Chapitre 1
Il est une vérité universellement reconnue, c'est que lorsqu'une mère a marié trois de ses cinq filles, elle va essayer tant bien que de mal de marier les deux dernières demoiselles de la maison.
C'était donc à cette tache que s'était attelée Mrs. Bennet. Elle n'avait pas de grands espoirs pour Mary, quoi qu'elle ait fait d'admirables progrès depuis qu'elle était devenue Miss Bennet, mais Kitty, qui allait désormais sur ses 20 ans, devait selon elle, être mariée dans l'année, sous peine de se faire voler la vedette par Maria Lucas. Ce que Mrs. voyait d'un très mauvais œil.
La rumeur courrait en effet, que Miss Lucas avait rencontré à la cour de St James un jeune lord du Kent, et qu'elle l'avait revu à Huntsford. Mais en revenant dans le Herbforshire, elle n'avait ramené avec elle, aucune demande en mariage, aucun sourire béat de fiancée, ni aucune angoisse à l'idée de recevoir une lettre libératrice. Bref rien n'indiquait l'imminence d'une union entre deux jeunes personnes, ce dont Mrs. Bennet ne se réjouissait qu'à moitié.
Mais elle n'avait pas à y penser toute la journée car son esprit était tout entier fixé vers Netherfield Park, qui devait bientôt retrouver des locataires. On ne savait ni quand ils arriveraient, ni qui ils étaient, mais on se posait beaucoup de questions. La chose elle-même n'était pas officielle mais Mr. Morris était venu 5 fois depuis les deux derniers mois, ce qui ne pouvait qu'annoncer l'arrivée de nouveaux locataires.
Comme on l'a déjà dit, Mrs. Bennet avait fort peu confiance en Mary pour attirer dans ses filets un jeune homme raisonnablement fortuné. Elle s'empressa donc d'écrire à son autre fille encore demoiselle, Kitty, qui était partie pour quelques mois chez une de ses sœurs, Elizabeth, dans le Derbyshire. La lettre priait la jeune fille de revenir bien vite, car son amie Maria Lucas était de retour, et que de plus, elle manquait follement à tout Meryton. Vraisemblablement, Mrs. Bennet n'avait que faire que sa fille passa de bons moments, entourée d'amis et d'une société bien différente de celle du Herbforshire. Depuis plus de trois ans, que ses filles aînées étaient mariées à deux des hommes les plus riches d'Angleterre, Mrs Bennet avait espéré qu'un de leurs riches amis s'éprennent de Kitty, mais rien ne s'était produit, et elle était désormais persuadée que ce ne serait que grâce à elle trouverait un époux.
« Je suis bien fâchée, que ni Jane, ni Lizzie, ne cherchent un mari pour leurs sœurs. Elles sont fort riches maintenant, et fréquentent toutes deux une société bien infiniment supérieure à la notre. Les Lucas avec leur cour de St James ont déjà presque fiancé Maria et aucune de mes filles n'aide cette pauvre Kitty. Il va falloir que je cherche moi-même un baronnet ou un Lord…ou un clergyman pour Mary…oui vous voyez ma sœur, j'ai dans l'idée qu'un homme d'Eglise serait parfait pour Mary, elle qui est si pétrie de morale et de réflexion… ce serait parfait pour elle… Oh et Lydia, qui habite si loin de nous maintenant, elle fréquente de nombreux officiers…mais je ne sais pourquoi, on refuse toujours à Kitty d'aller lui rendre visite ! Il est vrai qu'elle aurait pu rencontrer quelqu'un de plus importants dans les cercles que fréquentent Jane et Lizzie, mais il n'y a rien eu d'intéressant de ce coté là que je me dis parfois qu'un colonel, un cadet d'une riche famille ferait l'affaire…des fils de commerçants y cherchent une reconnaissance…ce serait parfait pour Kitty…Oh ma sœur, j'espère que les nouveaux locataires arriveront bien vite ! »
Voilà ce qu'étaient les conversations, ou plutôt les monologues, de Mrs. Bennet lorsque Mrs. Philips venait lui rendre visite. Mrs. Philips qui n'avait pas eu la chance d'avoir de filles écoutait sa sœur, puis lorsque venait son tour, elle parlait de James et Andrew, ses deux fils, de leurs épouses- qui lui déplaisaient de plus en plus- et de leurs enfants. Les plaintes de l'une répondaient à celles de l'autre, sans que les deux parties ne se soient vraiment écoutées. Puis lorsqu'il était temps, un peu après le thé, Mrs. Philips rentrait chez elle.
Mary, elle, avait à son grand dam, fini de relire une énième fois l'ensemble des livres que comportait la maison. Elle s'était assise de si nombreuses heures à son piano, qu'elle n'avait presque plus de partitions à apprendre ou d'airs à perfectionner. La broderie et ses multiples points n'avaient plus aucun secrets pour elle, et l'art des fleurs séchées avaient cessé de l'intéresser depuis bien longtemps. Elle rêvait maintenant de mieux connaître la bibliothèque de Pemberley, et en attendant de pouvoir s'y rendre, elle avait repris l'étude du grec ancien, qu'elle avait sans doutes bien trop négligé. Parfois cependant, elle abandonnait son étude au profit d'une promenade champêtre. Elle marchait seule jusqu'à la lisière de Netherfield Park puis revenait. Une ou deux fois, elle avait pris sur elle d'aller rendre visite à Mrs. Philips ou Mrs. Lucas. Mais ses visites avaient été fort courtes, car elle n'avait pas en elle la capacité de bavarder de choses légères, tels que le temps, les bals, ou la mode de printemps. Il allait sans dire qu'elle n'avait pas de vrai amis parmi les jeunes gens du voisinage, elle se contentait de parler d'un ton souvent bien trop docte et moralisateur, qui effrayait les jeunes âmes et qui fait qu'on ne recherchait pas souvent sa compagnie. Elle ne dansait pas, n'avait aucun goût pour les cartes et les jeux, et ne chantait et ne jouait du piano que d'une façon fort pénible et sans aucune virtuosité.
Cependant, maintenant qu'elle était l'aînée, elle sortait et discutait bien plus qu'au par avant. Et avait du, bien trop souvent à son goût, danser lors des bals qui étaient organisés dans les environs de Meryton.
