Here and now with all dreams realized

C'est Metantei Edogawa qui a posé les rails de cette histoire, je me suis contenté d'y faire passer ma locomotive avec un petit cortège d'idées personnelles en remorque.

Bien sûr, tous les défauts éventuels de cette fic doivent être reproché au maitre d'œuvre, pas à son commanditaire.

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Brouillard… Un brouillard sans le moindre point de repère ni la moindre consistance, en dehors de ce bip qui résonnait par intermittence, avec une régularité de métronome, comme autant de coup de marteau enfonçant petit à petit une pointe d'irritation dans une conscience encore prisonnière des limbes du sommeil.

Bien décidée à réduire ce maudit réveil matin au silence, pour s'accorder quelques minutes de somnolence supplémentaire, Haibara commença à remuer le bras, et constata, ce faisant, qu'on ne l'avait pas laissé libre de ses mouvements.

Une constatation qui la poussa à se redresser dans un accès de panique pour observer son environnement, tout en faisant le tri dans la multitude de souvenirs qui remontait à la surface.

L'organisation… La nuit dernière… Une confrontation qui était supposée être la dernière… La toute dernière, d'une manière ou d'une autre… La manière dont elle s'était terminé demeurait floue… Allait-elle se réveiller dans le camp des perdants, sanglée à ce lit ? Etait-ce Gin qui avait attendu patiemment son réveil pour s'offrir une nouvelle fois le plaisir de prolonger son agonie au lieu de lui donner directement le coup de grâce ?

La mélodie saccadée qui avait troublé le repos de la chimiste commença à s'emballer, mais au bout de quelques instants, cette cacophonie, à défaut de se noyer dans le silence, laissa néanmoins la place à son rythme initial.

Il y avait bien eu quelqu'un pour attendre patiemment son réveil, mais ce n'était pas l'assassin de sa grande sœur.

Un sourire étira les lèvres de la métisse tandis qu'elle contemplait le détective affalé sur la couverture de son lit, visiblement terrassé par la nuit qu'il avait passé à son chevet.

Kudo… Que dirait son ange si elle l'avait surpris en flagrant délit de tenir la main d'une autre, confirmant ainsi les pires soupçons qu'elle avait pu nourrir sur les véritables raisons de son absence ? Et que lui dirait-il en retour pour sauver sa petite vie d'une menace autrement plus dangereuse que l'organisation ? Si le cas de figure survenait, Haibara pourrait sans doute pimenter un peu les choses en observant, d'un air faussement innocent, qu'au bout de la quatrième fois, il y avait de quoi se poser des questions, en effet…

Le temps qu'ils se remettent de cette révélation, elle aurait pu signaler au garçon, avec une expression rien moins qu'innocente cette fois, qu'il était peut-être temps de passer à la vitesse supérieure, quitte à ce qu'elle s'enferme d'abord dans son laboratoire pour confectionner un antidote temporaire à répartir entre deux gélules au lieu d'une seule… Des préliminaires guère plus orthodoxes que leur relation, après tout…

Heureusement pour lui et malheureusement pour elle, le détective n'aurait pas manqué d'argument pour étayer sa défense face à la fille d'une avocate.

La première fois, ce n'était pas lui qui avait pris l'initiative, ce n'était pas sa main que l'émotion avait fait trembler, et s'il avait serré la sienne en retour, c'était uniquement pour rassurer sa propriétaire tandis que le dossier d'un siège de bus était sa seule protection face à la mort qui prenait un malin plaisir à lui faire sentir sa présence.

La seconde fois, c'était pour extirper une idiote du cercueil métallique où elle s'était enfermée, et l'appareil à qui on avait confié le bon déroulement de la crémation ne lui avait pas laissé le temps de s'embarrasser avec la décence.

La troisième fois, c'était pour faire sentir à la même idiote qu'il y avait encore quelques personnes qui tenaient à sa présence, tandis qu'elle agonisait sur la civière d'une ambulance, la nuit dernière.

Et pour ce qui était de la toute dernière… Hmm, cette fois les circonstances, à défaut d'être aggravantes, n'étaient guère atténuantes pour autant… Elle était visiblement hors de danger à présent, et si sa conscience le titillait au point de rester au chevet de son bouclier humain, entremêler ses doigts aux siens demeurait un excès de zèle des plus suspects… Si Ran ne lui réclamait pas d'explication, il faudrait qu'elle assume ce rôle ingrat à sa place.

Oh, il aurait certainement une raison à lui fournir, et certainement pas celle qu'elle ne pouvait pas s'empêcher d'espérer un peu malgré tout, mais pour le moment, elle pouvait savourer encore un peu ce zeste d'ambiguïté…

Par-delà la fenêtre de la chambre d'hôpital, l'aurore commença à lever le rideau sur une nouvelle journée, et quand elle prenait la peine d'y penser, une nouvelle vie, pour elle aussi bien que pour son compagnon d'infortune.

Enfin, est-ce que ce sobriquet-là était encore approprié maintenant que l'organisation avait officiellement déclaré faillite, face à l'huissier qui était venu leur demander de régler leur dette vis-à-vis du ministère de la justice, et de le faire rubis sur l'ongle ?

Oh certes, il restait encore le problème de leur âge apparent mais… Cette infortune là, elle n'allait pas maintenir leur union bien longtemps, maintenant qu'elle avait résolu le problème de l'antidote à leur condition… Une résolution qui prenait la forme d'une dissolution plutôt que celle d'une solution, hélas… Comment réagirais le détective quand elle lui annoncerait qu'il n'y aurait pas de deus ex machina pour ramener Shinichi Kudo sur la scène dont il avait été exclu, un an plus tôt, à son désespoir et celui encore plus grand de son amie d'enfance ?

Elle préférait ne pas y penser…En tout cas pour l'instant… et tous les autres instants qui lui seraient accordé avant le réveil de sa victime…

Fermant les yeux, Haibara continua d'absorber la chaleur qui irradiait de la main du détective et, tout en se laissant bercer par le son monotone du cardiogramme installé à côté de son lit, elle savoura pleinement l'état de fait que l'appareil signalait encore et encore à chaque instant, au cas où l'un des occupants de la chambre aurait eu un doute, (ce qui avait peut-être été le cas, cette nuit, du reste), elle était en vie.

Une vie qui ne serait plus une simple survis ni un sursis à apprécier tant qu'elle le pouvait encore, maintenant que cette aurore se levait, balayant de sa lumière l'ombre qui l'avait environné depuis sa naissance jusqu'à aujourd'hui.

Ce monde qui s'éveillait autour d'elle, Shinichi Kudo comme Shiho Miyano n'y avait plus leur place. Une situation qui serait sans doute difficile à accepter pour Conan Edogawa, et elle devait bien l'avouer, pour Ai Haibara.

Que faire de cette vie que Kudo lui avait offerte, maintenant qu'elle était libre, réellement libre d'en faire tout ce qui lui plairait ? N'ayant jamais envisagé sérieusement l'éventualité d'un monde où l'organisation appartenait au passé, elle n'avait jamais pris la peine d'accorder la moindre pensée à son avenir.

Lorsqu'il aurait absorbé le choc, Kudo pourrait reconstruire tranquillement son ancienne vie, la forme serait différente mais le fond demeurerait le même, il y aurait toujours des criminels à appréhender, un gentleman cambrioleur à poursuivre et une amie d'enfance pour atteindre le retour d'un adolescent arrogant, quand bien même cela prendrait des années…

Mais de son côté… Oh, elle pouvait toujours rester aux côté de son Don Quichotte, qui avait définitivement besoin d'un Sancho sarcastique à souhait, maintenant que la défaite finale de ses moulins à vent avait posé un dangereux précédent qui n'allait pas le pousser à redoubler de prudence à l'avenir…

C'était une option bien tentante, et pas seulement parce qu'elle constituait la voie de moindre résistance, elle se heurtait néanmoins à un léger écueil… Lorsque Conan Edogawa ferait enfin le deuil de ses illusions, pourrait-il encore supporter la présence de celle qui avait signé le certificat de décès de Shinichi Kudo, sans falsifier son diagnostic cette fois ?

Une question qui allait bientôt recevoir sa réponse, si elle en jugeait au bâillement qui avait résonné dans la chambre, tandis que son deuxième occupant se redressait, sans pour autant relâcher la main qu'il avait maintenue prisonnière dans la sienne.

Peut-être qu'elle pourrait faire semblant de dormir, cela aurait pu prolonger son sursis de quelques minutes… Malheureusement, lorsqu'elle avait essayé d'avoir recours à ce genre de subterfuge pour éviter une conversation gênante, cela avait peut-être fonctionné pour Ran, mais Kudo n'avait pas été dupe une seule seconde… Il valait mieux jouer cartes sur table…

Une décision partagée par son adversaire, visiblement, puisqu'il ne faisait aucun effort pour dissimuler son soulagement, maintenant qu'il y avait un regard pour croiser le sien.

« J'imagines que Ran n'a pas apprécié le spectacle lorsque tu t'es décidé à retirer pour de bon cette paire de lunettes… »

Une question incongrue qui ne manqua pas de susciter un haussement de sourcils.

« Pardon ? »

« Eh bien, sur le coup, je ne vois pas d'autres raison pour expliquer ta présence ici… Et comme tu n'as plus aucune raison de lui mentir… »

Conan relâcha sa frustration dans un soupir, mais cela ne fût pas suffisant pour dissiper son sourire.

« Idiote… »

« Ce n'est pas très charitable, Kudo… Après tout, elle a de bonne raison de t'en vouloir quand on y pense… »

« Ce n'est pas à Ran que je pensais… »

« Ce serait une première… »

Un certain nombre de pensées, flottèrent sur le visage du détective, y dessinant leur forme, mais l'irritation passa en coup de vent, et les reproches demeurèrent silencieux… Après tout, les sarcasmes d'Haibara restaient le meilleur pouls à tâter si on voulait s'assurer de son rétablissement.

« Tu m'avais annoncé que tu aurais quelque chose à m'avouer à ton réveil…et j'avais quelque chose à te dire de mon côté, alors… »

Le sourire moqueur d'Irène Adler s'était éclipsé face à la brusque gravité de son Sherlock Holmes. Elle avait oublié ce petit détail. Avant de sombrer dans l'inconscience, elle avait pris la peine de saborder ses vaisseaux, pour se prémunir de la tentation d'enterrer discrètement une découverte des plus dérangeante, de peur qu'un amoureux supposé de la vérité ne succombe de son côté à la tentation de tirer sur le messager, pour lui faire expier le contenu déplaisant de sa missive.

Une décision qu'elle regrettait, maintenant que la tempête était passée… On ne sous-estimait jamais assez le genre de sottise qui vous passait par la tête quand la mort vous contemplait les yeux dans les yeux, sans faire mine de s'éloigner… Enfin, ça aurait pu être pire… Après tout, elle aurait pu lui faire une confession aussi romantique que mélodramatique, tandis qu'elle se vidait de son sang, et elle n'aurait peut-être pas eu le temps de s'abriter derrière l'excuse de la plaisanterie avant de s'évanouir… A tout prendre, elle ne s'en tirait pas si mal.

« Eh bien, comme on dit…Montre-moi d'abord le tien, et si tu as de la chance, je te laisserais jeter un coup d'œil sur le mien… »

Ahhh, le regard affligé d'un détective tandis que sa mâchoire s'affaissait sous son propre poids… Il n'y avait définitivement pas de meilleur médecine…ni de meilleur moyen de tuer la conversation, visiblement.

« Quoi ? Ce n'est pas moi qui aie commencé en venant jouer au docteur dans la chambre d'une fillette au lieu d'attendre les heures de visite, comme tout le monde… »

Après avoir signalé le fond de sa pensée en levant les yeux au plafond d'un air significatif, le détective se décida néanmoins à prendre son adversaire au mot.

« C'était une décision stupide, tu sais ? »

Le sourire de la chimiste adopta un pli désabusé tandis qu'elle contemplait sa couleur préférée sur les vêtements de son cobaye favori.

« Sans doute, mais si j'avais été un peu moins idiote, ce soir-là, tu ne serais plus là pour me la reprocher, non ? Et puis, il fallait bien que je te rende la monnaie de ta pièce, un jour… »

Un nuage de confusion submergea les reproches qui avaient noirci le regard du détective, un instant plus tôt, ce qui ne manqua pas de faire soupirer Haibara.

« Ce jour là… Quand tu m'as extirpé de ce bus…Un jour comme un autre pour un héros d'opérette, j'imagine, mais la demoiselle en détresse a toujours un point de vue différent sur la question, tu sais… J'avais ton sang sur mes vêtements… Le genre de tâche dont il est difficile de se débarrasser… Oh ce n'est pas faute de les avoir passé en machine, et ma garde-robe n'était pas si limitée que ça, alors j'aurais pu les jeter, mais… Tu vois ce que je veux dire, hein ? »

« Pour être honnête, non. Ce n'était pas supposé être un prêté pour un rendu, idiote. »

Oui, définitivement un jour comme un autre pour cet imbécile, qui semblait parfois si mature alors même qu'il vous exprimait les opinions les plus naïves sans la moindre once d'ironie pour les enrober, et cela expliquait paradoxalement pourquoi ce jour s'obstinerait à demeurer unique entre tous pour elle.

« Bien, bien. Si cette excuse-là ne te convient pas, je pourrais toujours te dire que cette balle là, je ne l'aurais pas volé, contrairement à toi. »

Est-ce que cette petite pique là s'était enfoncée un peu trop loin ? Il fallait le croire si elle en jugeait au tremblement qui avait agité sa main tandis qu'il la refermait en un poing vengeur qu'il se retenait visiblement d'envoyer sur le crâne de quelqu'un… Non content d'être incapable de faire preuve d'autodérision, il était en plus dépourvu de la moindre oreille musicale quand il s'agissait de détecter la tonalité d'un sarcasme… Il est vrai qu'elle avait parfois tendance à s'abriter derrière l'ironie quand il s'agissait de confesser des vérités qu'elle ne se sentait pas la force d'assumer, mais elle ne pensait pas que cet idiot ait trouvé le pot aux roses sur ce point…

« Au cas où tu ne l'aurais pas compris, Kudo, ce n'était pas toi que Gin visait quand il a pointé ce revolver dans ta direction. »

« Oh ? Tu fais bien de me le préciser, naïf comme j'étais, j'aurais pu croire que si un tueur m'alignait dans sa ligne de mire, c'était avec l'intention de m'expédier ad patres… »

Tiens donc ? Elle avait fini par déteindre un minimum sur sa victime préférée ? Comme quoi il ne fallait pas désespérer… Enfin, pas totalement, les points qu'il avait gagné pour ses sarcasmes avaient dû être déduit de ceux réservé à sa compréhension.

« Si je n'avais pas été derrière toi, hier soir, cela aurait été l'évidence même en effet… Mais ce n'est pas toi qu'il a regardé les yeux dans les yeux en pressant cette détente. Vois-tu, aussi professionnel que soit ce brave Gin, quand ça me concerne, moi, il tend à avoir un petit plaisir coupable. Au lieu d'ajuster son tir de manière à me faire mourir de la manière la plus efficiente possible, il lui arrive de chercher à m'atteindre là où je ressentirais le plus de souffrance possible. Quand bien même il devrait s'acheter cette petite jouissance en m'accordant un sursis, et en prenant le risque de me voir lui filer entre les doigts, ce faisant. Hier soir, il a trouvé le moyen de joindre l'utile à l'agréable… Côté pile, je te regardais mourir sous mes yeux, côté face…Eh bien, je crois que je n'ai pas besoin de t'expliquer, n'est-ce pas ? Bon, la satisfaction de te faire embrasser un sol bétonné en t'écartant de la trajectoire de cette balle a peut-être pesé dans la balance, mais si peu… »

Les reproches ravalés à grande peine se noyèrent dans un sentiment de culpabilité, mais parvinrent néanmoins à se maintenir à la surface, tandis qu'un détective desserrait le poing.

« Quand bien même, tu n'étais pas obligé de rentrer dans son petit jeu… »

« Il ne me demandait pas mon avis, tu sais. Dès le départ, on ne s'est jamais vraiment intéressé à ce que je pouvais penser de ce petit jeu, on s'est contenté de m'énoncer les règles, quelques années plus tôt, et il y avait une sanction de prévue pour les défaitistes qui auraient le mauvais goût de quitter la partie avant le dénouement… »

Haibara avait fermé les yeux en énonçant ce constat désenchanté, la sensation d'une main se refermant doucement sur la sienne la poussa à les rouvrir pour contempler Conan d'un air interloqué.

« Ça ne t'a pas empêché de le faire, non ? »

Si elle résista à la tentation de fermer les yeux de nouveau, elle n'eut pas non plus la force d'affronter le regard de son interlocuteur, préférant contempler l'aurore qui resplendissait de l'autre côté de la fenêtre.

« Je n'avais plus rien à perdre ce jour là… »

« J'ose espérer que tu as enfin compris que tu t'étais trompé… »

« Et si je te disais que non, Kudo ? »

C'était une lueur d'affection et non de défi qui avait brillé dans les yeux de la métisse, tandis qu'elle se retournait vers celui qui ne lui avait pas lâché la main, ni ce jour-là, ni cette nuit-là, et qui continuait de le faire, ce matin-là.

« Tu n'as pas l'air très crédible, là… Mais quand bien même, je serais prêt à relever le défi et à te prouver que tu as tort…comme d'habitude… »

Deux sourires désabusés se croisèrent, et l'espace de quelques instants, peut-être même une bonne minute, la métisse pu laisser de côté cet avis de décès qu'il lui restait à délivrer…qui serait sans doute aussi le certificat de décès de la relation qui s'était établi, bon gré, mal gré, avec son imbécile… Cet imbécile qui se décida à briser ce petit moment idyllique qu'il lui avait offert.

« Et de ton côté, qu'est-ce qu'il te restait à m'avouer ? »

Un nuage de tristesse s'intercala entre le visage d'une scientifique et l'aurore qui avait commencé à baigner la chambre de ses rayons.

« En fait, je n'ai pas survécu, cette nuit-là, mais compte-tenu de mon petit sacrifice final, on m'a autorisé un dernier tête à tête avec toi, pendant que tu étais encore endormi à mon chevet… Quel dommage que tu te sois décidé à tout gâcher… »

Si le détective eût la courtoisie de maintenir son étreinte sur la main de la métisse, il s'accorda néanmoins le droit de se passer son autre main sur la figure en soupirant.

« Désolé, mais je ne crois pas aux fantômes… donc la seule possibilité qu'il me reste est que je sois en train de rêver…»

« Et même la possibilité que je sois en train de hanter tes rêves, à l'instant même, tu n'as pas l'air de lui accorder beaucoup de crédit… Alalah, il aurait fallu que j'enfile un uniforme de soubrette pour que ça soit crédible ? »

Dans sa pose, il ne pouvait plus se frapper le front de la main, il se contenta de se pincer l'arête du nez en fronçant les sourcils.

« Ah ce n'est pas dans cette direction là que vont tes inclinations ? Bon, j'avais une chance sur deux après tout, mais si tu me préfère avec une cravache, Kudo, je peux faire de mon mieux pour m'adapter… »

Conan leva le doigt pour interrompre son interlocutrice.

« Tu sais quoi ? Entre les deux options, je préfère la première, et je me la réserve dès maintenant, pour le jour où ce sera toi qui sera au pied du mur, et moi qui sera dans la position de te faire une offre que tu ne pourras pas t'offrir le luxe de refuser… Une petite compensation pour tous ces accessoires de mode que tu m'as extorqué… »

« Oooh tu serais prêt à me prendre au mot ? Intéressant. Bon, ce sera difficile de trouver un uniforme de soubrette adapté à ma taille actuelle, mais nous sommes au Japon après tout, donc ça ne devrait pas être impossible… »

L'expression de Conan reflétait l'affliction plus que l'affection.

« Tu peux t'épargner cette peine, va… »

« J'insiste, j'insiste… Si je ne te fais pas miroiter cette petite possibilité, je ne pense pas que je te convaincrais d'enfiler cet uniforme, le jour où ce sera toi qui devras m'acheter une petite faveur. »

Oh ? Si elle en jugeait à la manière dont il promenait ses doigts sur son menton d'un air songeur, il semblait réellement peser le pour et le contre. Décidément, les mois passé à ses côtés laissaient définitivement leurs traces…

« Si tu t'engages à m'appeler maître, au moment de payer mes honoraires, peut-être que ça fera pencher la balance… Mais avant cela, je me contenterais d'entendre ce que tu avais réellement en tête, hier soir, dans cette ambulance, je crois que tu me dois bien ça, non ? »

Bon, aussi agréable que soit la soirée, il fallait bien que le moment de régler l'addition se présente…et dans ce cas de figure précis, c'était le moment gênant où il faudrait avouer au deuxième convive que son compte en banque était dans le rouge quand elle avait accepté une invitation où on attendait d'elle qu'elle règle sa part…

« Je t'avais plus ou moins promis de t'offrir un antidote… Un antidote définitif… »

Son visage avait commencé à s'illuminer… Plus dure serait la chute, hein ? Compte-tenu de la manière dont elle avait énoncé ses mots, ce soi-disant détective aurait dû pressentir que la situation ne tournerait peut-être pas de la manière dont il l'avait espéré, mais contrairement à elle, il n'avait pas eu la maturité, ou la lâcheté, de refermer le couvercle de la boite de Pandore avant de se demander pourquoi l'espérance y avait eu sa place en tout premier lieu… Cela avait pu s'avérer payant face à l'organisation, mais malheureusement pour le disciple de Sherlock Holmes, son docteur Watson ne pourrait pas rectifier le tir en réécrivant le passé, cette fois…

En un sens, elle avait eu raison, on ne pouvait pas survivre en défiant le Moriarty de ce siècle, on pouvait tout au plus avoir la satisfaction de reposer à ses côtés au fond des chutes de Reisenbach.

« Et je crois bien qu'au final, hélas… un seul d'entre nous aura été capable de tenir sa promesse vis-à-vis de l'autre, Kudo… »