Hey !

Alors voilà le dernier machin que j'ai fait pendant le Nano. C'est une idée d'OS qui trainait dans un coin de ma tête depuis un bon moment, que j'ai commencé par le milieu avant de faire le début et un morceau de la fin, et ... Bon ben déjà c'est plus un Os, hein ? Normalement ce sera un three-shot avec une intro, l'intro étant le chapitre ci-dessous. J'ai presque tout écrit, il ne me reste que la troisième partie qui est déjà commencée, donc il ne devrait pas y avoir trop d'attente entre les parties. Si tout va bien.

Aussi, cette histoire tourne autour d'un événement historique, à savoir les émeutes de Stonewall qui ont eu lieu en Juin 1969 à New-York. Il n'y a bien sûr pas besoin d'être calé sur le sujet pour lire, mais retenez juste que c'était pas la joie pour les minorités à cette époque (Vente d'alcool interdite aux homosexuels, aucune loi contre tout ce qu'on appellerait aujourd'hui les LBGTphobies, le travestissement était illégal, tout ça tout ça. Et là j'ai pas parlé de toutes les minorité.) J'ai fait la masse de recherches pour ne pas dire trop de conneries, mais sachez tout de même que cette histoire n'a pas pour but d'être un témoignage historique (déjà, parce que j'étais pas là quand c'est arrivé). J'en reprends les grandes lignes, mais les événements servent surtout de contexte. (Et c'est aussi un gros prétexte pour parler de quelque chose qui me tient grave à cœur, mais je ferai des pavés dessus quand j'aurai tout fini.)

Un énorme merci à Yu et à Aé pour leur relecture et leurs retours !

Bonne lecture !


Au commencement

11 Décembre 1968

La première fois qu'il le voit, Axel est en train de parler avec sa sœur. L'allumé s'appuie contre le comptoir du bar, elle essuie les verres en soupirant parce qu'il est minuit passé et qu'elle crève d'envie d'aller se coucher. Elle a de quoi soupirer, Kairi, quand elle sait qu'elle grappillera trois heures de sommeil maximum avant de se lever aux aurores pour aller regarder le soleil se lever avec Sora. Elle a beau dire, sous ses airs de gamine dure à cuire qui envoie chier le premier crétin venu, elle aime bien les trucs romantiques. Pas tous, mais certains. Les levés de soleil, les fleurs et les films qui font chialer So' sur son épaule.

Il est tard, le coin est plus calme que d'habitude. Sûrement que les clients restants fatiguent sous l'éclairage artificielle, celui qui jaunit un peu leur face, l'unique lumière qui puisse entrer au sous sol. Il y a la musique qui ronronne faiblement, bruit de fond qui ne se remarque qu'entre deux échanges gênants. Les conversations, les éclats de rire gutturaux, les regards éphémères, les mains graveleuses et les baisers dans un coin de la pièce, de part et d'autre de la table ou contre un mur. Les petits curieux et les vieux habitués. L'alcool qui coule dans les gorges, laissant derrière lui une trace brûlante sur les bouches. Rien de nouveau.

Eux, ils sont là à parler, au Destin-inn, où Kai travaille le soir et certaines nuits. Larxene a servi un truc à Axel histoire qu'il "serve économiquement à quelque chose, faute d'apporter quoi que ce soit au bar", et il sirote distraitement. Un demi de blonde, parce qu'il tient à rester un minimum sobre. Il regarde la blonde - l'autre - qui, une fois son travail terminé, s'approche de Marluxia pour l'aider avec son maquillage.

"- Arrête de bouger, j'vais te rater sinon." qu'elle dit, le crayon entre les doigts.

"- Fais gaffe.

- J'fais toujours gaffe.

- Tu m'as mis des particules dans les yeux, la dernière fois.

- Bah c'est le crayon entier que j'vais t'y mettre si tu l'ouvres encore une fois."

Et l'autre ne bouge soudain plus, d'une patience d'or. Quand la serveuse a fini, elle arrange sa tignasse rose bonbon autour de son visage, grimace en voyant les racines brunes qui ont commencé à repousser, attrape un étrange chapeau fait de fleurs en tissu tressées qui sent l'artificiel à des kilomètres. Elle plisse les yeux en observant le résultat, histoire de s'assurer que ça ressemble bien à quelque chose et qu'elle n'a pas perdu son temps.

"- Allez ma belle, t'es nickel comme ça."

La voix de Marlu, quand elle sort de sa gorge alors qu'on voit sa tignasse bien arrangée et son maquillage impeccable, elle surprend un peu. Et puis on remarque ses trains durs, carrés, ses épaules nettement marquées qui tirent le tissu de sa robe, et on comprend. Ça a surpris Axel, la première fois. Des gens comme lui, il en avait jamais vraiment vu avant d'accompagner Kai ici. Il entendait les rumeurs, juste. Les bars de ce genre, où les pédés et les travelos viennent se joindre aux autres rebuts, il connaissait pas trop. Maintenant, c'est un peu son deuxième chez lui.

"-Oh, tu mattes quoi là ?" la blondasse balance méchamment en surprenant le regard du rouquin sur sa protégée.

"- Tes seins. C'est fou comme ils ont l'air bien, t'es sûre que tu t'es pas faite refaire ?

- Crève, t'y toucheras pas.

- Plus, tu veux dire."

Il rit, puis se retourne vers sa cadette. La musique de fond s'est tue pour laisser la place à Dem qui joue dans un coin de la salle, alors il lui faut parler plus fort pour se faire entendre. Fort, mais tout près de son oreille pour ne pas déranger la populace, un jeu d'équilibre vocal.

"- Tu finis à quelle heure ce soir, du coup ?

- 2h. Mais tu peux rentrer si tu veux pas attendre, hein, de toute façon je dois passer voir Riku.

- A une heure pareille ?

- Ça fait deux mois qu'il me doit du fric."

Ax hausse les épaules. Elle est trop gentille, Kai, elle prête quand on lui demande parce qu'elle connait la faim et qu'elle ne la souhaite à personne. Mais le premier crétin qui la prend pour une pigeonne, elle va le choper par la peau du cou pour le mater. Pas étonnant qu'elle s'entende aussi bien avec Larxene.

"- T'es sûre de vouloir aller voir Sora demain matin ? Tu vas être crevée.

-Pour changer."

Ils sourient, du même sourire. Celui de leur père.

D'abord, ce sont des bruits de pas dans l'escalier, celui qui descend vers la partie souterraine du bar - là où tout n'est pas beau, pas très propre. Et puis une tête apparaît, cachée sous une masse de mèches charbon. Il a les yeux jaunes, le type qui vient d'entrer. Pas commun, Axel trouve ça assez joli. Il se demande si ce sont des lentilles. Ces yeux, justement, ils se posent sur lui et ça l'impressionne soudain. Comme deux phares qui se rapprochent, quelque chose de brusque, de puissant. De la détermination, de la rage et un désir inextinguible, c'est tout ce que l'épouvantail trouve dans ces iris solaires. Il ne lui en faut pas plus pour comprendre que le gamin n'est pas arrivé ici par accident. Il sourit. Lui fait un signe de la main.

Le garçon fait quelques pas dans la pièce, le temps de se repérer.

"- Si tu veux commander, c'est par là !"

Sa voix doit porter jusqu'aux oreilles de l'intrus, parce qu'il s'approche après quelques secondes d'hésitation. Ses mirettes scrutent prudemment tout autour de lui, les gens, les tables et les mains glissées dessous, les murs condamnés, sans vitre, la lumière artificielle qui projette partout de drôles de formes. Il entend les voix, sent l'odeur marquée de l'alcool. Ça doit le surprendre un peu parce que l'alcool, si on suit la loi, c'est pas tout à fait légal de le vendre aux tapettes. Et le coin, il est pas réputé pour accueillir les petits fils de bonnes familles biens sous tous rapports.

"- C'est quoi ton nom ?" Axel demande en s'approchant de lui, abandonnant sa sœur qui retourne à la plonge.

L'inconnu le zieute de haut en bas, suspicieux. Il doit se poser la question, sûrement avec tout les types qui s'entassent dans le coin pour passer la nuit. Gay, pas gay ? Bi, peut-être. Pas un drag, il est sapé comme n'importe quel mec qu'on croiserait dans la rue. Drogué il ne l'envisagera pas longtemps, l'enflammé est en pleine possession de ses moyens et ses pupilles sont à peu près normales. Ah, il reste la prostitution. Mais bon, ça n'est pas incompatible avec le reste. Et puis, s'il la consomme pas, la drogue, peut-être qu'il la vend. Parce que ce ne sont pas les gentils fils de bonnes familles qui viennent, mais ça n'est certainement pas le bon dieu qui dirige le Destin-inn.

L'allumé s'amuse de ces prunelles qui le découpent. Lui aussi, la première fois qu'il a accompagné Kairi, il matait les gens pour essayer de comprendre, de deviner. Mais il a plutôt un bon flaire, il ne s'est planté que deux fois. Pour Nami qu'il prenait juste pour une gouine, jusqu'à ce qu'il entende sa voix et comprenne par la même occasion pourquoi elle ne parlait jamais. Et pourquoi elle portait cette perruque blonde, aussi. Puis pour Dem, parce qu'il a parié sur bi et que le joyeux chanteur est "gay comme un pinson", selon ses dires. Mais bon, pour Dem, il était pas loin. Et pour la petite blonde, c'était à moitié vrai. Elle passait juste mieux que Marlu.

"- Vanitas." le dénommé lâche finalement, passé l'instant suspicieux.

- Pas mal. Moi c'est Axel."

Il le regarde, l'air de s'en foutre pas mal. Mais il ne sait ni où il peut s'asseoir, ni à qui s'adresser dans ce lieu particulier, alors il suit quand même le renard qui le guide vers le comptoir avant de lui tirer une chaise haute pour poser ses fesses.

"- T'as envie de quoi ?

- Un truc fort.

- Ouais t'es bien mignon, mais des trucs fort j'en ai des tonnes." Larxene lâche en s'approchant, jugeant le nouveau venu d'un rapide coup d'œil.

Vanitas hésite, regarde le tableau et tout les noms inscrits dessus puis il finit par choisir un peu au hasard. La serveuse repart, Ax s'installe confortablement et il tourne sa chaise vers le louveteau, intrigué par cette nouvelle tête. Ils en voient passer des comme ça, parfois. De jeunes curieux qui viennent voir, et qui repartent pour toujours. Des gays qui cherchent un endroit un tant soit peu chaleur, mais que l'odeur alcoolisée et les lumières sales découragent finalement. Van, il a l'air solide. Sûr de lui. Il a poussé la porte, descendu l'escalier, et le rouquin est certain qu'il reverra sa tête un de ces jours.

"- Alors Van, t'es du coin ?

- J't'ai pas permis.

- Quoi ?

- De m'appeler Van.

- Vani-chou c'est pas mal aussi, mais il te manque l'auréole. Toi t'as plutôt les cornes et la queue, tu vois."

Il dit ça avec un sourire appuyé sur le mot "queue", l'autre le regarde avec condescendance. Ça faire rire Axel, cette tête à moitié blasée qui désespère déjà de la conversation. Mais c'est avec ce genre de conneries qu'il détend les p'tits flippés, à coup de vannes de cul bas de gamme.

"- Et donc, t'es du coin ?

- Mm.

- Tu viens d'emménager ?

- Non."

Dur de lui arracher des mots, à celui là. Mais quand son verre d'alcool arrive, il sirote le liquide et se détend un peu. Il doit se sentir plus à l'aise, à moins que ça ne soit la boisson qui lui délie la langue. Son visage perd de sa dureté, son sourire s'élargit. Un mince filet qui se redresse au coin de ses lèvres, ses yeux à peine plissés, ça lui donne l'air confiant. Et ça lui va bien, en plus.

"- Pourquoi t'es là ?" il lui demande même, en s'appuyant contre le comptoir.

"-De base, parce que j'attends que ma sœur ait fini de bosser." d'un coup de tête, Ax désigne la porte qui mène à la plonge, où on aperçoit vaguement Kairi avec sa vaisselle et sa mousse. "Elle bosse jusqu'à tard et j'aime pas trop quand elle se tape le trajet toute seule à cette heure. C'est pas foufou niveau fréquentation passé minuit, le quartier où on crèche.

- Et en vrai ?

- En vrai, on est sûrement ici pour la même raison."

Ils se scrutent quelques instants, guettent la réaction de l'autre. Pas de dégout, de refus, aucune insulte qui fuse - et pourtant c'est qu'il a l'air d'avoir la langue bien aiguisée, le noiraud. Ça, c'est bon signe. Ça veut dire qu'ici tout va bien. Qu'ici, il peut coucher avec qui il veut, ça ne regarde personne. Le nouveau se détend un peu plus, il se redresse. Son corps est plutôt carré, Axel note. Pas mal. Il cracherait pas dessus.

"- C'est tranquille ?

- Y a des descentes parfois, mais ça va. En général on est prévenus avant, et sinon vaut mieux pas être là, quoi.

- Et ça arrive souvent ?

- Ça dépend. T'as des moments où c'est tranquille, d'autre où les flics se pointent coup sur coup."

Van hoche la tête. Encore, ses yeux font le tour de la pièce, et le rouquin se questionne. Est-ce qu'il a déjà vu une descente, en vrai ? Des bars de ce type, il y en a d'autres. C'est pas le premier ni le dernier, le Destin-inn, à laisser entrer les gens comme eux. Mais le corbeau n'a pas tant que ça l'air familier du coin. Si ça se trouve, c'est juste un gosse qui a fugué de chez lui. Vu l'heure, ça se tient. Ou alors un étudiant qui sort enfin de sa chambre.

"- T'as quel âge ?"

Mais son nouvel ami hausse juste les épaules. L'allumé en déduit que c'est une question à ne pas poser, il n'insiste pas. Pour peu que la bête revienne, il aura tout son temps pour chercher la réponse.

"- C'est bon ?"

D'un geste de la tête, il désigne le verre entre les mains de Vanitas. L'alcool, en dehors de la bière, Axel en boit pas des masses. Ça le dégoûte un peu.

"- Ça va."

L'asperge boit pas vraiment pour le gout, de toute façon. Plutôt pour sentir la tête qui lui tourne, et l'autre doit bien faire un peu pareil. C'est plus simple parfois, de draguer comme ça. On est moins regardant, puis ça désinhibe efficacement. Mais il a pas vraiment l'air d'être très inhibé, lui. Et puis il boit, il boit, mais il tient bien. Axel se demande s'il a l'habitude. S'il boit souvent. S'il a des raisons de le faire. Mais il ne demande pas, pas ce soir. C'est bien trop tôt, et il sent au fond de lui qu'il aura d'autres occasions de le découvrir.


Voilà, j'espère que ça vous aura plus ! La suite devrait se pointer dans une semaine / dix jours, n'hésitez pas à laisser votre avis dans les reviews en attendant !