenait à peine, étouffée par les épais murs de la salle.
- Ce n'est pas si grave, c'est vrai que cette pauvre fille t'avait juste…
Un bruit de verre cassé retentit, et mes amis posèrent leur regard sur l'assiette que je venais de briser brutalement à l'aide de l'extrémité d'un bâton de billard.
- Je ne supporte pas qu'on me résiste, parlai-je lentement, détachant bien chaque syllabe pour que cette idée finisse par leur rentrer dans le crâne.
Je n'aimais pas les situations qui m'échappaient. Je ne jurais que par le contrôle que j'avais sur ma vie, et il devait être absolu, complet, que cela concerne mon attitude, mon visage, mes pensées, tout devait être contrôlé à la perfection, et cet individu trop bruyant m'en empêchait. Cette situation m'obsédait à tel point que j'en avais mal à la tête. Alors non, ça n'allait pas. A chaque fois que je tentai de fermer les yeux, c'était ses yeux qui m'apparaissaient, trop grands, beaucoup trop bleus. Son visage décidé me faisait serrer les dents, et je détestais ces espèces de cicatrices qu'il avait sur les joues. Sa détermination m'agaçait, et j'avais juste envie de le faire souffrir, de le blesser pour qu'il abaisse son regard devant moi, et qu'il reconnaisse qui dominait, qui était le chef. Je voulais le faire plier, une fois pour toutes.
- Tu ne penses pas que tu prends ça un petit peu trop au sérieux ? tenta une dernière fois Neji. Les choses finiront par se tasser, et les élèves oublieront l'incident comme si rien ne s'était passé.
- Il n'en est pas question. Je m'en occuperai moi-même, et dès demain.
Mes deux amis posèrent leurs regards sur moi, mais je savais que même si ils n'étaient pas d'accords, ils n'interviendraient pas.
Iruka et moi dînions silencieusement. Même si les évènements d'aujourd'hui m'avaient effrayés, je ne comptais pas me laisser faire, ni même me laisser abattre. Ce n'était pas dans mon tempérament. Je devais toujours me relever, toujours faire face à mes adversaires et leur prouver que moi aussi, je valais quelque chose. Que même si je n'étais pas riche, que j'avais une intelligence moyenne, je ne leur étais pas inférieur parce que j'avais d'autres qualités. Ils finiraient un jour par le reconnaître, tous autant qu'ils étaient, et même ce Sasuke qui méprisait tout le monde. Lui aussi finirait par le voir, parce que je continuerai à me battre contre lui.
- Tu es bien silencieux ce soir Naruto.
Je me tournai vers mon tuteur. Son visage à la peau légèrement brune me fixait avec une lueur préoccupée dans les yeux, et ses sourcils étaient froncés au-dessus de sa cicatrice traversant son nez.
- Ouais, je suis un peu fatigué. Une bonne suit de sommeil et tout rentrera dans l'ordre, assurai-je avec un grand rire.
- Tu es sûr ? Tu as des problèmes à l'école ? Déjà hier tu n'étais pas en forme…
- Non, non, les cours se compliquent un peu, et comme je suis concentré toute la journée, je pense qu'à une chose en rentrant : dormir.
- D'accord…
Il se tut quelques instants, avant de rajouter :
- Tu sais que tu peux tout me dire ?
- Oui, ne t'en fais pas !
Mais voyant qu'il me regardait encore (il était parfois aussi obstiné que moi), je finis par dire :
- Parfois, ce n'est pas très facile… de ne pas avoir d'argent dans un lycée pareil.
- Ah, je vois. Mais tu sais, pense qu'au final, tu as peut-être plus de chances qu'eux. Avoir tout ce que l'on veut n'est pas pour aider, et beaucoup tournent mal à cause de ça. Ils ne savent pas ce qu'est la vraie vie. Toi, tu le sais. Toi, tu as vécu beaucoup de choses, qui t'ont rendu comme tu es maintenant. On peut dire que dans un sens, cela a fait de toi un homme riche, riche de tes expériences, bonnes ou mauvaises. Ne les laisse pas te dénigrer sans te battre, si c'est ça le problème, et je suis sûr que tu parviendras à leur ouvrir les yeux sur ce que tu es vraiment. Tu es quelqu'un de bien Naruto, même à ton âge, et j'ai confiance en toi pour faire les bons choix.
Je souris en baissant les yeux sur mon repas. Iruka avait raison. J'avais beau ne pas être riche, je ne me sentais pas pauvre, parce que je savais que je possédais les choses les plus importantes dans une vie. Une famille, même brisée, des gens sur qui compter et qui comptaient sur moi. Je n'étais pas pauvre, et j'allais le leur prouver.
- Merci Iruka.
- De rien mon grand. Maintenant, finis vite ton riz avant qu'il ne soit froid. Pour une fois qu'on mange autre chose que des ramens, profites-en.
J'acquiesçai, et me remis à manger. Le repas se termina sur nos voix qui riaient de concert.
La matinée était déjà finie, et rien n'était encore venu troubler ma journée à part les phénomènes habituels. Je venais de m'asseoir à table, seul, et regardai les élèves autour de moi. Le self était composé de deux étages. Celui du bas, où mangeaient les simples élèves entre midi et deux, et un deuxième, dont l'escalier démarrait au centre de la pièce. Ma table était au bas de cet escalier, malgré le fait que le deuxième niveau était réservé à un groupe d'étudiant bien précis : le F4. Pourquoi ne mangeaient-ils pas au milieu des élèves ? Sans doute à cause de leur supériorité. Nous étions tous dans la même salle, mais leur espace était surélevé par rapport au nôtre, accentuant le fait que malgré la majorité d'élèves de bonne famille, eux ne faisaient pas partie du même milieu que nous. Cela avait toujours été ainsi.
Je poussai un soupir, et entrepris d'ouvrir mon obentô. Quand je découvris son contenu, mes yeux s'écarquillèrent d'émerveillement. Une grande langoustine, qui reposait sur un lit de légumes. Elle était bien différente des crevettes séchées auxquelles j'avais eu droit la dernière fois. Celle-là paraissait appétissante, et je pensais à Iruka, aux efforts qu'ils faisaient pour moi. Je me promis de le remercier comme il se devait ce soir, et de faire en sorte qu'il arrête de s'inquiéter pour moi.
- Naruto !
Je relevai mes yeux pour découvrir Kiba et Sakura qui marchaient d'un pas rapide dans ma direction. Leur visage paraissait peiné, et je remarquai que la démarche du garçon était un peu cassée. Je savais de quoi ils voulaient parler. Arrivés à la table, mon ami me demanda de sa voix déterminée :
- Pourquoi est-ce que tu nous évites ?
- Je crois qu'en ce moment, ce n'est pas forcément bon pour vous de rester avec moi, expliquai-je en leur souriant, cachant du mieux que je pouvais le fait que cette distance que je mettais me rendait un peu malheureux.
- Naruto, espèce d'idiot !
Sakura s'assit dans un grand fracas face à moi, et je vis à ses lèvres pincées et à ses yeux brillants qu'elle se retenait de verser des larmes. Un pincement à mon cœur me fit comprendre que je m'en voulais de la mettre dans cet état.
- Depuis combien de temps est-ce que l'on se connaît ? continua-t-elle de la même voix rapide, attristée. Plus de dix ans ! Et toi, jamais tu ne m'as laissée tomber. Tu m'as toujours défendue et soutenue, alors pourquoi tu ne nous laisses pas faire la même chose pour toi ?
- Sans doute parce que nos ennemis ne sont pas des gamins en mal d'actions cette fois, ris-je un peu tristement. Je n'ai pas envie de vous voir plonger avec moi…
- Ça, c'est à nous de décider, rétorqua Kiba en prenant place à côté de Sakura. Carton rouge ou pas, on ne te lâchera pas. Désolé, mais tu vas devoir faire avec nous pendant encore un bon bout de temps.
Et sans me laisser le temps de dire quoi que ce soit, il déballa son repas et commença à manger avec des gestes un peu brusques, ce qui lui valut de faire tomber une boulette de viande par terre. Il la ramassa en maugréant, mais son regard toujours décidé finit de me dérider. Sakura m'observait toujours de ses émeraudes inquiètes, alors je leur dis tout simplement :
- Merci.
Kiba s'arrêta de manger comme un porc, et me fit un sourire gêné avant d'hocher la tête. Sakura commença à son tour à manger, rassurée. Jusqu'à ce qu'une ombre ne se dessine à côté de nous.
Le bruit des chaussures sur le sol me renseigna sur l'identité de la personne qui venait juste de s'arrêter à côté de moi. Je déglutis, ne levant pas mon regard vers lui, mais le laissant sur mon repas pas encore entamé. La tension dans la pièce venait d'augmenter de manière radicale, tous attendant qu'il prononce enfin quelque chose.
- Un pauvre… qui tente vainement d'imiter ceux qui lui sont supérieurs.
Des mains aux longs doigts clairs vinrent se saisir de mon panier repas. Je le regardai alors pour plonger dans une haine et un dégoût purs qui me laissèrent bouche bée. Comment pouvait-on haïr autant en gardant un visage aussi… figé ? Seuls ses yeux d'un ténèbre profond révélaient ses sentiments violents… à mon égard. Je ne les méritais pas. Je ne le connaissais même pas ! Comment arrivait-il à ressentir ça pour moi alors que je ne lui avais parlé qu'une seule fois, qu'il ignorait qui j'étais ? Que je ne lui avais jamais rien fait ?
- Mais un seul regard suffit pour voir que tout cela n'est rien d'autre qu'un déchet !
Et au fur et à mesure que sa voix rauque prenait en ampleur, ses bras se levaient pour finir par balancer avec force sur le sol le repas que Iruka m'avait préparé. Le bruit me fit tressauter, tout comme Sakura qui poussa un petit cri face à moi.
La respiration de Sasuke était précipitée, alors que la mienne s'était tout simplement interrompue. Mon regard rivé sur le sol, je tentai de comprendre. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'il faisait tout cela contre moi ? Qu'est-ce que je lui avais fait à la fin ?!
Je me laissai tomber par terre, commençant à ramasser ce qui finirait aux ordures. La bouche sèche, je ramassai les légumes salis, et quand mes doigts se tendirent pur attraper le fruit de mer, une chaussure brillante l'écrasa contre le sol, m'écrasant tout à la fois. Ce fut le déclic.
Il s'écarta un peu, et héla ses amis à l'étage du dessus. Je les entendis parler, mais ne comprenais rien de leur parole. Je serrai mes poings jusqu'au sang. Et quand je le vis tourner les talons pour partir, mes lèvres s'entrouvrirent d'elles-mêmes :
- Attends.
Il s'arrêta, et se tourna dans ma direction. Je me relevai lentement, et me tournai dans sa direction. Je sentis une main prendre mon bras pour me tirer en arrière, m'empêchant de commettre ce qui pourrait être une folie, mais me dégageai. Il n'était pas question que je le laisse repartir, pas après qu'il ait fait ça.
Son expression glacé fit face à la mienne, sans doute plus rouge qu'habituellement. Rouge de colère. Je me rapprochai d'un pas, et ne me laissai pas démonter par son aura suffisante.
- Tu es persuadé d'être supérieur à tous ceux qui sont dans cette pièce, mais tu veux que je te dise, quelqu'un comme toi ne sait même pas ce qu'est la vie. Tu n'as jamais rien fait pour gagner le droit de vivre ! Alors tu sais quoi ?
D'un geste rapide de bras, je remontai mes manches, gardant mes poings tendus au niveau de mon torse. Je m'étirai rapidement la nuque, le fixant de mes yeux rageurs. Ça allait faire mal.
- Tu peux aller te faire foutre !
Ma main percuta sa joue dans un claquement sec, et il tomba au sol. Des cris retentirent autour de nous, mais tout ce que je vis, ce fut son expression ahuri quand il releva son visage vers moi. Ses doigts pâles allèrent trouver sa lèvre en sang, le rouge carmin luisant faiblement sur la peau diaphane.
- C'est une déclaration de guerre ! lançai-je en le toisant de toute ma hauteur. Alors maintenant, tu viens te battre si tu as des couilles.
Je le fixai encore un instant de mon regard furieux, mais il ne bougea pas, continuant juste de me regarder de ses yeux stupéfaits. Je ramassai avec des gestes pressés mes restes de repas, refermai mon obentô, et jetant un coup d'œil à Sakura et Kiba déjà prêts, nous sortîmes du self. Les élèves se décalaient à notre passage, n'osant rien me dire, sans doute de peur de subir le même sort. Et étant donné que ma colère ne s'était pas encore calmée, c'était bien ce qui risquait de leur arriver.
Encore maintenant, alors que je sortais de chez moi pour aller à mon travail après les cours, je n'arrivais pas encore vraiment à réaliser ce que j'avais fait. J'avais foutu mon poing dans la lèvre du roi du lycée, du fils du plus grand homme d'affaires que le Japon n'avait jamais connu, et dont l'activité était mondiale ! Je l'avais frappé, et insulté. Soit j'étais fou, soit mon courage était bien plus grand que ce que je m'imaginais. Kiba, une heure après, était encore mort de rire, et m'envoyai dans la classe des boules de papiers rapportant les exactes paroles que j'avais dites plus tôt. Quant à Sakura, malgré la peur qu'elle avait ressentie sur l'instant, elle m'avait félicité pour ma contre-attaque. Je voyais bien à son visage qu'elle avait peur sur ce qui allait se passer ensuite, je ne savais pas moi-même ce qui allait arriver, mais elle n'en dit rien. La victoire sur cette bataille avait un goût sucré, malgré le regard d'Iruka quand il avait vu que la boîte contenant mon repas avait une fissure sur le côté. Je lui avais raconté que je l'avais envoyé dans la tête de Kiba, mais que ce chien avait la tête dure.
Je tournai à l'angle de la rue, arrivant dans une impasse un peu déserte. J'avais presque envie de chanter, de monter sur une poubelle pour me déhancher comme une fille juste pour apprécier ma victoire. Mais je n'en fis rien et continuai mon chemin. Un bruit de klaxon résonna derrière moi, et avec curiosité, je me retournai. Ce fut une erreur.
Avant que je ne réagisse, trois hommes en costards et lunettes noires m'avaient attrapé par les bras, me plaquant contre l'un d'eux. On posa fermement un tissu sur mon nez et ma bouche, et mes yeux s'agrandirent quand je réalisai de quoi il s'agissait : chloroforme. Mon esprit commençait déjà à me lâcher, et mes gestes pour me dégager de leur prise étaient de plus en plus faibles. Et la seule chose que j'aperçus avant de fermer définitivement les yeux furent une voiture noire aux vitres sombres et à la forme agressive, ainsi qu'un visage indifférent et des orbes sombres.
Chapitre 5 : Le pouvoir de l'argent
La première impression que j'eus lorsque je commençai à émerger, c'était que ma tête allait exploser. Un mal de crâne douloureux frappait à l'intérieur de mes tempes comme si quelqu'un s'amusait à me tabasser à coup de marteau. Ma bouche était pâteuse, et je me raclai la gorge, j'avais l'impression que j'allais m'étouffer. Avec lenteur, mes paupières s'entrouvrirent, une fois, puis deux, et je remarquai une chose : il y avait de la musique qui battait à mes tympans. Bon sang, mais qu'est-ce qu'il s'était passé ?
Je commençai à remuer, constatant avec la même vitesse lente que j'étais assis… sur un fauteuil. Je me sentais nauséeux, fatigué, et pas frais du tout. Je remontai ma main à mon crâne, massant doucement ma tempe en espérant calmer la douleur. Il fallait que je me réveille plus vite, je ne me rappelais même plus de ce qu'il s'était passé ! Bon sang, souviens-toi Naruto, souviens-toi ! Je devais aller à mon travail après les cours, et quand j'avais emprunté une ruelle, il y a eu… des types ! Des types qui m'ont emmené avec eux. Et après, il y avait autre chose, mais quoi ?
D'un coup, je rouvris mes yeux, la respiration précipitée. Sasuke, Sasuke était là, dans sa voiture ! C'était ses hommes qui m'avaient… quoi ? Kidnappé ? C'était ridicule ! Je suis un mec, merde !
Mon regard fixa la salle dans laquelle je me trouvais : bar, murs violet sombre, fauteuils rouges. Je regardai vite fait devant moi, pensant être seul. Quand mes yeux furent attirés par un mouvement à ma gauche.
- Enfin réveillé ?
Je scrutai rapidement la longue silhouette qui venait d'apparaître devant moi. Sasuke, en costard noir et chemise de la même couleur. Seule sa peau aussi blanche que la neige ressortait dans son apparence si… obscure. Ses lèvres pâles souriaient légèrement, enfin, si on pouvait appeler cette légère grimace un sourire, et ses yeux d'encre me regardaient fixement, attendant une réaction. Il avait un verre d'alcool à la main. Le grand Sasuke dans toute sa splendeur.
- Je suis où ? demandai-je.
Ma voix était un peu rocailleuse, et je dus m'y reprendre à deux fois pour qu'il m'entende distinctement.
- Au club Eros, m'informa-t-il de sa même voix monocorde, indifférente.
Le club Eros… j'en avais déjà entendu parler pleins de fois par Kiba qui rêvait littéralement d'y aller. Mais il était strictement réservé aux personnes majeures sinon friquées, deux bonnes raisons pour que l'entrée nous y soit interdite. Enfin, normalement.
Je lui lançai un regard montrant que je ne le suivais pas, et il me désigna les deux vitres nous séparant apparemment des pièces où les clients avaient le droit d'aller. Avec précaution, je me relevai du fauteuil, soutenant encore ma tête. Je me dirigeai vers celle de droite pendant que Sasuke continuait de parler, marchant à côté de moi comme s'il y a quelques heures, je ne lui avais pas foutu un coup de poing en pleine figure. D'ailleurs, après une rapide vérification, sa lèvre rose était à peine marquée. Au moins, il ne pourrait pas m'accuser de l'avoir défiguré…
- Cette pièce est réservée exclusivement aux membres du F4, et de leurs invités. Ici, dit-il en me désignant de son verre l'endroit où je voyais la foule danser au rythme de la musique bruyante, c'est le côté boîte de nuit du club. Et là-bas…
Il se retourna et m'indiqua de le suivre. Je lui obéis, docile pour une fois, et surtout curieux de savoir pourquoi il m'avait emmené ici, dans quel but.
Je m'approchai de la deuxième vitre, et ce que j'y découvris me fit froncer les sourcils. Je voyais une scène où une fille, sans doute à peine plus âgée que moi, se déhanchait vulgairement au centre, enlevant peu à peu les fringues d'infirmière qu'elle portait. Dans le reste de la salle, des tables rondes accueillaient des hommes, la plupart en costume, qui accostaient des hôtesses ou observaient d'autres filles faisant un numéro de pool-dance.
- C'est le côté boîte de strip-tease, tu dois t'en douter. Un marché complètement légal d'un côté, et un autre qui tient si tu as quelques amis flics ou simplement puissants…
Il me laissa continuer d'observer le « spectacle », et je me retournai quand je l'entendis s'asseoir. Il me montra le fauteuil dans lequel je m'étais réveillé, face à lui, et je m'y assis, un peu paumé et pas encore complètement réveillé pour protester. Je n'aimais pas trop se plier à ses exigences, aussi petites soient-elles, mais autant au lycée je me sentais encore à l'aise, autant ici, je n'étais absolument pas sur un territoire connu.
- Pourquoi… est-ce que tu m'as amené ici ? Et comment cela se fait-il que toi-même tu puisses y entrer, alors que tu n'es même pas majeur ?
- C'est justement là où je voulais en finir, déclara-t-il en plantant ses yeux profonds dans les miens.
Malgré moi, j'eus l'impression que son regard pouvait littéralement me transpercer, et cela me flanqua un frisson. Je n'étais pas vraiment à l'aise ici, ce n'était pas mon milieu.
- Tu vois, commença-t-il en portant le verre à ses lèvres, se contentant de jouer distraitement avec, cette idée que tu as… de vouloir te battre contre moi, tu ferais mieux de la laisser tomber.
- Et pourquoi ça ? fis-je en haussant les sourcils, un peu sarcastique.
- Tu sais, rien que faire miroiter mon nom me permet de fréquenter ce genre d'établissements. Pourquoi à ton avis ?
- L'argent, devinai-je.
- Pas seulement. La notoriété aussi, le pouvoir. Ce que mon père a fondé serait capable de foutre à la porte n'importe quel salarié de n'importe quelle société dans ce pays.
- Heureux pour toi, je ne vois toujours pas en quoi ça me concerne.
Un rictus naquit sur ses lèvres et, se penchant légèrement sur le côté, soutint son menton de ses doigts, cachant légèrement sa bouche. Son visage se tourna vers la fenêtre de gauche, celle représentant les frasques nocturnes et sans doute condamnables du Eros Club. Il revint ensuite à moi, une expression sérieuse durcissant ses traits pourtant fins.
- Si tu veux, tu pourrais choisir une fille d'ici, je pourrais faire en sorte que tu l'aies dans ton lit ce soir.
- Je te demande pardon ? m'exclamai-je, interloqué.
- Ou un mec si tu préfères, ajouta-t-il, désinvolte. N'importe qui, je pourrais te l'obtenir sans problème.
- Attends, tu joues à quoi là ? continuai-je, toujours aussi stupéfié et de plus en plus écoeuré.
- Des fringues, une voiture, du cash, et même de la drogue si c'est ton truc. Peu m'importe, quoi que ce soit, je te le procurerai sans problème. A la condition que tu cesses de me résister.
Sa voix était tellement sûre d'elle que pendant un instant, je pensai à une blague. Il ne pouvait pas être sérieux quand même ?
- Tu essayes de m'acheter ? demandai-je en me redressant sur le fauteuil.
- C'est ça, confirma-t-il.
Il but une gorgée de son verre, et sa langue récolta une goutte de boisson à la commissure de ses lèvres. Etrangement, mes yeux avaient suivi le mouvement, légèrement hypnotisé. Il ne le remarqua pas, et continua :
- J'achète ton orgueil qui te pousse à me tenir tête de cette façon, ta résistance. Si tu le fais, je suspendrai le carton rouge, mais tu ne devras plus rien dire au risque que cette fois, les choses soient bien pires.
Il accentua le dernier mot en me dévisageant pour guetter la moindre de mes réactions. Il allait être servi.
- Et qu'est-ce qui te pousse à croire que je vais marcher avec toi ? sifflai-je en affichant pour de bon l'expression de profond dégoût que je tentai de cacher depuis tout à l'heure.
Il parut un peu étonné sur le brusque revirement de situation, et posa son verre sur la table basse à côté de lui. Ses sourcils fins se froncèrent de façon contrariée, il était visiblement agacé par mes réactions. On se fixa tous les deux le visage dur, attendant que le premier d'entre nous ne craque, légèrement penché en avant comme absorbé par l'autre. Il sourit légèrement en coin et me répondit :
- Ça me parait plutôt évident. Tout le monde est attiré par l'argent, n'importe qui ferait n'importe quoi pour une liasse de billet, et un fils de prolétaire comme toi n'échappe pas à la règle.
Je me relevai brusquement du fauteuil, faisant un pas vers lui. Il se leva à son tour pour me faire face à armes égales, et surtout pas dans une position inférieure à moi. Je lui criai d'une voix forte, vexé par ce qu'il avait dit :
- Ne me traite pas comme n'importe qui ! Je ne suis pas comme ces animaux de compagnie qui suivent le moindre de tes faits et gestes !
- Et pourtant, tu es exactement comme eux ! riposta-t-il sur le même ton, ses yeux s'agrandissant sous l'effet de la colère.
- Et qu'est-ce qui te fait dire ça, hein ?! Tu ne me connais pas, tu ne sais rien de moi, alors ne vas pas poser des choses comme étant des vérités alors que tu ne sais rien. Enfin, si, il y a une seule chose que tu sais : c'est à quel point je te déteste ! Je te hais Sasuke Uchiha, toi et ton attitude insultante vis-à-vis de tous ceux qui t'entourent !
Ma réplique me laissa le souffle court, alors que son visage adoptait une expression déconcertée. On aurait dit qu'il était sur le cul, visiblement. Mais bien vite il se rattrapa, et sa face fut à nouveau un lac gelé par le froid de l'hiver. Sa bouche se tordit en une grimace.
- Déteste-moi tant que tu veux, j'en ai rien à battre. Mais il y a une chose dont moi je suis sûr, c'est que comme tout le monde, l'argent t'attire, comme le pouvoir. Qui n'a jamais rêvé d'être riche et reconnu par les autres, hein ? Cite-moi une seule chose, uniquement une, qui ne s 'achète pas dans le monde.
Il se rapprocha un peu de moi de sa démarche féline, me fixant de ses yeux plissés, s'arrêtant au moment où mon visage fut plongé dans l'ombre du sien. Cette proximité me mit mal à l'aise, surtout quand son visage s'avança encore vers le mien. Je parvenais à sentir sa respiration profonde sur mes lèvres, et ce détail me fit reculer d'un pas. Un sourire naquit sur ses lèvres face à mon geste, et je me crispai face à lui.
- Une seule chose, j'attends.
Je baissai alors mon visage vers le sol, mon cerveau marchant à toute vitesse. Qu'est-ce qui ne pouvait s'acheter dans le monde ? Qu'est-ce qui, malgré tous les millions de yens que l'on pourrait débourser, ne nous appartiendrait jamais ? Qu'est-ce qui n'avait pas de prix ? La vie de quelqu'un ? Même pas, le trafic d'hommes existait encore, malheureusement. Alors quoi ? Plus je réfléchissais, plus je me disais qu'au final, il avait peut-être raison. Peut-être que tout ce qui était sur terre, tout, n'importe quoi, pouvait s'acheter en sortant une grosse somme d'argent. Je ne pouvais pas me résoudre à avouer que ce monde en lequel j'avais foi puisse être aussi matériel…
Je tournai mon regard vers la fenêtre de droite, promenant mon regard sur les murs, le DJ à ses platines, la salle noire de monde, la boule à facettes qui projetait sa lumière partout. Et là, pile à ce moment-là, j'eus la réponse.
Je le regardai à nouveau, mon visage rasséréné, et lui souris. Ce n'était pas un sourire hautain comme le sien, ni moqueur. Juste soulagé, satisfait.
- Le soleil.
Ses yeux s'ouvrirent un peu plus, et sa bouche s'entrouvrit comme si il allait dire quelque chose. Mais rien ne vint. Alors je poursuivis, devenant de plus en plus enflammé au fil de ce que je disais.
- Le soleil, jamais tu ne pourras l'avoir, même si tu sortais tout l'argent d'un pays. Tu as beau profité de sa lumière, de sa chaleur, c'est la même chose pour nous tous. Et tu auras beau désirer son éclat plus ardemment que n'importe qui, jamais il ne t'appartiendra. Ce sera toujours trop pour toi, jamais tu ne seras à la hauteur pour le posséder, quoi que tu fasses. Tu vois, il y a bel et bien des choses qui ne s'achètent pas dans le monde, et moi aussi j'en fais partie.
Et sur ce, je me détournai de lui. J'empoignai ma veste qui était encore sur le canapé, et me dirigeai à grands pas vers la sortie. Cinq minutes plus tard, je me retrouvais dans le froid de la nuit, à la sortie de la boîte. Ses paroles se répétaient dans ma tête de la même façon qu'un disque rayé. Je me sentais troublé par ses paroles. Il était vraiment prêt à aller jusque là juste pour que je cesse de lui tenir tête ? Ça me paraissait incroyable, et exagéré. Ce type était dingue, j'en étais sûr. Sa confiance en lui était… ahurissante. Cette histoire était loin d'être finie, j'en étais certain. Maintenant que j'avais refusé sa proposition, je sentais que les choses allaient s'envenimer.
Je jetai un rapide coup d'œil à ma montre, il était bientôt dix heures du soir. Je n'avais pas moins de trois heures de retard à mon travail. Je me mis à courir dans la rue, et je parvins à y être en une vingtaine de minutes. J'arrivai, essoufflé, à la porte du bar. J'y entrai, tentant de ne pas respirer comme un bœuf, et me précipitai au bar. C'est à ce moment-là que Kiba me vit. Il posa les bouteilles qu'il avait dans les mains et vint vers moi.
- Qu'est-ce qui t'est arrivé ? T'as trois heures de retard ! s'exclama-t-il en me tenant le bras, voyant que j'étais à bout de souffle.
Je pris une ou deux longues respirations, et parvins à lui dire difficilement :
- Sa… Sas…suke.
- Quoi ? Sasuke ? Pourquoi tu… Oh mon dieu ! fit-il en comprenant subitement. Il t'a fait quelque chose ? Attends, viens t'asseoir, on dirait que tu vas t'étouffer.
Il m'installa sur une chaise derrière le comptoir et me tendit un verre d'eau. Je le remerciai d'un signe de tête avant de le boire en deux secondes. Puis, quand je fus enfin calmé, je repris d'une voix normale :
- C'est Sasuke… le taré, il m'a… emmené de force avec lui on va dire.
- Et qu'est-ce qu'il t'a fait ? Tu vas bien ? Il t'a fait mal ? Vous vous êtes battus ?
- Oh, doucement les questions, fis-je en me massant le crâne, commençant à rigoler un peu.
- Ouais, vas-y récupère, je vais prévenir le boss que tu es là. Il s'est vachement inquiété puisque moi-même je ne savais pas où tu étais. Il a même appelé Iruka…
- Ce n'était pas la peine, vous avez dû l'inquiéter pour rien…
Il me jeta un coup qui signifiait clairement que quand il y avait Sasuke Uchiha dans l'affaire, ce n'était pas rien. Il disparut dans l'arrière-salle, et revint l'instant d'après avec Jiraiya sur les talons. Celui-ci me considéra un instant, assis pitoyablement sur ma chaise, la poitrine se soulevant toujours rapidement, et il poussa un long soupir de soulagement.
- Ne me refais plus jamais ça, menaça-t-il en pointant un index accusateur sur ma poitrine. Même Tsunade était…
Mais il fut bruyamment interrompu par un tonitruant « NARUTO » qui fit même sursauter les clients des tables près du bar. Une seconde plus tard, je fus étouffé par la poitrine on ne peut plus protubérante de Tsunade, la compagne de Jiraiya. La tête entre ses seins, je n'arrivais pas trop à comprendre ce qui arrivait, surtout que l'air commençait à me manquer. Ses bras minces, et pourtant d'une force herculéenne, me serraient contre son buste comme si elle ne voulait pas que je m'en aille à nouveau. Heureusement pour ma vie, elle se recula pour me fixer de son regard brun furieux. Elle me fit alors une pichenette sur le front un peu douloureuse, et m'ordonna d'une voix sévère et grondante, une voix à laquelle dire ne serait-ce que non pourrait vous coûter très cher…
- TOI ! La prochaine fois que tu nous fais un coup pareil, disparaître sans prévenir personne, dans le dos de tout le monde, je te jure que…
Elle prit une respiration avant de m'hurler au visage :
- JE TE JURE QUE TU N'AURAS MÊME PLUS TES YEUX POUR PLEURER TA MORT !
- Calme… calme-toi Tsunade baa-chan, je suis sincèrement désolé de vous avoir inquiété mais ce n'est pas moi qui aie décidé de m'évanouir dans la nature comme ça, j'y ai été un peu… forcé on va dire.
En même temps, je pouvais comprendre qu'ils se soient autant préoccupés de mon absence inhabituelle : en bientôt trois ans de travail dans leur pub, c'était la première fois que je leur faisais faux bond sans les prévenir au préalable.
La blonde me regarda encore un instant, sa bouche formant une grimace colérique, puis elle lâcha du bout des lèvres :
- Et c'est quoi ton excuse ? Je peux te jurer qu'elle a intérêt à être en béton.
Et dix minutes plus tard, quand j'eus fini de raconter mes petites péripéties, elle était encore en train de crier… mais pas sur moi cette fois :
- CE SASUKE UCHIHA ! SI JE LE CROISE, JE PEUX T'ASSURER QU'IL N'AURA MÊME PLUS DE BRAS POUR CREUSER SA TOMBE !
- Et la prochaine fois, ce sera : « Jiraiya ! Je peux t'affirmer que tu n'auras plus de jambes pour te rendre à ton enterrement ! » me chuchota Kiba en riant.
- C'est vrai qu'elle n'est pas très inventive… lui répondis-je, consterné.
Mais quand elle se tourna vers nous avec la mine d'un bouledogue, on se contenta de lui faire notre plus beau sourire.
- Je ne savais pas que tu avais ce genre d'ennuis à ton école Naruto, s'étonna Jiraiya. C'est comme ça depuis longtemps ?
- Le cirque des F4 ? Noooon ! Ça, ça dure depuis bientôt trois ans. Par contre, mes emmerdes, ça va faire même pas trois jours. Et avec ce qui vient de se passer ce soir, je pense que j'en aurais pour jusqu'à la fin de l'année, à moins d'un miracle.
- Et Inuzuka ? fit Tsunade en désignant du menton Kiba qui était en train de prendre la commande de nouveaux clients, un peu plus loin. Il a des problèmes lui ?
- Pas encore… Mais si jamais Uchiha décidait de vraiment s'en prendre à moi, c'est par mes amis qu'il commencera. Je ne sais pas si Sakura arriverait à supporter ça, et même Kiba d'ailleurs. Ce type est prêt à tout pour qu'on le respecte… Je n'ai pas envie qu'il leur fasse ça, mais je ne sais pas quoi faire pour me sortir de cette situation.
- Tant que tu resteras dans cet établissement, tu seras à sa merci, il ne faut pas te faire d'illusions, pesta Tsunade en croisant les bras contre son opulente poitrine.
- Et tu veux que je fasse quoi, hein ? m'énervai-je un peu. Je te signale que ça va faire trois ans que Iruka se prive afin que je décroche mon diplôme dans cet établissement. Tu vas me dire qu'il aurait fait tous ces efforts pour rien ? Non, je refuse d'abandonner comme ça et de céder face à cet espèce de bourge.
- Ce Sasuke, il est riche, hein ? fit Jiraiya en se grattant le menton.
- Riche ? C'est un euphémisme, il est richissime ! Il parait qu'il a comme une trentaine de chambres chez lui…
- En même temps, vu que c'est le fils du célèbre Fugaku Uchiha… concéda-t-il.
- Vraiment Naruto, tu es doué pour te mettre dans des situations impossibles ! se plaignit la femme, me fusillant du regard.
- Tu aurais voulu que je laisse cette pauvre fille se faire harceler pour une simple tâche ?
- Si cela avait pu t'éviter de te retrouver dans ton cas, alors oui ! répliqua-t-elle en se penchant un peu vers moi.
- D'ailleurs Naruto, regarde par là-bas, lança Kiba qui venait de revenir en me désignant l'entrée du pub.
Je me relevai un peu de mon tabouret pour que mes yeux puissent voir au-dessus du bar. Il y avait une personne qui attendait, semblant très mal à l'aise, regardant autour d'elle en passant mécaniquement sa main finement manucurée dans ses cheveux. Karin.
- Je crois qu'elle t'attend, précisa mon ami.
- Qui c'est celle-là ? demanda Jiraiya en la fixant un peu. Elle a une bonne paire de…
- Tais-toi, tu abrégerais ta vie, l'interrompit Tsunade alors que je me levai pour de bon.
Quand je fus à trois mètres d'elle, elle me remarqua enfin. Tout de suite son visage s'abaissa, et ses joues prirent une teinte d'un rose soutenu. Je ne sus pas vraiment quoi lui dire sur le moment, j'étais partagé entre les réactions qui s'offraient à moi. Devais-je faire bonne figure, lui parler comme je l'aurais fait si rien ne s'était passé alors que depuis le carton rouge elle m'ignorait… par peur ? Par lâcheté ? Ou bien devais-je lui en vouloir, la renvoyer d'où elle venait sans même l'écouter ? Ce genre de comportement ne me correspondait pas, et de loin. Mais on aurait beau dire que j'étais trop gentil, que je pardonnais facilement, que je me faisais avoir, tant pis. Si elle était venue jusque là, je pouvais bien lui accorder un peu de mon temps. Je la saluai d'une voix forte, la regardant fixement. Je voulais à tout prix étudier les changements dans son visage, voir si elle me mentait ou était sincère. Je n'étais pas bon à ce genre d'exercices, j'avais tendance à faire confiance à un parfait inconnu comme si je le connaissais. Mais là, je sentais que je devais me forcer.
- Bonsoir, répondit-elle d'une voix un peu faible.
Elle tritura ses doigts, et se mordit la lèvre inférieure. Apparemment, elle était mal à l'aise. Bizarrement, je me sentis un peu coupable de la mettre dans cet état.
- Tu es venue pour… ? l'encourageai-je en ne bougeant pas de ma place, n'ayant pas envie de l'acculer.
Elle releva son regard vers moi, et je vis qu'il était légèrement humide. Ok, là, il n'y avait pas à dire : je me sentais fichtrement mal de la mettre dans cet état. Pour autant, n'était-ce pas moi qui me faisais harceler par la quasi-totalité du lycée ?
- Est-ce que… commença-t-elle.
- Tu veux venir faire un tour avec moi ? l'interrompis-je en lui faisant un de mes larges sourires. Vu le nombre d'heures que j'ai de retard, je ne pense pas bosser ce soir alors…
Elle me considéra un instant, étonnée par ma proposition, mais finit par acquiescer. Je fis signe à Kiba que je sortais, et il hocha la tête de loin. Il s'occuperait de prévenir Jiraiya et Tsunade qui était en train de se disputer apparemment. Comme toujours d'ailleurs… J'ouvris la porte à Karin, la laissant sortir en première dans le froid de la nuit. Je réglai mon pas sur le sien alors qu'on pénétrait peu à peu dans le centre-ville, ne parlant pas. Comme à mon habitude, je regardai autour de moi avec un regard alerte, comme si c'était la première fois que je venais ici. Kiba rigolait de ça d'ailleurs, de cette manie que j'avais de jeter des coups d'œil partout avec une vivacité plutôt anormale disait-il, comme si j'étais une machine aux piles trop chargées. J'étais toujours en train de m'émerveiller pour un rien, sans doute parce que je n'avais pas vraiment eu une enfance facile. Au moins, cela m'avait rendu plus fort. Comme quoi, on était toujours capable de retirer une nouvelle force de tout ce qui nous arrivait, même des pires choses.
- Je voulais te dire pardon, parla soudainement Karin, s'arrêtant dans sa marche alors que l'on était arrivé à une petite place entre les circulations des voitures.
Je me stoppai à mon tour, et me retournai vers elle, la scrutant de mes yeux perplexes malgré moi.
- Ce que tu as fait, c'était pour m'aider et moi… tout ce que je trouve à faire, c'est de t'éviter.
Elle rit une seconde, se frottant le front d'un geste nerveux. Elle ne devait pas avoir l'habitude de s'excuser auprès de quelqu'un. On aurait même dit que c'était la première fois.
- Oh, tu sais, ce n'est pas bien grave, dis-je en me forçant à sourire.
- Si ! se récria-t-elle. Si, je… je te suis reconnaissante d'être intervenu, tellement reconnaissante, mais je…
- Tu as peur, c'est normal. Ils ne font pas de cadeaux en plus.
Je vis qu'elle s'apprêtait à parler encore une fois, mais je repris de suite, l'empêchant de continuer.
- Tu n'es pas obligé de t'excuser plus. Que tu sois venue me dire tout ça, c'est bien suffisant pour moi. Je te comprends, ne t'en fais pas, dis-je en me grattant l'arrière de la tête.
- Oui, mais…
- C'est bon.
Mon ton ferme lui fit refermer ses lèvres entrouvertes. Il me fixa un long moment, plantant ses yeux clairs dans les miens, décidés et fermés. Elle se résigna, et me remercia d'une toute petite voix.
- Tu pourras toujours passer au bar si tu as trop peur de me parler au lycée. Ce sera déjà sympa. Et puis, tu sais, je crois que tu as tapé dans l'œil de…
L'expression de son visage me fit me stopper de parler instantanément. Cette peur, je l'avais déjà vue dans ses yeux, une fois. Quand Sasuke la menaçait de son aura oppressante.
- Un… un F4 ! fit-elle en tendant le doigt face à elle.
Je fis aussitôt volte-face, inquiet de me faire à nouveau kidnapper comme…une fille, il fallait bien le dire. Je préparai mes poings, prêt à en découdre comme un vrai homme cette fois, et on allait voir si ce fils de richard savait lui aussi se défendre ! Non mais, où étaient passés les vrais et bons vieux duels à morts, comme dans le temps où on pouvait vanter les mérites de ces bagarres dont la fierté était en jeu ? Mais mes belles résolutions disparurent quand je vis la personne qu'elle me désignait de son index tremblant. Je me mis à sourire, et la rassurai.
- Ne t'inquiètes pas, tu ne risques rien avec lui. Attends-moi là.
Je m'éloignai rapidement d'elle, me rapprochant des bancs disposés face aux affiches publicitaires. En quelques secondes, je m'assis à côté de la personne déjà présente, lançant nonchalamment :
- Alors, on fréquente le peuple ?
Gaara tourna avec rapidité son regard vers moi, mais bien vite l'étonnement dans ses pupilles laissa la place à son ennui habituel. Enfin, ennui… j'aurais plutôt dit déprime.
- Ah, c'est toi…
- Ouais. On peut dire que ton ami est plutôt obstiné. Tu sais qu'il a voulu m'acheter ce soir ?
Le jeune homme me fixa à nouveau, étendant ses jambes devant lui. Ce que je lui avais dit ne paraissait même pas l'avoir effleuré. Il s'en foutait vraiment ou il avait dépassé son quota de mots pour la journée ?
- Tu dois te douter de ce que je lui ai répondu…
- Alors attends-toi à être toujours emmerdé derrière, se contenta-t-il de répondre.
J'acquiesçai, posant mon regard sur la publicité de parfum, observant un peu plus attentivement qu'auparavant le modèle de l'affiche. Elle était très maquillée, et ses habits moulants mettant en avant les rondeurs féminines de son corps. C'est alors que je la reconnus :
- Hé, c'est Uehara Konan là, n'est-ce pas ?
- On dirait que tu as un sens de l'observation hors du commun, ironisa-t-il.
Sa remarque me fit éclater de rire, et je dus même pencher la tête vers l'arrière.
- Merci, je crois que c'était mérité, commentai-je. C'est une ancienne de notre lycée, elle était à la réunion pour les futurs étudiants quand j'étais en dernière année de collège. Elle était… impressionnante par sa prestance. Je la trouve incroyablement classe.
Il fit légèrement volte-face, et me regarda un peu plus fixement, intrigué.
- A t'entendre, on dirait que tu l'admires.
- Sans doute que oui, c'est sûr que c'est le genre de femmes que j'aimerais avoir à mon bras…
- Oui. Elle est… plutôt exceptionnelle.
- Tu la connais ? l'interrogeai-je, curieux.
- Oui.
- Depuis longtemps ?
- Oui.
- Elle te manque ?
- Oui.
- Tu sais répondre autrement que par des monosyllabes, lâchai-je, un peu piqué au vif.
- Non.
- Okaaay, me marrai-je. T'es grave.
- Merci.
Je ris encore un peu, m'installant de façon plus confortable sur le bois du banc. Mon bras se colla au sien, et il me flanqua un coup, me faisant sans doute comprendre que je prenais trop de place. Je lui rendis la pareille, me plaignant dans ma barbe.
- T'es un vrai gamin, dit-il.
- Je t'emmerde, répondis-je, sourire à l'appui.
Pour la première fois, il se mit à sourire légèrement. Il était encore pire que l'Uchiha. Non, en fait, il n'était pas pire, parce que lui était plutôt sympa, et son ego semblait être d'une taille relativement normale. Il paraissait être relativement normal à part deux ou trois détails comme sa dépression constante et son manque de réactions face aux actions dégueulasses du F4. Mais bon, on n'allait pas être difficile, c'était déjà pas mal d'en avoir un de son côté.
Je poussai un petit soupir d'aise, m'étirant la nuque en me raclant la gorge, ayant toujours un petit goût désagréable au fond de celle-ci. Quand soudain, il demanda :
- Combien est-ce qu'on a d'heures de décalage avec la France ?
- Combien d'heures de… Tu sais que tu poses des questions bizarres ? m'exclamai-je en insistant sur le dernier mot.
- Si ça t'ennuie, j'étais bien seul.
- Roh, ça va, attends…
Je me déhanchai pour sortir mon portable de ma poche, faisant bien exprès de le faire bouger lui aussi pour l'agacer, et le pire était qu'il se laissait se faire ballotter comme sur un bateau sans rien dire. Je finis par sortir le petit appareil, et me mis à chercher.
- Voilà, c'est écrit… huit heures.
- Huit heures, répéta-t-il, désabusé. C'est long...
- En gros, ils viennent à peine de se lever là.
- Ouais…
- Pourquoi ? Tu connais quelqu'un qui habite en France ?
- Hm, elle revient dans pas longtemps…
Son regard turquoise restait collé à l'affiche en face de nous, et j'observais son profil régulier et légèrement pâle à la faible lueur des lampes environnantes. Je remarquai pour de bon la tristesse empreinte sur son visage, ses yeux las, la légère moue de sa bouche. Qui que soit cette personne, même si j'avais bien une petite idée vu qui il observait si intensément, il devait y tenir énormément. Je n'aurais jamais pensé avant ce soir que son comportement si détaché de ce qui l'entourait était causé par ses sentiments pour cette jeune femme que l'on voyait à peu près partout dans le pays sur des magazines. Je me demandais depuis combien de temps il ne l'avait pas vu pour qu'il ressente un manque tel que moi-même je le percevais.
- Je suis sûr que tu lui manques autant qu'elle te manque, fis-je en reportant mon regard sur Konan.
Je le sentis se tourner vers moi, mais ne bougeai pas. J'affichai un léger sourire, qui s'agrandit quand je l'entendis me dire :
- Merci.
- De rien, ce serait plutôt à moi de te remercier pour ton aide de la dernière fois, même si tu ne l'as pas vraiment fait pour moi… Bref, on m'attend derrière, conclus-je en me relevant. Je suppose qu'on se reverra au lycée.
- … Essaie de ne pas énerver plus Sasuke. Si jamais il se met vraiment en colère, ça risque de très mal finir.
- Si tu crois que j'ai voulu tout ça… chuchotai-je avec amertume.
Mais voyant qu'il n'ajoutait rien de plus, je me détournai de lui et retournai vers Karin qui m'attendait toujours, ses mains serrées sur son sac qu'elle tenait bien contre elle. Geste défensif je suppose, elle devait sans doute craindre Gaara. Arrivant près d'elle, je lui enjoignis de se remettre en route. Elle me suivit docilement jusqu'au passage piéton, et alors que nous nous apprêtions à traverser, un crissement bruyant de pneus retentit dans la rue, et une voiture noire aux vitres teintées nous coupa la route, nous faisant reculer. J'observai le véhicule d'un œil critique, agacé de ces chauffards qui ne respectaient jamais rien, surtout les plus riches. Mais alors que nous continuions notre route pour retourner au pub, un mauvais pressentiment se fit sentir en moi. Bizarrement, je croyais avoir déjà vue cette voiture…
