Chapitre 1 : Sirius

Chroniques d'un évadé

Premier chapitre de "Drabbles musicaux" (Merci à Jyzzlobber qui m'a fait découvrir le concept)

On choisit un fandom, un pairing ou un personnage. On lance le lecteur de musique en mode aléatoire. Le temps d'une chanson, on écrit un petit récit/drabble. On répète l'exercice sur une série de dix (ou plus) chansons. Sans en passer une seule.

Fandom : Harry Potter
Personnage : Sirius Black


Private Property - Judas Priest (4:29)

Il s'avançait d'un pas conquérant, étoile sur terre n'ayant pas d'égal plus brillant. Il ne jeta pas un seul regard à ceux qui l'entouraient, la lumière occultée par lui-même et ses pensées. Droit devant, droit vers les siens, droit vers le destin. Son visage hautain et anguleux ne cilla pas lorsqu'il distingua les silhouettes trépignant d'impatience de ses amis. Sans y prêter attention, il poursuivit. Mais un malicieux sourire éclaira peu à peu son visage, visage rayonnant de joie, joie pure et décidément assumée. Sirius Black était un grand, un très grand enfant. Il se pencha vers ses amis avant de murmurer :
« Ça y est, j'ai réussi. »

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Bad Reputation - Foo Fighters (2:34)

Tout le monde le connaissait. Tout le monde savait qui il était. Sirius Black avait sa réputation, et il en abusait. Sa démarche calculée, ces regards désinvoltes jetés en biais, tout était minutieusement choisi, tout s'emboîtait dans les méandres d'une grande stratégie. Il attirait les regards comme le miel attire les abeilles, sûr de lui et maître des non-dits. Rebelle, incorrigible insoumis, il savait jouer tant avec les opinions que les délits.
Sirius Black avait mauvaise réputation et jamais rien ne lui avait mieux réussi.

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My Apocalypse - Metallica (5:01)

Il cligna des yeux et secoua la tête. Retourné, décortiqué, ce qu'il venait d'entendre n'avait toujours aucun sens dans son esprit. Plus irréel que ce vide dans le ciel, plus improbable que la lueur mourante de cette chandelle. Il leva un regard interrogateur vers son meilleur ami, qui ne pût qu'hausser les épaules avec une moue navrée. Sirius se tassa dans le fauteuil. Il avait besoin de temps. C'était trop brutal. Il avait l'impression d'avoir reçu le coup le plus douloureux, le plus vicieux qu'il y ait jamais eu.
Fâcheuse nouvelle. Douloureuse. Il se recroquevilla, les mains blanches d'angoisse. Son frère. Son unique frère. Un Mangemort. Il se refusait d'y croire, chaque parcelle de son corps se révoltait contre cette fallacieuse affirmation. Son petit frère ne pouvait pas, n'était pas... Comme eux. Comme ces fous, ces fanatiques, qui tuaient sans vergogne, frappaient la nuit, voltigeant de démence au milieu de l'horreur. Non, à seize ans, son frère n'avait pas sa place dans cette guerre.

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Move on Now - Hard-Fi (5:08)

Il s'écroula au sol, s'écorchant les genoux dans les débris épars qui jonchaient l'asphalte. Il aperçut au beau milieu du désastre un cadre brisé, image du passé. Sans qu'il ne puisse les empêcher, les larmes s'invitèrent, baignant son visage ravagé par la douleur, lacérant ses joues. Ses épaules étaient secouées de violents sanglots, comme son cœur l'était d'amers remords. Il pleurait, haine et tristesse mêlées, une vie par la guerre ravagée. Il pleurait l'horreur et l'injustice, haïssant ceux qui au-dehors se réjouissaient. Son meilleur ami était mort. Cœur brisé, âme blessée à jamais, Sirius se releva sur les vestiges de la paix. Partit à la recherche de celui qui avait tout fait basculer, guidé par sa compagne haine.

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Porcelain Heart - Opeth (8:00)

Ses poings s'écrasèrent contre la paroi humide, Sirius hurlait de rage. Il avait été trahi par cette vermine, par ce moins-que-rien, immonde rebut qu'il avait autrefois considéré comme son ami. Lentement, le froid incisif et l'humidité viciée s'insinuèrent en lui. Il se laissa glisser le long du mur suintant. Une vague de désespoir le submergea. Il était enfermé. Il était seul. Perdu au milieu de l'enfer. De la buée s'échappa de sa bouche. Il remua faiblement, sentant une présence s'approcher furtivement. Un bruit de cape. Un souffle rauque. Une indicible terreur l'envahit soudainement. Livide, il voulut hurler, partir, courir au loin, s'échapper, ne pas subir à nouveau la morsure terrible du passé. Il tenta de résister. Tout devint flou. Il entendit des éclats de voix. Une porte claquer. Des pleurs.
Un hurlement résonna dans la nuit. Un rire dément l'accompagna. Sirius fut secoué d'un incontrôlable tremblement. Il était à Azkaban, dans le temple de l'horreur. L'antre du désespoir. Paniqué, il tâtonna autour de lui. Des murs humides. Un sol froid. Il toucha ses vêtements. Une robe grise. Il était avec eux. Avec les prisonniers. Il était l'un deux. Prisonnier là où la nuit était reine.

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Right Now - Van Halen (5:21)

Le soleil était a peine levé. L'aube fraîche caressait son visage. Les arbres autour de lui, l'herbe, l'horizon lumineux. Libre. Il était libre. Son regard se promena tout autour de lui, tandis qu'un sentiment de félicité s'emparait de son être. Un sourire fugace traversa son visage décharné. Aucun nuage ne venait troubler son avenir. Maintenant, la vengeance était à lui, tout près, si près, si attirante. Cette garce l'appelait, susurrait a son oreille.
Trouve-le. Tue-le. Venge-les.
Une regard carnassier s'imprima sur ses yeux gris. Il passa une main dans ses cheveux emmêlés.
Il allait le trouver. L'heure de la vengeance avait sonné, entachant une si douce matinée d'été.

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Jump the Moon - Ozzy Osbourne (2:53)

Il se glissa dans le passage. La nuit était noire. Il prit son élan, et courut. Traversa ce hall qu'il connaissait par cœur. Trouva le grand escalier. Monta les marches deux à deux, toujours plus vite, toujours plus déterminé. Il arriva au septième étage. Parcourut le couloir au pas de course. Un portrait. Haletant, il extirpa le précieux sésame de sa poche. Inestimable papier. Le personnage du tableau le fixa pendant qu'il lui lisait l'un après l'autre les mots griffonnés a la hâte.
Alors que sa voix s'éteignait, l'ouverture béante du portrait fit place au chevalier. Il pénétra dans la salle, le cœur gonflé de rage. Jeta un coup d'œil rapide aux alentours. Avisa les escaliers. Grimpa. L'empressement tambourinait à ses tempes. Si près, il était si près de son but. À quelques marches. À quelques pas. Peter.

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Black Dog - Led Zeppelin (5:13)

Il plia soigneusement la lettre. S'approcha doucement du minuscule hibou avant de la fixer à sa patte. Il le regarda s'envoler sans majesté, l'air pensif. Pourvu que la lettre arrive à temps. Il tourna les talons, sa robe déchirée voltigeant derrière lui, avant de prendre la forme d'un gros chien hirsute. L'animal s'élança souplement dans le chemin de pierre. Il bifurqua brusquement dans les fourrées et déboucha sur une petite clairière. L'homme reprit sa place. Attaché à un imposant chêne, le majestueux hippogriffe planta son regard jaune et acéré dans le sien. Le transperça de toutes parts. Sirius frémit et s'inclina avant d'enfourcher l'animal. Ils s'envolèrent. Droit vers le Sud. Vers des contrées paisibles, vers le futur, dos au passé ils étaient prêts à tout affronter.

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Noon - Éric Serra (4:01)

Il s'avança prudemment dans la bâtisse. Des monceaux de poussière s'accumulaient sur les plinthes rongées. Une atmosphère lugubre régnait. La maison était comme morte, sans âme. Personne n'y vivait depuis probablement des années. Il fit quelques pas dans le long couloir. Évita soigneusement les murs. Il entrevit un rideau qui y était fixé. Continua son chemin. Lentement, presque précautionneusement il monta les marches, une à une. Au premier étage, il avança d'un pas assuré jusqu'à la première porte. Sirius.
Il pénétra dans sa chambre, baignée d'un halo de lumière tamisée. Sa main glissa le long de la poignée, son regard se promena sur les murs, le lit, l'armoire, le bureau, se perdit dans le vide. Il tira la chaise. S'assit. Ferma les yeux. Bienvenue au deuxième enfer.

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Ertrinken - Die toten Hosen (4:13)

Sirius plongea ses yeux dans le fond du verre. Remua distraitement le liquide ambré avant de l'engloutir d'une seule gorgée. Assis seul à la table, il n'était entouré que par sa poussiéreuse solitude, avec pour seule compagne ses morbides pensées. Appuyé contre le dossier en bois, il poussa un long soupir. Sa main courut jusqu'à la bouteille posée non loin de lui. Il se resservit un verre. Le fixa quelques secondes avant de le vider d'un trait. Encore un. Et un autre.
Injustice. La colère l'envahit. Il était enfermé, seul, inutile, noyé face à lui-même, face à ses démons. Et à chaque fois, ils avaient raison de lui.


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