NE ME TUEZ PAS !
Pour ceux qui suivent ma fic sur Harry Potter, je vous en conjure : ne me trucidez pas et ne lardez pas cette histoire-ci de coups de couteaux !
J'ai juste besoin de changer de registre quelques temps. Les aventures d'Adam Walker et de toute sa clique sont justes momentanément suspendues ; j'ai du mal à mettre mes idées par écrits, ce qui m'énerve très beaucoup très très fort, alors que je n'ai aucun problème pour écrire au sujet du Seigneur des Anneaux. De toute manière, cette fic-ci sera bien plus courte et j'espère la terminer avant la fin des vacances pour pouvoir me remettre à Harry Potter.
Mis à part ça, j'espère que tout le monde appréciera cette histoire que j'espère originale, même si elle ne le paraît pas trop au début :p
Chapitre 1 : Juxtaposition
« …et ce que je vis, sans pouvoir le toucher, me pétrifia de terreur et de dégoût. Mais quelles étaient ces créatures à la peau grise, noire et verte, couverte de cicatrices, de croûtes et d'excroissances ignobles, ces créatures qui respiraient la haine et l'exprimaient sous la forme de cris gutturaux et de gestes obscènes, ces créatures dont les yeux malveillants balayaient leurs victimes en même temps que leurs armes grossières ?
Toute cette civilisation, que j'avais étudiée pendant de longues années, était en train de disparaître, noyée sous la masse de ces monstres sans pitié, âme ou cœur. A ma grande horreur, j'assistai à la mort de celui que l'on nommait Dormund, et à celle de sa femme et de leurs enfants. D'autres villageois dont j'avais suivi le quotidien furent assassiné devant mes yeux, sans que je puisse rien y faire.
Et quand je compris que j'allais à mon tour être confronté à cela…
Seigneur, pour la première fois, je crains l'arrivée de mon Transfert, ainsi que celle de ceux qui viendront après moi, et je prie chaque jour pour que ma mère, qui y était déjà, ait connu une mort plus paisible que celle de Dormund et sa famille.
Albert Westwood, 20 juin 1847 »
Un lourd silence tomba dans la pièce. Anthony tourna les pages de son livre, pour remarquer que l'écriture n'était plus la même son arrière, arrière… euh… son aïeul avait donc été Transféré après l'écriture de ce dernier paragraphe. D'ailleurs, la note de l'auteur suivant, le neveu d'Albert, confirmait cette hypothèse.
« Aujourd'hui, nous regrettons tous la perte de mon oncle, Albert Westwood. Son Transfert est douloureux pour beaucoup d'entre nous et ravive nos plus secrètes inquiétudes. Pendant ces dix-neuf ans durant lesquels la Juxtaposition n'a pas eu lieu, certains membres de la famille ont cru la malédiction levée, mais à présent, nous avons tous déchanté.
C'est à moi que revient le privilège de continuer cet ouvrage, dans l'espoir qu'il soit utile aux générations futures. En effet, je suis le plus proche de Là-Bas, j'arrive à comprendre les rudiments de leur langue (mon lexique personnel se trouve à la fin de ce journal), et leur façon de penser me paraît très claire.
Je continuerai le travail de mon oncle, même si je n'ai pas son sens du détail et sa perspicacité, et j'espère que quelqu'un prendra la relève lorsque mon tour viendra.
Frédéric Westwood, 1853 »
Anthony parcourut distraitement les pages suivantes, recouvertes de l'écriture de Frédéric, puis retourna le livre et commença par la fin, lisant consciencieusement les mots inconnus et leur traduction, écrits par la main de son ancêtre. Cette histoire lui paraissait de plus en plus réelle à mesure qu'il lisait l'ouvrage familial, comme si un vide se comblait en lui.
Non, il n'était pas cinglé ou psychologiquement dérangé ! Il était juste maudit, comme toute sa famille, et ce depuis des générations. Il était à la fois soulagé et effrayé. Plusieurs mots inquiétants revenaient souvent : Transfert, Juxtaposition, et le nom de cet endroit inconnu, qui avait été nommé Là-Bas, en contradiction avec Ici, qui désignait… bah la Terre. Sans oublier ces monstres si précisément décrits, et le mode de vie moyenâgeux qui semblait être de mise dans ce monde lointain…
Anthony leva brusquement la tête vers le miroir accroché au dessus de son bureau. Il y voyait…
…un visage assez banal, à l'air inquiet et aux sourcils naturellement froncés qui disparaissaient presque sous ses cheveux châtain un peu trop longs. Tout ça n'était pas problématique, et assez facile à arranger, mais ce qu'il n'aimait pas chez lui, c'était ses deux yeux verts étonnamment ternes et impersonnels, qui ne laissaient jamais transparaître aucune émotion, même lorsqu'il s'y essayait. C'était à cause d'eux qu'on le traitait de blasé, d'insensible ou de gars dans la lune.
Mais le jeune homme ne regardait pas la glace pour son plaisir. Non, il examinait ce qu'il y avait au-delà, c'est-à-dire une immense pleine herbeuse, qui s'étendait à perte de vue sous un ciel bleu éclatant. Là où ses ancêtres avaient vu des peuples et des monstres, lui ne voyait qu'un paysage vierge.
-Quel est ton nom ? murmura-t-il.
Evidemment, personne ne répondit. A la place, la porte de sa chambre s'ouvrit brutalement, laissant entrer un garçon de son âge, véritable caricature blonde aux yeux bleus.
-Peter ? s'étonna Anthony. Qu'est-ce que tu fous ici ?
La gravure de mode, parce que c'en était une, personne ne pouvait dire le contraire, sourit innocemment, prenant un air enfantin.
-La porte du jardin était ouverte, alors je suis entré.
-…T'aurais pu sonner, non ?
-C'aurait été moins amusant !
Anthony rit malgré lui. La fraîcheur et la bonne humeur de son ami lui faisaient du bien.
-C'est quoi ce bouquin ? demanda Peter en prenant le livre familial des Westwood. Il a l'air vieux…
-Je comptais justement t'en parler, répondit le brun. Je l'ai trouvé chez ma grand-mère... il dit juste que je ne suis pas complètement fêlé.
Le blondinet haussa un sourcil, intrigué, et parcourut quelques pages des yeux. Il hocha vaguement la tête à plusieurs reprises puis le referma soigneusement et s'installa sur le lit d'Anthony en soupirant.
-Entre nous, tu étais le seul à croire en ta folie, dit-il en lui tendant le livre. On va dire que je ne suis pas trop étonné, d'accord ?
-Je penserais que ça te ferait plus d'effet, marmonna son ami.
-Tu sais bien que j'adore toutes tes histoires, sourit Peter. Alors, qu'est-ce que tu as découvert ?
-Eh bien… Les gens de ma famille disparaissent régulièrement, mais ils appellent ça un « Transfert » car ils sont emportés vers le monde qu'ils… que nous voyons dans les reflets.
-Quoi ? La grosse plaine ?
-Bah, oui, écoute.
Anthony ouvrit le livre à une page bien précise et chercha un extrait en particulier.
« J'ai vu ma soeur ! Elle était là, devant moi ! Je ne pouvais ni la toucher, ni lui parler, et elle ne regardait même pas dans ma direction, mais elle était là. Ca confirme ce que nos ancêtres pensent depuis longtemps : nous sommes bel et bien envoyés Là-Bas ! J'imagine que Lily a dû revenir à l'endroit où elle a été Transférée… Je voudrais tellement pouvoir lui parler et la prendre dans mes bras !
J'ai honte, mais j'ai hâte de la rejoindre.
Rose Westwood »
-Elles étaient jumelles, précisa le jeune homme en refermant l'ouvrage.
-Les pauvres…
-Je pense qu'elles ont fini par se retrouver. Enfin, j'espère !
-Quoi d'autre ?
-Bah… ils appellent ce phénomène la Juxtaposition. Il paraît que les deux mondes se superposent pendant quelques heures, ce qui aspirent certaines personnes très réceptives nous, quoi. Enfin, c'est un philosophe qui a dit ça, alors crois ce que tu veux !
Peter fronça ses jolis sourcils, ennuyé.
-Tu pourrais disparaître n'importe quand, alors ?
-Ouais.
S'ensuivit un long silence. Le blondinet ne s'en rendait pas compte, mais sa réflexion avait refroidi l'ambiance qui régnait dans la pièce. L'idée de pouvoir être Transféré à n'importe quel moment commença à effrayer Anthony, qui ne s'était bizarrement pas encore arrêté sur ce détail. Cependant, au milieu de cet effroi, le jeune homme ressentait comme une pointe d'excitation mêlée à un peu de culpabilité.
-Tu vois, dit-il en se tournant vers Peter. Je pourrais disparaître maint…
