Je te salue, ô public adoré ! Oui, je suis de retour, avec une nouvelle fiction.
Pour mes seize ans, j'arrive avec une nouvelle fanfiction qui devrait être achevée avant fin juin (attention, je suis motivée, là !)
En effet, j'ai creusé ici les raisons qui poussent Neah à tenter d'assassiner Adam. Car dans ma vision des choses, ils sont amants, point (pas de discussion là-dessus !). Mais il est difficile de là de concevoir que Neah ait voulu tuer celui qu'il aimait...
Ce chapitre va sans doute vous paraître obscur, mais je vous assure que c'est normal, puisque ça l'est. Même pour Neah, son argumentation est totalement erronée, il se base et agit sur son impulsivité et ses émotions premières, ce qui le fait courir à la catastrophe. Ainsi, la raison et le pourquoi de ce drame est totalement...Absurde, justement.
Car, bien éloigné de mes écrits humoristiques habituels, c'est bien un drame que je vous livre ici, un drame en un acte seulement composé de quatre scènes, dont la première se trouve ci-dessous.
Je vous invite à apprécier et à intervenir, à laisser votre avis : même deux lignes de commentaires font plaisir !
Bonne lecture.
Musique écoutée durant l'écriture : Aucune (écris en silence).
. Scène 1 : Les conséquences du mensonge .
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On dirait ton regard d'une vapeur couvert ;
Ton œil mystérieux (est-il bleu, gris ou vert ?)
Alternativement tendre, rêveur, cruel,
Réfléchit l'indolence et la pâleur du ciel.
Tu rappelles ces jours blancs, tièdes et voilés,
Qui font se fondre en pleurs les cœurs ensorcelés,
Quand, agités d'un mal inconnu qui les tord,
Les nerfs trop éveillés raillent l'esprit qui dort.
Tu ressembles parfois à ces beaux horizons
Qu'allument les soleils des brumeuses saisons...
Comme tu resplendis, paysage mouillé
Qu'enflamment les rayons tombant d'un ciel brouillé !
Ô femme dangereuse, ô séduisants climats !
Adorerai-je aussi ta neige et vos frimas,
Et saurai-je tirer de l'implacable hiver
Des plaisirs plus aigus que la glace et le fer ?
« Ciel brouillé » Baudelaire, les Fleurs du Mal
.
« Adam ? » chuchota la voix de Neah à son oreille.
Le timbre de son amant était anormal. De tout temps, lorsque son Musicien lui parlait la nuit, le réveillait ou discutait au réveil, son ton était exalté, ou bien calme et apaisé, mais toujours avec une note de prudence. Comme s'il avait peur de briser ces instant de plénitude parfaite en s'exprimant trop vivement. Rien de tout cela ici. Au contraire, même. L'élocution de Neah était imparfaite, il y régnait une faille perturbante.
Alors, Adam comprit. Elle tremblait. La voix de son amant était décidée, mais imprécise, il semblait sangloter et être persuadé du mal qu'il se faisait à lui-même, pourtant apparemment inévitable. Peu importe les événements futurs, il s'était produit quelque chose qui avait profondément perturbé Neah, un fait si rare qu'il pouvait compter sur sa famille le nombre de fois où il avait surprit son Musicien sur le point de verser des larmes.
« Neah ? s'inquiéta-t-il soudain tout haut. Ça ne va pas ? »
Non, ça ne va pas. Pas du tout.
''Il ne t'aime pas'', disait Mana, et la phrase tournait dans sa tête.
Il ne t'aime pas, il ne t'aimera jamais.
Jamais, tu comprends ? Jamais, tu saisis, Neah ? Jamais ! Tu m'entends ? Jamais !
Jamais, jamais, jamais !
Ah oui ? Il ne m'aime pas, Mana ? Il ne m'aimera jamais ? Mais qu'en sais-tu, mon frère ?
Neah déglutit bruyamment, ce qui fit sourire Adam. Dans un noir pourtant absolu, ce fut soudain comme si son amant avait allumé la lumière il voyait la chambre telle qu'elle était éclairée par le soleil d'une fin d'après-midi. La pomme d'Adam de Neah qui tressautait -sa pomme, la partie de Neah qui était en sa possession-, son amant assit à moitié penché sur lui, la main en l'air, hésitant à la poser sur son corps, vaguement revêtu du drap mauve et de la couverture bleue à rayures violettes. Le lit double en bois d'érable taillé et gravé des feuilles du même arbre, le montant derrière sa tête, le sol parqueté, la porte en chêne épais, la grande armoire marbrée et solide qui conservait ses affaires, la commode élégante et vernie où Neah entreposait les siennes, les rideaux bleu léger, presque turquoise, fins et transparents, qui laissaient percer la lumière qui illuminait Neah.
Parce que c'était lui, Neah. Avant tout et toujours lui. Neah.
Il n'y avait même que lui. Tout disparaissait à l'instant où ses pupilles étaient accrochées par les prunelles de son Musicien, qu'il y contemplait les étoiles scintillantes qui s'y complaisaient lorsque le Quatorzième était à ce point prêt à pleurer, qu'il laissait son regard glisser le long de l'arête adoucie de son nez, de ses pommettes hautes et des fossettes de son sourire, de la courbe parfaite de ses lèvres et de celles-là mêmes, fendillées par leur assèchement. Ses mèches châtains, également, bordant l'arrondi du visage, cette toison fauve qui bougeait à la fois le suivant et pourtant indépendamment de ses mouvements.
Il n'aurait jamais besoin de lumière pour voir le visage de son amant, son cou mince tendu vers lui, le pli de son ventre causé par la torsion pour pouvoir le regarder, lui, Adam; et le reste, piètrement caché sous le tissu lilas, alors que Neah lui souriait de toutes ses dents, rassasié et embellit par les rayons couchants.
Un reniflement mouillé de son amant le rappela très vite à la réalité. Car ici, cette idée si attrayante n'avait pas de place. Neah ne souriait pas, il était très éloigné de cette image resplendissante. Il n'avait rien ni d'heureux ni de repus, il semblait désespéré et au plus mal.
« Neah ? Qu'est-ce qui se passe ? »
De toute évidence, ils n'étaient pas attaqués, ou Neah aurait été pragmatique et rapide, décidé et il ne s'était rien passé durant la journée qui ait pu le pousser à agir ainsi, ou Neah lui aurait fait part depuis bien longtemps. Non, pour que son Musicien l'éveille ainsi au milieu de la nuit, c'était qu'une de ses réflexions avait mal tourné, qu'il cherchait confirmation ou solution à un problème qui, émotionnellement, était trop difficile à soutenir. Aussi, et malgré son manque d'habitude à gérer le cas Neah, il convenait probablement d'agir comme il avait dû agir pour la totalité de sa famille, c'est-à-dire se faire calme et rassurant. Ils finissaient tous par craquer, un jour ou l'autre, et la plupart du temps ils avaient besoin de lui auprès d'eux. Lui-même, une fois ou deux, avait tenté de convertir Road en psychologue...
« Pourquoi..? »
La réplique presque timide de son amant le fit soupirer intérieurement. Il n'avait jamais été doué pour flatter, changer ou influencer les sentiments des autres, et réconforter les siens avait toujours été une gageure. Mais si, en addition à tous ces faits, Neah s'obstinait à nier le souci qui l'affectait ainsi, ce serait sans doute un échec total. Néanmoins, avant de reprendre la parole, Adam s'interrogea justement sur la phrase de son Musicien. Était-ce un ''Pourquoi se serait-il passé quelque chose ?'' ou plutôt un ''Pourquoi t'en soucies-tu ?''. Indécis, il décida de répondre aux deux.
« Il s'est manifestement produit un événement qui te trouble, Neah. Et cela me cause de l'angoisse parce que je t'aime. »
La seconde phrase, si claire dans sa tête et si naturelle dans sa bouche, sur sa langue, dans son souffle, le troublait tout à coup lui aussi. Certes, Neah était l'un des Noah, et il l'aimait en tant que tel comme le reste de sa famille, mais il avait surtout prit place dans sa tête et annihilé tout rival dans son cœur. Alors si oui, il était tout à fait près à crier en haute société cette certitude qu'il aimait Neah, pourquoi la phrase lui avait-elle semblé si incongrue ? Son Musicien lui-même s'était figé, oubliant d'effectuer les légers mouvements qui le caractérisaient d'ordinaire.
« Vraiment ? s'assura son amant, d'une respiration qui s'accéléra soudain. Tu m'aime ?
– Mais oui, bien sûr, rétorqua-t-il, définitif. Enfin, Neah, ce n'est pourtant pas la première fois que je... »
Adam stoppa de lui-même sa phrase en son milieu. Si, c'était cela, justement, qui perturbait Neah et lui donnait une impression étrange sur les lèvres. Il n'avait, jusqu'à présent, jamais dit à son amant qu'il l'aimait. Il le traitait comme son frère, ne cessait de lui prouver son affection et sa tendresse pour lui, mais cette nuit était bel et bien la première fois qu'il disait ''Je t'aime'' à Neah. Mais en quoi cela surprenait-il son Musicien ? Pensait-il donc que jamais Adam ne lui parlerait de ses sentiments à son égard, supposait-il n'être qu'une passade ?
En sept mille ans... Depuis ma première mort et ma première femme, tu as été le seul, Neah, pour lequel j'ai consentit à quitter cette aura d'invulnérabilité, d'être intouchable, afin de redevenir un humain comme tant d'autre, et de pouvoir t'aimer à ta juste valeur.
Neah-
Il saisit le visage de son Musicien à deux mains pour pouvoir l'embrasser tout son soûl.
« Je t'aime, Neah. »
Collé par obligation contre son visage, il sentit les yeux de son amant s'écarquiller, mais il ne sourit pas dans son baiser. Au contraire, une larme partit de son œil droit et coula le long de la joue d'Adam, lui faisant partager ce chagrin inexplicable. La goutte d'eau qui heurta le dos de sa main, posée sur la peau de lait de la jambe de son Musicien, venait probablement quand à elle de l'œil gauche, supposa-t-il. Cependant, à son grand regret, la cause de la peine de son amant lui restait totalement inconnue.
Il se sépara de Neah pendant un instant afin de reprendre son souffle, devenu erratique, avant de replonger de plus belle vers son amant pour reprendre possession de ses lèvres, de façon plus appuyée, plus passionnée, tout en le serrant fortement dans ses bras.
Je t'aime, je t'aime, je t'aime, je t'aime, scanda-t-il dans son for intérieur dans une tentative forcenée de le réconforter, sans trop oser le dire à voix haute au vu du trouble que ces mots provoquaient chez son Musicien.
Ce fut l'affaire de quelques dixièmes de secondes, un simple mouvement de son amant parmi tant d'autres, ceux qu'il ne cessait jamais d'effectuer, peut-être un peu plus vif néanmoins, et il retrouva avec une dague sous la gorge, la lame d'un blanc immaculé brillant si près de ses yeux qu'il en loucha. Il balbutia quelques mots incompréhensibles, en quête d'explications, mais pour toute réponse, Neah se contenta de lui poser une nouvelle question, la voix larmoyante voir même suppliante.
« Je peux ? »
Adam lâcha un borborygme contenant quelques jurons, un certain nombre d'onomatopées et le nom de son amant, répété jusqu'à l'outrance. L'inquiétude pour son Musicien avait fait place à une panique nettement moins mesurée et s'était en partie mutée en une angoisse qui lui retournait les tripes. Jamais il n'avait vu Neah dans cet état, et il craignait ce dont il pouvait être capable. Puis la lueur surnaturelle de la lame, luisante et blanchâtre dans l'obscurité, lui apporta une soudaine prise de conscience au sujet de ce dont il s'agissait, et l'épouvante le submergea tout à fait. De l'Innocence. Comment Neah avait-il osé emporter ici ce métal impie ?
Puis une nouvelle prise de conscience le saisit. Ce n'était pas si simple, ce n'était pas Neah jouant à un de ses nouveaux jeux stupides et dangereux, agitant inconsciemment une lame fait d'Innocence juste sous son nez. Non, c'était là bien plus que ça, parce que Neah ne jouait pas. Il était très sérieux, bien au contraire. Et les pleurs, la voix tremblante, les gestes malgré tout décidés et la menace présente d'un couteau moulé dans l'unique matière qui pouvait tuer les Noah... Tout cela ne laissait que peu de place pour l'imagination quand aux possibles intentions de son amant. Il voulait le tuer, voilà.
Son Musicien, l'homme qu'il aimait, voulait le tuer. Bien pire encore, Neah, l'homme qui l'aimait, du moins le supposait-il, cherchait à le rayer de la famille Noah... Un extraordinaire frisson naquit dans sa nuque pour se répandre tout le long de sa moelle épinière avant de gagner également les membres supérieurs et inférieurs.
« S'il te plaît ? » implora encore la voix geignarde de son amant dans le vide.
Il n'était pas en état de répondre. Rectification précise : il n'était pas en état de quoi que ce soit, que cela englobe dans l'instant ou dans quelques heures. Bredouillant un charabia incompréhensible, les larmes aux yeux, la seule chose qu'il parvint à articuler clairement fut un :
« Pourquoi ? »
Il fallut à Adam une paire de secondes pour réaliser qu'il venait de répéter à l'identique une des répliques précédentes de son amant, la réplique justement qui avait entraîné ce... désastre. Mais à cet instant précis, le Comte était bien trop occupé à fixer les lèvres de son Musicien, attendant désespérément une réponse, pour s'attarder sur l'ironie mauvaise de la situation.
Adam vit soudain une perle de sueur scintiller sur la lèvre supérieure de son amant; il rêva brusquement de venir la cueillir, de se relever vers Neah et de goûter sa saveur délicieuse, passionnément. Son Musicien semblait avoir perdu la raison, mais pourtant Adam ne rêvait que de l'embrasser. Il était fou de constate à quel point Neah lui était vital, à quel point il l'aimait. Et pourtant...
« J'en ai besoin, supplia alors la voix déformée et totalement surnaturelle de son amant. Je t'en prie, j'en ai besoin... »
Adam le considéra encore une minute, résista à la forte tentation de le renverser pour capturer ses lèvres et s'unir une nouvelle fois à lui. Il lui sourit avec tendresse, une chose qu'il n'avait jamais expérimentée auparavant mais qui était incroyablement naturelle.
« Non, Neah, déclara-t-il d'une voix ferme. Tu ne peux pas. »
Il arborait un sourire sincère, et avait l'impression de faire la leçon à un enfant capricieux. Mais capricieux, Neah l'était, et l'avait toujours été. Il eut été plaisant de se dire que Neah était davantage qu'un enfant, mais au regard de sa courte vie, pour les Noah tout du moins, c'était bel et bien le cas. Et, dans une telle situation, comment interpréter autrement les yeux larmoyants, la voix hésitante et ce petit air contrit qui donnait l'impression qu'il savait avoir fait une bêtise ? Dans ce cas, Adam avait opté pour la solution qui lui semblait la plus raisonnable, en l'occurrence tenter de le raisonner en utilisant une bonne dose d'autorité bienveillante et en adoptant l'attitude d'un adulte protecteur et amusé plus qu'énervé.
Ça ne suffit pas. De toute évidence.
Neah versa enfin librement les larmes qui cherchaient désespérément depuis le début à sortir de ses iris. Inondant son visage, allongeant ses cils en les mouillants, elles tombaient en une pluie lente sur le drap lilas, et malgré ses efforts pour venir les attraper au vol, chacune d'entre elle s'échappait dans une quête éternelle de liberté, qui tournait court en s'écrasant contre le tissu violet. L'une coula le long de l'arête du nez et échoua sur le bout de celui-ci, s'en servant alors comme tremplin, profitant d'un sursaut en avant de Neah pour bondir sur la joue d'Adam. La dague d'Innocence s'enfonça si loin dans son organisme qu'il se contracta sous le choc, tentant d'ignorer la brûlure atroce que la matière impie occasionnait dans son corps. Il était nettement moins sensible que ses frères à l'Innocence, ce qui déstabilisa par ailleurs Neah, mais l'élancement que la plaie causait lui tira néanmoins un gémissement qu'il trouva retentissant dans le silence parfait de la chambre.
Horrifié par la révélation qu'il avait visiblement échoué à le tuer, Neah posa une main sur sa bouche dans le vain espoir de retenir un hurlement qui sortit muet. Adam se releva légèrement pour retenir son amant qui s'éloignait progressivement, bientôt à la limite du lit et prêt à chuter hors de celui-ci. Il couvrit les doigts de son Musicien des siens, et les agrippa avait toute la force dont il pouvait faire preuve dans son état, mais ce geste l'affola encore un peu plus et Neah retira vivement sa main, reculant précipitamment à quatre pattes et échouant du lit.
Il secoua la tête, voulu se ruer hors de la pièce, tourna à l'intérieur telle une sauvage enfermée et enragée. Enfin, semblant retrouver une parcelle de son esprit, alors que lui-même haletait sur le matelas en tentant de ne pas s'évanouir de douleur, il ouvrit une passerelle vers l'arche et s'y engouffra.
Adam se leva et eut une horrible grimace en réprouvant sa souffrance, avant de boitiller difficilement à la suite de son amant. Il avait à peine rejoint le passage que celui-ci se scella définitivement, l'obligeant à se traîner jusqu'au lit pour s'affaisser sur la couverture et arracher d'un coup l'arme blanche de sa chair meurtrie. Et réfléchir, aussi, profiter de sa solitude et du néant de ses émotions pour faire une synthèse de la situation.
Neah avait voulu le tuer.
Comment avait-il pu penser à l'instant qu'il ne ressentait plus rien ? C'était impossible de ne pas réagir, ne pas plonger et espérer ne jamais refaire surface.
Neah avait tenté de le tuer.
Il ne pleura pas : il était au-delà des pleurs, des lamentations et de toute notion de mal ou d'affliction.
Neah avait voulu sa mort -son univers avait disparu, il se retrouvait seul dans un vide infini- et pour la provoquer, il l'avait poignardé d'une Innocence.
Il resta prostré toute la nuit entre les draps étalés, dans la chambre que Neah avait lui-même consciencieusement verrouillée un peu plus tôt.
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Katsura Hoshino : Personnages et lieux (général)
Kyouyimina Miuya : Intrigue et scénario
