1 - La lettre et l'inquisiteur :
Sagement assise dans le grand sofa de la salle commune des Griffondors, Hermione lançait des regards inquiets aux alentours. Il était près de Minuit et deux ou trois autres Griffondors de sixième année terminaient leurs devoirs. Elle jeta un dernier regard pour s'assurer qu'IL ne se cachait pas dans un des grands fauteuils moelleux de la pièce où qu'il n'était pas en train de descendre les escaliers du dortoir.
Elle posa le livre qu'elle faisait semblant de lire et sortit une enveloppe de la poche de sa cape.
Trois jours ! Trois jours qu'elle avait reçut cette lettre et qu'elle n'avait pas réussit à lire tranquillement sans qu'IL ne soit dans les parages ou quelqu'un d'autre qui aurait pu lui rapporter son secret.
Elle fixa le cachet de cire et le détacha doucement, silencieusement comme effrayée par le simple fait que quelqu'un pourrait l'entendre.
Se mordillant la lèvre inférieure, elle extirpa le parchemin délicatement lorsqu'elle se figea en sentant une présence s'appuyer au dossier du sofa. Elle tourna la tête et tomba nez à nez avec une petite frimousse rousse qui la regardait, interloquée.
« Hermione ? T'es pas couchée ? »
SA petite sœur, une de ces personnes qu'elle aurait préféré éviter. Elle tenta vainement de cacher la lettre qui n'échappa pas au regard vif de Ginny qui se redressa, un sourire au coin.
« Oh. Je vois… »
Hermione se força à sourire devant la mine moqueuse de la rouquine.
« S'il te plait, ne lui dit pas. »
« Je ne garantis rien, s'il me dit des choses blessantes, je réplique par d'autres choses blessantes. »
« Ginny, s'il te plait. »
Elle soupira devant la mine inquiète d'Hermione et décida de s'asseoir à côté d'elle.
« Décidemment… Bon, que t'a-t-il écrit cette fois ? Her-Mi-O-Neuh. »
La concernée lui lança un regard mauvais face à la moquerie de son amie.
« Je n'ai pas encore eu le temps de la lire avec ton frère dans les parages. On dirait qu'il le fait exprès. Ouh ! Il me rend dingue ! »
« Tu ne le laisses pas indifférente non plus tu sais. »
Hermione toussa en détournant le visage, espérant cacher ses joues qui avaient pris une jolie teinte rose.
« Allez, lis la et raconte si tu ne veux pas que je te la pique. »
La brunette secoua la tête en dépliant la lettre. Au plus elle la lisait, au plus elle souriait.
« Alors ? »
« Il va bien. Il a réussit ses examens malgré ses entraînement et les matchs de Quidditch… »
Elle continuait de lire et cette fois son sourire disparut.
« Il… Il me propose de venir le voir pour Halloween… »
Le regard de Ginny s'était écarquillé, mais Hermione compris que ce n'était pas la nouvelle qui lui avait donné cette réaction, mais la personne qui venait de descendre du dortoir. Elle ne tourna pas la tête. Elle articula juste silencieusement « Ron ? » et Ginny acquiesça.
« Vous ne dormez pas ? »
Ginny attrapa vite la lettre et la cacha sous son pull, mais n'eut pas le temps d'attraper l'enveloppe qui était posée sur la table basse devant eux.
Dans un geste ultime, Hermione tendit le bras vers le papier devenu dangereux par la situation, mais elle ne fut pas assez rapide et ce fut le garçon qui la ramassa, les sourcils froncés.
« Oh… »
Il la rejeta sur la table et se laissa tomber dans un fauteuil, juste en face d'Hermione qu'il ne quittait pas des yeux, la mâchoire serrée. On aurait dit un inquisiteur attendant des aveux de ces deux jeunes femmes. Son regard quitta Hermione pour se poser sur Ginny qui avait les oreilles rouges d'embarras. « Maudites génétiques Weasley » pensa-t-elle. Il se tourna de nouveau vers Hermione, toujours sans rien dire.
C'était une première dans les réactions de Ron. En général, soit il serait parti bouder, soit il aurait déclenché une nouvelle dispute. Mais là, ce silence était trop pesant pour elles.
Ils n'étaient plus qu'eux trois dans la salle commune… Trop silencieuse.
« Je… Je vais monter je crois… »
« Ginny. Tu ne bouges pas de là. »
Il n'avait pas crié, mais il avait prononcé ces mots d'une manière assez dure. Il n'avait toujours pas quitté Hermione des yeux, tentant de savoir ce qu'elle lui cachait, car il en était sûr : cette attitude fuyante, elle ne voulait rien dire ; et cette manière de se tordre les mains, elle culpabilisait. Tout en Hermione Granger indiquait qu'il avait de quoi lui en vouloir pour quelque chose, et ce quelque chose se trouvait à quelques centimètres de lui.
« Comment va… Vicky ? »
Ginny déglutit et Hermione releva la tête vers lui.
« Arrête de l'appeler comme ça, s'il te plait, Ron. »
Il plissa les yeux, la foudroyant du regard.
« Pourquoi ? Cette lettre ne vient pas de Bulgarie ? Il s'agit donc bien de ton cher Vicky. »
Ginny s'enfonça de plus en plus dans les coussins, sentant une grande menace planer au-dessus d'eux.
« Qu'est-ce que ça peut te faire ? »
Ouch ! La rouquine semblait disparaître dans le sofa. Ca y est… Ca allait commencer… Tous aux abris !
« Rien, tu as raison, tu es libre de faire ce que tu veux. Tu as tout à fait raison en fait… »
Il s'était relevé et partait vers les dortoirs.
« Bien ! Je peux donc passer Halloween chez lui et accepter un transfert dans son école ! »
« HEIN ?!!! »
Les deux rouquins avaient réagis au quart de tour. Ginny ressortit la lettre de sous son pull, au diable la discrétion. A travers les mots écrits en patte de mouche, elle reconnue la « proposition » de Krum, si c'en était bien une.
« Durmstrang cherche à se diversifier et une élève de ta qualité serait la bienvenue chez nous, si cela t'intéresse, bien sûr. »
Ginny relisait la ligne pendant qu'Hermione la récitait. Ron était pâle et fixait son amie, la bouche entrouverte. La préfète se tenait droite, les mains sur les hanches, le regardant d'un air de défi.
« Tu… Tu nous abandonnerais ? »
Hermione cligna des yeux et se tourna vers Ginny qui venait de parler.
« Je veux dire, tu abandonnerais tes amis pour partir là bas ? Tu serais prête à tout quitter... »
« … Pour lui. »
Ron avait murmuré assez bas pour que personne ne l'entende. Il serra les poings et se mordit la langue pour ne pas avoir de mots trop durs.
« Hermione ? Tu es sérieuse ? »
« Pourquoi pas, Ginny ? Après tout, j'ignore en quoi continuer mes études exactement, mais j'ai entendu dire que pour de grande ambition, il faut voir grand ! Etudier à l'étranger, c'est une bonne idée, non ? »
Ginny releva le regard de la lettre et croisa le regard d'Hermione. Elle était frustrée, Ron ne disait rien et au train où les choses allait, elle partirait dès que possible, laissant Poudlard derrière elle.
« Hermione… »
Ron ! Il se décidait enfin à parler. La jeune fille ne le regarda pas, se laissant tomber dans le sofa, attendant une remontrance du garçon qui lui permettrait de revenir sur ce qu'elle venait de dire.
« C'est donc un adieu… Et ben Ciao ! C'est pas moi qui te retiendrais. »
« RON ! »
Ginny s'était levée, rattrapant son frère devant les escaliers du dortoir. Hermione ne regarda même pas ce qu'il se passait et ne réagit même pas au bruit de claque qu'elle entendit. La rouquine tremblait de rage face à son crétin de grand frère.
« T'es vraiment qu'un… »
Cette fois, Hermione réagit à la deuxième claque. Ron regardait sa sœur d'un œil glacial, la main encore levée par le geste qu'il venait de faire. Ginny ne réagit pas de suite, portant machinalement la main à sa joue.
« Bonne-nuit. »
Il monta les escaliers quatre à quatre et Ginny revint s'asseoir aux côtés d'Hermione qui pleurait silencieusement.
« Il… Il m'a giflé… »
« Je suis désolée Ginny. Je crois qu'il a été clair, tu n'avais pas à intervenir. Je suis désolée, je ne pensais pas qu'il te giflerait. Je suis désolée. »
« Oh, c'est juste que je suis surprise… Il n'a jamais levé la main sur personne d'autre que Malefoy… Hermione. »
Elle se laissa pleurer aussi et elles s'étreignirent, se consolant mutuellement.
