- Prologue -

« Son nom est Kurt Hummel. Il a disparu depuis déjà trois jours. Si jamais, vous avez quelconque informations à son sujet, si vous l'avez vu, si vous pensez l'avoir vu, contactez-nous. C'est important, la vie d'un enfant est en jeu.

- La dernière fois que le jeune Kurt Hummel a été vu, il portait un pantalon noir et un tee-shirt vert. Il portait aux pieds des chaussures de la marque Converses vertes. Il mesure un mètre douze. Il a les cheveux blonds foncés.

- Et surtout, il a des parents qui l'attendent à la maison. Alors, je le répète si vous avez la moindre information, ne serait qu'un soupçon d'informations, contactez-nous. »

Blaine cessa de regarder l'écran lorsque la journaliste réapparut, cachant son père. Ce n'était pas la première fois que Blaine voyait son père à la télévision, mais à chaque fois qu'il éprouvait une joie immense à voir son père, son papa à lui, parlait devant des dizaines de journalistes. Il adorait voir et lire « Samuel Anderson, Chef de la police de Comté de Lima ».

Et lorsque son père rentrait le soir, Blaine lui disait toujours qu'il l'avait regardé. Alors, son père lui posait des questions sur sa prestation. Avait-il bien parlé ? Était-il bien habillé ? Une fois, il avait même mis le bracelet que Blaine lui avait fait pour son anniversaire, et il avait fait exprès de relever la manche de sa chemise pour que tout le monde le voit. Blaine avait été ravi.

Mais ce soir-là, quand son père était rentré et que Blaine lui avait dit qu'il l'avait regardé à la télévision, son père lui avait simplement dit qu'il était fatigué et qu'il avait envie de se reposer. Alors, Cooper était venu lui prendre la main, et l'avait emmené jouer dans le salon. Ils avaient joué au spectacle. Cooper avait dansé et chanté pendant que Blaine applaudissait des deux mains en poussant des petits cris excités.

Et quand le téléphone avait sonné et que Cooper avait fait signe à Blaine de s'en aller, le petit garçon s'était naturellement dirigé vers les voix rassurantes qui émanaient de la cuisine. Il ne voulait pas espionner. Parce que son père lui avait dit que c'était malpoli. Mais il ne pouvait s'en empêcher lorsqu'il avait entendu son père pleurer. Son père ne pleurait pas. C'était quand même le chef de la police du Comté de Lima.

« Putain, il a l'âge de Blaine. Je sais que je ne dois pas prendre les affaires trop à cœur. Mais, tu verrais ses parents. Bien entendu qu'ils sont dévastés. Comment arrivent-ils à continuer à vivre ? Anna, ça fait trois jours qu'ils vont au lit sans savoir si leur petit garçon a un lit. Ou s'il est en vie.

- Chhhhhhh, disait la mère de Blaine en prenant son mari dans ses bras et en le berçant. C'est normal de ressentir ça, mon amour. C'est normal. Calme-toi.

- J'espère qu'on va le retrouver ce gamin. Je veux le retrouver. Je veux être celui qui téléphonera à ses parents pour leur dire « c'est bon, j'ai Kurt dans les bras ».

- Chhhh, calme-toi Sam. Calme-toi. Je suis là. »

Et sans vraiment savoir pourquoi, Blaine avait commencé à s'intéresser à ce petit garçon aux yeux bleus qui avait disparu. Plus il grandissait, plus il cherchait. Il se souvenait du jour où son père était arrivé à la maison et s'était effondré dans les bras de sa femme en disant « c'est fini, ils arrêtent les recherches ». Et il lui avait expliqué qu'il avait dû téléphoner aux parents, aux malheureux parents pour leur expliquer que la police ne chercherait plus leur fils. Parce qu'ils n'avaient pas trouvé de nouvelles preuves, pas de nouvelles pistes. Alors, le soir, Blaine avait fait la promesse à son journal intime que ce serait lui qui retrouverait ce petit garçon et qu'un jour il appellerait son père pour lui dire « c'est bon, j'ai Kurt dans les bras ». Et alors, son père pourrait téléphoner aux parents du petit garçon et leur dire « c'est bon, mon fils a votre fils dans les bras ».

Le soir, en rentrant de l'école, Blaine cherchait des informations sur ce garçon. Il avait acheté un grand cahier avec l'argent qu'il avait eu à son huitième anniversaire et il collait des articles de presse qu'il trouvait, des informations sur les enfants disparus.

À douze ans, Blaine avait trouvé une photo de Kurt dans le portefeuille de son père alors qu'il y prenait un billet de cinq dollars. Il avait regardé la photo attentivement, et il l'avait mise à côté de la sienne dans la pochette plastique qui contenait le permis de conduire de son père. Son père n'avait jamais rien dit. Ni pour les cinq dollars empruntés, ni pour la photo qui avait été déplacée.

À seize ans, Blaine était entré à la Dalton Academy. Et il avait cessé de faire des recherches sur Kurt. Il aurait bien été incapable d'expliquer pourquoi. Mais il avait arrêté et lorsqu'il était sorti de l'université à vingt-et-un ans, il lui fallait quelques secondes pour se rappeler qui était Kurt Hummel. Bien sûr, une fois les quelques secondes passées, il se souvenait et pouvait en parler pendant des heures, mais le petit garçon aux yeux bleus étaient désormais associé à son enfance. C'était un souvenir.

Parfois, le sujet ressortait. Souvent c'était Cooper ou son père qui en parlaient. Cooper, parce qu'il voulait se moquer un peu de l'ancienne obsession de son petit frère demandait « Hé, P'pa, t'as des nouvelles du petit ami de Blaine ? Tu sais, Kurt Hummel ? ». Ou c'était son père. Et son père donnait des nouvelles de la famille de Kurt, comme on donne des nouvelles de la famille éloignée. « J'ai appris que le père du petit Kurt Hummel avait fait une crise cardiaque. Je vais lui envoyer une carte de Prompt Rétablissement ». Blaine se souvenait que son père avait été à l'enterrement de la mère du petit Kurt aussi. Et il se souvenait qu'il avait demandé à sa mère comment le petit garçon allait se sentir quand il allait le savoir. Et il se souvenait que sa maman ne lui avait pas vraiment répondu. Elle lui avait caressé les cheveux et l'avait embrassé, mais elle ne lui avait jamais répondu.

Allongé dans son lit, Blaine avait vingt-cinq ans et se demandait pourquoi il repensait à cette histoire.