Les personnages de House MD ne m'appartiennent pas.
J'ai commencé cette fic il y a trois mois. J'ai enfin pu poser la phrase de conclusion il y a deux jours. Elle est en deux parties.
Comme la storyline se cale sur la saison 7... On va dire que c'est la saison 7.
Bonne lecture!
vvv
A lire avec Yppah - It's Not the Same
La journée avait commencé par une sonnerie lointaine, une subtile caresse et des mouvements confus.
Il s'était alors tourné sur le flanc droit.
Des cris, des pleurs, un fredonnement.
De l'eau qui coule.
Il avait roulé sur le dos.
Des pas, une cadence, un rire.
Une chute, une exclamation étouffée, un sèche-cheveux.
Il avait ouvert les yeux.
Allongé au centre du lit dans la posture du Christ, House se demanda s'il n'était pas plus agréable d'être cloué sur une croix dans une contrée lointaine où juifs et musulmans se claqueraient dans le dos en buvant du bourbon.
Il alla jusqu'à se demander si dans cette contrée il y aurait des clubs échangistes où chinois et tibétains se claqueraient dans le dos mais aussi sur les fesses.
Froncement de sourcils.
Il se savait bougon le matin et taquin avec les communautés mais pas à ce point.
Cependant, comment se blâmer quand on sait au fond de soi que la tranquillité est une hostie bénite qu'on aimerait avaler à toute heure de la journée ?
C'est d'ailleurs sur cette pensée sanctifiée qu'il replongea dans une douce torpeur. Dieu que la solitude matinale pouvait être délicieuse !
Une porte claqua.
Nouvelle omission : Dieu est un con.
Des éclats de voix, un rire et des battements de bras.
House se redressa, hagard, la vue décidément brouillée par le sommeil puis émit un léger mouvement de recul quand un éclair bleu traversa son champ de vision.
Il leva les yeux puis les cligna quand un nouvel éclair traversa la chambre.
Il entrouvrit des lèvres sèches puis referma une bouche pâteuse quand l'éclair le frôla de nouveau en émettant un son difforme.
Plus il émergeait et plus l'éclair ralentissait la cadence avant de prendre les allures d'un spectre élancé.
Il bougea enfin, faisant glisser ses jambes vers le bord du lit.
Le spectre flotta à quelques centimètres de lui puis disparut aussitôt.
Les sons reprirent de plus bel, tentant de se frayer un chemin jusqu'à ses paresseuses oreilles.
Après un instant de flottement, il se leva enfin et tangua dangereusement. Il se retint de justesse au chambranle de la fenêtre puis avança d'un pas.
Un souffle d'air chaud caressa sa joue gauche puis des lèvres pressèrent furtivement les siennes.
Il eut tout juste le temps de porter son regard vers l'encadrement de la porte pour y apercevoir la silhouette spectrale qui ne cessait de bouleverser la pièce depuis une bonne demi-heure.
« À plus tard » furent les derniers mots qui percèrent ses tympans.
Il grimaça.
Le pire dans tout ça, c'est qu'il savait qu'au moment même où il croiserait cette agaçante entité matinale dans les couloirs de l'hôpital, il tomberait à nouveau sous son charme en livrant bataille contre les pensées amoureuses et abrutissantes qui foisonneraient dans son esprit.
Il aurait pu se laisser retomber sur le lit et, le plus innocemment du monde, oublier d'enclencher l'alarme du réveil pour profiter d'une matinée de sommeil.
Mais comme toujours, la peur de l'Etranger le fit vaciller jusqu'à la salle de bain.
Tous les matins, la même rengaine. Cuddy le laissait en présence de la petite et de sa nounou ; En plein dans la gueule du loup.
L'atmosphère s'alourdissait alors de mutismes tenaces jusqu'à ce qu'il franchisse le seuil de la maison et claque la porte en signe de défaite.
Accepter une présence humaine ? Aujourd'hui, il pouvait se vanter de le faire sans problèmes.
L'accepter Elle ? Il en était bien obligé. Elle faisait partie du lot gagnant avec la maman.
Mais ça coinçait… Quelque part… Et il avait bien du mal à localiser le malaise.
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_ Vous avez fait quoi ? s'exclama Wilson en bondissant de surprise.
Assise sur le rebord de son bureau, Cuddy se contenta de hausser les sourcils.
_ Je suis trop théâtral ? s'enquit l'oncologue.
_ Un peu. admit-elle d'un ton sec.
_ Lisa… Comprenez-moi… Vous êtes cinglée !
Elle se pinça les lèvres avec agacement et baissa les yeux pour éviter de vriller un regard trop belliqueux dans celui de son confident.
_ Il va se barrer, la laisser livrée à elle-même et ne vous pardonnera jamais de lui avoir fait un tel coup ! reprit-il en commençant à faire les cent pas.
_ Il n'est pas aussi irresponsable. répliqua-t-elle calmement.
_ Comment pouvez-vous en être si sûre ?
_ Je lui fais confiance. déclara-t-elle avec sérénité.
Ses derniers mots eurent l'effet de calmer instantanément Wilson. Il écarta légèrement les jambes et plongea les mains dans les poches de son pantalon.
_ Depuis combien de temps nourrissez-vous ce projet ? questionna-t-il.
_ Une semaine.
_ Et qu'en pense la baby-sitter ?
_ Je lui ai dit de partir quand il arriverait en lui signalant qu'il prendrait la relève. Elle n'a pas à connaître l'exacte raison de ce changement de programme.
_ Même s'il engage la vie de Rachel ?
_ Là, c'est moi que vous traitez en irresponsable. accusa-t-elle avec lenteur.
Il baissa la tête et soupira.
_ Il va se venger.
_ Je sais.
_ Vous allez souffrir.
_ Je souffre déjà de voir que les choses n'évoluent pas.
_ Et vous vous attendiez à quoi ? explosa l'oncologue.
_ Cessez de réagir comme si c'est de votre couple qu'il est question! rétorqua-t-elle.
Wilson émit un temps d'arrêt, perplexe… Puis comprit enfin.
_ Vous avez peur.
_ Je meurs de trouille. renchérit-elle en passant une main tremblante dans ses cheveux. Je sais qu'il restera. Je sais qu'il en prendra soin. C'est quelqu'un de pragmatique…
_ Mais ?
_ Mais ce n'est pas ce que j'attends de lui aujourd'hui.
_ Et ?
_ Et j'ai peur de m'être plantée. Peur de sa réaction envers elle…
_ Et envers vous.
Elle hocha la tête avec gravité.
Wilson retira les mains de ses poches et les croisa sur son abdomen.
_ Vous auriez dû m'en parler.
Un triste sourire étira les lèvres de la doyenne.
_ Si je vous en avais parlé, je ne le l'aurais pas fait.
_ C'est juste. admit-il.
_ J'aurais alors agit…
_ Avec pragmatisme.
_ Et c'est exactement…
_ Ce contre quoi vous luttez aujourd'hui.
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House regarda avec horreur la porte se refermer dans une sinistre lenteur.
Il cligna bêtement des yeux en pensant immédiatement à l'auteur de cette infâme machination.
Comment avait-elle osé ?
Com-ment avait-elle O-S-E ?
A côté de cet acte, le baiser de Judas était une taquinerie, la pomme du péché : une tomate cerise et la boîte de pandore : un simple coffret à bijoux.
Ne craignait-elle pas qu'il agisse puérilement en se contentant de claquer la porte à son tour ?
Il lui serait si facile de lui faire un mauvais coup… Là… Tout de suite…
D'appeler les services sociaux en accusant la mère de négligence.
De la mettre dans une boîte et de la déposer devant la porte du voisin… ou mieux encore ! Devant le commissariat.
Il pourrait aussi débarquer à l'hôpital avec Rachel à bout de bras afin de la lui rendre en prenant bien soin de lui faire honte… Horriblement honte.
Il soupira. Il n'en avait pas la force.
Il n'en avait même pas la force !
C'est en se disant que la vie de célibataire était bien moins compliquée qu'il se détourna de la porte et se dirigea vers le salon.
Elle était là, assise en tailleur sur le canapé, une girafe en caoutchouc dans la bouche. Elle leva la tête à son arrivée et se mit à le dévisager.
Ce n'était pas la première fois qu'elle s'adonnait à cet exercice particulièrement mal vécu par House.
Il l'intriguait tout comme elle l'intriguait. Et malgré leurs comportements similaires, un fossé les séparait : l'innocence.
Le diagnosticien grogna quelque chose d'inaudible puis s'installa dans le fauteuil qui bordait le canapé.
Il ne craignait pas de s'occuper d'elle, parfaitement conscient des besoins nutritionnels et médicaux d'une enfant de son âge. C'était mathématique. Purement et simplement mathématique.
Malgré sa possessivité envers Cuddy et son inaptitude à créer un lien avec Rachel, il avait su s'adapter à la situation. Il avait appris à rester à l'écart de la dynamique « mère-fille » sans pour autant se détacher totalement du cocon qu'elle s'évertuait à construire autour d'eux. Il savait être présent en cas de besoin et s'effacer lors des moments privilégiés.
Le tempérament calme de la petite l'avait considérablement aidé à s'acclimater.
Le coaching de Wilson lui avait permis de ne rien lâcher.
En parlant de ce traître… Il ne perdait rien pour attendre ! Quelle idée d'avoir un ami aussi proche de sa petite amie. Il ne serait d'ailleurs pas étonné d'apprendre que cette machiavélique idée venait de lui…
Un curieux mouvement sur sa droite l'éjecta de ses pensées.
A présent sur les genoux, Rachel se tenait aux accoudoirs du canapé, son regard rivé sur lui.
Il tiqua face à son attitude… A croire qu'elle prenait plaisir à le fixer ainsi !
Pourquoi diable ne refourrait-elle pas Sophie dans son bec en le laissant ruminer en paix ?
Elle haussa distraitement les épaules, semblant ainsi répondre à sa question muette. Il roula des yeux puis se mit à fixer ses mains.
En plus d'être mal à l'aise en sa présence, il n'arrivait pas à soutenir son regard.
Désespérant…
Il avait pourtant l'habitude de subir ce scan persistant. De se retrouver face à elle, les mains à hauteur des cuisses, prêt à dégainer le premier.
Oui, mais à chaque confrontation, sa mère était là… Cette manipulatrice, cette mesquine, cette hypocrite, cette amende grillée sous le soleil d'été…
Zut ! Une pensée abrutissante. C'était tout sauf le moment de se laisser porter par les arômes fruités de sa chevelure !
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Cuddy rejeta ses cheveux en arrière puis se mit à fixer le cadre photo qui trônait sur son bureau, redessinant du regard les traits de sa fille.
_ Bizarre qu'il n'appelle pas. nota Wilson.
Elle haussa distraitement les épaules.
_ Qu'il ne vous appelle pas, ok. Mais moi…
_ Vous voulez qu'il s'accroche à vous comme une demoiselle s'accroche à son preux chevalier ?
_ Je n'ai ja…
_ Il a sûrement dû vous inclure dans la « machination ».
_ En effet. bougonna l'oncologue.
_ Cessez de vous agiter Wilson et, si vous n'avez rien à faire, sortez de mon bureau. proposa la doyenne.
_ Je ne peux pas.
Elle releva la tête.
_ Je n'ai toujours pas saisi le cheminement de votre pensée.
Une lueur narquoise traversa le regard de Cuddy.
_ Vous me décevez James.
Il se renfrogna puis prit de nouveau place sur le canapé.
_ Vous le connaissez Wilson. reprit-elle plus posément. Il recherche une certaine sécurité dans ses relations aux autres. Il met un point d'honneur à contrôler les sentiments et émotions qu'il exprime. Cette sécurité n'est pas assurée tant qu'il ne connait pas celui qui lui fait face.
_ Ce qui a développé son sens inné de l'observation et du décryptage humain. résuma l'oncologue.
_ Il cherche d'abord à savoir comment l'autre fonctionne avant d'abaisser les barrières…
_ Quand il veut bien les abaisser. corrigea-t-il.
_ Quand il veut bien les abaisser, oui…
_ Où voulez-vous en venir au juste ? pressa Wilson.
_ Depuis que nous sommes ensemble et qu'il côtoie Rachel, il adopte une attitude ambiguë, à la fois aimable et agressive. Il est à la fois confiant et méfiant...
_ Il ne l'a pas cerné. en conclut l'oncologue.
_ Comment voulez-vous cerner une gamine de presque deux ans ?
_ Donc, depuis que vous êtes ensemble, il est au stade de l'analyse et bute totalement.
_ Ce qui le pousse à la traiter…
_ Comme une étrangère.
Cuddy serra la mâchoire.
_ Ça devient agaçant à force. grinça-t-elle.
_ Quoi donc ? s'étonna Wilson.
_ Que vous finissiez mes phrases !
_ Désolé. s'excusa-t-il avec un sourire moqueur.
Face à sa mine réprobatrice, il reprit son sérieux.
_ Cuddy…
_ Hum ?
_ Qu'attendez-vous réellement de lui ?
_ Qu'il cesse de réfléchir.
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Ne plus réfléchir. C'était peut-être ça la clef. Après tout, cette demi-portion ne se torturait pas l'esprit.
Pourquoi ne pas essayer ?
Il inspira profondément… Puis se figea.
C'était bien beau de ne plus vouloir réfléchir, mais comment s'y prenait-on ?
Il cligna fermement des yeux, atterré par sa propre bêtise.
De son côté, lassée de toute cette inaction, Rachel se laissa glisser sur le sol puis détala le plus rapidement possible en direction de sa chambre.
La traitant mentalement d'impertinente, le diagnosticien s'extirpa de son siège puis la rejoignit en clopinant avec lenteur. Alors qu'il franchissait le seuil de la chambre, il se vit forcé de faire un pas en arrière afin d'éviter in extrémis une poupée qui s'écrasa lourdement sur la porte.
Il écarquilla les yeux puis se tourna vivement vers la petite qui trottait rapidement vers lui. Elle paraissait presque ridicule avec cette couche qui entravait ses mouvements et l'obligeait à adopter une démarche de cowboy.
Quand elle arriva à sa hauteur, elle ramassa la poupée et partit dans une diatribe incompréhensible pour les plus de 3 ans. Un flot ininterrompu de sonorités aussi déconcertantes les unes que les autres franchissait ses lèvres. Naturellement largué par le propos, House se contenta d'entrouvrir la bouche.
Rachel se mit alors à le pointer du doigt puis secoua doucement sa poupée avant de redessiner son sourire du doigt.
_ Je suis navré mais j'ai beau être polyglotte, je ne parle pas ta langue. s'excusa le diagnosticien.
Rachel souffla bruyamment, comme fatiguée par si peu de réactivité puis recommença son discours avec plus de convictions et de moulinets avec les bras… Au point que House fut, à plusieurs reprises, obligé de bloquer ses mouvements de sa canne pour qu'elle évite de se frapper.
_ On croirait ta mère… fit-il remarquer. Vu qu'elle ne t'amène pas au boulot, je présume que tu l'as vu agir ainsi, accrochée au téléphone… Ou à ma gorge.
La petite se figea, comme absorbée par les paroles du diagnosticien.
_ Tu es trop jeune pour monter sur tes grands chevaux. reprit-il avec calme. Au moins ta mère dispose du sexe pour se défouler et se détendre.
Il jeta un furtif coup d'œil derrière lui, comme pour vérifier que personne n'assistait à la scène. Rachel l'imita.
_ Et soit dit en passant… ajouta-t-il en se penchant vers elle. Elle adore ça.
La petite leva les yeux et l'observa en silence, immobile.
Sans même s'en rendre compte, House cessa tout bonnement de respirer, captivé par la sereine énergie qu'elle dégageait. Presque hypnotisé, il se laissa envelopper par son regard, prêt à céder quand… il reçut la poupée en pleine poire.
Plus remontée que jamais, Rachel recommença à agiter les bras en le réprimandant avec force.
Le diagnosticien, qui n'avait pas bougé d'un pouce, resserra sa prise sur la canne et lâcha un claquant « Bref » que la petite snoba en lui offrant son dos.
_ Je vois… souffla-t-il avant de se redresser.
Elle plongea tête la première dans sa caisse à jouets.
_ Je vois… répéta simplement House avant de se diriger vers la chambre de Cuddy.
Il se laissa tomber sur le lit en se disant que les consultations étaient un paradis à côté de cet enfer. Il se voyait difficilement encaisser des jets de poupées scandinaves en pleine face toutes les cinq minutes. Malheureusement pour lui, la confiscation des projectiles provoquerait une crise interminable de pleurs dont seule la Vicodin l'aurait préservé. Pire encore, le précieux parc dans lequel il aurait pu la larguer avait été déménagé sous prétexte d'entraver sa croissance en l'empêchant de se mouvoir comme bon lui semblait.
Il roula sur le lit et se mit à grommeler des imprécations en direction de sa compagne tout en plongeant son nez dans les draps afin d'humer son parfum.
TBC...
