I – En terrain connu


Résumé : Alors que les équipes SG installent la toute nouvelle base terrienne sur une planète décrétée inhabitée, une bourde de Felger prouve qu'ils ne sont pas les seuls humains sur place ! SG1 est donc envoyée en mission de reconnaissance...

Disclaimer : les personnages et l'unviers SG ne m'appartiennent pas :-)


Il ne la regardait pas… non non, il était juste venu la chercher à la demande du général Hammond, et elle semblait tellement concentrée... Il ne voulait pas que la moindre interruption lui fasse rater la résolution de son indispensable calcul mathématique qui pourrait sauver la planète ! Et il n'avait certainement pas envie qu'on puisse lui reprocher quoi que ce soit si jamais… enfin bref, il ne la regardait pas…

« Le colonel O'Neill et le major Carter sont demandés en salle de briefing », cracha impatiemment le haut-parleur.

Elle releva brusquement la tête, les boucles de ses cheveux blonds adorablement désordonnées, et eut quelques instants d'hésitation en le voyant qui la regardait… ou qui ne la regardait pas, peu importait…

- Le général m'avait justement demandé de venir vous chercher, se justifia-t-il, et a priori il n'a pas encore compris que l'ascenseur est long et qu'il faut plusieurs minutes pour atteindre votre labo. Comme vous le savez, la patience n'est pas son meilleur atout, et…

- Alors ne le faisons pas attendre plus longtemps, le coupa-t-elle avec un petit sourire en passant dans l'interstice que faisait le corps du colonel avec le chambranle opposé de la porte.

Le frôlement de leurs bras provoqua en eux un frisson difficilement contrôlé, et la simple idée de se retrouver tous les deux plusieurs minutes dans l'ascenseur du SGC les fit inconsciemment accélérer le pas. Le major ralentit cependant après quelques longueurs de couloirs, se réprimant intérieurement son attitude : il ne se passerait rien dans cet ascenseur, ils le prenaient ensemble plusieurs fois par jour, plusieurs jours par semaine, plusieurs semaines par an !... sans qu'il ne se soit jamais rien passé…

Une fois à l'intérieur de l'ascenseur, une fois chacun face à la porte, raides et parfaitement stoïques, le colonel choisit de mettre à l'épreuve les dons de déduction de son major, histoire de briser le silence envahissant :

- Une idée de ce qu'il nous veut ?

Sans tourner la tête vers lui, mais avec un léger sourire en coin, elle répondit malicieusement :

- C'est vous qu'il a chargé de venir me chercher, si quelqu'un devait avoir une idée de ce qu'il nous veut, j'aurais cru que ce fut vous.

- Je vois… toujours aussi perspicace. Et bien pour ma part, je pensais au début qu'il voulait nous inviter à partager une glace et des pop-corns devant un bon film… mais l'annonce du haut-parleur a malheureusement détruit cette hypothèse.

Comme elle le regardait sans comprendre, il ajouta innocemment :

- Oui, il n'aurait jamais utilisé les haut-parleurs pour nous inviter à manger une glace !

Arrivé à destination, l'ascenseur s'ouvrit et laissa sortir ses passagers.

- Pour manger une pizza, peut-être ?, continua le colonel sur sa lancée.

- Ah, Sam, Jack ! Vous savez pourquoi le général vous a appelé ?, cria Daniel à travers les couloirs en les apercevant de loin.

- Et pourquoi il ne vous a pas appelé, vous, Daniel ?... jaloux ? fit Jack en penchant la tête sur le côté.

Daniel ne releva pas. Sam haussa les épaules, autant pour lui expliquer qu'elle n'avait aucune idée du pourquoi de cette convocation, que pour lui faire comprendre qu'elle ne savait pas pourquoi le colonel était toujours aussi gamin. Mais elle adorait ça.

Daniel les suivit jusqu'à la salle de briefing, et Jack n'eut de cesse de se retourner et de lui mimer de partir. A l'entrée de la salle, il lui ferma la porte au nez, non sans un 'Daniel… ce n'est pas bien d'être aussi curieux' assez théâtral. Quand il se sentit un tantinet observé, il se retourna enfin et fit face à un général passablement blasé qui cachait un rictus amusé, et à un major à peine assise qui peinait à détourner les yeux… 'Chacun son tour', pensa-t-il en se remémorant la scène vieille de quelques minutes seulement dans un certain laboratoire. Il prit place en face d'elle. Ce ne fut qu'une fois confortablement installés qu'elle sembla réaliser son attitude équivoque et abaissa son visage rosi vers ses papiers.

- Major, commença le général Hammond, si je vous ai fait venir ici c'est pour éclaircir certains points au sujet de votre mission sur P2X539. J'aimerais que vous m'exposiez les avancées de vos travaux quant à la solution sur laquelle vous m'avez dit vous pencher.

Elle s'apprêtait à répondre, mais le colonel fut bien plus rapide :

- Pardon ? Quelle mission ? Quels travaux, quelle solution ?

Aïe… elle n'avait matériellement pas eu le temps de le lui annoncer, et elle comptait justement le faire aujourd'hui… Il allait lui en vouloir, c'était certain ! Mais aussi, ces deux derniers jours, Cassie avait eu beaucoup besoin d'elle et, de plus, le petit bijou qu'elle étudiait dans son labo lui avait pris tout le reste de son temps libre !

- Carter, quelle mission ? insista-t-il.

Sa voix était timbrée d'une pointe de déception, et le général à ses côtés ne semblait absolument pas prêt à donner un petit coup de pouce à la jeune militaire. Elle assuma et se lança :

- Il y a deux jours, commença-t-elle, le général m'a exposé la situation sur P2X539. Vous n'êtes pas sans savoir qu'elle abrite depuis peu notre toute nouvelle base Gamma, qui a pour but de gérer les négociations ultérieures et d'en faire un lieu de rencontre avec nos potentiels futurs alliés.

- Oui, je m'en souviens parfaitement, vous pensez, une base avec un nom pareil, ça me fait toujours penser à un médicament !

- Le président lui-même a approuvé la nécessité de cette base, précisa Hammond. Notre but n'est pas d'éparpiller des colonies ici et là dans la galaxie, mais d'attribuer à chacune des bases une spécialité qui lui sera propre, en vue d'augmenter la sécurité.

- Oui, reprit Sam, la base Alpha est une enceinte d'étude et de développement scientifique pour des projets que la zone 51 ne peut techniquement pas prendre en charge. La base Bêta est notre QG de repli en cas de problème sur la Terre avec la porte des étoiles ou par exemple une mise en quarantaine. Etablir une autre base pour des recherches scientifiques ne ferait qu'éparpiller les sujets d'études, ou faire un deuxième QG ne serait que plus dangereux pour les équipes qui s'y regrouperont. Ces deux spécialités, si elles sont suffisamment bien exploitées, devraient utiliser à temps plein chacune de ces deux bases. D'autre part le président a jugé que négocier sur Terre n'était pas le meilleur moyen d'assurer notre sécurité. D'où l'implantation de la base Gamma.

- Je sais tout ça, Carter ce que je ne sais pas, c'est pour votre mission, ronchonna le colonel en appuyant sur le dernier mot avec une grimace en coin.

- En fait il se trouve que la végétation sur cette planète est bien plus envahissante que ce qu'ont affirmé les scientifiques qui l'ont étudiée.

- Et qui a fait ce boulot de merde ?

- Colonel !, le rappela à l'ordre le général. Ceci est mon problème et je vous demanderai de me laisser le gérer. Le fait est que les troupes avaient, il y a une semaine, déboisé un périmètre pour en faire une clairière et y installer la base. En trois jours la végétation avait entièrement repoussé jusqu'à atteindre quasiment la hauteur des autres arbres de la forêt.

- Oui, c'est comme si elle avait une croissance extrêmement lente au début, puis subitement exponentielle, et enfin qui décroîtrait brusquement dès lors qu'elle aurait atteint une taille donnée. Et elle ne cesserait de pousser, tout en diminuant indéfiniment sa vitesse de développement… un peu comme une asymptote qui…

Elle s'arrêta d'elle-même : les traits du colonel et ceux du général ne pouvaient s'empêcher de tirer sur l'ennui, malgré leur volonté de le cacher par respect et politesse. Elle décida de continuer dans une autre direction, qui intéresserait plus ses supérieurs :

- Ils ne peuvent démonter la base car elle est maintenant ancrée dans la végétation. On ne peut pas non plus l'abandonner là-bas car des ennemis pourraient y extrapoler des informations sur notre avancée technologique, nos techniques de combat, nos modes de vie et stratégies.

- Nous ne pouvons pas non plus l'auto-détruire, car nous risquons d'endommager cette végétation ainsi que les ressources naturelles à un point que nous ne pouvons évaluer par manque de connaissances.

Le général semblait dépité par sa propre phrase : si ça n'avait tenu qu'à lui, il l'aurait faite exploser… Mais le président, avec l'appui de ces damnés scientifiques qui voulaient se racheter, avait décrété qu'ils avaient fait suffisamment de bêtises comme cela sur cette planète et qu'il n'était pas question de l'abîmer davantage. Hammond n'était pas contre l'idée de préserver une planète qu'ils avaient à peine foulée, mais là, c'était un cas un peu particulier, et il jugeait cette réaction excessive.

- Toujours est-il que le général m'a demandé si je n'avais pas une idée pour améliorer la situation de la base, relança Carter après un temps.

- Oui, renchérit Hammond, avec toute cette végétation, la base ne rentre plus dans les normes de sécurité. Certes, elle est à l'abri d'une attaque aérienne, car à couvert, mais la forêt offre aussi un avantage tactique trop important à nos ennemis qui tenteraient une attaque au sol.

- J'ai donc parlé au général du Moufteur, termina Carter, rayonnante.

- A vos souhaits, se contenta de répondre O'Neill.

- Veuillez décrire rapidement au colonel l'utilité de votre robot, ordonna le général.

Il avait insisté de façon très appropriée sur le mot 'rapidement', et Sam s'en vexa quelque peu. Elle se renfrogna et s'enquit aussi succinctement que possible :

- Le Moufteur est un engin volant pourvu de plusieurs caméras des plus sophistiquées, et d'un programme autonome de surveillance : il va pouvoir effectuer des rondes régulières tout autour de la base en évitant la végétation. Et tout ceci sans se faire repérer, car il n'émet aucun bruit.

- C'est là que je voulais en venir, décréta Hammond. Je voulais discuter avec vous pour décider si l'utilisation du Moufteur serait suffisante à la protection de la base et évaluer le risque qu'il va nous falloir juger acceptable ou non.

- Il n'est pas question de dire que le Moufteur sera suffisant, mon général, son utilisation ne doit certainement pas être exclusive. En revanche, en attendant d'établir d'autres solutions pour renforcer efficacement la sécurité de la base Gamma, je pense que son utilisation pourrait être plus que nécessaire. Et même après, il donnera toujours une vue d'ensemble des alentours de la base en temps réel, ce qui, je pense, est un atout à ne pas négliger.

- Très bien. Nous réfléchissons déjà à quels moyens nous pourrons utiliser pour soutenir et compléter le Moufteur. Je ne vous demanderai que d'aller l'installer sur P2X539, Major. Vous le mettrez en fonctionnement, vérifierez son état de marche, et évaluerez sur le terrain ses possibilités.

- Peut-être qu'un ou deux potes scientifiques de Carter pourraient l'accompagner, histoire qu'ils puissent juger sur place de la situation, ça les aidera peut-être à trouver d'autres solutions ?

- C'est en effet une bonne idée, approuva le général, donnant ainsi son accord à la militaire pour choisir par quel scientifique elle se ferait seconder. Major, vous partirez demain, et je vous demanderai un rapport préliminaire par radio après deux jours.

- Bien, mon général, acquiesça Carter, prête à se relever, pensant cette réunion sur le point de se conclure.

- Euh… et moi ?, s'inquiéta O'Neill.

Carter s'ancra à nouveau dans son siège.

- Vous pensez être utile à l'implantation du Moufteur, colonel ? soupesa Hammond.

- Non, justement, c'est pour ça que je me demandais pourquoi vous m'avez fait venir.

- J'allais y venir. Nous allons envoyer de nouvelles troupes sur cette base, histoire de la maintenir en état de marche.

- Qui s'y trouve actuellement ?

- C'est l'équipe du colonel Manuel qui s'est occupée de l'installation de la base Gamma, et qui depuis tient cette position. En vue de respecter la décision du président d'augmenter le nombre d'équipes d'exploration SG, nous pensons envoyer sur P2X539 toutes les nouvelles équipes pour un séjour d'un ou deux mois avant de les envoyer en mission off-world. Nous avons deux équipes complètes de jeunes soldats qui viennent de terminer leur formation. Ils arriveront demain matin à Cheyenne Moutain, et je voudrais que vous les accompagniez directement sur la planète. Vous les superviserez et vérifierez qu'ils s'intègrent bien au groupe déjà sur place. Vous partirez tous avec le major Carter demain.

- Sauf votre respect mon général, non pas que l'idée de visiter Gamma me déplaise, mais le colonel Manuel ne pourrait-il pas se charger des nouvelles équipes SG lui-même ?

Etonnamment, Hammond prit un air ennuyé : visiblement, cette question le mettait mal-à-l'aise et il avait espéré que le colonel ne relèverait pas. Bien sûr, il pourrait lui dire de ne pas discuter ses ordres mais, après tout, il lui devait bien la version officieuse :

- On m'a averti hier de l'arrivée de Woosley après-demain à Cheyenne Moutain.

- Oh…

A priori, cette seule phrase semblait suffisante à Carter… Pas au colonel !

- Il a eu vent de notre dernière mission et des moyens peu orthodoxes que nous avons dû utiliser pour rentrer sains et saufs à la base ? s'enquit-il.

- Oui, approuva Hammond, et a priori ça n'a pas plu… Officiellement, il vient pour une inspection du SGC dans sa totalité : il ne peut pas se permettre de venir ici uniquement pour surveiller deux membres d'une seule équipe sur lesquels il a des soupçons qu'absolument rien n'accrédite. L'annonce de son arrivée étant donc officielle et ne visant soi-disant aucune équipe particulière, je suis en droit de maintenir les activités du SGC et par là-même d'envoyer mes équipes en missions off-world.

- Et pour Teal'c et Daniel ? s'inquiéta Sam.

- Pour le moment, Woosley n'a rien contre eux. Ce n'est pas eux qui se sont fait passer pour des amants cachés qui fuyaient leur planète d'origine, tout ça en vue d'avoir accès à la seule cache des habitants de P5X328, qui s'avérait aussi être leur réserve d'arme. Dois-je vous rappeler que lorsque vous avez demandé des renforts à l'arrivée des jaffas, non-seulement les autochtones s'en sont pris à nos troupes qui passaient la porte, croyant qu'ils étaient ceux que vous fuyez sur votre planète d'origine, mais qu'en plus vous n'avez pas pu ramener une de ces armes que vous m'avez décrites comme étant exceptionnelles ?

O'Neill, cachant sa gêne, amorça un geste de la main avec toute la désinvolture dont il était capable. Carter préféra s'expliquer avec des mots, bien qu'elle l'ait déjà fait un nombre incalculable de fois depuis leur retour de cette mission :

- Le seul moyen pour qu'ils nous fassent entrer dans leur cache d'arme était de les convaincre d'un besoin absolu de se dissimuler, et nous n'avons rien trouvé d'autre qui puisse suffisamment crédibiliser cette nécessité, débita-t-elle très vite en passant sous silence le fait que la brillante idée de les faire passer pour des Roméo et Juliette venait d'un certain archéologue.

- Vous m'avez déjà exposé la situation pendant le débriefing, coupa court Hammond. Si j'ai décidé de votre bonne foi en tant que dirigeant de cette base, ce n'est certainement pas pour qu'un Woosley vienne discréditer mon aptitude à juger la véracité des rapports de mes équipes.

Vraisemblablement, sa décision de faire éviter à Carter et O'Neill un interrogatoire en règle avec Woosley venait plus du fait que le général était vexé qu'on piétine ses plates-bandes que celui de couvrir ses subordonnés…

- Oui mais, s'alarma Carter après que le général se soit calmé, si ne nous trouve pas au SGC pendant son inspection, il va certainement s'en prendre au reste de SG1…

- Le connaissant, il va sans doute trouver quelque chose à reprocher à la présence d'un jaffa et à celle d'un archéologue sur une base militaire terrienne, confirma O'Neill.

Ce dernier donna alors son accord quant à l'utilité évidente de toute l'équipe SG1 sur la base Gamma. Enfin il se leva, décrétant ainsi la fin de leur petite réunion, et se retira dans son bureau.

Le colonel et le major, chacun debout à un côté de la grande table ovale, échangèrent un regard embarrassé… Ils n'avaient absolument pas envie de parler de cette mission pendant laquelle ils avaient trouvé assez agréable, autant l'un que l'autre, de se faire volontairement passer pour amants. Et bien que rien ne se soit réellement passé, ils sentaient une certaine gêne à avoir apprécié plus que de raison cette mission. Carter se décida la première à sortir de la salle de débriefing et à rejoindre son labo : il était encore tôt dans la matinée, et elle pouvait avancer le réglage du Moufteur avant le repas du midi.


- Felger ? crachota le colonel après s'être étouffé avec ses Froot Loops et faisant retomber bruyamment sa cuillère.

Et voilà, il râlait encore ! Pourtant elle avait cru qu'il serait de bonne humeur en la voyant venir prendre son repas du midi au mess. Elle qui avait raté le dîner déjà la veille au soir, et peut-être même aussi le midi! Et puis c'était aujourd'hui qu'ils devaient s'installer pour quelques jours sur P2X539 !

- Vous mangez des céréales à 2h de l'après-midi, mon colonel ? tenta-t-elle pour faire diversion.

- Carter, quand j'ai parlé de 'potes scientifiques' à Hammond, je ne pensais pas que Felger ferait partie de vos 'potes' !

- Felger a été choisi uniquement pour ses capacités, expliqua-t-elle calmement. De plus il a déjà participé à plusieurs missions scientifiques off-world, et c'est quelqu'un de très compétent, mis à part quelques bourdes ici et là du fait qu'il soit un peu… farfelu…

- Moi, j'aurai dit débile… marmonna Jack de sous la table, en essuyant les giclures de lait qu'avait faite la cuillère en tombant dans son bol plein.

- Felger est très compétant, approuva Teal'c pour aider son amie.

Carter se figea, attentive à ne pas faire le moindre mouvement qui puisse la trahir.

- … peut-être un poil encombrant, ajouta Daniel sans remarquer son trouble. Bon, moi j'y vais, j'ai hâte de voir l'arrivée des petits nouveaux… j'espère qu'ils ne sont pas trop fragiles, finit-il en rigolant.

- Je pense que chacun d'entre eux peut vous tuer de plusieurs manières différentes sans laisser aucune trace sur votre corps, docteur Jackson.

- Merci de votre précision, Teal'c. Vous venez avec moi ?

- Simple constatation, fit-il en se levant à sa suite.

- Vous ne voulez pas les accueillir avec nous, Jack ?

Carter se concentra pour ne pas rougir plus encore, et afficha un visage de marbre qui contrastait un peu trop avec les petits frissons qui lui remontaient le long la colonne vertébrale.

- Jack, je pense que le sol est sec maintenant, précisa Daniel.

Carter remercia le ciel d'être dos à l'archéologue : elle était sûre d'avoir atteint la couleur d'une rose… rouge, la rose…

Comme aucune réponse ne leur parvint, il insista en accentuant un peu plus chaque mot :

- Les jambes de Sam vous conviennent-elles, Jack ?

- Qu… quoi ?, bégaya le colonel en se relevant brusquement et se cognant immanquablement à la table. Il étouffa un juron.

Le contact entre son mollet gauche et les doigts de son supérieur rompu, Carter s'autorisa à respirer avant de se lever à son tour. Une main se posa sur le rebord de la table en face d'elle, puis une deuxième, et enfin des cheveux grisonnants :

- Je prenais juste mon appui pour essuyer une tâche un peu plus loin, Carter, articula le sourire satisfait qui apparut à la suite des cheveux.

Ils sortirent du mess et Carter bifurqua au premier couloir.

- Vous ne venez pas accueillir les p'tits nouveaux, Carter ?

- Je… Je vous rejoindrai plus tard… un dernier test à lancer dans mon labo…, bafouilla-t-elle en s'enfuyant.

Ce fut le général qui fit les présentations :

- Soldats, voici le colonel O'Neill, Teal'c, le docteur Jackson, et le maj… où est le major Carter ?

- Elle se cach…

- Elle fait un dernier test, général, répondit O'Neill.

Daniel étouffa un cri de douleur pour son pied droit, ce qui eut pour effet de faire sursauter Felger jusqu'à trois mètres plus loin.

- J'espère que c'est un test important, bougonna Hammond.

- Oui, je testais le Moufteur, mon général, je voulais être sûre qu'il fonctionne correctement avant que nous nous installions définitivement sur P2X539. Comme nous partons dans deux heures, et que le test dure une bonne heure, s'il s'avérait qu'il faille le refaire, nous…

- Soldats, voici le major Carter, l'interrompit habilement le général.

Cette dernière prit place entre Daniel et Teal'c.

Daniel étouffa un autre cri de douleur pour son pied gauche… Pourtant il était sûr qu'elle ne l'avait pas entendu !

- Bien, tous ceux qui doivent se rendre sur la base Gamma, direction les vestiaires et rendez-vous en salle d'embarquement dans une heure, annonça O'Neill. Il jeta un coup d'œil en coin à Hammond, qui acquiesça silencieusement.


En arrivant sur P2X539, le groupe se déploya sur toute la base, effectuant les vérifications nécessaires, se présentant aux militaires déjà sur place, et visitant les lieux.

- Quand vous avez parlé de végétation encombrante, je voyais une sorte de savane avec des herbes qui vous arrivent aux genoux… et non pas une… une jungle, grimaça l'archéologue.

- Daniel, si vous étiez venu écouter la présentation de Carter ce matin, au lieu de vous perdre, vous et votre nez, dans vos bouquins et vos traductions, vous ne seriez pas en train de marcher dans ces sables mouvants.

- Il n'y a pas de sables mouvants, docteur Jackson, je vous assure que vous pouvez me lâcher, annonça le Jaffa platoniquement.

- Mon colonel, le major Carter vous demande, appela Erwin Rox, le second du colonel Manuel.

Ils se séparèrent donc et Teal'c et Daniel prirent la direction d'un des préfabriqués. En entrant, l'archéologue découvrit entre autre une table, une étagère, et deux lits superposés. Sur celui du haut, Teal'c posa lourdement son sac dans lequel étaient entassées en vrac une vingtaine de bougies.

- Je suppose que vous avez choisi le lit du haut, commenta Daniel.

Le Jaffa confirma en inclinant simplement la tête.


- Alors Carter, je vous manque déjà ?

- Je voulais faire les présentations, répondit-elle en lui présentant un genre d'avion aux formes plutôt cubiques.

- Oh, c'est Mouffy?

- Avec votre permission, je vais l'activer. Il va s'élever et tourner autour et dans la base en continu, à plusieurs altitudes et en empruntant un chemin différent à chaque fois.

- Permission accordée.

C'était la première fois qu'il était aussi émoustillé face à un des joujoux de Carter. L'euphorie de l'arrivée, sans doute… Carter regarda le Moufteur s'élever silencieusement, et O'Neill regarda Carter.


Erwin Rox s'avéra être un excellent cuisinier, et l'enthousiasme s'empara de Daniel, alors rassuré quant à l'éventualité d'ingurgiter des rations pendant un temps indéterminé. Les tours de gardes furent distribués, les systèmes de sécurité renforcés, et Carter sortit de son tout nouveau labo pour rejoindre son lit pour sa première nuit sur P2X539.

En entrant dans son préfabriqué, elle stoppa net : elle connaissait un peu trop bien cette odeur. Se reprenant, - après tout ce n'était pas la première fois qu'ils devaient dormir dans la même chambre en mission- elle prit ses affaires et se dirigea vers la salle de bain.

- Je ne savais pas que je partageais votre préfabriqué, commenta-t-elle en passant devant les lits superposés.

- Rox a préféré s'installer plus près de la cuisine, expliqua le colonel, du haut de son lit.

- Son menu était excellent. J'avoue m'être demandée si nous mangerions de la poudre diluée à chaque repas, mais là je suis rassurée !

- C'était meilleur que mon omelette à la bière ? grommela jalousement son supérieur en passant la tête par-dessus le lit.

Elle le regarda d'en bas et ne put s'empêcher de lui répondre, en référence au repas du midi :

- J'aime bien aussi votre lait aux Fruit Loops.

Il la fixa intensément, incapable de détourner ses yeux de cette vision océanée. Quant à elle, elle déglutit péniblement, s'attendant à le voir sauter du haut de son lit à tout instant pour la plaquer contre le mur et…

… et la porte s'ouvrit en grand, laissant entrer un Daniel à mille lieux d'imaginer ce qui aurait pu se passer s'il n'avait rien interrompu :

- Jack, le colonel Manuel vous fait dire que l'établissement d'un vortex jusqu'à la Terre est prévu demain dans l'après-midi si vous avez quelque chose à dire au général, ou s'il vous manque quelque chose, matériel ou autre, vous pourrez l'inscrire sur la liste que Manuel fait tourner.

Sur ce, il s'en retourna, toujours ignorant du malaise qu'il avait provoqué dans les esprits des deux militaires. Après quelques secondes d'adaptation au silence envahissant, Sam rattrapa au vol ses affaires et se dépêcha de s'enfermer pour prendre une bonne douche froide.


Elle se demanda si elle pouvait rester dans cette salle de bain toute la nuit, et se maudit d'avoir oublié son haut sur son lit. Cela faisait presqu'une heure qu'elle squattait la douche, et elle espérait que le colonel s'était endormi. Elle éteignit la lumière de la salle de bain avant de sortir, puis ouvrit la porte sans un bruit. Surprise, elle tomba nez-à-nez avec son haut. Elle releva la tête et rencontra un regard malicieusement chocolaté : le colonel avait choisi de s'installer les pieds à la tête du lit et, le menton maintenant posé sur un bras, le petit haut de son major pendouillant au bout de l'autre, il lui sembla utile de préciser :

- Vous aviez oublié ceci… Mais je vois que vous avez trouvé une solution de rechange, ajouta-t-il, l'air faussement déçu.

Elle arracha son haut sans répondre et retourna dans la salle de bain pour l'échanger avec sa veste d'uniforme.

Quand elle revint, le colonel s'était retourné sur le dos. Regardant le plafond, il attendit que son major soit couchée pour lui demander :

- A part cette jungle, il n'y a rien d'autre sur cette planète ?

- Je regarderai les vidéos du Moufteur demain matin : à sa plus haute altitude, il peut embrasser un rayon de plusieurs dizaines de kilomètres.

Etrangement, le mot 'embrasser' les fit se taire tous les deux.


Lorsqu'il se réveilla, la première chose que le colonel O'Neill constata fut que son major était déjà levée et sans doute déjà dans le labo. Une fois prêt, il sortit effectuer une petite ronde dans la nouvelle base. En arrivant devant le préfabriqué de ses amis, il eut le plaisir de voir que Teal'c avait trouvé du café. Tout en lui mimant de lui en servir une tasse, il lui demanda comment il avait dormi. Le Jaffa se contenta de lever un regard terne boursouflé de cernes et il se prit à soupirer lorsque l'archéologue les rejoignit en se mouchant bruyamment :

- Jack, fit le nez encombré de Daniel, j'ai rajouté des mouchoirs et des produits contre les allergies sur ma liste. Pourtant j'ai pris tous mes médicaments habituels, mais ces plantes sur cette planète sont vraiment redoutables… Manuel vous a-t-il dit quand est-ce qu'il va faire transmettre cette liste au SGC ?

Depuis que le Jaffa avait besoin de dormir, c'est-à-dire depuis que la trétonine remplaçait avantageusement son symbiote, il appréciait pouvoir profiter pleinement de ces quelques heures nécessaires à la récupération de son énergie.

- J'espère que le général Hammond nous fera parvenir le nécessaire au plus vite, annonça-t-il avec la placidité qui le caractérisait.

Carter se joignit alors au groupe :

- J'ai visionné les premières vidéos longues distances du Moufteur, expliqua-t-elle aux trois hommes, mais pour le moment on ne voit que la jungle… au loin on dirait qu'elle semble s'arrêter, mais je ne peux pas encore le garantir.

O'Neill acquiesça simplement. Puis, comme pour couper court à toute éventuelle élucubration scientifique, il sortit de sa poche un sachet qui, à une époque, avait sûrement dû être transparent. Ne voyant pas de réaction particulière de la part de ses coéquipiers, il agita le-dit sachet sous leurs nez, en s'exclamant : « Tadaaaaaa ! ». Carter, intriguée, se lança la première :

- Qu'est-ce que c'est, mon colonel ?

- Comment, qu'est-ce que c'est ? Je sais bien que ça fait longtemps que vous avez perdu l'insouciance de votre enfance, mais je pensais que vous seriez capable de reconnaître des chamallows, Carter !

Vexée, cette dernière marmonna :

- Ce n'est pas parce que j'aime les choses qui ont attrait aux sciences que j…

- Vous en voulez un ?, lui proposa le colonel pour se rattraper.

- Euh… en fait, non, merci.

- Allez, Carter, ce n'est pas un minuscule chamallow qui va vous saper votre superbe ligne !

Le temps de réaliser ce qu'il venait de dire, Carter avait essayé de rivaliser avec la couleur d'un coquelicot, Daniel remontait inutilement ses lunettes sur son nez, et Teal'c avait plongé sa main dans le sachet de sucreries.

- Euh, je voulais dire, saper votre ligne, que vous avez… enfin… que vous avez…

- Superbe, Jack, vous l'avez déjà dit, l'enfonça Daniel un peu plus.

- Non, Daniel, j'allais dire 'cachée sous votre treillis' !

Sam sentit le rouge se répandre jusque derrière ses lobes d'oreilles.

- Je ne sais pas ce qui vaut le mieux, commenta l'archéologue.

Le colonel était sur le point de lui clouer le bec quand Carter, n'ayant trouvé que cette solution pour couper court à la discussion, précipita sa main dans le sachet, et en ressortit un chamallow rose fluo. Elle l'enfourna dans sa bouche sans plus de cérémonie, sous l'œil avisé de Teal'c, alors rassuré quant au caractère comestible du carré moelleux, caoutchouteux et maintenant un peu ramolli qu'il tenait encore entre ses doigts. Le Jaffa engouffra à son tour le chamallow, et attendit dès lors qu'il fonde de lui-même, collé à jamais à son palais.

- Et que nous vaut l'honneur de ces bonbons, mon colonel ?

- Ca remonte le moral des troupes.

- Une bien belle excuse pour le grand gamin que vous êtes, le relança l'archéologue.

- On devrait peut-être en offrir aux Goa'ulds ? hasarda O'Neill.

A ce moment-là, Teal'c, le chamallow toujours englué à son palais, pensa qu'en effet ce serait une arme redoutable contre les faux-dieux.

- Vous en prenez ? proposa le colonel à l'archéologue.

Ce dernier, malgré ses reproches, tendit la main avec avidité vers le paquet. Mais dès que ses doigts frôlèrent les tentantes sucreries, le sachet se retira loin de lui :

- Ah non, vous êtes peut-être allergique, qui sait ?

Daniel fusilla le colonel du regard, mais ce dernier fit mine de ne pas le voir, et encouragea plutôt Carter à en reprendre un.

- Non merci, mon colonel, je trouve qu'ils ont un drôle de goût.

O'Neill s'empara enfin d'un chamallow, l'envoya dans les airs à la verticale au-dessus de lui, et leur révéla :

- Gingembre.

Le chamallow atterrit dans sa bouche avec un 'plop' assourdi, et le colonel referma consciencieusement le paquet, sans se rendre compte du trouble qui s'était emparé de ses coéquipiers. Puis, comme si de rien n'était, il embraya une discussion avec le Jaffa sur comment Luke Skywalker devait s'inspirer de Bart Simpson pour apprendre la 'vraie vie'.

Ces deux sujets n'étant pas en rapport direct avec du naquada ou une quelconque particule élémentaire, Carter se désintéressa rapidement du sujet… Il avait une poussière dans les cheveux et ses yeux s'étaient accrochés à cette vision. Que ce soit l'effet du gingembre, ou les compliments à peine dissimulés qu'il lui avait fait ce matin-là, ça avait perturbé sa carapace… et elle se prenait à exécuter des gestes qu'elle n'avait pas sciemment commandés : il fallait qu'elle passe ses doigts dans ces cheveux pour enlever cette poussière.

Leur conversation cinématographique et télévisuelle terminée, O'Neill salua Daniel et Teal'c. Elle stoppa son geste immédiatement… et se retrouva bêtement le bras en l'air et les doigts mi-écartés.

- A qui faites-vous 'coucou', major ? l'interrogea son supérieur, surpris.

- … Felger, se récupéra-t-elle juste à temps, en voyant ce dernier accourir précipitamment vers eux.

Jack la regarda un instant de travers.

- Major Carteeeeer ! Major Carteeeeer ! haletait ce dernier.

Etrangement, les deux militaires sentirent l'arrivée imminente d'une catastrophe. O'Neill releva le scientifique qui s'était écroulé à ses pieds et l'invita à s'expliquer :

- C'est le Moufteur, Major Carter…, ne put que dire Felger.

- Qu'avez-vous fait à Mouffy ? s'emporta le colonel.

Etonné de ce soudain intérêt, Felger choisit de s'adresser à lui :

- Et bien, il se pourrait que je l'ai un peu bidouillé pour…

- Qu'avez-vous fait au Moufteur ? s'enquit à son tour le Major, essayant de garder son calme le plus longtemps possible.

- Il… Je crois que je l'ai un peu déprogrammé, et il est parti en ligne droite…

- Pardon ? fit O'Neill.

- Par là, compléta Felger, en pointant une direction hasardeuse.

- Vitesse ? s'informa Carter.

- Maximale.

Elle se frappa le front. Elle manqua frapper aussi celui de Felger avant de se souvenir qu'elle n'avait pas le droit de taper les civils… Le colonel s'en chargea pour elle. Elle courut jusqu'au labo, s'attelant à la rampe de programmation du Moufteur lorsque, quelques secondes plus tard…

- Felger ! cria-t-elle.

- Je… j'ai peut-être… il se peut que par mégarde j'ai aussi verrouillé le système…, avoua-t-il, penaud.

Enervée au plus haut point, ayant peur de ne plus pouvoir se contrôler, elle prit un siège et s'installa rageusement devant l'écran : autant se plonger dans le travail et essayer d'arranger ça plutôt que d'enterrer Felger vivant après lui avoir disséqué le cerveau. Le peu de personnes qui l'entouraient, comprenant le message, s'éloignèrent discrètement et retournèrent à leurs occupations respectives.


Le soir, au mini-mess, c'est une Carter exténuée que tout le monde vit entrer. Elle s'installa à la table de SG1 sans aucun commentaire, et picora lentement dans son assiette…

Ça n'allait pas… Jack le voyait bien… il se leva et lui rapporta de la gelée bleutée dans un gobelet en plastique. Il l'observa s'attaquer à son dessert favori et, sûr d'avoir marqué un point, osa finalement demander :

- Alors ?

Encouragée par le Jaffa et l'archéologue qui la contemplaient manger en silence, elle se lança :

- Felger est un incompétent.

Au fond de la salle, on entendit un couinement de frustration profonde, et Felger sortit le plus discrètement possible en vue de rejoindre ses quartiers.

O'Neill choisit d'afficher un sourire de 'je vous l'avais bien dit', et Carter s'expliqua :

- Je n'ai pas réussi à déverrouiller les commandes… Le Moufteur est définitivement à la dérive.

La tablée vécut une minute de silence.

- Major Carteeeeer !

Elle releva la tête vers son supérieur, apeurée : mais qu'avait encore fait ce scientifique de malheur ?! Courageux, O'Neill osa affronter la réalité et fixa son regard le plus effrayant sur Felger qui déboulait dans le mini-mess.

- Les vidéos ! cria ce dernier. Les vidéos du Moufteur ! On voit des bâtiments sur les vidéos !


- Alors Carter, prête pour cette nouvelle mission qui nous attend demain matin ? Hammond est entièrement d'accord pour nous laisser visiter cette ville, et le colonel Manuel s'occupera des cadets. Ah, et le général nous a envoyé une voiture militaire, histoire qu'on ne fasse pas tout le chemin à pied. Elle va vous plaire, c'est une tout terrain, dernière génération ! Pendant le trajet, Daniel nous fera son topo habituel sur tout ce qu'il a pu déduire des architectures qu'on voit sur les vidéos… Au fait, Hammond voudra qu'on fasse un rapport toutes les trois heures à Manuel, alors j'ai fait mettre une de vos antennes longue distance dans la voiture histoire qu'on puisse transmettre à cette distance-là. Combien, déjà ? Une centaine de kilomètres ?...


Tôt le lendemain matin, Jack donna une dernière recommandation au colonel Manuel : il lui fit jurer de prévenir Hammond au moindre pépin si Felger venait à préparer une nouvelle catastrophe. Il vérifia une dernière fois rapidement son paquetage, et s'installa dans le véhicule tout terrain décapoté aux côtés de la conductrice blonde qui était au volant. Il risqua un coup d'œil vers les deux hommes qui remplissaient la banquette arrière, avant de les abandonner, l'un à ses livres en guise d'oreiller, l'autre à son sourcil gauche abusivement levé. Il ordonna au major de démarrer. Sans tarder, elle mit le contact et testa joyeusement l'accélération de la voiture en terrain accidenté.

- Bien dormi ? se renseigna Jack face à ce débordement de bonne humeur.

- Très bien, assura-t-elle avec un grand sourire, sans prendre garde à l'étrange regard qu'il lui lança.

- Vous êtes sûre que c'est la bonne direction ? la relança-t-il après quelques minutes.

- J'ai imprimé une carte réalisée avec les vues du ciel du Moufteur. On va devoir faire un petit détour vers le milieu du trajet à cause des arbres, vous voyez, c'est là sur la carte, finit-elle en lui fourguant sa carte dans les mains tout en évitant une énorme racine.

Mais comment faisait-elle pour tout faire en même temps ? Et toujours comme si de rien n'était !...

Cela faisait presque deux heures qu'ils crapahutaient entre les arbres géants. Daniel, qui s'était réveillé, choisit d'informer le groupe de son stress montant :

- Vous ne voulez pas ralentir un peu ?

- On ne va même pas à 50 km/h, protesta Sam.

- Je vous rappelle que nous roulons sur un terrain plutôt… encombré ! insista-t-il.

- Regardez, on voit l'orée des arbres, on va bientôt pouvoir avancer à une allure correcte, annonça-t-elle en ignorant royalement sa remarque.

La voiture fit quelques embardées parfaitement maîtrisées, et Jack s'accrocha à la portière lorsqu'ils traversèrent un cours d'eau. Aspergé, il pivota vers le conducteur pour lui faire part de son mécontentement, mais le sourire rayonnant qui lui fit face l'empêcha de faire tout commentaire. C'est au moment où Daniel allait s'en charger que le véhicule se retrouva sur ce qui ressemblait à un sentier…

- Yep ! s'autorisa-t-elle de satisfaction.

L'accélération soudaine qu'elle donna à la voiture cloua le bec de l'archéologue avant qu'il n'ait pu prononcer un mot, et chacun se jura de ne plus jamais jamais jamais laisser le volant à Carter.

Ils roulèrent ainsi une bonne dizaine de minutes, jusqu'à ce que Teal'c leur fasse remarquer les constructions qui s'élevaient sur leur gauche. Sam donna un grand coup de volant dans cette direction, et choisit enfin de ralentir à une allure plus judicieuse au fur et à mesure qu'ils approchaient de ce qui ressemblait à une ville. Ils stoppèrent le véhicule à une distance raisonnable et le cachèrent derrière des bosquets qui faisaient honneur à la taille moyenne des végétaux de cette planète. Ils s'équipèrent, chargèrent leurs sacs sur leurs dos et se dirigèrent vers la ville.

De loin, on pouvait voir de hauts immeubles, d'aspect général plutôt ronds, dans les tons gris, et qui partaient en pointes vers le sommet. Accrochés aux pointes, ce qui ressemblait à d'immenses capteurs ovales imbriqués tels des poupées russes tournaient chacun autour d'un axe différent, donnant à l'ensemble une sensation d'envoûtement. Pourtant, ce n'était pas ce qui troublait le plus nos quatre explorateurs :

- Euh, j'ai des hallucinations, ou bien c'est…, balbutia Daniel.

- Une deuxième porte des étoiles ! s'extasia Carter.

- En effet.

La-dite porte s'activa. Cachés, ils observèrent un groupe d'humains en sortir, dos à eux, et se présenter à un baraquement situé une cinquantaine de mètres plus loin. Ils y furent accueillis par plusieurs autres humains qui les escortèrent dans le baraquement.

- Carter…

- Mon colonel ?

- Au sujet de deux portes des étoiles actives sur une seule et même planète, vous ne m'aviez pas dit un truc du genre 'impossible' ?

- Bien sûr, à notre niveau technologique, gérer parfaitement deux portes des étoiles nous est impossible. Mais peut-être qu'ils ont des sortes d'émetteurs qui leur permettraient de choisir la porte à activer. Vous voyez ce réseau de câbles accroché sur les côtés de la porte ?

- Les guirlandes ?… Vous croyez qu'elles s'éclairent la nuit ?

- Je pense que c'est un subtil récepteur qui dirige les voyageurs vers cette porte s'ils l'ont auparavant activé, par exemple en même temps qu'ils entreraient les coordonnées.

- Subtil…, fit Jack, dubitatif. Et pourquoi nous, nous avons atterri à l'autre porte ?

- Je pense que l'ensemble émetteur/récepteur donne l'exclusivité à cette porte. Tout le reste doit être redirigé vers la porte d'où nous sommes arrivés.

- Ce qui leur apporte en même temps un double avantage : d'abord ils peuvent choisir leur porte d'arrivée, et en plus ils filtrent les entrées ! Pas besoin d'iris ! approuva Daniel. Nous devons nous attendre à une civilisation plus évoluée que la nôtre, qui utilise régulièrement la porte, et qui plus est n'est pas sous l'emprise d'un Goa'uld.

- Vous voyez, Daniel, tout ça j'aurai pu le déduire moi même tout seul, grogna Jack en détaillant à nouveau les immeubles et l'ensemble de la ville. Au fait, Carter, vous n'aviez pas vu la deuxième porte sur les vidéos de Mouffy ?

- Nous n'avons pu récupérer qu'une partie des enregistrements, le reste étant définitivement perdu à cause de Felger, s'excusa-t-elle en butant sur le nom du scientifique. Sur les images que nous voyions, le Moufteur survolait déjà le centre de la ville, peut-être même une autre, encore plus loin.

- Que faisons-nous, O'Neill ? s'informa le Jaffa.

- Puisque nous sommes là, autant aller à leur rencontre… Mais il reste vingt minutes avant le rapport, alors nous allons attendre sagement ici, puis faire notre rapport, et ensuite y aller.

A ces mots, Teal'c se releva et se positionna un peu plus loin, pour faire le guet. Jack choisit un tronc d'arbre confortable pour s'asseoir et y appuyer son dos, et les deux autres cherchèrent à s'occuper.


- Ce que je ne comprends pas, c'est qu'on ne voit aucun objet ou véhicule volant, ou simplement qui s'appuie sur la poussée de l'air, dissertait l'archéologue depuis déjà un bon bout de temps. Pour une civilisation aussi évoluée, c'est plutôt étonnant.

- Peut-être qu'ils ont banni tous les ballons baudruche de leur société, commenta Sam en retenant un bâillement : elle faisait de gros efforts pour ne pas somnoler après les longues explications de Daniel, mais l'envie de lui clouer le bec avait été plus forte. Etonné par son manque inhabituel de perspicacité, l'archéologue lui renvoya un regard déçu, avant de réaliser qu'elle plaisantait.

- Jack, vous déteignez un peu trop sur Sam, conclut-il. A ces mots, cette dernière ne put s'empêcher de se sentir puérilement mal-à-l'aise. Quant au colonel, il se contenta de détourner la conversation :

- Manuel ? C'est O'Neill, vous me recevez ?

- Cinq sur cinq, colonel, grésilla la radio après quelques instants.

- Nous sommes arrivés sans encombre à une ville, nous allons y pénétrer. Transmettez à Hammond, et prochain rapport dans trois heures.

- Reçu.

En rangeant sa radio, le colonel se releva, faisant signe aux autres qu'il était temps de partir.

- Attendez ! cria Daniel. Je finis de trier mon sac, il y a des objets qui ne me serviront à rien et que je pourrai revenir chercher plus tard !

Agacé, O'Neill enjoignit le major et le Jaffa à continuer : Daniel les rejoindrait plus tard il n'avait qu'à se dépêcher, il avait eu tout le temps de le faire avant !

- Mince, où est ce livre, j'étais sûr de l'avoir emporté, râla l'archéologue. Jack, cria-t-il, c'est vous qui m'avez piqué mon livre sur… un livre à peu près grand comme ça, la couverture est verte, se reprit-il.

Mais le reste de SG1 ne l'entendait déjà plus : ils étaient presque arrivés au baraquement.

Le colonel toqua à la porte de métal, puis se recula de quelques pas. La porte s'ouvrit par le centre, laissant sortir un homme élancé, aux traits durs. Il les regarda à peine avant de d'annoncer leur arrivée vers le baraquement :

- Cybers, trois !

Aussitôt, cinq hommes sortirent à leur tour, et se placèrent face à eux. L'homme qui avait parlé s'adressa enfin aux trois membres de SG1 :

- Désactivation de la séquence embarquée. Prise en main pour récupération des données.

Interloqués, privés de Daniel pour les présentations habituelles, le groupe ne bougea pas d'un pouce. Apparemment ce n'était pas l'attitude qu'on attendait d'eux car l'homme répéta plus fort :

- Désactivation de la séquence embarquée !

O'Neill questionna du regard sa subordonnée sur la meilleur marche à suivre. La réponse attendue n'arrivant pas, il choisit de faire lui-même les présentations.

- Colonel O'Neill, US AirForce, Terre. Voici le major Carter, et Teal'c, annonça-t-il succinctement.

- Nous sommes venus par…, enchaîna Carter avant d'être coupée.

- Cybers déstabilisés ! cria un des hommes en les pointant du doigts. Mise en cargaison immédiate, séquence 5 !

La phrase fut immédiatement relayée par d'énormes haut-parleurs. Sous la surprise, les trois voyageurs se rapprochèrent les uns des autres, tentant vainement de calmer le vrombissement de leurs tympans. Dans la foulée, ils se retrouvèrent encerclés par une trentaine d'hommes équipés d'armes à trois visées.

- Euh, attendez, nous sommes pacifiques, de pacifiques explorateurs, tenta O'Neill en reprenant les mots habituels de Daniel.

- Forcez la désactivation ! se contenta de crier l'homme en face de lui.

Aussitôt, trois éclairs jaillirent de l'arme d'un des soldats, visant respectivement la tête, le tronc et les pieds du colonel. Ce dernier tressaillit sur place, immobilisé par la lourde décharge, et tomba violemment au sol lorsque le rayon s'arrêta. Teal'c avait déjà préparé sa lance et tira dans la foule qui les entourait. Carter ne mit qu'un quart de seconde avant de choisir de suivre Teal'c dans son attaque plutôt que de secourir le colonel : d'abord, il fallait s'en sortir. Inspirée, elle sortit son zat' et propulsa son tir en direction d'un rayon qui allait l'atteindre. Le tir du zat' bloqua le rayon et le renvoya comme un court-circuit dans l'arme du soldat, qui s'écroula aussitôt sous l'effet de son propre coup. Malheureusement, elle n'eut pas le temps de tirer à nouveau qu'un rayon la frappa dans le dos et la projeta au sol à son tour.

Face à Teal'c, les soldats hésitèrent à employer leurs armes électriques : le tatouage à son front semblait les pousser à croire que ce n'étaient pas les armes appropriées. Le Jaffa profita de cet instant de flottement pour faire le plus de dégâts possibles dans les rangs adverses. Rapidement cependant, un soldat fit écarter tous les autres et pointa dans sa direction un canon qui semblait alimenté par ces objets ovales qui tournaient sur des axes différents. Ils firent feu tous les deux en même temps, mais le tir de Teal'c fut englouti par le champ de force propulsé par le canon. Le Jaffa fut enveloppé à son tour par le champ de force, lui bloquant tout mouvement. Le soldat face à lui, satisfait, régla son canon à une intensité différente, puis donna à son poignet un mouvement hélicoïdal dans la direction de son prisonnier. Sous l'impulsion habile, le canon fit feu à nouveau, mais cette fois-ci le champ de force en sortit selon une ligne de champ bien définie, et vint s'agripper à la prison de Teal'c, tel un lasso.

Impuissant, Teal'c observa les soldats qui embarquèrent sans ménagement les corps inanimés de ses deux compagnons sur un véhicule. Ce dernier les emporta dans le baraquement. Quant à lui, il fut conduit en direction de la ville, dans sa prison mobile, sous la bonne garde de cinq soldats.


Voilà, un premier chapitre, un peu trop mièvre et coulant parfois, mais qui pose les bases de l'histoire. Il y aura plus d'actions dans les prochains chapitres, 5 en tout. N'hésitez pas à me faire vos commentaires, c'est ma première fic (nonon, je ne cherche pas l'indulgence des lecteurs ^^) donc toute critique est bonne à prendre pour évoluer. Merci de m'avoir lue :-)