Au large de Scar Island, 30°N, 160°E (ne chercher pas les incohérences).

« Va crever !

Ouai c'est ça ! Et toi rentre chez ta mère ! »

Pourquoi faudrait-il que ça soit toujours drôle. Est-ce une façade ? La peur du sérieux, d'appréhender les choses comme elles sont.

« J'aime pas les poissons d'eau douce ! »

Un mort.

« Allez tous chiez ! Bande de… »

Deux morts.

« Oh ta sœur ! »

Trois morts.

96 morts.

Comment on en arrive là ? Une bête sanguinaire ? Non. Plutôt le désespoir. Cela n'excuse pas les morts. Alors la solitude. Cela ne ramène pas les morts. Alors le dérapage. Cela ne pardonne pas les coupables. Alors rien. Rien. Rien, seulement un cri, une douleur incompréhensible et une limite. Franchie.

Alors que la terre tourne, les roches s'érodent doucement, les écritures deviennent de plus en plus illisibles, les uns attaquent les autres, les autres massacrent les uns, le temps passe mais le sang ne s'efface pas. Il sèche, s'ancre dans la peau jusqu'à en devenir la seule protection la seule attache au monde réel, à cette terre qui tourne, à ce soleil qui fusionne, avec eux.

Alors pourquoi, pourquoi est-ce si difficile, n'y a-t-il pas une autre issue que de se l'avouer à soi-même. La liberté qu'on enchaine, tous les boulets qu'on traine. Si c'était ces morts, on n'irait pas bien loin. Pourquoi toujours chercher à ouvrir sa putain de gueule ! Parler pour ne rien dire, parler pour détruire. Toujours. Détruire. Même ce qui ne nous concerne pas. Est-ce par inadvertance, est-ce par désespoir, cette limite. De la connerie.

Depuis quand cela dure. On n'a pas vu le sang s'effacer. On n'a pas vu. Et on ne verra plus jamais.

Ce n'est qu'un jeu, seulement le commencement.