Dites-moi que c'est faux. Dites-moi qu'on ma menti.

Dites-moi qu'il n'est pas parti.

A moi qui ne croit pas en dieu, on a dit qu'il était parti avec les anges.

A moi qui ne croit pas au diable, on m'a dit de ne pas m'inquiéter, qu'il était trop bon pour aller en enfer.

Je le sais bien qu'il est bon! Il est la définition même de la bonté.

Je ne crois pas en dieu. Mais lui, c'est un ange. Mon ange. Alors il ne peut pas mourir.

On m'a dit que j'étais fou. Peut-être.

On m'a dit que j'aimais l'inaccessible. Sans doute.

On m'a dit qu'il n'était plus. Jamais!

Dites-moi que je le reverrai.

Que je reverrai son sourire rayonnant.

Que je reverrai ses yeux d'un vert si profond, dans lesquels j'aurai pu me noyer.

Dites-moi qu'il rouvrira les yeux…

Dites-moi que son dernier soupir n'a pas encore franchi ses lèvres si délicates et sensuelles.

J'aurai voulu les goûter, ces lèvres chaudes.

Laissez-moi le temps. Laissez-moi trouver le courage…

Vous me dites que c'est trop tard. Que j'ai gaspillé mon temps, qu'à cause de ma lâcheté, il ne saura jamais.

Mais comment pouvais-je le savoir? Il a pour surnom "le survivant". Il n'était pas sensé mourir.

Pas comme ça.

Il n'a même pas eu le temps de vivre…

Dites-moi que ça ne finira pas comme ça.

On me répond que ça n'a même pas commencé.

Qu'est-ce qu'ils en savent?

Pour moi, ça a commencé depuis bien longtemps.

Depuis que j'ai croisé son regard, depuis que je me suis perdu dans ses yeux.

Ils me disent de me taire. Que c'est indécent.

Ainsi c'est indécent d'aimer? Vous oubliez que sa principale valeur, c'était l'amour?

On me dit que je suis incapable d'aimer. De l'aimer lui.

Je les déteste de dire ça. Ils ne savent rien.

Ils ne savent pas que ma douleur est si forte qu'elle en devient physique.

Ils ne savent pas que je m'accrochait à lui comme à une étoile, pour ne pas tomber dans la boue.

Ils ne savent pas que c'est lui qui m'a sauvé et qu'aujourd'hui je m'en veux d'avoir attendu si longtemps pour lui dire simplement "merci".

Pour lui dire "je t'aime".

Comment je vais faire, sans lui à mes côtés?

Dites-moi, vous qui croyez tout savoir, qui osez imaginer connaître mes sentiments, dites-moi comment je vais vivre?

Sans son sourire?

Sans son parfum?

Sans son regard?

Sans sa présence si rassurante à chacun de mes pas?

Je ne peux pas.

On me dit que le rejoindre n'est pas la bonne solution, que ce ne serait pas honorer sa mémoire.

Alors honorer sa mémoire, c'est vivre en souffrant?

Vous croyez qu'il préfèrerait voir quelqu'un souffrir toute sa vie, que de le voir s'en aller?

Vous le pensez comme ça? C'est vous qui n'honorez pas sa mémoire.

Il n'a jamais supporté de voir quelqu'un souffrir. Il aurait lui-même donné la mort à quelqu'un, si ça devait lui apporter la paix.

Mais je vous en prie…

Dites-moi que je n'ai pas besoin de le rejoindre parce qu'il est là.

Dites-moi qu'il vit.

Dites-le moi.

Par pitié.