Tout aurait pu être si différent - saison 8 - épisode 5

Voici une nouvelle série de OS indépendant des uns des autres (j'insiste sur INDEPENDANT). Il s'agit de suite de ces petits moments manqués, qui aurait pu tout changer dans la vie d'Adèle et Rocher, dans la saison 8 de "Profilage". Pour d'autres moments comme ceux-là, allez lire la série "Et si".

Cette enquête était éprouvante pour Adèle. Le meurtre de Martin Lepage, la situation avec son épouse ancienne espionne russe aujourd'hui atteinte d'Alzheimer, sa fille et au milieu de tout ça ce petit garçon, qui lui faisait tant penser à Ulysse.

Comme Théo, Ulysse devra grandir avec une histoire familiale compliquée. Comme Théo, il n'aura qu'une mère… Pas de grands-parents, ni d'oncle ni de tante. Enfin la tante c'était elle et sa mère était dans une tombe. Comment expliquer tout ça à un petit garçon de même pas trois ans?

Et puis depuis l'Anjou, depuis qu'elle avait vu Aurélie lui ouvrir la porte à moitié nue (qui fait ça enfin?!) et depuis qu'elle avait appris que ce n'était que la belle-sœur de Thomas, elle se questionnait beaucoup sur ses sentiments pour lui. Et inconsciemment, elle les menait tous les deux à se retrouver seuls pour des petits moments comme celui-là.

Thomas avait insisté pour la ramener chez elle en voiture mais avait fait un petit détour par chez lui pour voir si Lucas était bien rentré. Avant qu'il redémarre pour la déposer à sa péniche, elle avait ressenti le besoin de lui parler.

"Je suis désolée pour tout à l'heure". Elle se sentait tellement idiote d'avoir réagi si violemment après que les services secrets soient venus leur retirer l'affaire. Il lui répondit de sa voix profonde et rassurante: "Tout va bien. Ne vous en faites pas". Comme d'habitude, il voulait faire plus. La prendre dans ses bras, la rassurer. Mais il préféra détourner la conversation.

"Et avec Ulysse ça va?" Elle fut très surprise et le regarda d'un air interloqué, avant de comprendre. "Oui pourquoi? Ouais d'accord. C'est… C'est Jess qui vous a dit c'est ça?" "Elle m'a dit un peu". "Hum… Je… Il m'appelle maman en ce moment. Je ne sais pas trop comment réagir en fait. Et j'aime… j'aimerais pouvoir lui parler plus souvent de Camille mais il est si petit encore". Il détacha sa ceinture et ouvrit la portière.

"Venez on va marcher un peu". Il sortit. Elle fut encore une fois surprise mais elle avait besoin de parler un peu. Et si c'était à lui, ce n'était pas plus mal.

"On peut… On peut rentrer chez moi à pied ce n'est pas très loin mais il faudrait que vous fassiez le chemin inverse tout seul après".

"Oh ce n'est pas très grave", répondit-il en verrouillant sa voiture et de commencer à marcher en directement du quai qui les mènerait à la péniche d'Adèle. Ils marchèrent cote à cote pendant quelques minutes sans dire un mot.

"Vous allez me le dire ou pas?" "Quoi donc?" "Ce que vous étiez venue me dire l'autre soir et qu'Aurélie vous a ouvert la porte?" Oh il attaquait frontalement comme ça. Ok très bien elle allait répondre honnêtement.

"J'ai cru que… Enfin elle m'a ouvert avec juste une serviette autour d'elle, les cheveux mouillés, vous étiez sous la douche… Vous voyez quoi?"

"Oui le tableau était un peu… trompeur. Mais ça n'explique pas pourquoi tu… vous n'avez pas attendu que j'arrive". Il avait enchaîné très vite mais évidemment le "tu" ne lui avait pas échappé.

"J'étais gênée. Je pensais interrompre un moment… intime. Après tout, je ne sais pas si vous… vous êtes en couple en ce moment alors je me suis sentie de trop". Il s'arrêta. Il était à la fois amusé de la situation et anxieux de ce qui allait suivre. Mais les signes ne trompaient pas. Ou plus. Il fallait qu'il lui dise.

"Vous auriez dû rester… Aurélie est un peu envahissante mais bon, quand vous l'avez croisé elle était sur le point de sortir. Elle est allée au cinéma avec Lucas". "Ça doit faire du bien à votre fils de revoir sa tante". "Enormément. Mais elle ressemble tellement à ma… à Julia. J'ai peur que ça le perturbe. Je ne veux pas que…" Il s'arrêta en plein milieu de sa phrase parce qu'il ne voulait pas continuer à parler d'Aurélie.

"Vous ne voulez pas quoi?" "Là je ne veux plus parler d'elle. Pour répondre à votre autre question, je ne suis pas en couple en ce moment". Il lui faisait face maintenant. Un silence gênant s'installa. Elle le fixa du même regard qu'elle lui avait lancé devant la porte de sa chambre de ce château en Anjou.

"En fait ça fait des mois que je… que je pense trop à… quelqu'un… pour passer la nuit dans les bras d'une autre. J'aurais l'impression de t… la trahir". Que répondre à cela? Elle était encore plus paumée qu'il y a deux jours, quand elle était tombée sur Aurélie chez lui. "Et vous? Vous avez… quelqu'un?"

Elle se mit à rire nerveusement et baissa les yeux. Puis elle releva brusquement la tête vers lui. C'était à son tour d'attaquer frontalement. "Je crois qu'il faut qu'on arrête ça Thomas… Je veux dire faire comme si… comme". Elle parlait sans se rendre compte qu'il se rapprochait d'elle millimètre par millimètre. "Comme si on n'avait pas failli s'embrasser l'autre soir".

Il lui fit le même sourire. Le même sourire qu'il avait esquissé quand elle lui avait dit "je sais pas si Baransky est rentrée", l'invitant presque dans sa chambre. Presque. Inconsciemment peut-être. Mais presque quand même. Puis il lui caressa affectueusement les coudes et se rapprocha d'elle. Comme quand il lui avait remis la couverture sur les épaules après la prise d'otages dans les catacombes du château en Anjou.

"Si seulement ton téléphone n'avait pas sonné", murmura-t-il sur le ton de la plaisanterie. Elle répondit sur le même ton que lui. "Ah oui? Il se serait passé quoi après?"

"J'aurais… j'aurais posé ma main sur ta joue. On serait restés comme ça quelques secondes. Et puis je t'aurais doucement repoussé contre la porte pour que tu ne t'enfuies pas. Et là… Là je t'aurais embrassé". Il lia le geste à la parole. Bon ils étaient dehors et il n'y avait pas de porte… Mais il encadra le visage d'Adèle avec ses mains et l'embrassa tendrement. Elle frissonna. Cette sensation était… au-delà de ce qu'elle imaginait. Et n'avait surtout rien avoir à ce qui s'était passé entre eux il y a des années. Elle se recula doucement, le sourire aux lèvres. "Je me serais jamais enfuie. Jamais". Il fondit à nouveau sur elle et l'embrassa langoureusement. Elle faillit tomber à la renverse mais il la rattrapa sans que leurs lèvres ne se détachent. Puis une très désagréable sonnerie de téléphone rompit ce moment.

Ils manquèrent d'éclater de rire. Adèle sortit son portable de son sac et répondit en restant collée à Thomas. "Oui Jess? Comment ça Ulysse a perdu son doudou? Ce n'est pas possible ce doudou il va me rendre folle… Hein? Oui ne t'inquiètes pas je suis là dans cinq minutes. Je ne suis même pas à 200 mètres de la péniche. Je… Quoi? Oui je suis à pied… Si je suis seule? Mais Jess c'est quoi cette question?" Thomas se disait que cette Jess avait vraiment un sixième sens. Comment pouvait-elle sentir que son amie n'était pas seule à ce moment-là?

Puis en fait il comprit vite qu'elle avait juste une bonne vue. Parce que de là où ils étaient, il fallait tracer une ligne droite pour aller à la péniche. Ils voyaient clairement la petite voiture rouge d'Adèle garée devant la péniche.

"Ah… tu… tu nous as vus. Ok donc en fait tu ne vas pas arrêter de me poser des questions toute la soirée c'est ça? … Non il ne va pas venir manger avec nous Jess. Il a un fils dont il faut qu'il s'occupe". Elle avait raison. Thomas redescendit sur terre. Il ne voulait pas se retrouver avec Adèle face à Jess toute la soirée de toute façon. Il fallait qu'il rentre.

Quand elle raccrocha, Adèle parut gênée. "Qu'est-ce qu'il y a?" "Jess nous a vus. Et elle t'a très distinctement reconnu". "Elle est incroyable… Ce n'est pas bien grave hein. Tu vas juste subir un interrogatoire en règle". Il l'embrassa encore et lui replaça une mèche derrière l'oreille. Un petit moment à eux suspendu dans le temps.

"Je vais rentrer voir mon fils". "Ouais moi aussi… A… A demain". Il l'embrassa furtivement et s'éloigna. Quelques mètres plus loin il se retourna et lança: "La prochaine qu'on se retrouve tous les deux, je te confisque ton portable".