Disclaimer : Évidemment, ils ne sont pas à moi, je ne fais que les torturer un peu.

Note : Cette fic ne prend pas en compte l'épilogue.

Message de l'auteur : J'écris cette histoire depuis un an et demi et j'ai finalement décidé de la diviser en chapitres étant donné qu'elle fait 53 pages alors qu'elle n'est pas encore finie ^^'... La suite arrivera rapidement puisqu'elle est déjà écrite.

Pour ceux qui suivent Maux et Mots, ne vous inquiétez pas (laissez-moi rêver, ça me fait plaisir de me dire qu'il y en a peut-être qui s'inquiètent ... T.T) je ne vous oublie pas ! Je travaille sur le chapitre 5, il devrait être prêt ce week-end :)

S'il y a des fautes d'orthographes, excusez-les, elles sont jeunes ! lol …

Bonne lecture !

I do want to leave you breathless

Chapitre 1

"You keep disrupting the feelings that I am trying hard to hold back."

Dimanche 13 Novembre, 17 h 09 :

En cette magnifique journée d'automne, tout son corps tremblait comme les feuilles rougies des arbres qui allaient peu à peu tapisser la pelouse d'un dégradé orange. Il était enraciné là, planté au milieu du couloir, aussi immobile et raide qu'un tronc. Son cœur se fanait doucement et, pareil à une branche qui s'effeuille ou une fleur qui se meurt, tombait lentement en lambeaux, pétale par pétale. Les yeux embués par un brouillard brûlant qui tentait de voiler sa vue pour l'éloigner de cette cruelle réalité, il n'arrivait plus à respirer, son souffle lui ayant été délicatement dérobé par la tendresse de l'échange qu'il venait de surprendre. Un vent frais vint caresser son dos et fit virevolter ses cheveux blonds devant son visage inexpressif seulement troublé par de fines traînées humides sur ses joues. Un frisson le parcouru longuement et le fit violemment vibrer de la tête aux pieds, si bien qu'il ferma un instant les yeux.

Sa gorge se serra comme si tous ses sentiments s'étaient insinués dans sa trachée pour l'empêcher de prendre une bouffée d'air frais consolatrice. Il contemplait toujours ce même point devant lui qui le torturait mais duquel il ne pouvait détacher son regard, comme un cauchemar duquel on ne peut se réveiller. Il baissa la tête, vaincu, mais rapidement une grimace de colère apparue sur son visage et il serra les poings jusqu'à s'en faire mal. Tous ses muscles se contractèrent et tout son être frémit. Son corps était en ébullition et il sentit le besoin de fuir le plus loin possible l'assaillir. Comme obéissant à un souhait non formulé, ses jambes bougèrent toutes seules et le firent reculer d'un pas. Puis deux… Et il se retrouva à courir comme si sa vie en dépendait dans les couloirs de Poudlard.

Sa course effrénée continua un long moment, malgré la fatigue et l'essoufflement, ses pas se faisaient de plus en plus rapides. Il aurait voulu hurler sa douleur mais ses sanglots qu'il refusait de libérer l'étouffaient.

Arrivé dans le parc, les larmes dévalaient ses joues en cascade et la haine suintait par tous ses pores. Il courait encore mais cela ne lui suffisait pas … Il voulait se libérer, s'épuiser, se défouler jusqu'à en souffrir. Et, à peine ces pensées eurent traversées son esprit, que son corps s'illumina, comme frappé par la foudre.

Il y eut un éclair.

Qui dura juste un instant.

Et ses années d'entraînement portèrent leur fruit : il venait de prendre sa forme d'animagus.

C'est donc un cheval lusitanien, à la robe crème et aux yeux délavés, qui galopa dans le parc partiellement couvert d'orange, sous une pluie battante. Ses foulées n'étaient pas régulières et on aurait presque dit qu'il était enragé, possédé même, tellement ses mouvements étaient désordonnés et hors de contrôle. Il donnait l'impression de vouloir se libérer de liens invisibles. Il étirait et courbait son encolure, traversait le parc entier à une vitesse record, faisait des écarts, repartait de plus belle et se cabrait même par moment. Dans une sorte de danse folle rythmée par le son de ses sabots percutant le sol imbibé d'eau, il recommençait et recommençait encore le même manège comme s'il n'y avait pas de lendemain.

Il entendait son sang pulser dans son crâne, son cœur battre à lui exploser la poitrine, sa respiration erratique sonner comme un bruit de tissu qui se déchire et ses hennissements brisés résonnants aussi bien dans le vide étriqué de son âme que dans l'immensité de l'espace qui l'entourait.

Au bout d'un long moment, l'épuisement eut raison de sa rage et il s'immobilisa à côté d'un arbre, la pluie frappant son corps meurtri. La fatigue et la douleur le submergèrent, son corps se replia un peu sur lui-même et il baissa piteusement la tête, tendant son encolure. Abattu, trempé jusqu'à l'os, essoufflé comme jamais, il resta un instant sous la pluie à essayer d'oublier la tendre scène à laquelle il avait assisté et qui avait fini de l'achever. Mais il n'y avait rien à faire, ces images assassines revenaient le hanter et elles rejaillissaient à chaque fois qu'il voulait les enfouir. Il essayait de toutes ses forces d'effacer ce spectacle de sa mémoire, de ne plus voir ce garçon qui lui tournait le dos à quelques mètres de lui. Son dos mince baignant dans son grand pull, ses cheveux impossibles avec des épis un peu partout. Le blond tentait, comme toujours, de refouler cette sensation, cette vague de chaleur qui le tuait à chaque fois qu'il voyait ce crétin.

Les images défilaient toujours, une jeune fille à la chevelure rousse qui lui rappelait cette saison qu'il détestait tant, cette fille sautant au cou du brun chétif avec un sourire niais. Il avait très bien imaginé le regard comblé d'imbécile heureux que le Gryffondor devait avoir eut. Et après lui avoir sourit amoureusement, la rousse l'avait simplement embrassé.

Et Draco, à l'autre bout du couloir, était resté planté là, à écouter son cœur se déchirer lentement.

Dimanche 13 Novembre, 17 h 09 :

Harry suffoquait, ce parfum bien trop sucré lui donnait mal à la tête et l'empêchait de respirer convenablement, comme à chaque fois. La couleur criarde de ces cheveux agressait ses yeux et ce corps aux formes généreuses collé au sien ne l'attirait pas, bien au contraire. Mais il ne dit rien. Il avait toujours fait avec, il avait toujours toléré, supporté toutes ces choses qui le répugnaient. Il avait toujours fait semblant d'aller parfaitement bien en jouant son rôle de garçon sage à la perfection. Cachant toute sa peine et sa douleur au fond de lui, depuis cinq ans il avait toujours vécu avec cette sensation désagréable, chaque inspiration devenant un combat contre les larmes, chaque expiration tremblante un souffle libérateur.

La cause de son mal-être était tout à fait stupide, ne se l'avouant à lui-même qu'à moitié, il s'était juré de se cacher derrière cette image de garçon banal et de ne jamais en dire un mot à personne. Mais ce jour était particulier, ce jour était un jour de révolution dans la vie du Sauveur car il avait décidé d'arrêter de faire semblant. Il ne voulait plus jouer la comédie. Depuis trop longtemps il se taisait, depuis trop longtemps il encaissait et cela n'avait que trop duré.

Ses meilleurs amis avaient appuyé sa cause, mais il savait que sa petite-amie ne le prendrait sûrement pas aussi bien qu'eux. C'est pourquoi il lui avait donné rendez-vous, mais malheureusement, la dernière des Weasley avait mal interprété sa demande et, croyant qu'il s'agissait d'un rencard, venait de lui sauter dessus en plaquant ses lèvres recouvertes de maquillage sur les siennes et dévorant sa bouche.

Dimanche 13 Novembre, 17 h 51 :

Des bruits de pas dans les feuilles mortes ramenèrent Draco à l'instant présent mais il n'esquissa pas un mouvement. Il n'avait plus de force et il sentait qu'il ne pourrait pas tenir encore très longtemps sous sa forme d'animagus. Les pas se rapprochèrent et instinctivement, Draco recula en poussant un hennissement qui ressemblait étrangement à une supplication. Mais la personne continua.

Alors, faisant tous les efforts du monde, il releva finalement la tête pour voir qui pouvait bien oser venir le déranger. Dès que ses yeux entrèrent en collision avec ceux de son vis-à-vis, tout s'effondra, comme si son être était fait de cristal, il se sentit se briser. Sans qu'il ne comprenne vraiment comment ni pourquoi, il reprit sa forme humaine en tombant en arrière. Il vérifia immédiatement s'il avait ses vêtements et fut rassurer en voyant qu'il avait réussi à les faire réapparaître à sa transformation. Puis Draco releva lentement son visage. Il fixa le brun qui lui faisait face encore un instant avant de détourner les yeux avec une grimace de dégoût.

_ Toi … Je suis vraiment maudit.

Ces mots prononcés avec tellement d'amertume et de haine figèrent le brun sur place. Un lourd silence s'abattit alors sur eux, le blond refusant de croiser le regard du Gryffondor qui le fixait sans relâche.

Harry avait vu Malfoy se transformer et devenir totalement fou sous la pluie, il avait été étrangement peiné mais finalement, c'était une rage jalouse qui s'était emparée de lui et l'avait poussé à courir jusqu'au parc pour le retrouver. Mais maintenant qu'il se trouvait en face de lui, il ne savait plus ce qu'il était sensé faire.

Au bout d'un long moment, le brun se décida à faire le premier pas et lui demanda :

_ Qu'est-ce qui se passe, Malfoy ?

L'interpellé releva doucement la tête et Harry écarquilla les yeux à la vue qui s'offrait à lui. Draco était trempé de la tête aux pieds, ses joues étaient légèrement rouges, il avait la bouche entrouverte laissant ainsi s'échapper une respiration presque animale. Mais ce qui le marqua le plus furent les gouttes de pluie qui dégoulinaient de ses cheveux sur son visage auxquelles se mêlaient les larmes que ses yeux versaient à n'en plus finir.

Le brun fit un pas en avant, comme hypnotisé par cette image de fragilité que revêtait pour la première fois son pire ennemi, mais immédiatement, le visage du blond se crispa.

_ Dégage Potter.

Encore ce ton sec et haineux qui le poussait à obéir mais pourtant cette voix enrouée lui criait de rester près de lui. Harry n'aurait sut se l'expliquer s'il avait cherché à le faire à cet instant mais il y avait quelque chose dans cette voix qui l'appelait.

C'est à ce moment là que Draco remarqua une marque rouge sur la joue d'Harry. Il oublia instantanément ce pourquoi il se retrouvait dans un état aussi misérable. Il se leva tant bien que mal, ses membres endoloris tremblaient ce qui ne l'aidait franchement pas. Enfin debout, il s'approcha doucement du Gryffondor qui, étant plus petit, leva les yeux vers lui. Puis Draco leva lentement sa main vers son visage et effleura la marque de deux doigts.

_ Qui t'as fait ça ?

Sa voix rocailleuse et inquiète fit frissonner le brun qui sentit avec horreur le feu dévorer ses joues. Harry baissa immédiatement la tête et fit un pas en arrière pour échapper au touché aérien des doigts de sa Némésis. Un sourire nerveux pris place sur ses lèvres alors qu'il répondait du tac au tac, sans réfléchir :

_ Disons que Ginny n'a pas apprécié la nouvelle que je lui ai annoncée…

A ces mots, Draco sentit une paisible chaleur traitresse l'envahir. Il la ravala, sachant très bien qu'il se faisait des idées. Et ça le tuait de se raccrocher au moindre petit espoir. Il ne faisait que se relever pour mieux tomber, en continu il ne faisait que ça et le savait mais cela ne l'empêchait pas de recommencer encore et encore.

_ … Et … Quelle était cette nouvelle ? demanda tout doucement Draco en se rapprochant du brun comme s'il s'agissait d'un animal qu'il voulait domestiquer.

Harry releva la tête vers le Serpentard, de plus en plus troublé par les événements. Cela ne ressemblait en rien au Malfoy qu'il connaissait depuis plus de sept ans, il voulait bien croire qu'il se soit assagi après la guerre mais il y avait une limite à la gentillesse. Cela ne lui déplaisait pas, loin de là même, mais il se sentait vulnérable quand il parlait avec lui sans mépris…

Remarquant le trouble du brun, Draco se rattrapa :

_ Laisse tomber … C'est pas mes affaires, hein ?

A la fin de sa phrase, le blond lui fit un sourire renversant qui lui coupa le souffle et mit fin aux battements de son cœur. C'était un de ces sourires fragiles qu'on a peur de briser au moindre mouvement, un sourire qui vous fait bien plus mal qu'un coup de poing ou des pleurs. Un sourire qui vous tue tant il reflète l'amertume et la douleur.

Alors qu'Harry restait figé, complètement perdu, Draco se retourna à contrecœur et commença à avancer vers le château. Mais le brun se réveilla soudain de sa léthargie et l'attrapa par le bras pour l'arrêter. Le Serpentard se tourna lentement en posant ses yeux sur lui, leurs regards s'accrochèrent alors, comme aimantés. Leur échange où la douleur écrasait tout autre sentiment acheva Harry qui demanda dans une expiration, un souffle à peine plus fort qu'un murmure :

_ Qu'est-ce qui t'arrive ?

Draco, fatigué de lutter, céda le contrôle de la raison à ses envies. Il se rapprocha alors de sa Némésis, comblant l'espace qui les séparait en quelques pas. Le cœur au bout des lèvres, il les pinça pour retenir le flot de paroles stupides qu'il voulait lui dire qui restaient là, entassées dans sa gorge.

_ Ce qui m'arrive …? répéta le blond en essayant de garder son sang-froid.

Son visage était fermé, ne laissant transparaître aucune émotion comme il savait si bien le faire, mais il était conscient que sa voix cassée disait tout. Il contempla longuement Harry qui ne semblait rien saisir à son comportement qu'il devait sûrement trouver inhabituel. Après tout, le brun ne connaissait de lui que ce qu'il voulait bien lui montrer. Et il s'en voulait déjà de l'avoir laisser entrevoir ses blessures intérieures, cela l'énervait d'être aussi faible. Le brun le rendait faible, il lui faisait ressentir trop de choses insensées qui lui faisaient perdre ses moyens.

Le Gryffondor n'eut pas le temps de réaliser ce qui lui arrivait, en un clignement d'yeux il se retrouva plaqué contre un arbre. Il releva rageusement la tête, prêt à riposter par un coup de poing mais à cet instant, le temps s'arrêta brusquement comme suspendu, chaque seconde s'étirant à l'infini.

Malfoy fondit sur lui, son souffle chaud s'égara dans son cou avant que sa bouche n'aille effleurer son oreille. Le Gryffondor ne fit pas un mouvement pour le repousser ou pour s'échapper de cette étrange situation, il était complètement paralysé. Il ne sentait plus que sa Némésis, tout autour de son corps. Il n'y avait que lui. Le blond, étant plus grand et plus large que lui, le recouvrait entièrement et Harry aurait voulu rester comme ça éternellement. Et comme dans un rêve, son cerveau cotonneux enregistra les quelques mots que lui confessait son ennemi à demi-voix.

Ses mots crus à peine murmurés résonnèrent dans le labyrinthe de sentiments dans lequel Harry s'enfonçait.

Le corps du Sauveur se liquéfia sous la tiède souffrance de sa voix et dans un soupire il pria pour ne faire plus qu'un avec le Serpentard.

Mais Draco s'arracha à lui, déchirant le cœur du brun qu'il venait de vidé.

Harry ne le vit même pas s'éloigner. Il ne bougea pas. Il était là, seul et abandonné sans la chaleur de ce corps contre lui. Il était fébrile et avait l'impression d'être nu. Un vent froid le fit presque vaciller et le glaça jusqu'aux ongles. Le monde lui parut bien trop grand maintenant qu'il n'était plus emprisonné par Draco, piégé par son corps. Des pensées confuses commencèrent à envahir son cerveau ensommeillé par ces douces paroles de détresse. Un nœud lui serra la gorge et cette sensation qui le tordait, lui prenait les tripes, qui lui piquait le nez et lui brûlait les yeux, lui parut plus insupportable que jamais.

« Tu as tout ce dont un homme peut rêver, alors pourquoi est-ce que te tu retournes pour quelqu'un comme moi ? Pourquoi est-ce que tu t'arrêtes pour me regarder m'effondrer ? Pour admirer ton œuvre ? Pour mieux savourer ton bonheur ? Tu n'as aucune idée de ce tu me fais endurer. T'es toujours deux pas derrière moi, comme pour vérifier si je ne me relèverais vraiment pas cette fois. Et ça fait mal, crois-moi. »

Dimanche 13 Novembre, 18 h 16 :

_ Et merde ! grogna Draco en claquant violemment la porte de sa chambre avant d'aller s'affaler à plat ventre sur son lit.

Ses vêtements trempés dégoulinaient sur les draps, mais il s'en fichait. Son corps était en bouillie et il avait l'impression que sa tête allait exploser, mais il s'en fichait. Sa gorge était en feu, cela étant dû autant à sa course sous la pluie qu'à ses pleurs, mais il s'en fichait. Il ne pensait plus qu'à une seule chose : l'énorme connerie qu'il venait de faire. Il se maudit intérieurement d'avoir été aussi faible pour craquer devant Harry, il se traita de tous les noms possibles et imaginables pour avoir put lui dire des choses aussi idiotes, et finit par étouffer un cri dans son oreiller. Il s'en voulait tant. Comment avait-il pu être si stupide ? Sa colère était telle qu'il eut encore une fois à ravaler ses larmes de rage.

Il resta un long moment à ruminer, immobile, le visage toujours enfoui dans son oreiller avant de faire glisser sa tête sur le côté. Il renifla un peu et ferma les yeux quelques secondes pour tenter de se calmer. Mais il afficha finalement un sourire amer et articula d'une voix cassée : « Amour quand tu nous tiens, on peut bien dire ''adieu prudence ''… »

Il se releva et s'assit sur le bord de son lit, la tête dans les mains il en était presque à s'arracher les cheveux. Un soupire lui échappa alors qu'il passait une main lasse sur sa nuque et il décida finalement de continuer son monologue qui était pourtant loin de lui remonter le moral :

_ Pourquoi je m'accroche encore ? marmonna-t-il en se levant. C'est impossible et je le sais bien. C'est juste stupide.

Il se traîna jusqu'à la salle de bain en prenant soin d'éviter son reflet dans le miroir et commença à se déshabiller.

_ Mais c'est bien connu : l'amour qui dure le plus longtemps est l'amour impossible, souffla-t-il avant de retirer son tee-shirt imbibé d'eau d'un mouvement rageur.

Dimanche 13 Novembre, 19h 36 :

En rentrant dans le hall d'entrée du château, Harry était aussi vide qu'un courant d'air. Le silence cuisant qui régnait en lui était seulement perturbé par quatre petits mots qui résonnaient depuis deux longues heures dans sa tête. Quatre petits mots pas si bouleversant que ça, pas si horribles que ça, mais ils avaient été dit avec tellement d'émotion qu'ils le torturaient encore.

« Et ça fait mal. »

Cette plainte chuchotée lentement par cette voix si cruellement douce le déroutait totalement et il se sentait affreusement mal. A tel point qu'il devait faire un effort surhumain pour retenir ses larmes. Pourtant c'était son « crois-moi » qui avait fini de l'achever, il lui donnait l'impression que le blond était enfermé dans son mal-être et taisait sa souffrance.

Les questions tournoyaient sans fin et les hypothèses s'enchaînaient au même rythme, c'était un ensemble de logique et de déraison qui passaient sur lui comme un ouragan. Il ressentait trop de choses confusément précises pour qu'un sentiment sorte du lot et lui éclaire le chemin.

Il traversa la Grande Salle la mort dans l'âme et alla machinalement s'assoir à côté de son meilleur ami. Il resta les bras ballants, le dos courbé, les épaules affaissées et les yeux rivés sur son assiette vide un long moment jusqu'à ce qu'il ne se rende compte qu'Hermione était en train de lui parler. Elle l'interrogeait sur la raison pour laquelle il était trempé comme s'il venait de prendre une douche habillé et la seule réaction d'Harry fut de regarder ses vêtements, vérifiant les dires de son amie. Il se demanda alors s'il s'était vraiment écoulé autant de temps depuis son étrange discussion avec Malfoy, mais il venait effectivement de passer deux heures sous la pluie, tétanisé, figé à l'endroit où le Serpentard l'avait laissé.

_ Euhm … Apparemment je suis resté dehors sous la pluie … pendant deux heures.

Sa voix trembla, toujours prise d'assaut par les pleurs retenus et ses yeux faillirent lâcher des rivières. Il s'en mordit l'intérieur des joues, se maudissant d'être aussi fragile et se demandant pourquoi il était si chamboulé par quelques mots sortis de la bouche de son ennemi. Il ne comprenait pas pourquoi il y accordait tant d'importance, pourquoi cela le touchait. Il avait la désagréable impression que toutes ses barrières avaient été détruites en un souffle. Il ne fit plus aucun effort pour écouter le sermon de son amie qui n'en revenait pas qu'il refuse qu'elle le sèche avec la magie et retrouva son mutisme chaleureux où il n'entendait plus rien du monde qui l'entourait.

Il y avait trop de questions, trop d'émotions pour qu'il garde toute sa tête mais il demeurait inexpressif, affichant un visage aussi mort que celui d'un macchabé. Il se sentait réellement mal, comme si une petite partie de lui avait été dérobée et que sans celle-ci le reste ne pouvait plus fonctionner correctement.

Son regard vide balaya la salle, passant sur les visages des élèves qu'il ne discernait même pas, regardant chaque personne sans voir.

Tout d'un coup, Harry se sentit aspirer à ses dépends par un regard orageux posé sur lui. Comme des tentacules invisibles qui l'entrainaient au plus profond de ce puits de tristesse, il était harponné par des yeux gris qui le maintenaient immobile et sagement soumis à la volonté du blond. Ce dernier articula quelque chose que le Gryffondor n'essaya même pas de comprendre.

Croiser ce regard douloureux fut comme un électrochoc qui le ramena à la vie, les battements de son cœur reprirent, affolés, et résonnèrent à ses oreilles. Il respira de nouveau et devint si sensible qu'il sentit jusqu'à l'air se propager dans ses poumons avant de faire demi-tour pour s'échapper doucement par sa bouche entre-ouverte. Il sentit jusqu'à son sang être pomper à un rythme inquiétant et dévaler dans ses veines. Alors le même sentiment de sécurité que lorsque Draco s'était collé à lui dans le parc s'insinua lentement en lui, fouillant son âme et trouvant son cœur.

Le brun trouvait ce sentiment tellement agréable que s'en était douloureux, tellement doux que cela lui laissait un goût amer en bouche. Il se dit alors que si son cœur continuait de courir aussi vite, il finirait par s'arrêter de battre pour reprendre son souffle. Pourtant il aurait tout fait pour ne jamais perdre cette tendre peine qui l'enserrait. Mais malgré les nombreuses prières d'Harry pour que leur échange dure éternellement, ce moment de plénitude prit brusquement fin alors que le Serpentard détachait ses yeux des siens.

Trop abîmé par la perte qu'il ressentait en cet instant, il mit un long moment à se rendre compte que ses vêtements ne le collaient plus désagréablement, qu'il n'avait plus du tout froid … qu'il était sec. Étonné, il bouscula son cerveau endormi pour tenter de réfléchir correctement. La seule chose qu'il réussit à en sortir fut que c'était l'œuvre d'un sort de séchage.

Il se retourna précipitamment vers Ron et Hermione mais constata qu'ils étaient absorbés dans une discussion agitée avec Seamus et Neville et qu'ils ne lui prêtaient aucune attention, trop occupés à argumenter sur qui détenait le record de chaudrons explosés depuis leur première année.

Il regarda alors Ginny qui lui lança un regard noir comme si elle allait lui sauter dessus pour l'égorger avec les dents, il en déduit que ce n'était pas elle non plus…

Finalement, sans qu'il ne s'en doute, ses yeux retournèrent à la table des Serpentards. Il fixa Malfoy qui discutait avec Zabini d'un air mi-ennuyé, mi-énervé et d'un coup, comme s'il venait de recevoir un coup en plein ventre, son souffle se brisa sous le poids de la révélation qui lui tomba dessus. C'était lui qui lui avait jeté le sort de séchage.

Devenue soudain trop lourde, sa tête balança d'un côté puis de l'autre avant qu'il ne la laisse tomber en avant pour aller frapper le bois de la table. Ne pensant à la douleur physique pas plus d'une seconde, il siffla un petit ''Et merde'' en fermant douloureusement les yeux.

_ Harry ? demanda Hermione, inquiète suite au bruit que venait de faire la tête du brun.

Le Sauveur lui répondit par un grognement plaintif qui ne fit qu'inquiéter un peu plus son amie.

_ Est-ce que ça va ? interrogea-t-elle.

_ … Non, ça va pas du tout … geignit Harry.

Dimanche 13 Novembre, 20h11 :

Draco, accompagné de ses amis, sortit le plus rapidement possible de la Grande Salle avec l'estomac vide. Il ruminait le fait qu'il n'avait fait qu'enchaîner les conneries depuis quelques heures. C'était la faute du brun tout cela. Mais quelle idée de rester deux heures sous la pluie sans sort d'imperméabilité et de ne même pas utiliser de sort de séchage en rentrant ! Oui, c'était la faute d'Harry s'il avait dû le sécher lui-même de peur qu'il ne tombe malade. Il s'inquiétait d'ailleurs du fait que le brun n'ait rien avaler au repas … était-ce à cause de ce qu'il lui avait dit ?

En tous cas, maintenant il devait rattraper le coup pour ne pas éveiller les soupçons. Il n'avait pas le choix, il devait faire comme il avait toujours fait, ne pas dévier des pas.

_ Hé Potty ! interpella le blond en voyant sa Némésis au bout du couloir. Ça va sûrement te décevoir d'apprendre ça mais ce n'est pas en tapant ta tête contre une table que tu feras disparaître ta stupidité.

Les Serpentards ricanèrent comme à leur habitude alors que Draco affichait un sourire narquois. Mais à l'étonnement de tous, autant chez les Lions que chez les Serpents, le Survivant ne réagit pas. Il se contenta de lancer un regard noir peu convainquant aux amis du blond en évitant soigneusement de regarder ce dernier, puis il se retourna pour continuer son chemin.

Malfoy resta figé sur place par le comportement du brun. Il se demanda s'il le fuyait à cause de ce qu'il lui avait dit deux heures auparavant ou pour une autre raison. Se disant que cela ne pouvait être que la première hypothèse, il s'englua dans un mélange de culpabilité et de peur. Soudain il vit Blaise faire quelques pas vers Potter, certainement pour lui apprendre qu'on ne tournait pas le dos à un Serpentard.

_ Blaise, attends- … tenta le blond pour le retenir.

Mais c'était trop tard :

_ Ho Potter ! Tu te crois où là ? cracha le noir avec haine. Comment oses-tu l'ignorer ? On ne t'a jamais appris le respect ?

Cette fois-ci Harry se retourna vivement et avança vers Blaise d'un pas décidé. Draco ressentit un pincement au cœur de voir que la colère de son ennemi ne lui était pas destinée. Habituellement, il était le seul à pouvoir le mettre en rogne à ce point. Cette expression sur son visage lui était réservée.

_ Et si tu te mêlais de ce qui te regarde, Zabini ? éructa le Sauveur. Surtout qu'entendre un Serpentard parler de respect, ça me fait doucement rire !

Draco refusait que cela se passe ainsi. Pourquoi le brun ignorait ses piques mais répondait de bon cœur à celles de Blaise ? Pourquoi devait-il le regarder se disputer avec quelqu'un d'autre que lui ?

_ Mais c-

Zabini ne pût en dire plus car le blond venait de lui passer devant pour attraper Potter par le col et le plaquer sans ménagement contre le mur le plus proche. Beaucoup de mâchoires dégringolèrent en voyant qu'Harry se laissait totalement faire. En revanche, cela n'étonna pas Draco. Non, il s'y attendait et son manque de réaction l'énerva encore plus.

Malfoy le poussa un peu plus contre le mur dans l'espoir de le faire réagir mais le brun resta de marbre. Draco ne voulait pas le voir comme cela, il aurait voulu effacer ce qu'il lui avait dit dans le parc, revenir en arrière pour que tout redevienne comme avant. Quand Harry lui portait encore un peu d'intérêt.

Il croisa son regard sans vie qui changea instantanément pour se voiler d'un sentiment qu'il ne sut identifier. Alors, sans réfléchir une seconde, Draco se colla à lui en plaçant son visage près de son oreille pour que personne d'autre n'entende ce qu'il allait lui dire. Il dût se faire violence pour ne pas enfouir son nez dans ses mèches indisciplinées afin d'en sentir le parfum.

Dimanche 13 Novembre, 20h18 :

Harry, les joues en feu, tenta de se fondre dans le mur contre lequel il était en rencontrant le regard du Serpentard, se battant contre lui-même pour ne pas se laisser aller. Mais il rendit docilement les armes quand Draco se rapprocha encore plus de lui et il profita de la proximité du corps du Serpentard qui lui avait étrangement manqué.

Sa respiration s'arrêta quand il sentit celle du blond atterrir dans ses cheveux, juste au dessus de son oreille. Une seule note de cette voix fluide et grave suffit pour l'amadouer complètement.

_ Si tu m'ignores à cause de ce qui c'est passé dans le parc, oublis tout, lui ordonna le blond d'un ton sec.

Le brun se retint de lâcher un pitoyable gémissement en entendant ces mots. Ravalant difficilement ses larmes, il ferma les yeux et baissa la tête, essayant de se cacher du regard de Malfoy. Négligeant les quelques personnes qui devaient les regarder, Harry agrippa le devant du pull de son vis-à-vis et enfouit son visage dans son cou. Ne se rendant pas compte de son geste, il s'enivra de son parfum et de sa chaleur comme pour se donner du courage avant d'articuler :

_ J'y arrive pas… avoua le brun d'une voix tremblante. Tu ne peux pas me demander ça.

Draco le relâcha sous le coup de la surprise, se décollant légèrement de lui. Harry retint son souffle devant le canyon de vingt centimètres que le blond venait de creuser entre eux deux. Et comme si lui aussi avait ressenti cette impression de distance immense quand leurs corps s'étaient séparés de quelques malheureux centimètres, le Serpentard revint contre Harry en abattant rageusement son poing juste à côté de sa tête, mais le brun ne sourcilla même pas.

_ Oublis, ordonna le blond dans un murmure. Je t'en pris, oublis tout.

A ces mots chuchotés, Harry sentit le nœud dans sa gorge grossir et ses côtes tenter d'écraser ses poumons. Il resserra sa prise sur le pull de sa Némésis pour le rapprocher d'avantage de lui et respira à pleins poumons son odeur, les yeux toujours clos.

Il prit une dernière bouffée puis releva la tête. Il ouvrit lentement des yeux embués, comme s'il savourait les dernières touches de couleurs d'un doux rêve nostalgique. Mais la réalité le rattrapa bien vite quand il remarqua la douzaine de paires d'yeux posée sur lui. Cette petite minute contre le mur lui avaient paru une éternité, c'est pourquoi il repoussa un peu Malfoy, très mal à l'aise.

Dimanche 13 Novembre, 20h19 :

Quand Harry le poussa légèrement de ses mains tremblantes, Draco ne résista pas, il obéit et s'éloigna de lui. Il jeta un petit regard en arrière pour voir la réaction des Gryffondors et des Serpentards qui venaient d'assister à cette étrange scène entre les deux ennemis. Ils ne paraissaient pas si choqués que cela, ils devaient certainement penser que le blond était en train de le menacer. Cela soulagea Malfoy qui laissa de nouveau couler son regard jusqu'au brun toujours emprisonné par ses bras.

_ Lâche-moi, fit le Survivant, la tête baissée.

Mais Draco ne le lâcha pas pour autant. Il voulait voir son expression, savoir comment il se sentait, comment il allait. Il chercha alors le regard du brun qui s'obstinait à fuir ses yeux, comme pour se cacher. Sans vraiment être conscients du changement dans leur comportement, ils se comprenaient maintenant grâce à un nouveau langage où aucun mot n'était nécessaire et où chaque geste sonnait comme une tirade.

Harry retint une sorte de sanglot et le repoussa encore une fois, tentant de s'échapper de son emprise mais Draco fit doucement glisser sa main sur le bras de son ennemi lui faisant ainsi comprendre qu'il n'abandonnerait pas.

Se résignant finalement, le Gryffondor releva la tête sachant que s'était le seul moyen pour que le Serpentard le laisse partir. Et à la vue de ses yeux débordant de larmes, Draco ressentit comme un coup de poing en plein cœur. Sous le choc, il le laissa s'éloigner de lui à regret, en fixant son regard au sien.

Ce fut Harry qui détourna les yeux en premier avec l'envie irrépressible de rester le plus loin possible du Serpentard. Ce dernier le regarda partir sans rien dire, le cœur se faisant passer au rouleau compresseur et le cerveau près à déborder de reproches et de questions.

_ Euh … Dray… Il va falloir que tu m'expliques deux ou trois petits trucs là, fit Blaise en s'approchant de son ami qui semblait complètement abattu.

Dimanche 13 Novembre, 20h23 :

Ce fut un Sauveur plus énervé que jamais qui déboula dans la Salle Commune des Gryffondors. Il marmonnait des propos confus presque inaudibles et pestait de temps à autres contre le monde entier. Mais en réalité il se sentait complètement vulnérable et vraiment stupide. Il en voulait au blond c'était certain. Mais il s'en voulait bien plus à lui-même et aux réactions de son corps qui tremblait encore de son rapprochement avec Draco. Alors il essayait d'attiser cette irritation pour détourner sa propre attention de l'état dans lequel il était réellement.

_ Harry, écoute-moi … Il faut que tu te calmes, tenta Hermione d'une voix qui se voulait rassurante.

_ Non ! Ce crétin l'a fait exprès pour que je me sen-

Harry ne finit pas sa phrase. Il l'avait fait exprès pour qu'il se sente faible ? Non, sûrement pas. Il se serait contenté de l'humilier comme à son habitude. Pourquoi Draco lui avait dit et fait tout cela alors ? Pourquoi lui avoir lancé une bombe à la figure pour ensuite lui demander d'oublier ? Il n'en savait strictement rien, il avait beau chercher il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas…

Le brun afficha un air tellement perdu qu'il en oublia sa colère précédente. Totalement alarmée par l'expression d'Harry, Hermione le fit s'assoir sur un des canapés et s'installa à côté de lui. Le Survivant n'eut aucune réaction, il paraissait figé dans son incompréhension. Et quand il refit surface quelques minutes plus tard, ce fut un Harry malade de ne rien contrôler, même pas ses propres réactions, qui prit place. Il ferma alors les yeux pour refouler ses insupportables larmes qui refusaient toujours de le lâcher et chercha une bouffée d'air dans la vaine tentative de calmer sa respiration chevrotante.

Il était tellement sur la défensive que la main réconfortante que posa Ron sur son épaule le fit sursauter.

_ Harry, fit la préfète-en-chef, si tu commençais par nous dire pourquoi tu t'es laissé faire par Malfoy ?

Un peu gêné, le Sauveur fixa ses chaussures un long moment avant de murmurer d'une voix frémissante :

_ Je ne sais pas.

Mais en entendant le son de sa voix, il se donna finalement une énorme claque mentale. Il ravala toutes ses pensées, toutes ses larmes et tenta de calmer ses mains tremblantes et ses jambes flageolantes. Il décida de se reprendre, il ne devait pas se laisser abattre pour si peu, ce serait vraiment ridicule. Il avait essayé de survivre aux attaques d'un Seigneur des Ténèbres toute sa vie durant, et il craquait pour ça ? Oui, ce serait tout à fait ridicule. Alors il ne laissera pas faire et passera simplement à autre chose.

Il rassura autant que possible ses amis en bafouillant des excuses comme quoi ils avaient passé l'âge de continuer cette idiotie de rivalité inter-maison qui n'en finissait plus et il réussit à s'enfuir jusqu'aux dortoirs.

Il se changea rapidement, ferma les rideaux de son lit à baldaquin avant de se jeter sous les draps. Arrivé là il s'ordonna à lui-même de dormir. Et quand il esquissa une pensée vers le prince des Serpentards, il se répéta qu'il ne devait plus y penser, que ce n'était rien d'autre que des mots un peu inhabituels.

Mais il ne réussit même pas à s'en convaincre lui-même. Si ce n'était rien, alors pourquoi se torturait-il la tête avec ces quelques paroles de sa Némésis ? Pourquoi sa voix le rendait aussi pathétique ? Pourquoi se retrouver aussi proche de lui faisait se dérober le sol sous ses pieds ?

Et c'est ainsi qu'Harry passa une nuit blanche.

Dimanche 13 Novembre, 20h37 :

_ Comment ça ''c'était rien'' ?! s'époumona Blaise en entrant dans la chambre de son meilleur ami.

_ Écoute… Il m'a ignoré, je l'ai plaqué contre un mur, je l'ai menacé et c'est tout ! mentit Draco presque naturellement.

_ A d'autres, Draco ! Tu ne réussiras pas à me faire gober ça !

Le mulâtre lui développa pour la sixième fois ses arguments plus que biens fondés sans le lâcher d'une semelle et Draco sentit la colère gronder en lui.

_ Mais il te faut quoi pour me croire ? lâcha finalement le blond en se retournant brusquement vers le brun.

Blaise tannait son ami depuis plus de dix minutes en lui demandant de s'expliquer sur son comportement avec le Sauveur. Il remuait lentement le couteau dans la plaie sans en avoir vraiment conscience et Draco voulait juste lui crier « Continue, tu vas atteindre l'os ! ». Il n'avait vraiment aucune envie d'avoir cette discussion. Ni avec Zabini, ni avec quiconque. Pour l'instant tout ce qu'il voulait c'était pouvoir faire son ermite pendant au moins dix jours sans que personne ne vienne le déranger et ensuite peut-être qu'il songerait à aviser d'un potentiel comportement à adopter.

_ Regarde-moi dans les yeux et jure-moi que tu ne me caches rien, fit le mulâtre le plus sérieusement du monde.

Draco eut un rire sarcastique devant le ridicule de sa réponse digne d'un Poufsouffle de première année mais il cessa rapidement en croisant les yeux de son meilleur ami. Il ne lui laissait pas le choix. Et c'était le seul moyen pour qu'il le laisse tranquille.

Le blond prit donc une grande inspiration et se plaça face à Blaise. Il le fixa droit dans les yeux quelques secondes mais dans son regard presque noir, il sentit son âme se faire autopsier et sa détermination se faire émincer. Les deux garçons se connaissaient, pour ainsi dire, depuis toujours et Draco ne se souvenait pas lui avoir déjà menti pour autre chose qu'une part de gâteau dérobée. Et il était certain qu'il en était de même pour son ami. Son regard s'abaissa lentement sous la honte qui l'envahissait et ses mots sonnèrent comme une excuse :

_ J'ai juste pas … la force d'en parler, ok ? articula-t-il difficilement.

_ Ok… Je comprends, répondit-il doucement. Mais tu vas quand même m'en parler parce que je ne veux plus te voir te morfondre sans en savoir la raison, trancha le noir.

Après plusieurs arguments et contre-arguments, Draco finit par plier et se retrouva assit face à son ami qui n'attendait plus qu'une seule chose : qu'il se confit. Le blond le prévint qu'il n'allait pas s'en remettre et lui raconta le peu qu'il y avait à dire sur les événements de sa fin de journée, tentant d'expliquer au mieux son attitude. Et tout ce que Blaise trouva à répondre fut :

_ Attends … Tu craques pour Potter ?

Draco sourit tristement et laissa échapper un énigmatique « Si seulement ». Il baissa les yeux, tentant de trouver les mots justes qui pourraient exprimer le tourment qui l'habitait.

_ Pendant la guerre, quand Tu-Sais-Qui est arrivé à Poudlard après avoir affronté Har-Potter … Comme tout le monde, j-j'ai cru qu'il était mort, lâcha-t-il d'une voix incertaine. J'ai vraiment cru que je ne le reverrai plus jamais. Je me suis mordu l'intérieur des joues jusqu'au sang pour ne pas dire un mot, pour ne pas … lâcher une larme. C'était une torture, cette douleur mentale est insupportable. C'est une réalité qui s'accroche à toi, une voix que t'arrive pas à faire taire. Et c'est là, juste là … dans ton esprit, et tu veux juste t'en débarrasser quitte à t'arracher la tête, tu veux juste pouvoir fermer les yeux une seconde. Quand je l'ai vu … j'ai voulu mourir dans la seconde pour ne plus ressentir rien du tout, pour ne plus rester planté là, impuissant, à supporter cette vision, cette idée qui me déchirait lentement … Tu te rends compte ? J'ai voulu mourir pour ce crétin…

Au fil de son récit, sa voix baissa d'intensité jusqu'à ce qu'elle s'éteigne, comme un feu oublié qui se meurt lentement au fond de sa cheminée. Draco fixa le sol d'un air absent un instant avant de relever brusquement la tête vers son ami et de conclure rapidement d'un « Alors non, je ne ''craque'' pas pour lui ».

Blaise était complètement sous le choc. Il se posait mille questions à la seconde. Comment son meilleur ami avait-il put garder tout cela caché en lui ? Depuis combien de temps le blond gardait-il cela pour lui ? Comment faisait-il pour tenir ? Comment avait-il fait, lui, pour ne rien voir ? Comment avait-il put être si aveugle ?

_ Tout le monde dit qu'à notre âge l'amour est léger et éphémère, pourtant cela va faire quatre ans que j'essaie de me débarrasser de mes sentiments. Tout le monde dit qu'à notre âge l'amour est un jeu superficiel, mais pour moi c'est plus un cauchemar qu'autre chose. Tout le monde dit que le temps n'attend pour personne, mais je l'attends toujours, lui, et je ne crois pas être capable d'arrêter un jour. Parce que je ne veux pas qu'il réalise que je suis celui qui lui faut juste au moment où j'aurais cessé de l'attendre.

_ Mais … Tu tiens depuis quatre ans alors pourquoi aujourd'hui ? demanda Blaise, incertain.

_ Tu sais ce que ça fait de te dire au moins quinze fois par jour « Attention, ne te mets pas à espérer. Reste à ta place. » ? De devoir jouer la comédie, l'insulter pour ne pas éveiller les soupçons ? De te lever tous les matins en sachant qu'il est avec quelqu'un d'autre ? Une fille ? Que tu ne l'auras jamais parce qu'il n'est pas intéressé par les hommes ? Parce que pour lui tu resteras toujours son ennemi ? Parce que ça fait trop longtemps que tu joues au petit con pour qu'il réussisse à te voir autrement ? il fit une pose pour tenter de reprendre son calme. J'en peux plus Blaise. Voir cette … Weasley lui sauter dessus à chaque tournant … Ne pas pouvoir faire deux pas sans la voir collée à lui… Alors aujourd'hui j'ai craqué. Je lui ai dit un truc vaseux et il ne le prend pas comme je pensais qu'il le ferait.

Draco poussa un long soupir et laissa tomber sa tête dans ses mains. Il lâcha un petit « Je suis qu'un abruti » qui fit mal à son meilleur ami, puis conclut ironiquement en disant :

_ Je l'aime aussi résolument qu'un vieux sage et aussi stupidement qu'un adolescent…

A suivre.

Les reviews ne sont pas obligatoires mais quand même chaudement appréciées étant donné que si je publie ici c'est pour partager :)