«Je suis désolé de vous l'annoncer ainsi, mais votre fille risque de ne plus pouvoir utiliser ses jambes dans un an, voir peut-être deux. Il faut l'opérer ou elle en perdra l'usage et finira...»

«Dans une chaise roulante.»

Sa voix était tremblante, ses yeux brillants dû aux larmes qui menacées de couler. Elle allait finir en fauteuil roulant... Son pire cauchemar...

«Camila, je t'avais demandé de rester dans ta chambre !» lui cria sa mère.

«Désolée... Mais je voulais le verdict, et vous ne me l'aurez pas annoncé, ni toi, ni papa. Je vous connais...» déclara la brune juste avant de tourner les talons pour s'enfuir jusque dans sa chambre, à l'étage, le plus vite possible.

Elle se jeta sur son lit juste après avoir claqué la porte de sa chambre. Ses sanglots venaient d'exploser la barrière de ses lèvres, les larmes coulaient sans en demander l'autorisation... Elle allait passer le reste de sa vie en fauteuil de roulant... Comment en était-elle arrivé là ? Pourquoi ? Tout simplement parce qu'à sa naissance, la vie ne l'avait pas gâtée. Et maintenant, à part pleurer et s'attirer d'autant plus les regards de pitiés de la part de ses camarades de classe, elle ne pouvait rien faire. Absolument rien. Elle ne pouvait pas vivre un jour normalement.

Soit elle se réveillait en pleine nuit, dû à ses douleurs aux genoux, ou alors elle faisait une crise d'asthme à n'importe quel moment... En journée elle ne pouvait pas sortir, ou du moins, elle ne pouvait pas sortir seule. Ses parents craignant qu'elle ne tombe à n'importe quel moment. Mais malheureusement pour ces derniers, Camila n'était pas le genre de fille à sympathiser avec ciel, mer, océan et terre. Elle se contentait en général, de rester dans son coin, à la bibliothèque, au fond de la cour, dans la classe, dans les couloirs... Mais jamais accompagné. Le peu de fois où elle avait essayé de se faire des amis, c'était juste parce que ces derniers avaient pitiés d'elle. Quand elle l'avait découvert, elle avait préférés les envoyer balader, poliment et, rester seule. Au moins ainsi, elle ne se baladait pas avec de faux amis.

Une petite heure plus tard, elle entendit la porte d'entrée claquer, puis une voiture démarrée et ensuite, le silence. Elle en déduit que le docteur était parti et que maintenant, elle pouvait dormir. Elle avait dû se lever tôt ce matin, alors que nous étions dimanche. Ce qui ne lui avait pas plu du tout... Et tout ça pour garder sa petite sœur, certes, elle l'aime, elle pourrait donner sa vie pour la sienne, cependant elle aurait aimé pouvoir dormir plus. À cause de son horrible nuit, elle avait des cernes. Et à peine avait-elle trouvé le sommeil que ses parents l'avaient réveillée...

Quand son réveil se mit à sonner, sa main tapota sa table de nuit près de son lit à la recherche de ce dernier. Quand elle se posa dessus, elle l'éteignit mais ne bougea pas. Pourtant, elle était bel et bien réveillée, mais n'avait aucune envie de bouger... Peut-être allait-elle rester ici finalement ? Dans son lit, bien au chaud, en pyjama... Après tout, qui aurait envie de sortir en période d'hiver... Et puis, elle avait sport aujourd'hui, pendant deux longues heures elle allait devoir attendre sur un banc parce qu'elle ne pourrait jamais faire sport. Mise à part la piscine mais encore là avec son allergie au chlore... C'était risqué et impensable pour elle.

Ce fut avec un grognement qu'elle sortit de façon lasse de son nid douillet. Ses pieds nus rencontrèrent le parquet froid, lui provoquant un frisson dont elle se serait bien passé. Puis elle suivie ses pas jusque la salle de bain où elle se préparait tous les matins, de manière presque répétitive tant elle faisait ses mouvements sans même s'en rendre compte.

Peu de temps après, elle était en bas dans la cuisine où sa petite sœur déjeuner déjà. Cette dernière lui souriait toujours de manière un peu trop innocente, mais c'était Sofia, elle souriait toujours de façon aussi innocente sans le savoir. C'est donc automatiquement que l'aînée de la famille lui rendis son sourire, bien que très léger, mais la plus jeune put le percevoir et c'était le principal.

Comme d'habitude, Camila prit la route à pied. Son établissement était dans la direction opposée à celui de sa cadette et il n'y avait pas de bus dans ces environs. Elle soupira, faisant ainsi naître un petit nuage de buée près de ses lèvres, son sac était sur son épaule et ses mains dans ses poches, bien au chaud. Elle était couverte d'un manteau ainsi que d'une écharpe et un bonnet. Sa mère avait souvent insisté pour qu'elle porte des gants, mais la brune avait toujours refusé. Elle avait peut-être la santé fragile, elle pouvait peut-être attraper un rhume au coin de la rue, ou juste en pointant le bout de son nez dehors, mais jamais elle ne porterait des gants. Elle avait passé ce cape depuis longtemps. Le bonnet, le manteau, l'écharpe... C'était amplement suffisant pour elle.

Et comme d'habitude, en passant le pas de la porte d'entrée de son université les discussions qui se faisaient entendre dans le hall d'entrée cessèrent aussitôt, ou pour certaines elles baissèrent juste d'un ou deux volumes. Des regards se posèrent sur elle, plus ou moins discrets. Mais elle en avait l'habitude, elle les ignorait. Depuis la primaire c'était comme ça. À force on s'y habitue. Elle passa le hall sans même prendre la peine de leur lancer un regard pour leur dire bonjour ou quoique ce soit du genre. Elle préférait passer, telle une simple ombre, et rejoindre la petite salle où certains étudiants finissaient leur café tout en discutant. Des étudiants ayant dans la vingtaine d'années. Normalement, une personne âgée de 18/19 ans ne s'aventure pas ici. Mais dès lors qu'elle avait compris que dans cette pièce, on ne la regardait pas différemment, elle n'avait cessé de venir. Parce que ici, on ne la mettait pas mal à l'aise, on ne lui lançait pas des regards compatissants plein de pitié, non, on l'ignorait tout simplement.

Elle s'installa à une table, comme elle le faisait d'habitude, une table au fond près d'un radiateur et déposa son sac sur cette dernière en soupirant. Elle retira ensuite son bonnet, qui lui donnait un peu trop chaud, puis son écharpe. Elle ouvrit également son manteau, qui commençait à l'étouffer. Là, elle était à l'aise. Si elle était une addicte de lecture elle aurait probablement sorti un livre. Mais malheureusement, elle était plus du genre à regarder des films que lire. Elle aurait bien dessiné, mais même sa petite sœur de 8 ans dessinait mieux qu'elle. Elle préférait écouter discrètement les conversations qui se faisaient entendre dans la pièce.

«Hey, petite, lève toi ça a sonné.»

La voix raisonnait dans sa tête, une voix douce mais mature. Probablement une étudiante. Cette dernière la bougeait un peu au niveau de l'épaule pour la réveiller en douceur. Ce qui fonctionnait plutôt bien, la brune ouvrit ses deux orbes noisettes et s'étira doucement avant de regarder la personne qui se tenait à présent debout à ses côtés. Une blonde, plutôt petite... Était-elle vraiment à l'université ?

«Je sais que le coin des étudiants est plutôt paisible... Mais évite tout de même d'arriver en retard.» reprit-elle en souriant. «D'ailleurs je vais y aller, sinon les pimbêches là-bas à l'entrée vont me faire une de ces morales !»

Camila tourna la tête en direction des deux concernées, qui par ailleurs ne ressemblaient en aucun cas à des pimbêches. Et vue l'allure de la blonde en face d'elle, ça l'étonnerait fortement qu'elle traîne avec ce genre de filles. Ce fut donc avec un dernier sourire, magnifique soit dit en passant, que l'inconnue sortit de la pièce. Bizarre, elle ne se rappelait pas l'avoir vu en rentrant... Peu importe, non ? Elle devait se rhabiller pour sortir d'ici et rejoindre son établissement. D'ailleurs comment savait-elle qu'elle n'était pas étudiante ? Elles ne se connaissaient même pas.

Elle soupira et se leva, repris son sac sur son épaule et rejoignis son immeuble. Grâce à cette fille, elle était arrivée pile à l'heure. Et elle put constater avec joie et soulagement que sa place au fond près du radiateur n'était pas prise. Mais sa joie fut rapidement perdue. C'était évident, les élèves lui avaient juste laissé la place libre. Si elle n'aurait pas une santé aussi fragile, elle était sûre qu'elle serait déjà prise...

Les deux premières heures passèrent, mathématique puis français. Rien d'extra si ce n'était le fait qu'elle avait manqué la moitié des cours la semaine passée et qu'à présent, elle était paumée. Elle avait donc demandé les cahiers de personnes dans sa classe et rattraperait durant le sport, à la bibliothèque histoire de profiter de la petite pause de dix minutes pour aller se chercher de quoi se réchauffer à la boulangerie du coin. Bien que si elle le voulait, il y avait des distributeurs dans la salle des étudiants, de boissons chaudes, froides, mais également un distributeur de truc à manger. Mais elle préférait tout de même sortir, marcher quelques minutes, puis revenir tout en mangeant sur la route.

Une fois la pause passée, elle avait prévenu son professeur de sport qu'elle allait rattraper ses courts. Ce dernier étant au courant pour les problèmes de l'adolescente, ne chercha pas plus et la laissa tranquille.

À peine fut-elle entré dans le lieu calme, reposant et chaud, que la bibliothécaire lui souhaita un bonjour. Mais en voyant que c'était Camila, elle esquissa un sourire. La femme était une personne plutôt âgée, à peine plus grande que la brune, avec des lunettes. Mais elle semblait se tenir en meilleure forme qu'elle...

«Camila, bonjour. Ça faisait un moment que je ne t'avais pas vu. Tout va bien ?»

La lycéenne hocha la tête.

«J'ai eu quelques petits problèmes, vous savez, de santé.» répondit-elle finalement après avoir hésité quelques secondes. «Mon coin est libre ?»

«Depuis la semaine passée, il y a une étudiante qui vient réviser. Sans doute pour ses interrogations... Elle n'est pas bruyante et ne semble pas être très bavarde. Tout comme toi.»

Malgré les informations, elle ne semblait pas très enchanté de devoir partager son petit coin rien qu'à elle. Mais elle n'en tenue pas compte et resta silencieuse. Quelle genre de personne pouvait bien venir réviser à 10 heures du matin ? Sans doute le genre d'intello, fille à papa et maman...

Oui enfin c'était ce qu'elle s'était dit. Mais en arrivant à destination, elle fut plutôt surprise de voir une personne hors de ce qu'elle s'était imaginée. Elle avait plutôt pensé à une blonde, ou une brune, avec des lunettes et le style un peu "classique" typique des filles de bonnes familles qui ne pensent qu'à réviser jour et nuit.

Mais ce fut tout le contraire. La personne assise là, avait certes la tête baissée pour lire les lignes de son cahier, mais elle possédait non pas des cheveux blonds ou bruns, mais noirs, détachaient et plutôt longs. Elle ne portait pas de lunettes, du moins à première vue. Et avait un style un peu... Décontracté, du genre jean simple, chemise à carreaux ouverte, un tee-shirt avec des motifs qu'elle ne pouvait distinguer... Une paire de basket... Cette dernière, en se sentant observer, releva doucement la tête. Ainsi, Camila put facilement distinguer le dessin sur son tee-shirt "1975", et la couleur de ses yeux. Vert. Un vert qu'elle n'aurait jamais pensé voir un jour en vrai, elle l'avait déjà vu sur des images, mais jamais en réalité.

«Je peux t'aider ?» questionna calmement la jeune étudiante.

«Je venais juste pour... Pour rattraper mes cours... Si ça ne te dérange pas...»

Camila et la conversation... Une grande histoire d'amour n'est-ce pas ? Elle n'aimait pas parler, en général les gens ne lui parlent que pour lui proposer de l'aide, jamais pour faire connaissance. Donc elle évitait, un maximum. Et quand elle devait répondre à une question, elle se mettait automatiquement à bégayait ou à bloquer à certains moments de ses phrases... Ceci, l'inconnue assise l'avait bien remarqué. C'est ce qui l'avait fait sourire, enfin, d'après la brune...

«Installe toi, je t'en prie. Je ne mords pas.»

La métissée hocha la tête en signe de remerciement et posa son sac sur une chaise afin de retirer ce qui lui donnait des bouffées de chaleurs depuis qu'elle était entrée dans la bibliothèque. Elle avait posé le tout sur la même chaise puis s'était installé et avait sorti ses affaires afin de rattraper ses cours calmement. Et tout ça, sans même remarquer que deux orbes vertes l'observée discrètement, probablement par curiosité. Les deux filles ne s'étaient jamais rencontrées, jamais vu, et elles venaient tout juste de s'adresser la parole. Mais quand elle releva la tête, celle de l'étudiante était baissée. Pourtant, elle aurait juré qu'elle l'observait il y avait deux secondes... Ou peut-être plus ? Mais avec son temps de réaction, elle ne remarquait pas toujours les choses au bon moment. Ou tout simplement, elle se faisait des films.