Le poste numéro 4 était en effervescence ce soir là. Tous les agents du poste s'activaient pour pouvoir rentrer chez eux au plus vite. Depuis plusieurs jours, des bombes éclataient un peu partout dans la ville de Toronto et malgré la coopération de tous les postes de police, aucun indice n'avait été récolté pour retrouver le ou les auteurs de ces attentats.

Le niveau d'alerte était à son maximum. Mais ce soir là deux hommes étaient particulièrement inquiets.

« Murdoch, cette situation ne peut plus durer. Nous ne pouvons pas vivre avec cette peur perpétuelle qu'il nous arrive quelque chose ou bien à nos familles. Il faut trouver une solution et vite »

L'inspecteur Thomas Brackenried était tellement agité et nerveux que le verre de Whisky qu'il tenait dans sa main menaçait de se renverser à tout moment.

William Murdoch se frotta les tempes. Toute cette histoire n'avait pas de sens. Pourquoi voulait on s'en prendre à d'honnêtes gens ? Les terroristes avaient posé leurs bombes à différents endroits de la ville qui n'avaient aucun lien entre eux : une bombe avait d'abord explosé chez un bijoutier, puis dans une boucherie et la dernière avait explosé hier dans l'après midi dans une usine désaffectée.

William commençait à penser que seule la terreur motivait les poseurs de bombe. Leur seul but était de plonger la ville de Toronto dans un climat de peur extrême pour obliger les habitants de la ville à se barricader chez eux. Mais dans quel but ?

La situation était si critique que le maire de la ville avait décidé d'instaurer un couvre feu. Comment prédire quel bâtiment allait être la prochaine cible de ces terroristes ?

Chaque soir, depuis maintenant une semaine, l'inspecteur et William restaient au poste de police au cas où l'enquête progresserait.

Brackenried avait préféré envoyer Margareth et les enfants chez sa sœur le temps que tout danger soit écarté. Il souffrait de leur absence mais il pouvait garder la tête froide au travail en sachant qu'ils étaient tous les trois en sécurité.

William allait répondre à son supérieur lorsqu'une femme se jeta dans ses bras. Il reconnut immédiatement son parfum et resserra son étreinte autour de sa taille.

« William je m'inquiète tellement pour vous » Elle avait murmuré ces paroles au creux de son cou, refusant de le lâcher une seule seconde.

William l'écarta pourtant un peu de lui pour pouvoir croiser son regard « Julia vous savez à quel point c'est dangereux de parcourir toute la ville en ce moment »

Julia croisa les bras, déterminée à ne pas se laisser faire « Dans ce cas je reste avec vous »

William soupira longuement « Julia vous savez que je n'arriverai pas à me concentrer si je sais que vous êtes en danger. Rentrez chez vous s'il vous plait avant que le couvre feu ne commence »

« Hors de question William. Je ne bougerai pas d'ici »

Désespéré, William supplia du regard l'inspecteur de lui venir en aide.

Brackenried s'approcha du couple « Ecoutez Murdoch, cela fait une semaine que vous êtes coincé ici. Pourquoi ne pas rentrer avec le docteur ce soir et vous reposez un peu ? »

William n'en croyait pas ses oreilles « Mais Monsieur, vous avez besoin de moi au poste. Vous ne pouvez pas assurer la sécurité de Toronto seul »

« Murdoch j'ai des hommes avec moi et pour l'instant il n'y a rien que nous puissions faire de plus. De plus je crois savoir qu'une certaine personne aimerait passer un peu de temps en votre compagnie » Brackenried fit un clin d'oeil à William qui se mit à rougir l'espace d'un instant. Il se retourna vers Julia qui patientait avec un petit sourire aux lèvres.

William se perdit dans la contemplation de ses yeux pendant quelques instants. Depuis combien de temps n'avait il pas eu la chance de pouvoir passer un peu de temps avec elle ? Ils ne se voyaient que très rarement, chacun étant absorbé par son travail.

Cette soirée était tout ce dont il avait besoin. Il fouilla dans la poche de son pantalon et soupira intérieurement de soulagement. La bague était toujours dans sa poche, attendant le moment parfait pour être offerte à celle pour qui elle était destinée. Cette soirée était peut être la seule qu'ils allaient passer ensemble avant longtemps et William ne comptait pas laisser filer sa chance.

« Bien Monsieur, si vous n'avez plus besoin de moi je vais me retirer »

« Profitez de cette soirée pour vous détendre Murdoch. Je suis sûre que le docteur a quelques idées en tête pour vous relaxer »

William se racla la gorge brièvement, quelque peu gêné puis il marmonna un rapide « Merci Monsieur » avant de tendre son bras vers Julia qui le prit immédiatement.


Ils n'avaient que très peu de temps pour rentrer et William prit la décision de l'amener chez lui. Son logement était bien plus près du poste que ne l'était celui de Julia. De plus, si Brackenried avait besoin de lui, il saurait où le trouver.

William avança d'un pas pressé. Il aurait préféré faire le chemin en calèche mais hélas celles ci avaient interdiction de circuler à partir d'une certaine heure.

Une légère pression sur son bras le fit ralentir.

«Où m'amenez vous William ? »

William se rendit compte qu'il ne lui avait même pas demandé si elle était d'accord pour passer la soirée chez lui.

« Chez moi. Je pourrais dormir plus facilement en sachant que vous êtes en sécurité avec moi »

Julia mit un temps avant de répondre. Elle n'était certainement pas habituée à ce que William se montre si entreprenant et direct. Elle savait qu'il était sous tension et elle n'avait qu'une hâte : arriver pour pouvoir se blottir dans ses bras et oublier le danger permanent qui rôdait autour d'eux à chaque seconde.

Elle lui sourit tendrement et ils reprirent leur route. Ils arrivèrent à l'angle de Queen's street lorsqu'un souffle violent les projeta tous les deux à terre. William entendit des cris avant d'être cerné par le noir total.


William reprit connaissance quelques minutes plus tard soupirant de douleur. Du sang coulait de sa tempe. Son cœur manqua un battement lorsqu'il s'aperçut que Julia n'était pas à ses côtés. Il se leva péniblement regardant tout autour de lui, criant son nom. Ses cris se perdaient dans le tumulte qui régnait dans la rue. Des gens couraient, hurlaient de peur.

William essaya de se frayer un chemin parmi la foule. C'est alors qu'il vit une femme à la chevelure dorée allongée par terre. Il l'aurait reconnu n'importe où. Il s'agenouilla près d'elle et lui prit son pouls. Des larmes coulèrent de ses yeux lorsqu'il sentit les battements réguliers de son cœur.

Il la souleva lentement et fronça les sourcils en sentant une bosse conséquente à l'arrière de sa tête.

« Murdoch ! Murdoch ! »

Brackenried était arrivé sur les lieux en compagnie de plusieurs agents de police.

« Murdoch dieu merci vous êtes sain et sauf. Où est le docteur.. » Ses paroles restèrent en suspens lorsqu'il la vit inanimée.

« Monsieur je dois l'amener à l'hôpital de toute urgence »

« Prenez la calèche Murdoch, nous nous débrouillerons »

Brackenried aida William à installer Julia dans la calèche puis il la regarda s'éloigner en poussant un juron.


William passa la nuit à l'hôpital. Une fois ses blessures vérifiées, William avait installé une chaise à côté du lit de Julia et ne l'avait plus quittée. Le médecin lui avait annoncé qu'il faudrait peut être des heures avant qu'elle ne se réveille. Le choc de l'explosion l'avait projeté à terre plus violemment que William du fait qu'elle se trouvait à ce moment là du mauvais côté.

William s'inquiétait de la bosse qui se trouvait à l'arrière de son crâne mais le médecin lui avait assuré qu'elle finirait par se résorber d'ici quelques jours.

Il finit par s'endormir d'épuisement sa main accrochée à la sienne.

Les rayons du soleil le sortit brutalement de son sommeil. Il leva aussitôt la tête vers Julia qui l'observait avec une pointe de peur dans le regard.

« Julia, mon dieu, vous êtes réveillée. Si vous saviez à quel point j'ai eu peur de vous perdre »

Julia ne répondait pas, se contentant simplement de l'observer.

Devant son silence, William ajouta « Comment vous sentez vous ? Voulez vous que j'appelle le médecin ? »

Julia ouvrit la bouche puis la referma plusieurs fois avant de dire « Peut être pourriez vous me dire d'abord comment vous vous appelez ».