Tu claques le magazine sur la table basse devant toi d'un geste rageur, avant de t'effondrer dans le canapé. Tu fixes le plafond un instant, puis laisses ton regard glisser sur le mur en face de toi pour finir ta course sur le sol. Blanc. Un blanc immaculé qui t'agresse les yeux et contraste particulièrement avec les meubles d'ébène qui agrémentent la pièce. L'ensemble a l'air inhabité tant la décoration est inexistante. Aucun tableau, aucune photo, pas une salissure ne pourrait laisser penser que quelqu'un vit dans cet appartement de haut standing – et pour cause, tu ne fais qu'y survivre. Tout te paraît vide. Tout est vide. Ton estomac, puisque tu n'as rien avalé depuis ce matin ta vie sociale, emplie de gens inintéressants ton âme, que tu as lavée de toutes sensations. Seul ton cœur bat encore un peu plus vite lorsque tu la croises.
Haute perchée sur ses escarpins, sa silhouette finement galbée dans son tailleur, son petit air mesquin plaqué constamment sur le visage. Elle te snobe deux fois par jour – matin et soir. Elle porte sa longue chevelure blonde relevée en un chignon serré – elle sait que tu as horreur de ça. Mais tu sais qu'il y a pire que son insolence affichée clairement. Il y a son absence. La cruelle absence qui a laissé une brèche béante dans ta poitrine. Ce trou qui te fais te sentir si petit, te fais haleter lorsque tu respires et qui remplace l'appétit. Tu la détestes autant que tu l'aimes, c'est-à-dire beaucoup. Elle se joue de toi, marionnette entre ses mains. Tes amis t'avaient prévenu mais tu ne les as pas écoutés. Pourquoi l'aurais-tu fait ? Tu viens d'une famille noble et personne n'a à te dicter ta conduite.
Mais revenons-en au journal.
Tu l'as projeté avec une telle véhémence qu'il est tombé sur le sol. Bien entendu, tu ne t'es pas penché pour le ramasser. Quelle importance, penses-tu ? Aucune. Mais à présent son magnifique sourire te dédaigne depuis la première page où une photo d'elle et son nouveau fiancé s'étale dignement. Tu as vaguement parcouru l'article, ne prêtant pas réellement attention aux propos du journaliste. Tu as appris à t'en méfier depuis ta rupture si médiatisée. Néanmoins, tu sais qu'il dit vrai, qu'elle t'a déjà remplacé. Elle en a le droit, bien sûr. Mais cela t'étreint douloureusement le cœur.
A Poudlard, tu n'avais pas réellement fait attention à elle. Tu ne te préoccupais pas de grand-chose, à vrai dire. Lorsqu'elle était arrivée dans la salle commune, tu étais déjà en troisième année et bien trop occupé à te pavaner pour accorder le moindre intérêt aux plus jeunes. Ce n'est qu'à la fin, lorsque au pied du mur tu étais mort de trouille, incapable de prendre la moindre décision, que tu as remarqué son existence. Elle t'a pris la main sans un mot. Et tu l'as suivi. Etais-ce l'instant, si empli d'émotion ? Ou ses yeux brillants à la façon du Cristal ? Tu ne le sais toujours pas vraiment, mais tu es tombé éperdument fol amoureux.
Votre idylle a duré quelques mois. Tu y croyais sérieusement. En fait, lorsque son regard a croisé le tien, le monde a cessé de tourner autour de ta petite personne. Elle devenu le centre gravitationnel de chaque chose à tes yeux. Le problème lorsque l'on est épris, enflammé, c'est que l'on devient totalement dépendant. Un peu comme une drogue, tu avais besoin d'elle chaque jour, chaque heure, chaque minute. Au point que ta passion l'a étouffée et qu'elle t'a fui – prétextant que tu n'étais plus l'homme dont elle s'était entichée.
Astoria Greengrass a décidé de se marier. Demain. Avec un autre que toi.
Il est temps de réagir, Malefoy.
