Auteur : Sayuri Nobara
Base : Dio x BIS
Pairing Mikaru x Tsukasa
Disclaimer Le blabla habituel.
Genre Yaoi / Twins, ça se dit? Oo / Dépression... Ne délivrons pas trop tôt la clef de la fin ;)
Music : Epica – Solitary Ground
Note Merci à Phantasmagoria pour, en une simple écoute de la chanson du même nom que le titre de la fic', m'en avoir donné l'idée fulgurante.
Titre Suicide Gemini
Chapitre 1 : Gémellité dépassée


Des éclairs zébraient le ciel, et il pouvait entendre un peu plus loin derrière lui sa mère pester contre le mauvais temps. Il écouta le son étouffé de ses protestations couvert par le tumulte de l'orage et reporta son regard sur la route inondée en contrebas. Parfois, il se disait que ce temps là correspondait à ses propres émotions. Lorsqu'il se sentait profondément mal et désespéré, il se mettait inexplicablement à tonner et à pleuvoir. Comme si le ciel, à son tour, pleurait sa misère.

Il se tenait debout sur le petit balcon de sa chambre, droit malgré le froid qui le faisait trembler, la pluie infiltrant ses vêtements ruisselant sur son beau visage, et clignait des yeux pour faire tomber les gouttes qui menaçaient de momentanément l'aveugler. Il avait besoin de se faire subir cette punition. Il avait besoin de toujours chercher à se faire du mal. Ce n'était pas pour se prouver à lui-même qu'il était plus fort que les autres, non, c'était simplement pour se punir d'exister.

Il baissa les yeux, sentant ses pieds nus engourdis par le froid et frissonna une énième fois. Demain, il serait malade, il pourrait rester chez lui, dans sa couette, sans avoir à croiser le regard de ces idiots qui le regardaient avec curiosité. S'il avait pu faire de ses yeux des armes à feu, combien il aurait été heureux ! Tous les voir s'écrouler devant lui, ces loques humaines, toujours à se vanter et à se moquer des plus faibles... Oh oui, comme il aurait voulu les voir tous morts, tous agonisants, tous gémissants et le suppliant...

Un bruit de pas échappa à son ouïe mais il ressentit sa présence bien avant qu'il ne lui parle. Il pouvait le sentir lorsqu'il était proche de lui, percevoir ses émotions et son angoisse lorsque sa voix s'éleva en tremblant dans son dos.

- 'Nii-chan... Qu'est-ce que tu fais là ?... Rentre, tu vas attraper mal !

Il esquissa un sourire sans joie et se retourna presque mécaniquement vers la silhouette sombre qui se découpait dans la semi obscurité de sa chambre.

- Je vais bien, Tsukasa, ne t'en fais pas...

Pourquoi me mens-tu comme ça... Tu crois que je ne vois pas ce qui se passe ? Pourquoi t'obstines-tu toujours à me prendre pour un enfant ?...

- Rentre, 'Nii-chan, répéta Tsukasa en le tirant doucement à l'intérieur. Viens dans la salle de bain, je vais t'enlever ces vêtements trempés...

Il referma la porte fenêtre et poussa un petit soupir lorsque son frère éternua, puis le poussa sans brusquerie vers la pièce carrelée. Il hésita un moment puis lui demanda de monter dans la baignoire. Mikaru se laisse faire sans omettre d'objection, se contentant de le regarder lui enlever difficilement sa chemise trempée.

- Je peux me laver tout seul, lâcha-t-il un peu plus froidement qu'il ne l'aurait voulu.

Le plus jeune releva les yeux et ses épaules s'affaissèrent alors qu'il détournait la tête. De plus en plus ces temps-ci, Mikaru l'envoyer balader sans lui donner d'explications. Pourtant, ils étaient jumeaux, et Tsukasa n'avait jamais eu d'autre ami que lui. Son éloignement progressif lui faisait terriblement mal au cœur, mais il ne pouvait pas lui en parler. Parce qu'il ne l'écoutait plus...

- Mais tu... Tu trembles de froid...

- C'est normal, j'étais sous la pluie.

- Pourquoi as-tu fait ça ?

Pour faire parler les imbéciles dans ton genre ! pensa amèrement Mikaru en poussant un grognement d'exaspération.

- Ça ne te regarde pas.

- Ah... Nous y voilà.

- Qu'est-ce que c'est que cette réflexion ?

- Qu'est-ce que je t'ai fait de mal, 'Nii-chan ?... murmura faiblement le plus jeune en se voûtant sur lui-même pour ne pas qu'il voit les larmes couler sur ses joues.

Un instant déstabilisé, Mikaru hésita quant à l'attitude qu'il devait adopter puis céda à la compassion et attira son frère contre lui, le bord de la baignoire séparant leur deux corps.

- Gomen ne...

Surpris de ce changement de comportement, Tsukasa ferma les yeux et laissa encore un moment ses sanglots résonner avant de se calmer.

- Ta peau est si froide...

Appuyant ses dires, il fit courir le bout de ses doigts sur la peau blanche de la joue avant de les glisser sur ses lèvres entrouvertes. Un long silence suivit sa remarque, et les yeux plongés dans ceux de l'autre, ils ne parurent pas se douter du temps qui s'égrenait. Au bout d'un moment, ils rompirent le contact visuel lorsque Mikaru lui demanda de monter avec lui dans la baignoire.

- Mais tu m'as dit que...

- Je sais. Mais oublie ce que j'ai dit.

De ces mains tremblantes de froid, le plus âgé voulu enlever lui-même les vêtements de son frère mais Tsukasa l'arrêta en prenant doucement son poignet dans sa main.

- Toi d'abord. Tu dois enlever ces habits trempés...

Ce n'était pas vraiment la seule raison. Ils ne s'étaient pas vus nus depuis l'âge de cinq ans. A présent deux adolescents aux formes plutôt bien faites, il ressentait une certaine excitation à redécouvrir ce corps jumeau. Etait-ce mal ? Il ne s'en sentait pas vraiment coupable... Même, ce sentiment de culpabilité lui procurait un étrange plaisir... Ou bien confondait-il avec autre chose... Il secoua la tête en se souriant à lui-même. Il détacha les derniers boutons de la chemise du pyjama et frotta vigoureusement sa main contre son dos et son ventre pour le réchauffer un peu pendant qu'il s'attaquait au pantalon. Arrivé à son sous-vêtement, il eut un instant d'hésitation et se mit à rougir plus facilement que d'habitude. Bien que la peau froide aurait du le repousser, il ne pouvait au contraire s'empêcher de l'effleurer. Il s'empêcha néanmoins de baisser les yeux alors qu'il faisait glisser le boxer sur les jambes fines de son frère. Celui-ci avait déjà les lèvres bleuies et tentait vainement de s'arrêter de trembler. Rapidement, Tsukasa ôta à son tour ses vêtements, les jeta dans un coin de la pièce et referma le rideau de douche.

- M... Mikaru... Qu'est-ce que tu... ?

Celui-ci venait de se coller à lui, et le plus jeune clignait des yeux d'un air hébété, ne sachant pas trop comment réagir au contact de son corps tout entier pressé contre le sien.

- J'ai... J'ai si f... froid !...

Tsukasa poussa un petit soupir et glissa une main dans son dos tout en actionnant la sortir d'eau. Il agita un moment le pommeau de la douche au dessus de son pied pour vérifier la température avant de le diriger sur eux deux. A mesure que l'eau chaude ruisselait sur leurs deux corps, il sentait Mikaru se détendre et cesser de trembler. Lorsque Tsukasa le vit renverser la tête en arrière pour nettoyer ses cheveux, il eut un petit sourire secrètement heureux de pouvoir de nouveau partager un moment de complicité avec son frère.

- Accroche la pomme de douche, demanda Mikaru en évinçant l'eau de ses yeux.

- Pourquoi ?

Il s'exécuta néanmoins et sentit les gouttes chaudes pleuvoir sur sa tête.

- Tourne-toi, lui demanda doucement son frère aîné.

Un peu surpris, il lui obéit de nouveau et sentit peu après ses mains savonner son dos.

- Ça fait bizarre...

- De ?

- De reprendre une douche ensemble...

- C'est vrai...

- Pourquoi on a arrêté ?

- Parce que deux adolescents ne doivent pas prendre de douche ensemble.

- Pourquoi ?

- Tu es naïf ! s'exclama Mikaru en riant.

- Umpf... Je sais. Alors ?

- Parce que c'est mal vu.

- On s'en fiche !

- Hm. Oui mais lorsque deux personnes assez mûres pour comprendre font ce genre de choses, c'est que généralement elles s'aiment.

- Mais nous aussi on s'aime ! s'exclama Tsukasa en se retournant vers son frère.

Mikaru perdit alors tout sourire et resta immobile, les bras le long du corps, comme une statue.

- 'Nii-chan ?... J'ai dit quelque chose qu'il fallait pas ?... murmura Tsukasa le regardant avec inquiétude.

Tout se passa alors si vite qu'il n'eut presque pas le temps de réaliser. Un instant, Mikaru le fixait intensément de ses yeux noirs, et quelques secondes plus tard, il l'avait collé contre le mur et pressait ses lèvres contre les siennes.

- Arrête ! Qu'est-ce que tu fais ?!

- Tsukasa...

Une langue s'introduisit dans la bouche du plus jeune pour venir chercher son homologue tandis que le corps de Mikaru était de nouveau collé au sien. Les yeux écarquillés, Tsukasa avait le regard rivé sur les yeux mi-clos de son frère qui le regardait pour observer sa réaction.

- Mais... !

- Shht... Laisse-toi faire...

Il sentit des doigts caresser sa hanche puis venir entre ses cuisses pour frotter lentement son entrejambe, et de surprise, il lâcha un petit cri.

- Tu es devenu fou ?!

Les caresses de Mikaru se firent de plus en plus pressantes, et il lâcha malgré lui un gémissement lorsque sa main se glissa un peu trop loin.

- Arrête...

- Ce n'est pas vrai, tu as envie que je continue...

- Non...

- Cesse de faire l'enfant pour une fois...

- Lâche-moi !

Il repoussa Mikaru à l'autre bout de la baignoire de toutes ses forces, et celui-ci tomba lourdement sur le sol, grognant en percutant la surface froide. Sans attendre qu'il se relève, Tsukasa enjamba le bord de la baignoire, attrapa ses vêtements et couru jusqu'à sa chambre pour s'y enfermer. Il repoussa fébrilement le verrou et courut jusqu'à sa penderie pour masquer sa nudité. Il avait encore le cœur qui battait fort dans sa poitrine et eut un petit sursaut en entendant la porte de la salle de bain claquer de l'autre côté du mur. Il revêtit son pyjama puis alla se blottir dans son lit en enfouissant sa tête dans la couette. Il n'avait pas compris pourquoi son frère lui avait fait ça. Il sentait encore ses mains sur sa peau et le goût de sa bouche dans la sienne... Il était si perturbé et sur le qui vive qu'il poussa un cri de terreur en entendant frapper à sa porte.

- Tsukasa ? C'est toi qui a crié tout à l'heure ? Tout va bien ?

C'était sa mère. Il ravala le sanglot qui montait dans sa gorge et lui répondit faiblement par l'affirmation.

- Bien, alors tu viendras manger.

Il aurait voulu lui dire qu'il n'avait pas faim, qu'il ne voulait pas descendre et devoir croiser Mikaru, mais elle avait déjà tourné les talons lorsqu'il retrouva l'usage de la parole. Immobile, il attendit un long moment avant d'oser sortir de la protection de son lit, ses jambes flageolant immédiatement après qu'il ait fait un pas au dehors. Pesamment, il avança jusqu'à sa porte et sorti dans le couloir en écoutant les bruits provenant du bas. Ils étaient tous à table. Il venait d'entendre la voix de Mikaru répondre sèchement à son père qu'il n'avait pas à lui tenir compte de ses occupations. La main de Tsukasa se figea sur la rambarde de bois et il descendit mécaniquement l'escalier, cette simple action lui semblant durant une éternité. Le murmure des voix s'était terni, il n'entendait même pas qu'on l'appelait, son cerveau s'était fermé à toute réception auditive autre que celle de sa respiration laborieuse. Il n'arrivait plus à poser un pied devant l'autre, un seul regard l'avait foudroyé sur place. Son regard. Il le suivait, l'observait, le dévisageait. Tsukasa se sentait complètement mis à nu, non seulement physiquement avec leur douche commune, mais aussi psychologiquement. Il lui semblait que Mikaru avait établi une sorte de contact encore plus fort avec lui, mais contre son gré. Il faisait une intrusion dans ses sentiments et son intérieur avec une soudaineté déconcertante. Enfin, son frère battit des paupières presque imperceptiblement et le son lui revint en même temps qu'il reprenait pied dans la réalité.

- Tu rêves ? Allez, viens t'asseoir.

Sans trop comprendre, Tsukasa s'assit aux côtés de son aîné sans le regarder, mais une légère rougeur lui montait sournoisement aux joues. Son riz ne lui avait jamais paru si insipide. Il tenait vainement de repousser l'idée qu'il n'avait jamais rien goûté d'aussi délicieux que la langue de Mikaru contre la sienne, il fut bien obligé de s'avouer vaincu. Il se troubla davantage en réalisant que c'était son premier baiser... Il reposa brutalement son bol sous les regards étonnés de ses parents.

- Ça ne va pas ?

- Je me sens mal... Je crois que je suis malade... Je vais me reposer !

Il quitta la table sans rien ajouter d'autre et ne se retourna pas pour constater que le reste de la famille s'interrogeait des yeux. Il se laissa tomber sur le sol de sa chambre et se mit à pleurer sans comprendre pourquoi, avant de ramper vers son lit comme une âme en peine. Secoué de sanglot, replié sur lui-même, il sentait comme la nécessité écrasante de se vider d'un sentiment nouveau trop écrasant. En quelques minutes, son point de vue sur son jumeau avait changé du tout au tout. Il l'avait toujours considéré comme son égal, sa moitié, et il se trouvait à présent devant un fait indéniable : Mikaru était aussi un garçon. Il avait des désirs, des pulsions, il était comme un autre. Mais le voir sous cet angle là lui faisait peur. Il ne le comprenait plus. Il avait changé, et Tsukasa n'avait jamais voulu perdre son innocence enfantine. Il ne voulait pas croire que son frère lui avait fait des attouchements dans le but d'aller encore plus loin dans sa faute. C'était impossible à concevoir. Et pourtant...

OoO

Deux jours qu'il ne lui avait pas adressé la parole... Deux longues journées d'éternité qui pesaient sur son cœur comme une masse lourde de reproches. Il sentait dans ses gestes qu'il lui en voulait, qu'il n'avait pas compris pourquoi, qu'il s'éloignait pour ne pas se blesser davantage. Avait-il bien fait d'être aussi soudain ? Mais de simples mots auraient-ils eu assez d'impact ? Il n'avait pas pu retenir le désir de le toucher, mais peut-être aurait-il du se forcer en fin de compte... Peut-être qu'il aurait eu une meilleure chance de lui faire comprendre ses sentiments... Sa main s'abaissa brutalement sur son poignet et il serra les dents lorsque la lame entailla la chair. Il était seul à cette heure-ci, seul dans la maison autant que dans son cœur, et il préférait qu'il en soit ainsi. Après tout, plus il s'enfonçait, plus Tsukasa se détachait de lui, ainsi son jeune frère serait préservé de la souffrance qu'il aurait pu lui infliger. Tout était pour le mieux finalement... Il cligna des yeux alors que des larmes lui obscurcissaient la vue. D'une main, il appuyait fermement sur son poignet pour que la plaie ne se referme pas et laisse goûter son précieux fluide. Des billes rouges dévalèrent le côté du bras blanc avant de s'écraser sur le mouchoir, mais il n'en était pas satisfait. Il appuya davantage encore, et une grosse goutte s'échappa, bientôt suivi par un filet rougeâtre. La douleur irradiait dans la blessure, mais en comparaison de celle de son cœur, elle était bien moindre. Il avait simplement besoin d'extérioriser. Certains écrivaient, d'autres n'avaient pas la chance d'être doués avec leurs mots et ne trouvaient de consolation que dans la dégradation physique. Mikaru se demandait comment les autres faisaient pour être aussi aveugles, pour ne pas se rendre compte de sa lente déchéance. Il ne faisait pratiquement rien pour cacher ses plaies, bien que ses bracelets à outrance le préservent des regards indiscrets. Le métal froid contre la chair à vif lui valaient de bien nombreuses mimiques de souffrance, mais au fil du temps, il avait fini par adapter son visage à l'impassibilité. Cependant, cette accoutumance l'insatisfaisait et l'exaspérait. Il lui en fallait toujours plus. Les cicatrices s'amoncelaient sur ses bras, si bien que la peau semblait devenue insensible à cet endroit. La rage d'être impuissant combinée à celle du désespoir le torturait sans cesse, ravivée par le sentiment de vide en lui qui se creusait un peu plus ces derniers temps. Sa faute avait été d'avouer maladroitement à son jumeau qu'il le désirait. Il n'avait pas eu le temps ni la délicatesse de lui faire plutôt sentir l'amour réel qu'il éprouvait pour lui, comment devait-il le voir à présent ? Il avait beau se dire que c'était tant mieux s'il l'abandonnait maintenant, quelque chose en lui le hantait et l'empêchait de trouver un peu de repos. Il avait besoin de sa moitié, besoin de le voir sourire et d'entendre son rire même si lui n'avait connu que très peu de véritables joies depuis qu'il avait commencé à devenir dépressif.

D'un geste maladroit, il se coupa le doigt et grogna en envoyant le cutter sur le sol, s'adossant mollement à son lit alors que son poignet semblait inerte sur sa cuisse. Il parcourut indifféremment les irrégularités du mur en face de lui et alors que son regard s'arrêtait à la plainte du bas du mur, un bruit sourd le tira de sa semi inconscience. Un léger sourire flotta sur ses lèvres en même temps qu'il imaginait la silhouette dans le couloir. Il entendit les pas hésitants et discrets de son jumeau passer devant sa chambre, faisant mine d'être occupé à autre chose, puis y revenir et s'y arrêter. Il le savait derrière la porte, à écouter si un quelconque bruit lui parvenait, mais Mikaru n'avait pas la force d'aller lui ouvrir. Il se sentait las et dégoûté de tout, de lui, de ses agissements, et de ses sentiments. Il soupira et reporta son regard sur le sang coagulé avant de fermer les yeux. Tsukasa n'entrerait pas de lui-même, il n'oserait pas faire face à un frère ayant trahi sa confiance. Car c'était ce qu'il avait fait au fond, et même s'il pensait que c'était pour le mieux, il ne l'avait pas souhaité pour autant.

- Tu es là ?

Cette simple question rappela le jeune garçon à la réalité, et son premier geste fut de vivement rabaisser sa manche. Pourtant, il savait que Tsukasa n'était pas entré. Un simple automatisme qu'il n'aurait pourtant pas pris la peine d'exécuter s'il s'était agi de quelqu'un d'autre. Il ouvrit la bouche sans y trouver de salive, et se résolut à ne pas répondre. La douleur de ne pas pouvoir partager ses jours avec le plus jeune le détruisait petit à petit, mais il ne voulait pas se résoudre à le reconnaître.

Il pensait que Tsukasa insisterait davantage, car il n'était pas du genre à abandonner si facilement lorsqu'il s'agissait de Mikaru, mais il se résigna au contraire à regagner sa chambre sans attendre davantage.

- Eh... Tu t'en vas déjà ?...

Il se leva avec peine, s'appuyant sur son bras valide, et atteignit la poignée en se prenant les pieds dans son tapis. Il chuta lourdement contre le bras et poussa un son étouffé lorsque son bras heurta le bois, mais se redressa tant bien que mal. Soudainement, l'étendue de ce qu'il semblait perdre lui sautait à la figure. Sans prendre la peine de frapper, il ouvrit d'un geste brusque la porte de la chambre de son frère et le vit se retourner, pétrifié par la surprise et par un sentiment beaucoup plus fort : la peur.

- Mi... Mika...

Le reste du prénom fut étouffé par l'étreinte brutale dont Tsukasa fut gratifié. Ils restèrent ainsi plusieurs minutes, Mikaru avait fermé les yeux et laissait son visage tout contre le cou de son jumeau, bercé par l'odeur de sa peau, tandis que celui-ci gardait les bras le long du corps et les yeux écarquillés.

- Pardonne-moi...

Mikaru se laissa glisser le long du petit corps et se retrouva à genoux devant lui, la tête baissée alors que ses épaules tressautaient au rythme de ses sanglots. Tsukasa le regarda sans bouger et lutta pour ne pas le serrer contre lui.

- Pourquoi...

- Pourquoi j'ai fait ça ?... Parce que... Parce que je t'aime !

- H... Hein ?!

Le plus jeune recula d'un pas alors que la main faible de Mikaru attrapait son mollet sans lui faire de mal.

- Je n'aurai pas du faire ça comme ça... Je n'aurai pas du te forcer... S'il te plaît, oublie, oublie que je suis répugnant...

Ces mots étaient-ils vraiment sortis de sa bouche ? Pourtant il n'y avait pas de doute, Tsukasa venait d'entendre un aveu considérable. Mais devait-il y répondre ?... Accablé par un sentiment brusque de culpabilité, il se laissa tomber devant lui et hésita à poser une main sur son épaule.

- Tu... Tu n'es pas...

- Bien sûr que si... Ne te forces pas à me cacher ce que tu ressens... Tu me détestes, pas vrai ?...

- Non ! Jamais ! Tu es... Tu es mon frère !

- Mais j'aimerai tellement être plus...

Il releva les yeux vers ceux de Tsukasa et les posa douloureusement dans les siens.

- Tu dois te tromper Mikaru, tu ne... Tu ne peux pas m'aimer !...

- Pourquoi ?...

- Mais parce que...

- Parce que je suis ton frère ? Il y a une différence entre devoir et pouvoir. Je ne devrais pas, c'est vrai, mais je ne peux pas taire ce que je ressens...

Un silence suivit ses paroles sans qu'aucun d'eux ne puissent le rompre. Tsukasa ne s'était jamais senti aussi bouleversé et impuissant en même temps. Il ne comprenait pas bien ce qui se passait dans la tête de son compagnon, mais craignait que les tourments qui l'accablaient depuis quelques temps ne soient sa faute. Lorsqu'il baissa à son tour les yeux vers le sol, il remarqua alors que la chemise de son frère, bien que de couleur sombre, était tâchée de quelques gouttes de sang. Piqué par la curiosité, il se pencha un peu plus en avant et attrapa sa main pour la retourner. Il reçut comme un coup dans la poitrine en apercevant les blessures, ayant eu le temps de nettement les observer avant que Mikaru ne le lui retire brutalement, affolé qu'il l'ait découvert.

- Tu... Tu te mutiles ?...

- C'est... C'est pas...

- Ce que je crois ? Et qu'est-ce que je crois au juste ?

L'aîné fixait son cadet en attendant sa réaction, frissonnant d'horreur qu'il ne se mette en colère sans essayer de comprendre pourquoi. Mais il ne s'attendait pas à ce qu'il fonde en larmes.

- Pourquoi tu m'as rien dit ?!

- Tsuki...

- Tu vas mal depuis tout ce temps au point d'en être réduit à ce genre de chose et tu ne m'as rien dit ! Rien !... Mikaru !

Il l'attrapa vivement pour le serrer contre lui, glissant ses mains dans son dos tout en sanglotant sur son épaule.

- Ne pleure pas voyons...

- Tais-toi... Tais-toi...

Ses lèvres trouvèrent les siennes sans qu'ils ne les guident vraiment, et pour la deuxième fois, ils échangèrent un baiser qui n'avait plus rien d'innocent. Agréablement surpris, Mikaru se détendit et se redressa un peu pour approfondir cet échange, une volonté nouvelle prenant naissance dans son cœur.

- Je ne veux pas que tu te sentes obligé de...

- De quoi tu parles ?... Je ne suis obligé à rien... J'avais envie de t'embrasser...

- Vraiment ?...

Leurs doigts se frôlèrent puis glissèrent sur le corps de l'autre avec tendresse, cherchant à le faire pleinement exister devant lui. Mais soudainement, Tsukasa se détacha de son frère.

- Q... Quoi ?

- Qu'est-ce qui nous arrivera ?

- Comment ça ?

- Si on va plus loin, si je m'avoue à moi-même que je ressens des sentiments amoureux pour toi... Qu'est-ce qui va nous arriver ?

- Je... Je ne sais pas mais... Ce sera notre secret... Ne ?

- Mais Okaa-san et Otô-s...

- Ne pense pas à ces deux idiots ! Ils ne me voleront pas le seul bonheur que je pourrais avoir... Dis... Tu m'aimes vraiment ?

- Je n'en sais rien...

- Qu'est-ce que tu ressens lorsque je pose ma main... là ?

Joignant le geste à la parole, il fit glisser sa main sous le tee-shirt du plus jeune et posa sa paume contre le ventre lisse qu'il sentit frémir au contact.

- De la chaleur...

- Quelle sorte de chaleur ?

- Une chaleur qui monte...

- Et si je vais plus bas ?...

- Non !

Tsukasa retint le poignet de Mikaru en lui jetant un regard craintif. Celui-ci y répondit sans le vouloir par une ombre passant sur son visage, alternant son expression.

- Pourquoi ?...

- Parce que... C'est... mal...

- Et alors ?... Si on fait le mal à deux... ça deviendra du bien... Et du bien mutuel ça procurera... du plaisir...

- Attends mais qu'est-ce que tu comptes faire ?! Tu me fais peur...

Encore une fois, il était allé trop vite, emporté par son désir. Le ton apeuré de sa moitié calma ses ardeurs et il se racla la gorge tout en mettant une distance raisonnable entre eux.

- Pardon... J'ai du mal tu sais... A me réfréner...

- Hm... Oui... Je sais...

La gorge nouée, Mikaru se releva et ferma les yeux pour se calmer momentanément. Il commença à prendre le chemin de la sortie en titubant et repoussa Tsukasa quand il voulut le rattraper.

- Non... Je ne veux pas de pitié. Fais le point sur tes sentiments avant de me donner ta réponse.

- Ma réponse ?... A quelle question ?

- Est-ce que tu veux sortir avec moi ?

Sans attendre une quelconque réaction de sa part, il traversa les quelques mètres le séparant de sa chambre et se jeta sur le lit, une cruelle douleur dans le bas-ventre. Allongé sur celui-ci, il respira aussi profondément qu'il le pu avant de se retourner, envahit par une sensation de désir inassouvi. Fixant le plafond d'un regard éteint, sa main droit se déplaça jusqu'à son entrejambe et se glissa dans son pantalon sans plus de cérémonie. Il ne comptait plus les fois où il s'était retrouvé en sueur à rêver du corps nu contre le sien, et la difficulté avait été encore plus grande lorsqu'il avait été sous la douche avec lui. Tsukasa ne s'était pas douté de l'envie mordante qu'il avait provoqué chez lui... Sentir le frôlement de leur deux peaux avait suffit à l'électriser. Il murmura le nom de son frère tout en prenant en main son érection naissante, et se caressa lentement en imaginant que le pouce qui jouait avec son extrémité n'était pas le sien.

- Oh Tsukasa...

Il se mordit violement la lèvre inférieure alors que ses yeux se fermaient d'eux même, commençant à exercer une série de va et vient impatients et brutaux, frustré et quelque part désespéré de ne pas réussir à gagner le cœur de son jumeau. Le plaisir montait doucement en lui, et il s'efforçait de mettre de côté la culpabilité de son acte solitaire, très peu enthousiaste à la perspective de jouir seul. Mais avait-il une autre solution ? Tsukasa refusait qu'il le touche, il n'allait tout de même pas lui demander de faire ce genre de chose !

Ses doigts enserrant le membre allaient de plus en plus vite, mais son visage ne se crispait plus pour la même chose. Il en avait assez de tout ça. Assez de mourir dans son coin, assez de souffrir sans rien dire, assez de n'être rien aux yeux des autres comme aux yeux de son frère ! De rage, il se tendit d'un coup, mais ne ressentit pratiquement rien d'autre qu'une envie de violence pour évacuer. Il retira sa main poisseuse et se rassit sur son lit avant de bondir soudainement au milieu de la pièce et alla percuter de son poing fermé le mur communicant entre les deux chambres. De l'autre côté, le plus jeune ressentit la violence de sa douleur comme s'il recevait les assauts rageurs, et ils le touchaient durement en plein cœur. Il se prit la tête dans les mains et les larmes perlèrent sur ses joues tandis que les bruits sourds continuaient à pleuvoir, creusant la distance qu'il avait cru pouvoir combler entre eux deux.

OoOoO

Mot de la fin : A la base, ce ne devait être qu'un OS, mais les pages s'accumulant et le dénouement se faisant de plus en plus lointain, j'ai été contrainte d'en faire plusieurs chapitres... Très courts cependant, cette fic' ne comportera que 4 chapitres et se terminera... Comme vous le verrez :D Je m'adore parfois...

...A SUIVRE...