Chapitre 1 : Joyeuses insultes

- Il est vachement bien, ton poster, remarqua Alice.

- C'est vrai, approuva Violette.

- Il est à sa place, au plafond.

Reims, 3 avril 2006, vers deux heures de l'après-midi. Les deux filles étaient avachies sur le lit de Violette et scrutaient avec attention le poster accroché au plafond. c'était un poster en papier glacé tout ce qu'il y a de plu banal, à l'exception qu'il représentait Edward Elric. C'était le héros d'un manga dont les deux filles étaient fan. Il était très reconnaissable à son bras mécanique qu'il brandissait justement en avant. Son autre particularité était une taille plutôt petite pour son âge, qu'il ne supportait pas qu'on mentionne. Mais ce n'était qu'un poster. Ces deux choses, Alice en était consciente.

- N'empêche, dit-elle, comme ça, il a pas l'air sympa. T'as vu comment qu'y me zieute ? Tu veux mon poing dans la...

Elle se cacha derrière ses mains. Violette éclata de rire.

- Avec son bras en métal, il risquerait de me faire mal, expliqua Alice. Remarque, il est tellement petit que je ne sais pas s'il pourrait aller jusqu'à ma tête. Oups, ça m'a échappé.

Elles se fendirent la tronche.

- Arrête, conseilla Violette. Il va te haïr !

- Pas grave, son frère va le retenir. Heureusement qu'il est sympa, LUI.

Sur le poster, il y avait en effet le frère d'Edward, qui était en fait une armure.

- T'as vu ? On dirait qu'il fronce les sourcils. Ça doit vraiment le mettre en colère, le petit. Oups, je l'ai encore dit...

- Je pense qu'il ne te croit plus, maintenant.

- Boh, faut pas m'en vouloir. J'aurais pu dire des trucs bien pires. Sans que ce soit faux, d'ailleurs...

- Il va se venger, fais gaffe.

Elle prit un air effrayé.

- Tu crois qu'il va venir hanter mes cauchemars ? Ou qu'il va sortir pour me casser la figure ? Tu me diras, il pourrait bien avoir c'te mauvaise idée, malfaisant comme il est.

- Ce serait marrant.

Alice se redressa.

- Qu'il me casse la figure ? grogna-t-elle en faisant les gros yeux.

- Mais non, qu'il sorte !

Pour la forme, elles se payèrent une tranche.

- En attendant, commenta Alice, c'est marrant d'insulter quelqu'un qui ne peut pas se défendre. Pas vrai, naimbus ?

Et hop, c'est reparti (je me demande bien pourquoi ça les fait marrer). Soudain, Alice se coinça le pied dans celui du lit.

- Aïe !

- Ça va ?

- Je me suis tordu le pied. Je suis sûre que c'est Edward qui a fait ça !

- Tu vois, fallait pas l'insulter. Tu ferais mieux d'arrêter, recommanda Violette avec un grand sourire.

- Tu crois ? Zut alors ! J'aimais bien l'insulter, moi, ce nain. Dommage. J'aurais pu lui dire encore plein de choses.

- Ah oui ?

- Ouais. J'aurais pu lui dire qu'il tenait dans ma boite à bijoux, mais que je l'y aurais pas mis de peur qu'il se fasse écraser par mes boucles d'oreilles, par exemple.

- Pas mal. Mais il est pas si petit que ça...

- Tu crois ? J'ai de grosses boucles d'oreilles, tu sais.

Alice se cassa la figure en descendant du lit.

- Il m'a poussé, cria-t-elle.

Violette faillit s'étouffer à force de rire, bientôt rejointe par son amie.

- Bon, conclut Alice. On va chez moi ? Avant que le petiot m'envoie par la fenêtre.

- Pas de problème.

Violette se leva à son tour. Elles ramassèrent leurs sacs et sortirent.

Ce n'était qu'un poster, elles le savaient. Mais ce qu'elles ne savaient pas, c'est que même les posters ont des oreilles.