Premier rappel : Hinata.
Ce jour-là, c'est le bruit de la sonnette qui m'a réveillée.
J'ai sorti lentement mes jambes trop fines et trop blanches de ce lit trop grand et me suis trainée jusqu'à l'interphone.
- Oui ? Ai-je dit de ma voix mal-assurée.
- Nee-saaaan ! C'est moiiii ! As-tu clamé.
- Hanabi ! Qu'est-ce que tu fais là ?
Tu n'as pas répondu. Tu t'es contentée de reposé tes doigts impeccables aux beaux ongles vernis sur le bouton de la sonnette, impatiente. Je suis persuadée que tu souriais. Du moins c'est la représentation mentale que j'en ai aujourd'hui.
Ce jour-là, j'ai soupiré et je t'ai ouvert de mauvaise grâce.
J'ai déverrouillé la porte d'entrée et je me suis éclipsée le temps que tu montes les étages menant chez moi, j'ai été prendre ma douche. J'étais agacée que tu empêches ma grasse matinée avec ton habituelle manie de n'en faire qu'à ta tête.
Je n'étais jamais très réceptive de si bon matin, mais tu le sais n'est-ce pas ?
Quand je t'ai rejoint avec mon drap sur la tête, tu étais installée dans le canapé. Tes bottes noires posées sur la coursive et la tête penchée dans ma direction. Tu m'attendais. En souriant.
- Combien de fois dois-je te dire d'enlever tes chaussures ?
Tu as ricané et repris une position plus conventionnelle. Ce que tu n'étais pas.
D'autant plus avec ce look qui faisait horreur à notre famille conformiste. Mais tu t'en fichais, tout t'étais égal à toi. Tu étais l'insouciance même.
Où bien était-ce moi qui était trop formatée ?
- Que viens-tu faire ici ? Osais-je questionner de cette voix qui manquait d'assurance.
- Notre cher père est d'humeur massacrante. Il attend un client important pour le déjeuner.
- Hanabi ! T'ai-je grondée. Tu es l'héritière ! Pourquoi n'y es-tu pas ?
- C'est du bœuf bourguignon… Gémit-elle.
Je m'en rappellerai toute ma vie de cette moue dégoutée et de la façon dont tu prononçais en plissant les yeux le mot « Bourguignon ».
J'ai ri avant de prendre une mine offusquée mais cela ne te donna pas de remords. C'était une piètre excuse pour fuir mais toutes deux nous savions que tu n'étais l'héritière que par défaut et que tu méprisais ce titre.
Peut-être encore plus que moi-même je n'ai pu le mépriser.
C'était ta façon de montrer ton mécontentement, tu t'habillais en noir et trop courtement, tu te peignais tes ongles trop longs en un noir mat et ornait les longs doigts que père destinaient au piano de bagues métalliques pour triturer une guitare rouge écarlate.
Mais par-dessus tout, tu n'étais jamais à court d'idées pour fuir la demeure ancestrale.
Plus il fulminait, plus loin tu allais dans la provocation.
- Tu viens de te lever ? Il est déjà 11h, tu sais…
Tu me scrutes de haut en bas, les yeux rieurs. Le piercing qui orne ta lèvre brille alors que celle-ci s'étire en un sourire te rendant plus démoniaque encore.
J'ai resserré les pans de mon peignoir blanc autour de moi et ai fait mine d'aller mettre quelque chose de plus convenable mais tu m'en as empêchée en déclarant que tu te fichais de ce que je pouvais bien avoir sur le dos.
Et que je devrais plus souvent laisser voir mes jambes, qu'elles étaient trop bien façonnées que pour être emprisonnées dans mes tailleurs si tristes.
J'ai souri.
- Cela te tente des croissants ? T'enquiers-tu soudainement.
J'hoche la tête, bien que sceptique.
L'enthousiasme te fait sauter sur tes pieds hors du canapé ce qui soulève ta jupe de façon obscène mais tout ce que je me dis à cet instant-là, alors que tes immenses yeux nacres me fixent et que tu abordes ce sourire enfantin, c'est que tu es devenue une magnifique jeune femme.
Le bonheur t'allait si bien, tu n'étais faite que pour porter cette expression.
- Et où penses-tu trouver des croissants au juste ?
- J'ai mon idée sur la question, ne t'inquiète pas !
Et tu attrapes ce perfecto de cuir qui ne te quitte jamais pour te diriger vers la porte de mon appartement.
- Hanabi ! Comment es-tu venue au juste ?
Tu t'es retournée et j'ai reconnu instantanément le trousseau de clé qui tournait habilement entre tes doigts. Tu jouais avec, une lueur amusée dans le regard et l'attitude provocante.
- Neji va te tuer.
Peut-être aurais-je dû te confisquer ces clés ?
- Sans doute.
Ton rire a résonné dans la cage d'escalier alors que tu dévalais déjà les marches et je me suis précipitée à la fenêtre pour te voir t'en aller.
Tu t'es engouffrée dans la voiture de sport, la portière a claqué et le vrombissement du moteur a rompu le calme du quartier bien famé où j'habitais à l'époque.
Je t'ai observée prendre le temps de choisir la musique sur le tableau de bord. Je ne voyais que l'éclat ébène du haut de ta chevelure et pourtant je savais que c'était un choix important pour toi.
Cela a duré quelques dizaines de secondes avant que n'éclate bruyamment le son d'une batterie. Il s'agissait de « Zerstoren » d'un groupe allemand que je ne connaissais absolument pas. Ensuite, tu as passé la première et dans un train d'enfer, quitter mon champs de vision.
Zerstoren… Cela se traduit détruire.
Et je n'ai même pas pensé à te dire au revoir….
Cette musique, je l'entends toujours aujourd'hui, tu sais ?
Elle me hante.
Après, ce fut l'horreur.
J'ai mis un mois a quitté ma chambre.
Père avait d'abord insisté pour que je revienne à la maison puis avait été forcé de respecter mon besoin de solitude.
Je ne parlais pas.
Je ne pleurais pas.
Je ne vivais plus.
J'étais la dernière personne à t'avoir vue en vie. La culpabilité me rongeait.
Et si j'avais refusé les croissants ?
Et si je t'avais pris les clés de cette voiture trop puissante ?
Et si … ?
Puis, progressivement, j'en suis venue à mépriser les autres.
Notre père en première place.
Lui qui m'avait reniée pour te nommer héritière contre ton gré. Lui qui ne respectait jamais ton besoin de liberté et négligeait ton épanouissement. Lui qui t'avait confisquée ta voiture pour t'empêcher de lui échapper.
Lui qui n'avait fait que te critiquer, inlassablement. Ta façon de t'exprimer, ta façon de t'habiller, tes fréquentations, tes loisirs, tes études… Il méprisait ton âme torturée d'artiste.
Tout ce qui faisait de toi ce que tu étais.
Tu sais, il se plaint de ne jamais t'avoir comprise et je n'ose lui dire qu'il n'a tout simplement pas essayé.
Mais moi non plus, je n'ai pas vraiment essayé, pas vrai ?
Me pardonnes-tu ?
J'en ai également voulu à notre cousin. Après tout c'est sa voiture que tu conduisais, mais aurait-ce été différent s'il s'était agi d'un véhicule moins puissant ?
Le chauffard qui t'a percutée aurait-il pu t'éviter si tu étais venue moins rapidement ?
Où simplement, était-ce inévitable ?
La mort de la seule personne avec qui je n'aie jamais pu avoir une conversation était-elle incontournable ?
Tu te rappelles, je ne parlais pratiquement pas à cette époque.
J'étais timide, effacée.
Invisible.
Et pourtant, toi, tu me voyais toujours.
Il serait faux de dire que je vivais pour toi, puisque je n'avais pas d'existence propre.
Je vivais à travers toi. À travers tes yeux effrontés et tes perpétuelles frasques et aventures.
Quelquefois, je me demande si je ne suis pas née le jour où tu es morte.
Dis… Est-ce mal de penser de cette façon?
C'est moi qui suis allée vider ta chambre.
Ce parfum qui t'accompagnait à chacun de tes pas emplissait la pièce.
Ce n'était pas seulement l'effluve sucrée de ton parfum hors de prix.
C'était également l'odeur du cuir et du tabac, l'odeur de l'huile essentielle que tu plaçais sur la pierre Citrine que tu portais au creux de ton cou pour te donner confiance en tes décisions. Celle des oranges que tu transportais partout avec toi, en mangeant en tout temps. Cela sentait un peu la poussière qui virevoltait au-dessus de tes rayonnages mais également la peinture fraiche, comme si tu étais venue récemment donner le coup de pinceau final à l'une des toiles reposant contre le mur. L'odeur de l'acier des cordes de ta guitare flamboyante et le caoutchouc de l'épaisse semelle de tes bottes. Une effluve de bougie parfumée à la vanille et un fond de thé au citron.
J'étouffais.
J'ai bien faillit flancher, quitter la pièce en courant et ne jamais y remettre les pieds. L'idée était tentante car facile. Et je n'avais jamais été quelqu'un de courageux.
Mais si ta propre sœur ne pouvait se battre pour sauvegarder tes œuvres et perpétuer ton souvenir, qui le ferait ?
J'ai ouvert la fenêtre en grand et l'ai regretté instantanément. À jamais, envolé ce mélange d'odeurs qui n'appartient qu'à toi.
Alors j'ai serré les dents et j'ai trié tes armoires, jeté tes déchets, classé tes partitions, encadrés tes tableaux, essayé tes vêtements. Et emporté le tout.
En chaque petites choses, même insignifiantes, je te retrouvais. C'était délicieusement douloureux.
Je n'ai pas eu le cœur d'ouvrir toutes les boîtes que tu possédais, tu en avais bien trop. Mais surtout, je savais que c'était dans ces dernières que tu gardais ce qui avait réellement de la valeur à tes yeux.
En réalité, la seule que j'aie ouverte cette après-midi-là fut une minuscule petite boîte en bois ébène qui ne devait pas faire plus de cinq centimètres. Elle tenait dans le creux de ma paume.
Mat, noble. L'attache dorée tranchante a un peu protesté quand j'ai tenté de la déverrouiller.
À l'intérieur se trouvait ce collier que nous avions acheté ensemble. Ou plutôt devrais-je dire : que tu as acheté sous mes yeux alors que je ne m'expliquais pas que tu sois si dupe face à cette commerçante à l'apparence étrange. La boutique en elle-même m'impressionnait beaucoup même si accorder des pouvoirs aux pierres me semblait surréaliste et je me suis longtemps demandé par la suite comment nous avions atterri là.
Il a fallu des mois avant que tu ne te décides à arrêter de porter cette pierre. Tu l'exhibais partout, comme un trésor.
Mais, dis-moi… L'élégant grenat de ce ras-de-cou ne protégeait-il pas contre le mal et les dangers cachés ?
Alors, pourquoi ne l'avais-tu pas mis ce jour-là?
Père m'a convoquée environ trois mois après ta disparition.
Je n'admettais toujours pas ta mort, tu étais mon étoile et je ne pouvais me résoudre à arrêter de croire à ton retour.
Je portais tes vêtements sur mon corps si maigre et ton grenat dans mon cou, mes ongles étaient vernis de cette couleur que tu affectionnais et je dégageais les effluves de ton parfum.
Je ne parlais toujours pas.
Je n'avais pas pleuré.
J'étais bien trop brisée pour cela.
.
L'ensemble du conseil des anciens et tous les membres éminents du clan était là quand j'ai rejoint père dans son bureau. Il portait un luxueux costume bleu marine et son visage impassible embrasa la fureur qui m'habitait.
Qui était-il pour me jeter pareil regard désapprobateur ? Où était-il les dernières semaines ?
Étais-tu donc si insignifiante à ses yeux ?
Une gêne qu'on se réjouit de ne plus subir ?
Ainsi, ce fut une surprise générale quand je me mis à hurler sur père lorsqu'il me demanda de reprendre le statut d'héritière puisqu'il était désormais vacant. J'aurai pu le gifler.
Personne n'avait jamais osé s'adresser ainsi à lui. Encore moins quelqu'un de notre clan.
Encore moins sa fille ainée.
Je pense qu'il est resté en état de choc jusqu'au moment où j'ai quitté cette antique maison bien trop froide en claquant une à une toutes les portes derrière moi.
Une fois sur le trottoir, j'ai levé les yeux et j'ai vu père de la fenêtre de son bureau qui m'observait.
J'étais loin, il ne faisait pas très clair et pourtant je suis quasiment certaine qu'il pleurait.
Une larme solitaire couru le long de ma joue mais je n'ai pas trouvé la force de l'effacer.
Et cette chanson que tu avais mise à fond en démarrant ce jour funeste résonna une fois de plus à mes oreilles.
Encore maintenant, il m'arrive de l'entendre. Dans ces moments-là, je caresse le grenat autour de mon cou et je me laisse bercer.
Suis-je folle, Hanabi ?
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J'ai pris peu d'affaires, essentiellement les tiennes, et j'ai quitté mon appartement.
Je suffoquais dans mon existence étriquée.
Lentement, j'ai traversé la nuit. Ta guitare sur le dos et un sac de voyage dans la main. L'une de tes jupes plissée s'agitant au vent et ton perfecto en cuir me réchauffant un peu extérieurement.
Intérieurement, j'étais glacée.
J'avais la sensation qu'à tous instants je pouvais fondre et disparaître.
Pourtant, j'ai marché encore et encore. Inlassablement. Jusqu'à la gare et pris le premier train pour l'aéroport.
Je n'avais même pas songé a prendre un taxi.
Londres était ma destination.
Mon but.
C'était ton rêve, après tout.
.
Confortablement installée en première classe, la musique sonnait plus fortement que jamais à travers mon esprit embrumé.
J'étais épuisée mais trop tourmentée que pour dormir.
Mon voisin de voyage s'installa et me jeta un drôle de regard.
Il est vrai que je devais avoir une mine épouvantable mais que pouvais-je y faire ?
Ma petite sœur n'était plus là pour veiller à ce que j'existe. Seul son regard me prouvait ma propre existence mais jamais plus il ne se poserait sur moi alors que je suis dans les ténèbres pour me sortir de l'ombre.
Alors à quoi bon paraître bien sage ?
L'avion a décollé et je me suis crispée. Je paniquais, était phobique de ce moyen de transport.
L'homme à mes côtés n'a pas dit un mot et m'a attrapée la main jusqu'à ce que je recouvre une respiration normale.
- Merci. Ai-je murmuré quand les hôtesses ont recommencé à se balader.
- Je vous en prie.
J'ai tourné la tête dans sa direction, il me regardait gravement et sa voix était noble, basse.
- Je l'ai surtout fait pour les sièges, à vrai dire. Je craignais que vous ne les déchiriez a vous y agripper de la sorte.
Je n'ai pas eu le cœur de lui rendre ce demi-sourire qu'il me fit.
Les yeux écarquillés, je ne pouvais détourner le regard de ses prunelles noires. Je m'y noyais.
Et mon cœur, si serré, à l'étroit dans mon faible corps, tambourinait furieusement alors que je ravalais péniblement les larmes qui montaient dans ma gorge.
Je me cramponnais à cette main que je ne parvenais pas à lâcher, y puisant tout le réconfort que personne ne m'avait accordé ces derniers mois.
Je m'y cramponnais ardemment et pourtant je demeurais seule.
Il ne fit pas un geste pour récupérer ses doigts et me laissa pleurer sur nos mains jointes.
Le front sur l'accoudoir central, j'ai sangloté longuement avant de sombrer dans un semblant de sommeil hanté de ton sourire et de bruit de sonnette.
Ce fut l'odeur de croissant chaud qui me tira de ma léthargie.
- En désirez-vous un ? S'enquiert l'homme alors que je fixe l'origine de l'odeur qui trône dans son assiette.
Mes yeux papillonnèrent et se levèrent dans sa direction. Ils étaient pleins de larmes mais cela ne m'empêcha pas de discerner la mine inquiète qui se pencha doucement au-dessus de moi.
Je mordis nerveusement ma lèvre alors qu'il passa sa main dans mes longs cheveux d'ébène.
Tu étais tellement forte, Hanabi. Comment faisais-tu pour sourire en toutes circonstances?
En douze heures de vol, l'inconnu ne me posa plus aucunes questions. Il se contenta de me réconforter en silence alors que j'alternais crise de larmes et état végétatif.
.
Ce fut les larmes aux yeux que je l'observais s'éloigner tranquillement dans le gigantesque hall d'arrivée de l'aéroport de Londres, son complet noir se fondant rapidement dans la foule.
Je n'ai pas pu le remercier correctement, les mots restant callés dans ma gorge.
Et dans ma main, un petit carton estampillé au logo d'une célèbre société immobilière sur laquelle figurait une série de chiffre permettant de le joindre jour et nuit, d'après ses propres mots.
Il me fallut un long moment pour reprendre mes esprits et cesser de fixer l'endroit où je l'ai perdu de vue. J'ai glissé la carte de visite dans la poche à tirette de la veste en cuir et j'ai été récupéré mon bagage, la guitare sur l'épaule et le cœur au bord des lèvres.
Je me sentais si morcelée que rien ne me semblait réel.
C'est plus morte que vivante que j'ai traversé la ville la nuit de mon arrivée, mais tu sais mieux que quiconque que je vivais en apnée depuis toujours alors quelque part c'était déjà un progrès, tu ne penses pas ?
Je ne savais pas quelle adresse donné au chauffeur du taxi que j'ai arrêté alors je lui ai ordonné de rouler jusqu'à ce que je trouve une réponse à lui fournir.
Il m'a regardé dédaigneusement et n'a accepté d'obtempérer que lorsque je lui ai jeté une liasse de billets. Et il a roulé. Longtemps. Dans un dédale de petites rues proprettes, d'artères gigantesques, de places ornées de statues et de routes longeant des parcs.
Rien ne trouva grâce à mes yeux. La paix espérée ne venait pas.
- Déposez-moi au meilleur hôtel que vous connaissez. Ai-je exigé.
Le son de ma voix l'a fait sursauter, je l'ai bien vu. Depuis combien de temps étais-je dans ce taxi ? Il n'a fait aucun commentaire cependant alors qu'il me déposa devant un bâtiment d'une classe inégalable.
Le portier se précipita pour m'aider à porter ma valise alors que mon chauffeur, dûment récompensé, quittait les lieux dans son carrosse noir.
La réceptionniste ne me laissa pas de souvenirs particuliers au contraire de la suite qui me fut attribuée. Une verrière, au-dessus du lit, donnait vue sur la voie lactée.
Je me laissais tomber toute habillée dans les draps soyeux, n'osant détacher mon regard du ciel.
Aspirée dans cet univers de ténèbres lumineuses, n'importe qui se serait senti petit et vulnérable.
Insignifiant.
Les étoiles sont comme nous, en fait: elles naissent, elles vivent pendant un certain temps, puis elles meurent. Certaines s'éteignent doucement, certaines explosent, mais à la fin, comme nous, elles sont mortelles.
Tu es une étoile, Hanabi, et les humains sont petits, risibles à tes côtés.
Pourtant, chacun désire briller, même de façon éphémère.
Et c'est de cette sensation que je m'emplis pour affronter fièrement le réveil, le lendemain, et me rendre dans la salle richement décorée où se tenait le petit-déjeuner. Si je ne mangeais pas grand-chose, j'y trouvais néanmoins un certain plaisir. Les mets étaient délicieux et fort heureusement l'odeur des saucisses et des haricots rouges couvrait celle des croissants chauds.
Cependant je n'avais aucun but, aucune idée de quoi faire dans cette ville.
C'était ton rêve, pas le mien et je me sentais brutalement très naïve d'avoir pensé y trouver un sens.
J'ai erré sans destination pendant une bonne partie de la journée et, même si je n'étais pas constamment attentive à ce qui m'entourait, j'appréciais cette ville sans âge.
Étrangement, personne ne semblait surpris de mes vêtements ou de mon visage dévasté. Je fus d'ailleurs la seule à fixer certains passants aux looks bien plus exotiques que ce que ma sœur n'avait jamais osé et de cette constatation naquit mon amour mon Londres.
Il me fallut trois jours pour me retrouver presque parfaitement dans le centre-ville et ses alentours. Une semaine pour me déplacer sans consulter sans arrêt le plan du métro et une de plus pour me décider à quitter l'hôtel et me mettre en quête d'un appartement.
Mais il s'avéra compliqué de se loger dans la métropole quand l'on ne savait pas où s'adresser.
Et c'est ainsi que je me suis retrouvée un matin à fixer le combiné du téléphone ornant la table de nuit de la suite où j'avais établis mes quartiers, me triturant nerveusement les doigts a l'idée de téléphoner à l'inconnu de l'avion.
J'ai dû soupirer une bonne centaine de fois et ai décroché/raccroché le combiné au moins autant de fois. Pourquoi était-ce si angoissant de parler à cet homme ?
J'ai passé ma main sur mon visage et l'ai faite couler doucement le long de mon cou pour saisir ton grenat.
Tu étais avec moi, tout irait bien.
.
Rendez-vous avait été pris pour dix-sept heures dans Saint James Park et j'avais donc passé l'après-midi à me balader dans les allées entourant le lac tout en observant les écureuils qui galopaient dans les pelouses.
Je pensais qu'il serait peu aisé de se retrouver dans cet endroit étendu et peuplé mais vers seize heures trente un homme en costume bleu marine s'installa à mon côté sur le banc face à l'étendue d'eau. Je n'eus pas besoin de tourner la tête pour savoir que mon inconnu était là et cela m'arracha un faible sourire.
Je poursuivis ce que j'étais en train de faire, c'est-à-dire nourrir les petits écureuils roux qui se pressaient à mes pieds, sans accorder un seul regard à l'homme d'affaire que j'avais fait venir jusqu'ici.
Je ne savais pas encore quoi dire alors je prenais mon temps avec les rongeurs. Et il semblait se douter que je l'avais repéré et que je feignais de l'ignorer car il ne souffla mot.
Quand je me rassis et tournait enfin la tête vers lui, je croisai instantanément ses yeux sombres. Il avait fait légèrement raccourcir ses longs cheveux noirs, laissant cependant quelques mèches plus longues lui caresser les joues et trancher avec sa peau pâle. Les bras étendus sur le dossier du banc et un de ses pieds reposant sur son genou, il avait l'air parfaitement détendu.
Tout mon contraire.
Comment aurais-tu fait Hanabi ? Mais la question est absurde, tu ne craignais rien ni personne.
C'est presque étonnant que la mort n'ait pas été intimidée, si tu veux mon avis.
Je luttais pour ne pas triturer mes doigts devant moi et baisser la tête sous l'intensité de son regard. J'étais subjuguée et terrifiée.
Des échos de ta musique ont surgit et je me suis infligée une gifle mentale avant de soutenir son regard, un peu provocante.
Ici, à Londres, j'étais qui je voulais.
Et je voulais être toi, Hanabi.
- J'ai besoin d'un logement. Ai-je annoncé
- Bonjour à toi aussi. A-t-il soufflé d'une voix moqueuse en se passant la main dans les cheveux.
Je n'ai pas répondu et ai reporté mon attention sur les canards nageant dans le lac.
Il a esquissé le mouvement de se lever et j'ai tendu ma main dans sa direction.
- Hina Chigiku. Me présentais-je.
Il l'a saisie tout en reposant son dos contre le dossier.
- Sasuke Uchiha.
- J'ai besoin d'un logement, Sasuke Uchiha.
Cet homme était beaucoup trop perspicace que pour se laisser berner par cette fausse identité mais il n'a pas relevé. Il m'a fait un étrange demi-sourire et je pense que c'est à cet instant là que je me suis dit pour la première fois qu'il était incroyablement beau.
Les traits de son visage étaient fins, gracieux. De grands yeux noirs et profonds, ornés de longs cils, une bouche bien dessinée et un nez droit. Grand et musclé, des épaules carrées et un maintien altier. Jeune, sans doute à peine plus âgé que moi, et bien habillé. Que faisait pareil homme assis sur ce banc en ma compagnie ?
- Suis-moi.
Et il se leva d'un bond agile, commençant déjà à s'éloigner alors que je reste figée. Il parcourt une dizaine de mètres avant de se retourner et de constater mon immobilité. Un de ses sourcils se hausse mais il revient se positionner devant moi et me tend une main que je saisis lentement.
''Chigiku'', ça sonne bien non, Hanabi ? Cela signifie « Mille Chrysanthèmes » et pour moi qui porte ton deuil à chaque pas, c'était le nom idéal…
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Il bataillait avec un imposant trousseau et pesta plusieurs fois avant de finalement brandir le sésame déverrouillant la porte dans un mouvement triomphant. Il me devança dans la pièce rapidement avant de s'appuyer contre le plan de travail de la cuisine en silence, me laissant explorer à ma guise.
La pièce de vie était lumineuse et le parquet en bois ancien lui donnait un cachet luxueux qui me rappela douloureusement le bureau paternel.
Je ne dis pas un mot alors que je me coulais face à lui, me contentant d'un geste de la tête négatif. Sasuke m'observa et, dans un presque sourire se redressa pour quitter les lieux.
Nous visitons deux autres appartements mais l'obscurité s'étendit rapidement sur la ville et je concédais qu'il était préférable d'effectuer les visites de jour bien que j'aie envie de poursuivre ma quête.
- Quand pourrons-nous nous revoir ? Lui demandais-je
- Parce que tu me congédies ? N'ai-je pas le droit de t'inviter à diner ? S'offusqua-t-il faussement.
Ses yeux pétillèrent de malice et, comme avec toi quand tu souriais si fort que cela touchait tes yeux, je ne pus refuser. Certaines choses ne peuvent changer.
- Dans ce cas, il faut que je revête une autre tenue.
Il me détailla de la tête aux pieds puis haussa les épaules.
- C'est Londres… Dit-il vaguement avant de héler un taxi.
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Le restaurant français où il m'emmena était beaucoup trop chic pour que j'y passe inaperçue. Mais étonnamment, cela me fut égal.
Pour la première fois de ma vie, je n'avais pas besoin de satisfaire mon image publique. Personne ne me jugerait ou ne renverrait un avis peu flatteur à père. Personne ne me gronderait et ne s'échinerait a rabâcher les règles auxquelles se doit de se plier un membre important de la oh combien noble famille Hyûga.
J'étais libre d'être qui je voulais et pourtant mon cœur était lourd.
Parce que tu n'avais eu de cesse de courir après ce privilège sans jamais l'obtenir.
As-tu enfin accès à cette liberté à laquelle tu aspirais tant là où tu es ?
Inconsciemment, je portais ma main entre mes clavicules, caressant du bout des doigts la pierre bordeaux de ton collier. Le geste n'échappa pas à mon vis-à-vis.
- C'est une très belle pierre. Un grenat ? Demanda-t-il
Je détournais les yeux, me perdant dans le vague et mes doigts se crispèrent sur l'éclat précieux dans un geste futile pour le cacher de la vue de l'importun.
Sais-tu combien de fois j'ai formulé des prières pour que tu me concèdes rien qu'un brin de ta répartie ?
Mon trouble du transparaitre sur mes traits puisque Sasuke étendit son bras sur la table que nous partagions pour saisir ma main libre.
- As-tu trouvé ce que tu désirais manger ? Changea-t-il de sujet alors qu'il inspectait tout à coup le menu.
- Pas vraiment. Admis-je, Et toi ?
- J'hésite. Le bœuf Bourguignon est tentant…
Il sourit alors que je volais en éclats intérieurement.
- Ce sera donc du canard. Se ravisa-t-il en caressant délicatement le dos de ma main.
Je déglutis, tentant vainement de me donner une contenance. Fondre en larmes dans ce splendide restaurant serait ridicule.
Mais je devais reconnaître que Sasuke était incroyablement prévenant à mon égard. Et observateur.
Peut-être trop pour mon propre bien, d'ailleurs.
- Je vais opter pour le Rouget, je crois. Murmurais-je dans un souffle.
- Tu es sûre ? Demanda Sasuke en faisant signe au serveur sans me quitter du regard
- J'aurai moins de mal à me décider et à réfléchir si tu arrêtais de me dévisager deux petites minutes. Rétorquais-je
S'il fut surpris de mon brusque aplomb, j'en fus moi-même choquée. Et émerveillée.
Suffisait-il que je baisse ma garde et ôte les filtres de bienséances inculqués pour m'exprimer sans crainte ?
Je risquais un sourire maladroit en direction de mon convive et fut soulagée de le voir me le rendre.
- Parce que je te trouble? Me nargua-t-il
J'ouvris la bouche pour répliquer mais il me coupa dans mon élan en pressant ma main et se pencha légèrement en avant.
- Je te préviens, si tu réponds non, je continuerais jusqu'à ce que ce soit le cas.
- Et dans quel but souhaites-tu me troubler ? M'informais-je
- N'est-ce pourtant pas évident ?
Je haussais un sourcil et lui lança un regard interrogateur.
- Comment pourrais-je espérer te revoir sinon ?
- Tu n'as pas besoin de cela, tu pourrais tout aussi bien utiliser les visites d'appartements. Notais-je
- Tôt ou tard tu remarquerais que ce n'est pas mon métier et tu disparaitrais.
Sa réponse me laissa pantoise.
Pas son métier ? Qu'est-ce que cela signifiait ?
Pourtant nous avions effectué des visites… Comment était-ce possible ?
Il se passa une main lasse sur le visage.
- La société pour laquelle je travaille en ce moment possède les logements que nous avons visités aujourd'hui. Cependant, je n'ai aucune qualification pour la location de biens.
- Pourquoi ?
Ce fut le seul mot que je réussi à dire. La question tournant en boucle dans mon esprit.
- Mais je viens de te le dire : je désirais te revoir. Énonça-t-il posément sans la moindre gêne.
Je sentis mes joues prendre feu alors qu'extérieurement j'étais certaine qu'elles étaient écarlates. Et lui, de ses yeux sombres qui ne me lâchaient pas, n'en perdait pas une miette.
C'était trop pour moi, la tête me tournait.
- S'il te plaît, ne t'en va pas.
Je n'avais même pas réalisé m'être levée.
J'y voyais trouble et ma respiration était douloureuse.
J'avais chaud.
Mes pieds se dérobèrent sous moi et ma seule pensée fut pour toi.
Encore.
Juste une dernière fois, ton sourire…
S'il te plait ne t'en va pas.
Je veux te revoir.
- Hanabi…
Tu sais, je désirais ardemment te revoir et ce, même si pour cela je devais aller te chercher en enfer.
J'accepterais même de faire un pacte avec le diable en personne.
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- Tu es resté à mes côtés ?
J'étais sans doute toujours sonnée et avais mal compris.
Je m'étais réveillée quelques minutes auparavant et j'avais découvert Sasuke dormant dans le fauteuil étroit de la chambre d'hôtel où j'avais visiblement été emmenée. Il se frotta les yeux d'un mouvement lent, endormi, avant d'acquiescer.
- Comment te sens-tu Hina ? S'inquiéta-t-il d'une petite voix en se redressant dans une grimace
Je me décalais sur la droite avant de m'asseoir, remontant le coussin dans mon dos plus confortablement et d'indiquer la place libérée dans le lit à l'homme toujours à moitié somnolant.
Il croisa mon regard et je le sentis hésitant. Était-il réticent à dormir avec moi ?
- Je ne vais pas te manger.
- Dommage. Déclara-t-il en s'allongeant.
Je rougis furieusement et posa ma main sur mon visage pour le masquer à son regard mais il avait déjà les yeux fermés et la tête semi enfouie dans le coussin en plumes.
Je souris prudemment en l'observant, le visage si détendu.
Quand avais-je eu personnellement ce luxe pour la dernière fois ? Songeais-je amèrement.
Je replaçais délicatement une de ses mèches de cheveux noires pour qu'elle cesse de lui chatouiller la commissure des lèvres et ne l'embête pas dans sa quiétude sans réaliser mon geste, prise dans mes sombres tourments habituels.
Je n'en pris conscience que lorsqu'il sourit et, d'un bras puissant, me ramena contre son corps pour m'enlacer.
Son torse contre mon flanc et son visage enfouit dans mes cheveux.
Son souffle heurtant le bas de ma mâchoire et se répercutant en de multiples frissons dans mon cou.
Je fermais fermement les yeux, m'imposant le calme alors qu'il rabattait grossièrement les couvertures sur nous avant d'assurer sa prise sur mon corps frêle.
J'ai juste à compter jusqu'à… disons cent, et il sera endormi. Je pourrais alors me libérer de son emprise discrètement et filer.
- Tu penses trop fort. Grogna Sasuke
Je me raidis et tenta furtivement d'observer son visage mais il était enfoui dans mon cou à présent ce qui empêchait toute possibilité de savoir s'il dormait ou était bel et bien éveillé.
Dis, Hanabi, quand tu faisais le mur pour rejoindre Kiba est-ce qu'il te prenait dans ses bras de cette façon ?
Il y a tant de choses qu'on n'a pas eu le temps de se raconter.
Je pense que j'en étais à cinquante-sept quand une sonnerie de téléphone retentit, brisant mon comptage et le silence.
De toute façon j'avais perdu le compte trop de fois pour être sûre d'où j'en étais.
Un grognement sourd s'échappa de la bouche qui avait glissé sur mon épaule et la main tenant ma taille s'aventura dans les couvertures pour chercher à tâtons l'objet dans une poche de son pantalon.
Il le trouva finalement et eut le temps de décrocher avant la dernière sonnerie, glissant nonchalamment le portable dans sa chevelure emmêlée et le callant de son épaule pour reposer doucement sa main sur mon ventre.
- Hn ?
Il n'avait même pas regardé qui était son interlocuteur. Qui pouvait bien lui sonner en pleine nuit ?
- Bien entendu que je dors, il est une heure du matin. Pesta-t-il faiblement. Je rentre jeudi… Oui… Hn…Tu me fatigues.
Je tentais de tirer profit de son agacement qui l'avait fait un peu se redresser pour m'extirper du lit mais ses orbes noires me stoppèrent nette.
- Tu ne vas quand même pas filer à l'anglaise ? S'exclama-t-il en ignorant royalement la personne à l'autre bout du fil. Non, Naruto, je ne te parle pas. Tu sais quoi, je te rappelle.
Et il raccrocha sans même écouter la réponse, tout en continuant à me fixer. Je m'assis prudemment sur le bord du lit, démunie face à cette attente teintée d'anxiété.
Lentement il parcouru la faible distance entre nos deux corps et attrapa mon bras pour m'entrainer à sa suite dans le lit. La chute me conduit directement contre son torse et il referma ses bras sur moi, m'y plaquant entièrement.
- Je serais le gardien de tes ténèbres, si tu le veux.
J'esquissais un sourire mélancolique.
- Ce que je crains, ce sont les étoiles.
- Ah bon ? S'étonna-t-il.
- C'est mortel, une étoile. Et lorsqu'elle meurt, la perte de sa lumière ne se remarque pas au milieu des autres pourtant celui qui la suit pour se guider se retrouve bien démuni.
- Alors, je serais ton étoile.
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Tu sais Hanabi, mon ciel compte désormais une étoile de plus. Elle brille tellement fort qu'il m'arrive brièvement d'oublier l'emplacement où tu illuminais avec tellement d'intensité mon univers.
Mais au fond, ce n'est pas l'emplacement qui compte, c'est ce que cette lumière à apporter dans ma vie.
.
Les quatre jours qui suivirent, je dormi toutes les nuits avec Sasuke.
Il partait le matin après m'avoir déposé un café au bord du lit et revenait en fin d'après-midi prendre une douche avant qu'on ne sorte tous les deux.
La nuit il m'enlaçait et parfois s'aventurait à passer ses doigts fins dans mes cheveux. Il les humait ou les enroulait autour de ses phalanges.
Le jeudi de son départ arriva trop rapidement.
Ce matin fatidique, il se leva et prit son temps pour se vêtir d'une tenue de ville que je ne lui avais jamais vue. Je ne le connaissais qu'en chemise et pantalon classique, ainsi le voir dans ce jeans noir parfaitement coupé et dans ce polo bleu marine me laissa ébahie.
Mais au fond, je savais qu'il serait exquis même s'il était vêtu de fripes.
Et au vu du regard de la réceptionniste quand nous eûmes rendu la clé de la chambre, elle était également pleinement consciente du physique remarquable de l'homme qui partageait mes nuits.
- J'espère vous revoir prochainement, monsieur Uchiha. Ronronna-t-elle.
Je lui lançai un regard acide qui n'échappa pas à l'interpellé. Il eut un sourire ravageur à l'égard de la jeune femme et je cru qu'elle allait se pâmer d'amour.
- Qu'en penses-tu, ma chérie ? Désirerais-tu rester ici encore quelques temps ? Me demanda suavement l'ignoble moqueur.
- Il n'en est pas question. J'aurai trop peur que cette greluche vienne se glisser entre nous pendant la nuit. M'exclamais-je avant de tourner les talons sous les cris offusqués de la réceptionniste et le rire de Sasuke.
Il me rejoignit quelques instants plus tard et m'observa, comme à sa désagréable habitude.
- Jalouse ?
- Cesse ce petit jeu. Je ne suis pas ta « chérie ». Le cassais-je immédiatement.
- Ne tient qu'à toi de le devenir, madame l'insensible.
Je le toisai malgré ma petite taille et il eut un sourire narquois.
- Mais si tu n'es pas mienne, je n'ai aucune raison d'envoyer paître cette charmante jeune fille de l'accueil.
Je clos mes yeux pour ne pas qu'il puisse se réjouir de la rage contenue dedans.
- Bien, fais donc ça. Bon retour. M'exclamais-je.
Je pris mes jambes à mon cou et hélais le premier taxi qui passa.
Il grimpa dedans avec moi.
- Sors.
- Où va-t-on ? M'ignora-t-il.
- Je ne vais nulle part avec toi, sors.
- Pas avant qu'on ait discuté.
Je le jaugeais et un long soupir s'échappa de mes lèvres.
- Hôtel 41, sur Buckingham Palace Road. Ordonnais-je au chauffeur qui commençait à perdre patience.
- Pas trop tôt, grommela-t-il à voix basse.
- Je ne vous le fait pas dire. L'approuva Sasuke.
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L'Uchiha siffla d'admiration lorsqu'on pénétra ensemble dans la suite que j'avais quelque peu délaissée ces derniers temps au profit de sa propre chambre d'hôtel.
Même moi je fus à nouveau frappée par l'énorme verrière surplombant le lit. La décoration marine n'avait jamais été quelque chose que j'affectionnais mais je devais admettre que le tout avait une sacrée classe. Même les meubles anciens, qui auraient juré n'importe où d'autre, semblaient chic et de bon goût sous cette lumière éclatante.
L'impertinent garnement qui m'avait suivie s'allongea sans rien dire sur le dos, face au ciel azur.
- Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu avais une telle suite ? S'offusqua-t-il
- Tu ne me l'as pas demandé.
Il me lança un regard de reproche et j'haussais les épaules.
- J'allais te demander de rentrer à Tokyo avec moi mais finalement je pense que je vais plutôt rester ici…
- Pardon ?
Avais-je bien entendu ?
Rentrer avec lui ?
Tokyo ?
Mon souffle se coupa en me représentant mentalement les réactions de mon clan si je débarquais après une si longue absence. Qui plus est au bras d'un inconnu.
- Ne m'oblige pas à répéter.
- Non.
- Non quoi ?
- Non, je ne vais pas à Tokyo et non, tu ne restes pas ici.
- Tu sais quoi ? Tu me saoules. Tu veux pas être avec moi ? Très bien, mais faudra pas pleurer.
Et il s'en fut en claquant la porte.
Je ne fis même pas un geste pour le retenir.
Dis Hanabi, toi non plus je ne t'ai jamais retenue. Tu m'en veux ?
Mais tu étais encore plus insaisissable que lui, tu sais.
Une vraie étoile filante.
Sur le lit, un paquet cadeau noir surmonté d'un énorme ruban rouge trônait.
- Merde.
À l'intérieur une boîte de portable haut de gamme et un morceau de papier.
Je fus soufflée par une vague de soulagement. J'appréhendais stupidement le contenu de ce petit paquet.
S'il s'était agît d'un collier, qu'aurais-je fait ?
Aurais-je consentis à délaisser ton grenat au profit de ce présent ?
Non. Jamais.
Mais Sasuke devait s'en douter. En réalité à cette époque, il me comprenait mieux que moi-même je ne me comprenais.
J'étais totalement repliée sur moi-même, axée sur ta perte et je ne connaissais finalement presque rien de cet homme qui s'était posté comme mon sauveur.
Nous parlions peu et jamais de nous-même.
Pourquoi cet inconnu me consolait-il sans faillir ?
Me l'as-tu envoyé ?
Du bout des doigts, je saisis la feuille de papier. Dessus, dans une fine écriture s'étendait une unique phrase :
« Dis-moi quand tu es à Tokyo.
Sasuke.»
Je poussais un cri de rage et déchirait le morceau de papier en fins lambeaux.
- Crétin !
Je passais la fin de journée à tourner en rond dans cette superbe chambre et ne me calmais qu'une fois la nuit tombée, m'allongeant face à la voie lactée et me perdant dans la contemplation de la lune qui était pleine et éclairait la pièce de ses pâles rayons.
Ma peau, claire d'ordinaire, semblait spectrale et j'étendais mes doigts devant moi avec fascination.
Si je suis une enfant de la lune et toi une étoile filante, nous sommes en quelque sorte voisines, non ?
Je souris de mon absurdité et mes yeux se fermèrent.
.
La journée qui suivit fut longue.
J'étais dans une expectative quasi inconsciente du retour d'un certain brun taciturne.
Quasi inconsciente car mes pensées voguaient sans arrêt vers ses prunelles sombres et son regard sur moi me manquait. J'avais pris goût aux nuits à ses côtés et mes réveils en solitaire étaient teintés d'amertume.
J'aimais la fille que j'étais à ses côtés. Cette Hina Chikigu qu'il prenait soin de ne jamais nommer. Elle était entière, fière et disait les choses sans faiblir face aux regards d'autrui.
Elle ne bafouillait pas, ne trébuchait pas sur ses mots et ne les mâchaient pas.
J'aimais sortir dans la rue dans sa peau, vêtue courtement de tes tenues que je n'aurai même jamais osé envisager de porter, et assumer sans rougir le regard des garçons sur mes longues jambes pâles.
J'explorais les possibilités de cette fille que je n'avais jamais été et je t'enviais ton absence de pudeur. La vie est tellement meilleure quand l'on est insouciante.
Tu étais vrai, Hanabi. Entière. Terriblement vivante.
Alors, pourquoi est-ce moi qui n'ai jamais vécu qui me traine toujours en ce bas-monde ?
Mais ce jeu de personnalité commençait à s'essouffler et j'avais le mal du pays.
En un mois, personne ne m'avait donné de nouvelles. Le plus triste étant que je n'en étais pas surprise. Père savait sans aucun doute où je me trouvais, il lui suffisait d'inspecter mes paiements bancaires pour connaître chacun de mes déplacements, il aurait donc pu me joindre à mon hôtel. Mais il ne l'avait pas fait.
Pourtant j'avais besoin de rentrer chez moi.
Chaque fois que je réfléchissais à mes raisons de rentrer, la réalité de ton absence me frappait. Même si je regagnais Tokyo, tu ne serais pas là pour m'accueillir.
Alors à quoi bon ?
Père serait indifférent à mon retour si je refusais le rôle d'héritière, Neji m'avait toujours méprisée et le reste du clan ne me vouait qu'un semblant de respect mêlé à de la haine.
Je n'avais aucuns amis, aucunes connaissances pouvant se faire du souci pour ma personne.
Ma relation la plus proche, excepté toi, devait être Mlle Kurenai. La concierge de mon immeuble.
Pathétique existence.
Je songeai brusquement qu'aucuns de tes amis n'avaient été présent à ton enterrement. Quelqu'un s'était-il chargé de les prévenir ? Et si oui, toi qui étais si populaire, pourquoi aucun n'avait fait le déplacement ?
Et Kiba ? Était-il informé de ta disparition brutale ?
Je ne l'avais jamais rencontré mais tu le mentionnais quelque fois. Vous aviez l'air très amoureux. Cela me semblait inconcevable qu'il ait été volontairement absent à tes funérailles.
Pourquoi n'y pensais-je que maintenant ?
Je devais rentrer dans notre ville natale et rencontrer tes proches pour les prévenir. Ils avaient le droit de savoir, d'arrêter de s'inquiéter de ton silence inexplicable.
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Je pris l'avion le lendemain en fin de matinée et atterris dans la capitale nipponne très tôt, sous le soleil levant.
Je me rendis rapidement à mon appartement et fus soulagée de retrouver celui-ci inchangé. La pile des choses que j'avais emportées de ta chambre trônait dans mon salon et, dans un élan d'audace, je saisis une boite en carton blanc à rayures beige.
À l'intérieur se trouvait des dizaines de feuilles de papier, de petits coupons et de bracelets de tissus.
Je saisis prudemment un petit carton verdâtre et découvrit avec surprise qu'il s'agissait d'une entrée de concert pour un groupe dont je n'avais jamais entendu parler. La salle où s'était passée cette soirée se situait à l'autre bout de Tokyo.
Je ne connaissais ni l'endroit, ni le quartier. J'avais du regarder sur le GPS du Smartphone payé par l'imprévisible inconnu pour avoir une idée de la localisation.
Je dépliais un à un les papiers, cartons et autres bracelets et m'aperçut rapidement que la boite ne contenait uniquement des entrées de concerts situés dans de multiples salles, bars et parfois même, dans d'autres villes.
Je fus légèrement choquée de découvrir que tu profitais parfois des voyages d'affaires où tu accompagnais père pour assister à des concerts.
Sortais-tu en douce de l'hôtel, la nuit, pour t'y rendre ?
S'il t'avait surpris, il aurait été furieux.
Mais sans doute n'en avais-tu que faire.
Un endroit cependant revenait régulièrement sur les billets : Un bar situé non loin de la demeure familiale et étrangement son nom ne m'était pas inconnu : L'amère à boire.
Oui, c'est là que tu m'avais dit retrouver tes amis.
Je nota rapidement l'adresse dans mon téléphone flambant neuf et me culpabilisais un rien de ne pas avoir donner de nouvelles à Sasuke.
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Une semaine s'écoula. J'avais comblé mon surplus de temps libre à écumer mon logement tel un lion en cage sans osé sortir de chez moi le jour.
Par peur de croiser qui, déjà ?
Personne.
Par peur que ma solitude ne me pèse encore plus lourdement dans la foule bondant les rues.
J'étais lâche.
Toutefois, j'allais certains soir à l'amère à boire lire quelques heures en espérant rencontrer le jeune homme qui t'avait faite vibrer. Mais la chance ne m'avait pas encore sourit.
La chance, c'était un privilège que nous n'avion aucune des deux, Hanabi. J'en étais convaincue à cette époque.
Cent fois au moins, mes doigts avaient tapoté un message insipide sur le pavé tactile avant de l'effacer, je craignais que mon silence convienne à Sasuke et n'osais toujours pas le contacter.
Ce fut un soir, alors que je rentrais d'une heure de lecture dans le bar où maintenant le barman me connaissait, que je fis une morne rencontre.
De l'autre côté de la rue à double voie, sur le trottoir face à moi, se trouvait notre cousin dans son impeccable costume trois-pièces. Ses longs cheveux encadrant comme d'habitude son visage aux traits jugés angélique.
Mais son impassibilité coutumière n'était pas de mise alors qu'il était figé, observant mon corps frêle de ses yeux blancs perçants.
Il semblait avoir vu un fantôme et sa peau opaline était plus claire que jamais.
Était-il un enfant de la lune, lui aussi ?
Mais la pensée était puérile et je la chassais rapidement alors qu'il traversait la chaussée dans ma direction.
- Hinata-sama ? Articula-t-il difficilement.
- Neji-kun. Le saluais-je froidement.
Son regard passa de la robe cintrée à carreaux noirs et blancs aux lourdes bottes noires avant d'inspecter mon visage. Je le voyais suivre chaque trait laissé par le maquillage d'un air désapprobateur désormais.
- Quand êtes-vous rentrée ? S'enquit-il impérieusement.
Ma fragilité ascendante voulu reprendre le dessus et je dus lutter pour ne pas me confondre en excuse en me contorsionnant sur place. Je ne lui devais rien.
Qu'était-il pour moi, cet homme prétendument de ma famille mais qui ne se montrait comme tel que lorsqu'il était question de me condamner ? Rien.
Il avait été aux abonnés absents à chaque instant de ma vie où un soutient m'était nécessaire pour ne pas m'effondrer. Pire, il lui était arrivé de me porter le coup final alors que je m'accrochais à l'ultime bout de bois flottant post-naufrage pour ne pas sombrer.
Il me méprisait sans me connaitre, pour ce statut que je haïssais.
Soit. Qu'il en soit ainsi.
Mais qu'il cesse directement d'oser interférer dans ma vie privée, lui qui n'était rien.
Je tournais les talons sans répondre après lui avoir lancé un regard écœuré.
- Hinata-sama ! M'appela-t-il doucement en attrapant mon bras gauche.
- Je n'ai rien à te dire. Lâche-moi.
Il me vrilla d'un regard que je ne lui connaissais pas et s'exécuta.
- Condoléances pour votre sœur, je sais combien elle vous était précieuse.
Et il reprit sa route, me laissant pantelante sur les pavés froids de cette ville sans âme.
Mes mains tremblèrent et je dus les presser l'une contre l'autre fermement, me concentrant sur cet acte plutôt que sur l'étau qui m'oppressait la poitrine un peu plus à chaque pas.
Ébranlée jusqu'aux os.
Je sortis difficilement mon portable de mon petit sac en cuir vernis et m'y repris à quatre reprise pour le déverrouiller. Je n'étais plus maître de mes doigts et des larmes contenues s'accumulaient dans mes yeux, les rendant troubles et douloureux.
L'appel ne dura que quelques secondes avant que l'appareil ne m'échappe et ne s'écrase à ma suite au sol.
Recroquevillée en boule sur les dalles grises, je perdis toute notion de temps alors que je sanglotais.
- C'est fini, je suis là. Me chuchota une voix grave à l'oreille.
Je fus soulevée de terre et en quelques pas rapides transportée sur une banquette en cuir. Je n'osais ouvrir les paupières, savourant le parfum brièvement humé dans les bras musclés.
Quand je me ressaisis enfin, le véhicule s'engageait dans une petite allée menant sur un large portail en fer forgé. Je dépliais mes jambes, me redressant et jeta un regard affolé dans l'habitacle.
J'étais précédemment allongée à l'arrière tandis que derrière le volant, Sasuke conduisait.
Je l'avais appelé.
Et il était venu.
La situation était irréelle, ici, à Tokyo, dans la vie quotidienne. Londres ne me semblait qu'un mirage depuis mon retour.
Ainsi, la réalité de sa présence et de son existence faisait défaillir mon cœur trop fragile.
Il se gara et fit le tour de sa voiture pour m'ouvrir la portière, sans un mot comme à son habitude. Je sortis précautionneusement et il me saisit fermement par le coude, me guidant dans une vaste demeure. J'obtempérais, le suivant à travers un dédale de pièces et de couloirs.
Mais peut-être mes jambes pesant lourdement et mon esprit vagabondant trop n'aidèrent pas à estimer à juste titre la distance et les pièces parcourues.
Sasuke me libéra devant un canapé en velours rouge et attendit que je m'y installe pour disparaître par une lourde porte en chêne. Il revint quelques temps après avec un verre d'eau que je bus goulûment.
Il s'assit à mes côtés sur le fauteuil, me fixant.
Le silence s'éternisait.
- Je hais Tokyo. Murmurais-je d'une voix brisée.
Il avança sa main doucement, la posa sur ma joue et caressa du pouce de la base de ma mâchoire jusqu'au haut de ma pommette, ses prunelles encre plongées au fond de mon âme.
Et d'un seul mouvement, il me saisit par la taille pour me coller à lui, effleurant mes lèvres des siennes.
Tétanisée, je demeurais les yeux écarquillés et les lèvres entre-ouvertes alors qu'il pressa plus vivement sa bouche contre la mienne.
Sans réfléchir, je le repoussais durement, éloignant de mes maigres bras son torse musculeux le plus que je ne le pouvais.
Sa mâchoire se crispa et ses sourcils se froncèrent alors qu'il passait sa main dans ses cheveux corbeau.
- Mais bordel, tu veux quoi à la fin ?
Je ne répondis pas, je ne pouvais pas. Aucune réponse ne me venait.
- Si tu veux quelqu'un qui t'embrasse le front et te caresse le dos quand t'es triste, trouve-toi un ami. Mais compte pas sur moi. Grinça-t-il en se levant.
Il traversa d'un pas vif le salon et ouvrit une porte à la volée, se servit un verre hors d'une bouteille aux éclats cuivrés et s'appuya contre le mur pour me fixer en sirotant à petites gorgées le breuvage.
Il semblait hors de lui.
- Sasuke… Murmurais-je. Je suis …
- Désolée ? Me coupa-t-il. Mais qu'est-ce que tu veux que ça me fasse ? Arrête donc de t'apitoyer sur ton sort.
Je me mordis nerveusement la lèvre inférieure, attendant une suite qui ne vint jamais. Il restait stoïquement adossé contre le papier-peint fleuri, achevant sa boisson sans un regard pour moi.
Il ne releva plus la tête dans ma direction et ce fait, insignifiant pour d'autres, attestait de combien je l'avais blessé.
Je me levais silencieusement et me rapprochais à petits pas, m'arrêtant à distance d'un bras, attendant un signe de sa part. Mais il ne vint pas.
Alors, réunissant l'ensemble du courage dont je disposais, j'agrippais sa nuque et posa un léger baiser sur la base de son cou. Il frémit et l'intensité de ses yeux lorsqu'ils se posèrent dans les miens me fit me sentir ridiculement petite.
Mais j'étais petite à côté de lui et de son port altier. Il me surplombait totalement.
Sans dire un mot, je m'éloignai d'un pas à reculons et chuchotais un remerciement avant de quitter la pièce.
J'avais quelque chose à régler avant de pouvoir penser à me reconstruire en ta compagnie, Sasuke. Pardonne-moi.
Attends-moi.
Je reviendrai te chercher et, c'est promis, je t'offrirai tout ce que j'ai en ma possession.
Et ce fut plus confiante que jamais que je regagnais l'amère à boire.
.
J'avais posé un tas de questions au serveur et il avait été surpris que je sois venue si longtemps sans m'en être enquérie plus explicitement.
Il voyait en effet parfaitement qui tu étais et il sembla réellement peiné d'apprendre ton décès.
Il me conta longuement ses souvenirs de toi sur scène, ta présence et l'énergie que tu dégageais. Les rifts de ta guitare vermeille et ta voix rauque.
Je ne savais pas que tu donnais des concerts, Hanabi. Pourquoi ne m'as-tu pas laissée y assister ?
J'aurai aimé voir cela, tu sais…
Il me surprit à t'appeler ''Courtney Love'' et me sourit tristement quand je lui ai demandé plusieurs fois de répéter. Il m'a affirmé que tout le monde savait que tu utilisais un pseudonyme, et que celui-ci n'était pas très brillant puisqu'il s'agissait tout de même d'une des rockeuses les plus célèbres au monde –si ce n'est pas sa musique, par son mariage.
Il m'a confié que tu chantais parfois les chansons de la dites Courtney. Notamment ''Miss Narcissist''.
Est-ce ainsi que tu te représentais, Hanabi ?
J'écoutais chacune de ses confidences dans un silence religieux et lorsqu'il se tût pour m'indiquer d'un mouvement de tête quelque chose sur la gauche, mon cœur rata un battement en réalisant qu'un jeune garçon était assis sur le tabouret à côté du mien, sa tête posée dans son coude sur le bar.
Les cheveux bruns ébouriffés, des tatouages rouges sur les joues et une boucle noire sur le haut de l'oreille, le nouvel arrivant respirait la testostérone, le mâle et le rock.
Je ne savais pas ce qu'il avait entendu de notre conversation mais ses yeux étaient dans le vague et il semblait avoir perdu pied avec la réalité.
Je sus de qui il s'agissait avant même que le barman ne le nomme.
- Kiba-kun ? Demandais-je doucement.
Il releva la tête et me jeta un regard d'incompréhension. Son air perdu me fit mal.
- Elle est morte, pas vrai ? Souffla-t-il.
Je hochais douloureusement la tête alors qu'il saisissait la sienne dans ses mains.
- Je lui avais dit d'arrêter avec cette merde, putain, je lui avais dit ! Pourquoi elle n'écoutait jamais rien ! S'affola-t-il
Je restais interloquée, quelle merde ? De quoi parlait-il ?
- De quoi parles-tu ?
Ma voix avait été plus sèche que je n'aurais voulu et il reporta son attention sur moi.
- Elle a fait une overdose, c'est ça ?
Mes yeux s'agrandirent d'effroi. Pas toi, Hanabi. Tu n'avais pas pu appartenir à ce genre de scénario sordide de délinquante camée à la poudre.
Tu es mon étoile, Hanabi, tu n'as pas le droit d'avoir fait ça.
Mais le visage grave de ton ancien copain me confirma que je m'étais fourvoyée sur toute la ligne.
- Non. Elle a eu un accident de voiture.
- Elle a souffert ?
- Non.
Et il ne dit plus rien. Le barman, Kankûro, lui déposa un verre sur le comptoir juste à côté de sa tête et je me levais pour partir.
J'avais fait ce que j'avais à faire. Le plus dur était passé.
C'est ironique, tu ne trouves pas ? J'ai accepté de te laisser partir après cette soirée-là.
J'ai pris conscience que tu étais humaine et que tu avais tes travers et je t'ai laissée filer.
Le deuil ne fut pas facile et il prit longtemps mais j'y suis arrivée.
Tu me manques toujours cruellement et le temps, s'il guérit, ne comble jamais les regrets.
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Sasuke sourit brièvement de ce demi-sourire qui lui fait pétiller ses orbes nuit.
- Bonsoir monsieur Uchiha.
- Madame... Me répond-t-il avant de froncer les sourcils. Aurais-je un jour le privilège de connaître ta vraie identité ?
Je souris. Comme prévu, il savait.
- Hinata Hyûga.
Et je tendis une main qu'il serra dans la sienne avant de tirer sèchement dessus pour me coller à lui.
- Et que faites-vous en pleine nuit dans un parc, mademoiselle Hyûga ? Votre père ne vous a-t-il pas prévenu que vous pourriez y faire de mauvaises rencontres ? Souffla deux lèvres presque contre les miennes.
Je parcouru l'espace restant en me mettant sur la pointe des pieds.
Et le temps cessa d'exister alors, qu'enfin, Sasuke Uchiha m'enlaça et me rendit passionnément mon baiser.
Il faisait nuit et quelque part dans ce ciel d'encre, parmi tes amies étoiles, tu m'observais en souriant. J'en étais convaincue.
Tout irait bien désormais.
Merci d'avoir été mon étoile.
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