Voilà une petite tentative de publication. En vous souhaitant une bonne lecture.

Les personnages ne m'appartiennent pas et l'histoire non plus, ils sont la possession de JKRowling (la magnifique).


Ses lèvres s'étaient pratiquement déformées tandis qu'elle éclatait d'un rire toujours plus bruyant, enchaînant sans mal les informulés. Elle dansait, baguette en main. Bellatrix était plus impressionnante que jamais. Elle plantait sur moi un regard voilé par la démence.

Avais-je le même éclat glacé lorsque les souvenirs me submergeaient ?

J'évitais de peu un sort qui se brisa à mes pieds, me forçant à reculer de nouveau. Il fallait que je me concentre. Mais les informations arrivaient jusqu'à moi étaient trop nombreuses. Terrifiantes. Les hurlements de mes alliés, les éclats brillants de magies qui sillonnaient la pièce, l'illuminant par intermittence de vert, rouge et blanc, et les voix toujours les voix. Non pas celles de mes amis mais celles qui me poursuivaient inlassablement depuis Azkaban.

Harry va mourir, tu ne seras pas capable de le protéger.

Des murmures de vipères, qui m'empoisonnaient l'esprit, contre lesquelles je me battais sans cesse, pour garder le contrôle, pour ne pas me laisser engloutir dans cette folie sous-jacente. Cette même folie qui habitait ma cousine.

Harry, j'avais si peur pour Harry. S'en était pratiquement difficile de se concentrer sur le combat. Malgré tout, mes années d'entraînements, mes combats au sein de l'Ordre, avaient forgé des réflexes. Mais une chose m'avait toujours fait défaut, l'analyse de l'environnement. Quand mes pieds rentrèrent en contact avec le socle de marbre brillant de l'Arche, je réalisai pour la première fois la faible distance qui me séparait d'elle.

D'ici, le murmure du voile m'était parfaitement audible. Léger, comme le bruissement de la soie contre la peau.

Tu vas mourir.

Comment a-t-elle su ?

Mes talons butèrent sur un relief du socle et je tombai en arrière. Le temps semblait s'étendre, l'éclat vert me frôla avant de disparaître à travers les vagues grises du voile tandis que je voyais le visage défait d'Harry. Ses yeux écarquillés s'étaient plantés sur moi, il avait réalisé également, tout comme la voix, ce qui m'attendait.

Et le rire. Toujours plus fort. Ce rire cruel, le rire de Bellatrix.

Le contact du voile était glacé sans être désagréable. Ma respiration se coupa brutalement. Comme en cinquième année lorsque j'étais tombé de mon balai jusqu'au lac.

C'est étrange, ça faisait des années que j'avais oublié cet événement.

Le froid me tétanisa tandis que la pièce disparaissait sous mes yeux, remplacé par un noir opaque.

Le froid ? Ou bien était-ce la mort ?

Lorsque l'on s'apprête à mourir que ce passe-t-il ?
Je pensais que l'on voyait sa vie défilée devant ses yeux, mais là tout ce que je vois c'est le noir.

N'y a-t-il rien dont je puisse être fier ? De toutes ces années de souffrances n'y a-t-il rien que je puisse voir avant de disparaître pour toujours ?

Fier de quoi ? Avoir passé mes années d'école à être un crétin ? Avoir passé la plus part de ma vie dans une prison ? Mettre échappé des murs physiques de ce lieu immonde sans être capable de fuir mon propre esprit ? Avoir été incapable de protéger mon filleul ?

Je voudrais pouvoir tout refaire, pouvoir changer le cours du temps.

Avoir une nouvelle chance.

Rien qu'une.


La mort est étrangement douce. Elle se résume à un monde moelleux, comme celui d'un matelas et d'une couverture épaisse. J'ai l'impression que mes paupières filtrent une lumière, comme celle du jour. Tout est si calme. Les voix ont disparu.

Ouvre les yeux crétins !

Ou peut-être pas.

Il y a autre chose. Une pulsation lente, si réelle qu'elle en est douloureuse. Régulière, calme, puissante. Le battement de mon cœur. Je le sens s'agiter dans ma poitrine, pulsant le sang à travers mes membres engourdis.

Qu'est-ce que tu attends ?

- Tu crois qu'il va reprendre connaissance ? souffle une voix proche.

C'était une voix que je reconnais, qui attise une colère brûlante lorsqu'elle résonne jusqu'à mes tympans.

Tachycardie.

L'adrénaline se propage rapidement, provoquant un étrange fourmillement dans mes mains et mes pieds.

- Je vous laisserai l'honneur de le torcher pour le reste de sa vie, lance une seconde.

C'est comme un signal d'arrêt. Tout mon corps s'apaise dans un souffle lorsque je l'entends. La nostalgie m'envahie.

C'est impossible !

Les larmes menacent.

- Tu n'es pas censé être son meilleur ami ? grince une dernière.

- Si c'est un légume, alors il s'agit de mon ex-meilleur ami, précise la précédente.

Mes paupières, je dois réussir à ouvrir mes paupières ! Je lutte contre ses forces qui m'engloutissent dans cette semi-inconscience.

Ouvrez-vous !

Ouvrez-vous !

Plus que jamais la lumière est éblouissante, cette fois les larmes coulent pour de bon. Je voudrais pouvoir former une barrière avec ma main mais celle-ci peine à bouger. Elle s'est pratiquement changée en poids mort. Je la vois, elle repose sur le drap.

C'est étrange.

Fine, longiligne, d'une peau lisse, douce, les ongles sont coupés nets, limés ?

Depuis Azkaban ma paume s'est recouverte de rugosité, les cicatrices sont nombreuses, souvenirs des nombreuses fois où j'ai hurlé à la mort en frappant sur le mur. Normalement mes ongles sont cassants, ils n'ont jamais récupéré de ce séjour dans l'antre de la mort.

Cette main, est-ce vraiment la mienne ?

- Sirius ?

Cette voix, encore celle-ci. Je redresse le regard, tandis que les sanglots agitent ma poitrine. Je suis incapable de les retenir, je n'en ai pas la force. Malgré le mur flou que forment mes larmes, je l'aperçois. Ce visage ovale, aux lèvres fines toujours tordues dans un demi-sourire, ses yeux noisettes brillants de malices qui disparaissent derrière cette hideuse paire de lunettes aux montures en écailles de tortue.

- T'as vraiment une sale tête, mec, reprend-il.

Il fait mine d'être confiant, il veut faire le fier, mais je sens que sa voix tremble. Est-ce à cause de ma réaction ?

Cette main trop propre, trop douce, pour être la mienne, se lève finalement. Et selon ma volonté vient essuyer le torrent de larmes.

Surprise à nouveau.

Sous la pulpe de ces doigts pâles, je ne sens pas les rides aux coins de mes yeux, et il n'y a plus la moindre trace de ma barbe. Juste un léger duvet. Doux.

Fou, tu es complètement fou.

- Est-ce que tu peux parler ?

Silhouette fine, je reconnais ses cheveux parfaitement ordonnés. Il a toujours eu l'habitude de les peigner comme ça, pourtant on lui a bien dit un bon nombre de fois que cette raie était ridicule. Mais il aime bien cet aspect enfant sage, ça lui permet d'être bien vu. Même si ma vision est floue, je sais que sous ce col parfaitement boutonné jusqu'en haut se cachent les stigmates de la lycanthropie.

- Je vais aller chercher l'infirmière.

C'est le grassouillet qui a parlé. Ce corps qui ne me parait pas être le mien réagit malgré tout à mes sentiments. Il s'est redressé dans un sursaut, cette main inconnue agrippe le pichet sur la table de chevet et la lance jusqu'au traître. Il éclate brutalement au sol, dans une centaine de morceau de porcelaine blanche. Le rat a reculé sous l'effet de la surprise. Les deux autres se sont également redressés.

- Sirius, je t'assure que je ne l'ai pas fait exprès ! couine-t-il.

Sa voix est un horreur, une abomination. Je la déteste ! Il a tué James ! Il a tué Lily ! Il est responsable de…

- Bon sang Sirius ! Tu es complètement malade !

Remus, la voix de la raison.

S'il savait ! Il me laisserait l'étriper sur place !

Je veux hurler, leur expliquer tout. Mais quelque chose cloche. J'ai chassé les larmes de mes yeux et maintenant la scène est parfaitement claire. James, Remus, Peter. Ils sont là. Toujours figés dans la surprise.

James n'a presque pas changé. Il est le même que dans mes souvenirs mais quelque chose ne va pas avec Remus et Peter. Je les ai vus. Il n'y a pas si longtemps. Et pourtant, là, ils sont si jeunes.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Ses mots, ce sont les miens mais cette voix ne l'est pas. Elle est forte, puissante. Ni enrouée, ni rauque, elle ne semble pas avoir hurlé pendant des jours et des heures.

- On faisait une petite partie en dehors du terrain, Peter a renvoyé un peu fort le souaffe, tu es tombé, lance Remus.

Il pèse ses mots, il ne bouge pas, comme s'il essayait d'analyser mes réactions. J'ai surtout l'impression qu'il se tient prêt si jamais j'essaye de me redresser pour en coller une à Peter.

- Dans le lac, précise James.

En retrait, il a adopté une position confiante, ses bras sont croisés.

Il est vivant.

Et pourtant je le revois encore tel qu'il était dans mon dernier souvenir.

Etendu, les yeux grands ouverts, la baguette toujours en main. Ses lunettes ont légèrement glissées, elles sont de travers. Sa peau est translucide, teintée de mort.

- Sirius ?

Je tourne le regard vers James. Il semble inquiet. Une véritable inquiétude. Pas la moindre pitié contrairement à ce dont je me suis habitué depuis mon retour d'Azkaban.

Merde.

Je me suis encore laissé engloutir par les souvenirs. J'ai l'impression que la folie est plus proche que jamais.

Elle n'est pas proche, tu es déjà fou.

Toute cette situation est pure démence. Est-ce qu'en attendant la mort mon esprit a créé ça ?

La main se dresse. Ma main se dresse. Je passe mes doigts sur mon visage, masse mes paupières, tente de remettre de l'ordre dans mes pensées. Tout semble tournoyer.

- Il s'est réveillé mais il semble complètement perdu !

J'ouvre à nouveau les yeux.

Pomfresh est debout devant le lit, avec mes trois camarades. Les bras croisés, elle me toise.

Depuis quand ?

Je ne serais pas capable de le dire. J'ai l'impression d'avoir perdu tous mes repères temporels, c'est encore pire qu'après mon évasion, lorsque j'ai passé des journées, des heures à errer.

Le rire des voix. C'est le même que celui de Bellatrix. La dernière chose que j'ai entendue. Avant de… Avant que…

- Je suis mort.

A mes mots, les yeux s'écarquillent, seule l'infirmière reste sereine. Elle s'approche vers moi, prend mon poignet, ses doigts se sont glissés entre mes tendons. Je connais cette méthode pour prendre le pouls, je l'ai utilisée. Sur James.

Sa pâleur aurait dû être un signe, sa peau présente les premiers signes de la jaunisse, c'est évident. Le foie a lâché depuis un moment. Le contour de ses yeux, ses lèvres, ses extrémités, elles ne tarderont pas être bleues. Pourtant malgré l'évidence, je prends son poignet et je cherche un pouls. Je ne le cherche même pas à sa nuque. Peut-être car j'ai bien trop peur de m'approcher de son visage inexpressif, de ses yeux grands ouverts voilés par la mort.

- Vous avez fait un chute importante mais vous avez été pris en charge rapidement, vous allez très bien Monsieur Black, dit Pomfresh d'une voix douce.

Elle a utilisé un ton le plus calme possible, ça semble fonctionner. Les images d'horreurs s'éloignent. J'ai l'impression de reprendre pieds. La pièce se redessine autour de moi.

- La date ?

C'est tout ce que mon souffle m'a permis de dire mais elle m'a compris apparemment puisqu'elle me dit :

- 13 Novembre 1975.

Je m'effondre sur les coussins derrière moi. Les yeux rivés sur les voûtes de l'infirmerie.

Je suis incapable de l'expliquer. Je ne comprends pas. Est-ce un rêve ?

Ou est-ce réellement une nouvelle chance ?