ROI DE COEUR / SANS COEURS
CHAPITRE I : Naissance d'un assassin.
Elle arrive. Marche. Pose chaque pied, l'un devant l'autre. Avec cet étrange rictus, imprimé sur sa face blâfarde. Tourne, à droite. S'arrête, l'espace d'un instant, sur le seuil d'une échoppe douteuse. Semblant hésiter, tiraillée par de mauvais présentiments. Se retourne, comme pour s'assurer que, non, personne ne l'a vue. Non, personne ne sait qu'elle entre dans cette bicoque verreuse aux relents nauséabonds. Et que oui, plus personne n'est là pour tendre la main, l'empoigner fermement, et lui dire : "Non, arrêtes ! Ne fais pas ça !"
Elle pousse la porte, et le petit grelot au dessus de celle-ci graillonne désagréablement.
Finalement. Si, elle l'a fait.
Greyback, Fenrir. Tel était son nom. Un nom, que personne, encore ne connaissait réellement. Un nom, dont personne n'avait peur.
Un gentil, jeune adolescent. Visage assez séraphin, pour peu qu'on ne s'attarde pas sur ces yeux à la lueur quelque peu ... chafouine ? d'un lion en cage. Une crinière brune, indisciplinable, légère dans le vent. Un nez à peine busqué. Hormi cela, semblant d'une innocence étrangement pure, presque idiote. Cette petite et adorable tête montée sur le corps fin d'un jeune dégingandé, achevait de dressé le portrait de Fenrir. Ce portrait avait pourtant une note artificielle.
Quoi ? Vous n'alliez tout de même pas penser que cet ange n'avait pas sa place à Serpentard. Tout droit sorti des jupons du diable, avec son sourire indécryptable, son allure si frêle. Sa beauté presque féminine.
Oh, et puis après tout, laissons croire à tout ceux qui le veulent que Fenrir n'était pas un masque... et revenons un peu en arrière. Avant la naissance du cher enfant. Avant tout cela. Et cherchons à savoir qui il est. D'où il vient ? Une grande famille de sang-purs, qui, obéissant aux principes de sa "caste", décida de préserver jusqu'au bout la pureté du sang de la ligné. Forcée de constater, au bout d'un certain temps, qu'hélas, les sang-purs devenaient de moins en moins nombreux. Des mariages, des alliances, finirent de faire oublier ce nom, Greyback, qui, autrefois signifiait encore quelque chose. Une dernière branche, plus ou moins impure, subsista cependant, et finit, par un miracle étrange par ne donner que des héritiers mâles. Fantastique providence pour ces sorciers dégénérés qui ne rêvaient plus que de réssuciter leur nom.
Fenrir nacquit donc. Grandi dans un monde froid et terne, pour être finalement envoyé à Poudelard. N'étant pas encore passé sous le chapoix magique que celui-ci l'expédiait parmis les vert-argent. Son enfance fut donc une succession de soumission à d'autres qui traçaient son chemin, en exploitant son potentiel. Curieusement, le-dit garçon ne semblait absolument pas désireux de s'affranchir de cette encombrante tutelle. Non. Ses adorables prunelles regardaient se dérouler ce manège fabuleux, sans vie. Courbant toujours plus l'échine... Avec une docilité étonnante.
En dehors de cela ?
Il n'était pas introverti. Ce n'était pas un petit nabot teigneux. Etrangement, il avait quelque chose de séduisant.
C'était une drogue douce. Qui appellait à être consommée encore et encore. Une drogue néanmoins capricieuse, et qui ne se laissait pas alors capturer si facilement.
***
[VENDREDI]
"Greyback. E. Misérable, ou peut-être devrais-je corriger, lança froidement McGonagall. Irrécupérable. Il semble qu'en dépit des heures de retenues qui occupent pour le moins tous vos week-end ... vous demeurez impérméable à la métamorphose."
Elle jetta la copie sur le bord de la table, nonchalement.
"Malefoy. A-. Vous devriez inciter votre camarade à s'installer plus près de vous de manière à ce que ses copies soient un reflet plus exact des vôtres."
Une nouvelle feuille volante.
"Goyle. D. Des progrès tout à fait notoires."
Ce cynisme sans pareil.
"Black. A. Potter. B"
Et pourtant aucun mauvais mots pour les rouge et or. Irrésistiblement injuste, n'est-ce-pas ? Un Rogue avait plus que le droit de faire du favoritisme. Il aurait fait le professeur idéal. Il en ferait même sans la moindre subtilité, ouvertement, avec méchanceté. Tout simplement. Mais que McGo s'y mette semblait absurbe, burlesque. Une mauvaise farce, vraiment. Elle n'avait pas le mot juste. Ce petit ton méprisant, le menton à peine relevé pour pouvoir mieux regarder de haut les Griffondors. Ou parfois tout simplement ce silence transpirant de sous-entendus. Elle aurait du prendre exemple sur Severus Rogue...
Greyback scruta le serpentard. Ce petit visage cireux et maladif. Ce nez résolument plongé sur McGo. Un étrange prototype qui conduirait au psychopathe type. Snape n'était pas foncièrement méchant. Il était juste ... Oui, cireux. Effacé et effacable. Une trace, un tâcheron vaguement doué pour répéter des formules magiques. Il avait quelque chose de révulsant et en même temps, Fenrir, Malefoy, et tout ces autres ne pouvaient pas s'empêcher d'en rire. A le voir suer de la cire. Cracher de la cire.
"Rogue. A"
Rire étouffé. Potter désigna Rogue du menton. Sans doute un bonne blague, se dit Greyback. Il n'y prenait aucun plaisir. Qu'est ce qui pouvait bien passer dans le cerveau huileux de Snape ? Tout d'un coup il l'imagina, tout simplement, en train d'essayer d'essuyer toutes ces tâches de graisse, sur sa copie. Il n'y était pour rien.
C'était ça, Snape.
Fenrir se retourna, pour se retrouver nez à nez avec Malefoy.
"Ne me dis quand même pas que ce type ... ce ... sang-mêlé, soupira t'il avec dégoût, t'intéresse ? Ca me décevrait beaucoup de toi. Tu sais, il faut y faire un peu attention, il est ... dangereux ... disons, pas très équilibré. Tu vois ce que je veux dire ?"
Grognement d'approbation de la part de Goyle. Et Crabbe, restant le bras croisé sous son énorme double menton, regardant muettement son C. Incapable de comprendre cet exploi.
"Si tu le dis."
"Je te le dis. Parce que je le sais. Tu devrais faire attention, tu sais. Je te trouve un peu bizarre toi aussi."
"Ta conception du bizarre est très vague."
"Malsain."
"Ohhhh."
Lucius eu droit a un sourire éblouissant. Comparant Snape, la bouteille d'huile, et Fenrir, ce joli petit minois. Etrange à quel point ce gars lui faisait un effet. Ce n'était pas qu'à lui, bien sûr. A tant d'autre il l'avait remarqué. Sa voix, douce, mélodieuse même, quand il le voulait. Il se demanda un instant, quel effet celait ferait de l'embrasser. Sa chair se hérissa doucement, mais il chassa ses pensées, éberlué de se voir céder du terrain devant Greyback.
"Tu voudrais pas jouer un bon tour à Snape, Fenrir ? Ce serait drôle, pas vrai ? Comme la fois où Potter s'était amusé avec lui. Qu'est ce qu'il avait fait, déjà ?"
"Suspendu en l'air, grogna Goyle."
Surprenant de voir l'analogie en Goyle et le porcinet de base. Les accents de la voix. Le facies. Le... Tout, en fait.
"Non, vraiment. Je ne pense pas qu'avoir Snape à dos, ce soit une très très très bonne chose. Comme tu l'as si bien souligné, Malefoy, Snape n'a pas l'air d'avoir sérieusement toute sa tête. Tes farces, garde les pour toi."
"SILENCE ! Vociféra McGo."
"Ohhh siiii, sussura Malefoy. Voyons Fenrir... quand je veux que quelqu'un face quelque chose ..."
"Ce n'est pas parce que tout le monde se met à tes pieds, que moi, je m'y metterais, compris ?"
"Ah oui ?"
Goyle couina. Ce devait être un rire. L'expression porcine l'empêchait d'aller au delà.
"Oui."
Oui, oui, oui. Ce mot qui se repettait sans fin dans son crâne, à un tel point que Fenrir en avait assez de ces échos qui roulaient et martelaient son cerveau... Engourdi. Etrangement. Il n'entendit pas Malfoy murmurer les derniers mots. Un bourdonnement étrange vint juste assaillir sa tête. Quelques secondes, il relevait la tête vers le blond, son sourire carnassier, et, par réflèxe, murmura :
"Tu disais, Malfoy ?"
"TAISEZ VOUS, GREYBACK ! rugit McGo."
D'un clin d'oeil chargé de sournoiserie, Lucius s'apprêtait à dire quelque chose. Mais Fenrir aperçu seulement l'énorme Goyle et son gosier, qui s'agitait allègrement. Signe avant coureur que la tornade n'allait pas tarder à éclater. Gloussement porcin. Une fois de plus. A savoir qui du graisseux ou du cireux le dégoutait plus. Mais Malfoy ne prenait plus garde à son acolyte.
"Je me dis que ça pourrait être drôle de faire une petite blague à Snape, non ?"
"Hnn ... Après tout ... Ca me semble une bonne idée."
"Je te laisse faire. Surprends nous, Fenrir ..."
Une remarque finalement si pleine ... de cynisme ? de sarcasme acerbe ? Mais au fond, Lucius n'était jamais qu'un bon serpentard. Mesquin par nature. Manipulateur aussi. Egoïste. Ses lèvres fines se tordirent légèrement pour masquer son sourire naissant. Il l'avait bien attrapé, ce petit ange de Greyback. Oh, comme il en rirait quand il dissiperait le sortilège interdit.
Pauvre Greyback. Il serait la risé du petit monde poudelarien lorsqu'avec un peu de chance, Snape, exédé par l'archange manipulé, lui fillerait la raclée du siècle.
Pourquoi pas "pauvre Snape" ?
Lucius, visiblement satisfait, se retourna, tandis que sa douce marionnette fixait le cireux.
"GREYBACK, siffla la voix ! Greyback ! Au nom du ciel ! Avez vous seulement écouté la moindre des choses que j'ai pu dire ? Vous êtes peut-être satisfait de vos résultats, après tout ! fulmina t'elle. Vous avez tellement raison. Mais après tout, si vous ne retenez que cela... Vous viendrez en retenue ce week-end. Une fois de plus ... Bien que je doute que les résultats viennent."
Fenrir jaugea la silhouette de harpie qui cheminait vers lui.
Etrange parenté entre McGo et une harpie vociférante, prête à labourer son visage d'angelot. Nouveau coup d'oeil vers Rogue, immobile, là à le dévisager avec une expression qu'il ne lui connaissait que trop : curiosité et dédain. Curiosité, en se disant, comment un serpentard peut-il toucher à ce point le fond. Dédain. Oui. Car ce pauvre type, il le méprisait souverainement. Ce n'était qu'une mouche, parmi tant d'autres mouches.
Plus étrange encore. Ce sentiment d'excitation qui gargouillait au fin fond des trippes de Fenrir, comme si cette heure avait eu quelque chose de spécial.
"Vous mécoutez, quand je parle ?"
"Oui, professeur, murmura passivement l'adolescent."
Se levant.
"Vous pouvez partir."
Il n'attendait plus que cela. Démangé par cette furieuse envie de titiller Severus. Pourquoi était-il à ce point attaché à satisfaire Malfoy, lui, qui, après tout n'avait jamais véritablement accordé d'importance à sa victime ? Pourquoi si subitement ? L'espace d'un cours.
De quelques regards.
De quelques mots.
Héhé, mais que va t'il arriver à ce pauvre Snape ? Pauvre Snape, qui, au fond, ne se doute de rien ? Muahahah.
[ Suite dans le prochain feuilleton ]
