Bonjour ! :)
Me voilà de retour avec une toute nouvelle fic. Je suis particulièrement fière de celle-ci. J'ai dû travailler fort pour mettre en place tous les éléments que j'imaginais pour cette histoire. Cette fois, j'avais envie de quelque chose de quadruplement plus mouvementé, humoristique et intense en émotions. J'espère que ça vous plaira.
Cette fic comprend 19 chapitres en tout. Si tout va bien, je publierai au rythme d'un chapitre par semaine, comme je le fais d'habitude.
Attention, classement M ! Cette histoire contient des scènes érotiques pouvant ne pas convenir à tout lecteur. Déconseillé aux moins de 18 ans.
(L'univers et les personnages appartiennent à JK Rowling)
(Pour voir la bannière en entier de cette histoire, visitez Melfique sur DeviantArt)
Bonne lecture ! :)
Chapitre 1 ― Le Localisateur
― Objecta mala revelio ! murmura une petite voix.
Au bout de la baguette, un germe d'étincelles bleues jaillit et toucha la sphère de cristal posée sur le bureau. Une brume illuminée se matérialisa à l'intérieur, prenant la forme d'une fine flèche qui se mit à tourner rapidement sur elle-même comme l'aiguille d'une horloge détraquée. Filius l'observa attentivement, ses petites lunettes reflétant les lueurs. Si l'objet passait ce dernier test, il pourrait déclarer sa création réussie.
Après un moment, la flèche brumeuse s'immobilisa et pointa, à l'autre bout de la salle de classe, l'armoire remplie de coussins dépareillés. Le cœur battant, Filius sauta du haut de la pile de livres sur sa chaise, traversa la pièce entre les travées aussi vite que ses courtes jambes le lui permirent et alla écarter sur l'étagère du bas les coussins qui tombèrent par terre. Un grand sourire s'étira sous sa moustache noire lorsqu'il se saisit de la semelle glacée, qu'il y avait cachée.
― Bravo, Filius, vous êtes extraordinaire !
Filius poussa un cri aigu, semblable à un couinement de souris, et laissa tomber la semelle dans les cousins. Le professeur Sinistra se tenait dans l'encadrement de la porte, souriante. Depuis combien de temps l'observait-elle ?
― Au-Aurora..., balbutia Filius de sa voix fluette. Qu'est-ce que vous... ? Je veux dire... qu'est-ce que je peux faire pour vous ?
Chaque fois qu'il se trouvait en sa présence, le professeur Sinistra le rendait nerveux. Sa haute taille mince, sa peau brune et ses cheveux noirs noués en une longue tresse qui lui descendait jusqu'aux fesses lui faisaient naître des papillons dans la poitrine. Non seulement elle était belle, mais elle était aussi d'une immense gentillesse. Il ne suffisait que de croiser son sourire une seule fois dans la journée pour récupérer la totalité de sa bonne humeur. Comme elle venait souvent le voir à la fin des classes pour discuter de tout et de rien, Filius avait cru avoir une chance avec elle, mais il avait vite compris qu'il ne devait pas se faire d'illusions. Elle était gentille comme ça avec tout le monde. De toute façon, qui est-ce qui pouvait tomber amoureux d'un homme aussi petit que lui ? Les femmes préféraient les plus grands, pourvus de voix graves et de bras virils, sans vraiment accorder d'intérêt à l'intelligence. La preuve était que, de toute sa vie, il n'avait encore jamais trouvé personne qui voulait l'aimer d'amour, tel qu'il était.
Le professeur Sinistra s'avança dans la pièce, vêtue d'une longue robe mordorée, brodée d'étoiles et de planètes, qui s'agençait parfaitement à son teint mat. La fascination animait son visage, de façon presque enfantine.
― Vous avez enfin réussi, dit-elle en penchant la tête sur son épaule.
Filius acquiesça en ramassant la semelle à ses pieds.
― J'ai eu peur de ne pas être prêt pour le congrès, couina-t-il. Il restait quelques modifications à apporter pour que mon Localisateur d'objets maléfiques soit au point. C'est le cinquième test que je lui fais passer aujourd'hui. Mais maintenant, c'est bon. La boule ne se trompe plus du tout.
― C'est quoi ? demanda Sinistra en lui désignant la semelle glacée dans les mains.
― C'est une semelle à glaçons que j'ai empruntée à Barjot et Beurk. J'avais besoin de quelques objets de magie noire pour tester mon Localisateur. J'en ai d'autres, cachés dans mon bureau. Je ne sais pas trop comment fonctionne cette semelle, mais quand on sait l'activer dans la chaussure, elle transforme sa cible en statue de glace.
― C'est horrible !
― Vous pouvez le dire ! approuva Filius avec un frisson. Mais maintenant que j'en ai fini avec mon Localisateur, je vais pouvoir me débarrasser de tous ces objets maléfiques. Ils me rendent mal à l'aise... Je vais envoyer un hibou à Beurk...
Il revint vers son bureau à petites enjambées et y posa la semelle à bout de bras avant de se frotter les mains pour les réchauffer.
― Et vous, Aurora ? s'enquit-il en levant la tête pour la regarder. La matinée s'est bien passée ?
― Très bien, répondit-elle en s'avançant entre les piles de livres qui entouraient le bureau. Le premier trimestre est bien entamé. Les nouveaux ont commencé à apprendre le nom des étoiles. Ils se débrouillent bien. En fait, j'ai surtout pensé à vous. J'espérais que vous y arriveriez avec votre Localisateur. Mais je m'inquiétais pour rien, comme d'habitude. Tout vous réussit. Vous êtes tellement brillant.
Filius sentit ses joues s'empourprer. Il détourna les yeux et tripota machinalement la manche de son veston. Il n'osait pas la remercier, de peur de paraître prétentieux. Il voulait rester modeste, sauf qu'il ne savait pas quoi dire. Lorsqu'il voulut la regarder de nouveau, elle s'était rapprochée si bien de lui qu'il se heurta le nez dans sa robe. Aussitôt, il hoqueta en s'éloignant, les joues en feu.
― Excusez-moi ! glapit-il. Je suis vraiment désolé !
― Mais non, ce n'est pas grave, rassura le professeur Sinistra avec un petit rire. C'est ma faute. Je voulais juste voir votre Localisateur de plus près.
Filius déglutit dans les effluves du parfum de cannelle qu'il venait de humer à plein nez. Il avait l'habitude de heurter les gens. Soit on ne le voyait pas, soit c'était lui qui était trop distrait. Mais quand c'était le professeur Sinistra, il ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir. Il aurait aimé être plus confiant en sa présence. Trop de maladresse de sa part pourrait finir par la lasser. De plus, c'était suffisamment pénible d'être petit sans devoir lui rappeler sans cesse qu'il n'était pas de taille pour elle.
― C'est... c'est une boule de cristal..., couina Filius, tandis qu'elle examinait le Localisateur sur le bureau. Elle vient de chez Sibylle. Je l'ai soumise à plusieurs sortilèges pour qu'elle... enfin...
Il s'interrompit. Aurora glissait doucement son doigt le long du socle doré et ce geste lui provoqua un long frisson dans le dos. En cet instant, il aurait bien voulu être à la place de l'objet.
― C'est beau, souffla-t-elle.
― Merci, répondit-il.
― C'est beau comme vous arrivez à créer des merveilles d'inventions comme celle-ci.
― Merci, répéta-t-il, la voix miniature.
Elle tourna ses yeux d'ébène vers les siens et ils s'observèrent en silence, échangeant de timides sourires. Une mèche libérée de sa tresse retombait le long de sa joue brune. Elle était adorable. C'était elle, la merveille. Sa beauté n'égalait en rien la sphère de cristal. Filius pourrait la contempler ainsi pendant des lustres.
Un raclement de gorge retentit à la porte et tous deux tressaillirent en détournant les yeux.
― Pardon de vous interrompre dans vos émotions, dit sèchement le professeur McGonagall.
Grande et droite, le chignon strict, elle s'avança dans la salle en leur jetant des regards perçants par-dessus ses lunettes rectangulaires. Filius passa un doigt dans son collet pour évacuer la chaleur. Il espérait ne pas avoir eu l'air ridicule.
― Bonjour, Aurora, dit le professeur McGonagall. Si ça ne vous ennuie pas, j'ai à parler un moment avec Filius.
― Oh, oui... pas de problème...
Les joues légèrement rosies, Aurora s'éloigna vers la porte en adressant à Filius un dernier sourire gentil.
― C'est arrangé pour le congrès, reprit le professeur McGonagall, dès que les pans de la robe mordorée d'Aurora disparurent dans le couloir. Il aura finalement lieu aux Trois Balais.
― Ce ne sera plus à Londres ? s'étonna Filius.
― Non. Les autres vont croire que ce sera à Londres, mais en vérité ce sera ici, à Pré-Au-Lard. Après l'émeute survenue le soir de la Coupe du Monde de Quidditch, Dumbledore pense qu'il vaut mieux prendre des précautions.
― Ah oui, couina Filius en balançant nerveusement les bras. Je comprends...
― Tout est arrangé avec Madame Rosmerta, poursuivit le professeur McGonagall qui plissa le nez en remarquant la semelle à glaçons sur le bureau. Bien sûr, elle a hésité avant de nous prêter son pub ― la Marque des Ténèbres en a terrorisé plus d'un, vous comprenez ―, mais elle a fini par accepter. Comment se déroulent vos derniers tests ?
― Très bien. Mon Localisateur fonctionne à la perfection.
― Bien. Dumbledore sera content d'apprendre votre réussite. Les invitations seront envoyées aujourd'hui, avec les nouvelles informations. Nous utiliserons des Patronus pour plus de sûreté. En attendant, je vous conseille de rester discret concernant la nouvelle adresse. Ça pourrait tomber dans de mauvaises oreilles.
― Pas de problème.
― À part ça, comment allez-vous ? s'enquit-elle soudain, le scrutant attentivement, comme si elle lui guettait une quelconque réaction.
Filius sentit son estomac se contracter d'appréhension. Sa question était-elle purement conventionnelle ?
― B-bien, répondit-il maladroitement. Et vous ?
― Bien.
Le professeur McGonagall continua de le fixer, comme si elle espérait qu'il lui confie quelque chose, mais elle n'insista pas. Après lui avoir souhaité une bonne journée, elle s'en retourna de sa démarche droite et Filius laissa échapper un soupir silencieux. Mais son soulagement fut de courte durée, car au moment de franchir la porte, elle pivota sur ses talons pour lui refaire face et lui lança enfin :
― Pourquoi ne l'inviteriez-vous pas à sortir ?
― Hein, quoi... ? balbutia Filius qui, sous le coup de la surprise, vacilla sur ses pieds. Quoi ça... ?
Le professeur McGonagall lui offrit l'un de ses rares sourires.
― Prenez votre courage à deux mains, Filius, et osez. Elle n'attend que ça.
Puis elle quitta la salle, laissant Filius en proie à une bouffée d'émotions ardentes.
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Minerva McGonagall arpentait les couloirs parmi les foules d'élèves bruyants. La pause s'achevait dans quelques minutes. La robe voltigeant derrière, elle descendit au premier étage et entra dans son bureau où une haute fenêtre projetait un quadrillage de soleil sur la table bien rangée. Elle se saisit du manuel de métamorphose à l'usage des débutants, puis tout en ramassant dans un tiroir des boîtes d'allumettes qu'elle jeta dans son sac, elle pensa à Filius. Le professeur Flitwick avait toujours été d'une nature très sensible. Pourvu qu'elle ne se soit pas trompée sur les sentiments d'Aurora, auquel cas, elle pouvait être assurée de retrouver son collègue anéanti.
Minerva connaissait Filius depuis ses études à Poudlard. Élève modèle, travaillant, réservé, il avait rarement consacré son temps aux filles. Il avait dit souvent que l'amour ne l'intéressait pas, mais à quelques reprises, Minerva l'avait surpris à envier les couples d'élèves qui s'étaient formés autour de lui. En sixième année, elle avait trouvé dans les marges de ses cahiers des poèmes d'amour désespéré. Quel dommage qu'il soit resté célibataire toute sa vie ! Mais peut-être qu'Aurora était la bonne ?
Minerva referma son sac en soupirant. Elle se remémorait maintenant le temps de ses propres amours. Ses deux défunts amants, malgré les années, venaient encore la hanter. Dougal McGregor avait été le premier. Elle l'aurait volontiers épousé si ce mariage Moldu n'aurait pas contrecarré ses ambitions. Hélas, elle avait dû l'abandonner et ne l'avait jamais revu depuis. Il était mort plus tard pendant la première guerre des sorciers. À l'annonce de la nouvelle, son cœur avait explosé. Après sa mort, elle avait consolé son cœur auprès d'Elphinstone Urquart, son ancien chef de service du ministère, mais elle l'avait perdu lui aussi, à cause d'une tentacula vénéneuse, à la troisième année seulement de leur mariage. Malheureuse, elle était alors revenue à Poudlard, dans son petit appartement en pierres froides, et avait continué à enseigner tout en cadenassant ses émotions dans le plus profond de son être. Après avoir subi autant de souffrances, elle avait fait une croix définitive sur l'amour.
Son sac à la main, Minerva passa rapidement devant le petit miroir accroché près de la porte et vérifia que son chignon était toujours bien serré. Elle examina également les rides aux coins de ses yeux. Le temps avait parcheminé sa peau et donné à son visage une expression d'austérité figée. Elle n'était plus très jeune, mais son manque de charme l'indifférait. Elle s'était accommodée à la chasteté.
Une inflammation surgit dans ses articulations et elle relâcha son sac en poussant un cri étouffé. Elle amena sa main devant ses yeux, repliant et dépliant les doigts. Sa mère avait souffert de l'arthrite à la fin de sa vie et voilà que c'était son tour. Le problème avait commencé trois mois passés. Pour apaiser les douleurs, Minerva buvait une potion aux huit jours, mais avec les préparations du premier trimestre, elle avait oublié de renouveler ses fioles auprès du professeur Rogue.
― Je lui en parlerai en fin de journée, murmura-t-elle en se caressant les jointures.
Elle ramassa son sac et quitta son bureau.
Dans les couloirs, les élèves se pressaient pour ne pas arriver en retard à leurs cours. Certains se bousculaient aux coins des murs et d'autres s'élançaient sans regarder devant. Minerva dut faire un bond de côté pour éviter d'en heurter un de plein fouet.
― Veuillez ne pas courir dans les couloirs, je vous prie ! aboya-t-elle, agacée.
Les enfants d'aujourd'hui avaient perdu les bonnes manières d'autrefois. Pestant contre leur manque d'éducation, Minerva poursuivit son chemin et s'engouffra dans le couloir qui menait à sa classe. Soudain, elle entendit une voix maligne à sa droite :
― Et toi, avec qui tu aimerais baiser ?
Minerva s'arrêta net.
Trois garçons étaient cachés derrière une large tapisserie à motifs rouges au bas de laquelle on y voyait les pieds. La voix appartenait à Lee Jordan, un Gryffondor de sixième année. Les deux autres étaient donc, évidemment, les jumeaux Weasley, puisque ces trois-là étaient inséparables. Qu'est-ce qu'ils faisaient là alors que les cours étaient sur le point de commencer ?
― Bah..., fit la voix nonchalante d'un des jumeaux (ils avaient la même voix). Tu sais, Johnson est pas mal, hein. Et elle sera à la soirée. Je l'ai invitée.
Minerva s'approcha avec la ferme intention de les rappeler à l'ordre. Dans le couloir, les élèves se dispersaient et étaient presque tous en classe.
― Et toi, George ? continua Lee Jordan. Tu as quelqu'un en tête ?
― Oui, la veille McGo.
Minerva s'immobilisa brusquement, choquée, tandis que les garçons éclataient de rire.
― Espèce d'idiot ! s'amusa Lee Jordan. Arrête ça et sois sérieux !
― Mais mon frère est très sérieux, intervint Fred d'un ton malicieux. Il a toujours eu un faible pour les vieilles prudes, non ?
― C'est ça, approuva George. J'aime bien casser la croûte avant de baiser !
― Ah, mais tu es dégoûtant ! s'esclaffa Lee Jordan en faisant mine de vomir. Bon, allons dans le parc, il fait soleil. J'aimerais aussi profiter de la période libre pour terminer le devoir de Flitwick.
La tapisserie remua et Minerva s'éclipsa aussitôt dans le couloir le plus près et marcha droit devant, la main crispée sur son sac. Elle ne pouvait pas les punir d'être là, puisqu'ils n'avaient pas cours, et elle avait encore moins envie de les affronter après avoir entendu une plaisanterie pareille. Elle aurait été incapable de soutenir leur mine désinvolte pendant qu'elle aurait déployé de gros efforts pour ne pas rougir de honte. Une vieille prude ! Par Merlin ! L'injure poignardait son orgueil.
Elle tourna un coin de mur pour reprendre son chemin vers sa classe, quand elle percuta un corps en pleine face. Aussitôt, des bras solides l'attrapèrent et l'enserrèrent pour l'empêcher de perdre l'équilibre. C'était le professeur Rogue. Minerva eut le souffle coupé.
― Ça va ? demanda-t-il en fronçant les sourcils, le nez à quelques centimètres du sien.
― O-oui..., balbutia-t-elle en le fixant droit dans ses yeux noirs.
Elle ne comprit pas pourquoi, mais pendant qu'ils s'enlaçaient sans bouger, un étrange trouble la saisit. Son corps drapé de noir était pressé contre le sien et dégageait une agréable chaleur, tout comme son souffle tout près de ses lèvres. Quelques mèches de ses longs cheveux noirs retombaient en travers de son visage cireux qui d'habitude n'était pas aussi séduisant. Même son nez crochu, tout à coup, avait quelque chose de charmant.
Enfin, dès qu'ils reprirent leurs esprits, ils s'écartèrent dans un sursaut. Minerva se racla la gorge pour se redonner une contenance.
― Désolée, dit-elle d'un ton sec. Je ne vous avais pas vu.
― Sans rancune, répondit le professeur Rogue, impassible. Je peux faire quelque chose pour vous ?
― Heu... non... Enfin, si... Je suis à court de potion. Je voulais vous en parler.
― De potion... ?
― De potion, oui ! répliqua-t-elle sans savoir d'où lui venait ce brusque agacement. Pour mes... vous savez... mes rhumatismes.
Rogue la dévisagea sans aucune expression, en total contrôle de lui-même. Minerva aurait aimé en faire autant. Pourvu qu'elle ne soit pas en train de rougir comme une idiote.
― Je vois, dit-il lentement de sa voix grave. Je vais m'occuper de ça. Venez me voir en fin de soirée, votre potion sera prête.
― Merci.
― Il n'y a pas de quoi. Je vous souhaite une agréable journée, professeur McGonagall.
Minerva déglutit et le regarda s'éloigner tranquillement, sa cape flottant derrière lui. Qu'est-ce qui lui avait pris de se comporter ainsi ? On aurait dit que son cerveau avait disjoncté. Severus Rogue avait été son élève avant de devenir son collègue. Malgré ses sarcasmes et sa désagréable manie de privilégier les Serpentards au détriment des élèves des autres maisons, il lui arrivait d'apprécier sa compagnie ― le Maître des potions était un homme intelligent avec qui on pouvait s'offrir de belles discussions ―, mais de là à éprouver soudain ce curieux coup de foudre... ? Ce devait être dû à la proximité des corps. Elle aurait heurté n'importe quel autre homme qu'elle aurait probablement eu la même réaction. Il l'avait surprise, tout simplement.
Minerva secoua la tête pour revenir à elle, puis reprit son sac qui était tombé à ses pieds. Elle allait être en retard pour son cours.
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― Une ! deux ! une ! deux ! une ! deux !
― Mais arrête avec ton comptage, tu m'étourdis !
― C'est pour nous garder motivées !
Habillées de shorts, côte à côte, en sueur, Pomona Chourave et Rolanda Bibine joggaient autour du terrain de Quidditch. L'année précédente, suite à une résolution de début de trimestre, Pomona avait demandé à Rolanda d'être son entraîneuse. Ses efforts avaient été récompensés : elle avait perdu beaucoup de poids et, de plus, Rolanda était devenue sa meilleure amie.
― Tu vas me tuer, oui, si tu continues comme ça, haleta Pomona. On a bientôt fini ?
Rolanda répondit d'un sourire taquin, la respiration sifflante. Ses yeux jaunes de faucon étincelaient sous le soleil de septembre.
― C'est pour ton bien, Popo, répliqua-t-elle. Tu verras, tu me remercieras encore d'être aussi exigeante avec toi.
Pomona éclata de rire en ralentissant.
― D'accord, mais maintenant, je suis fatiguée. De toute façon, il est l'heure de rentrer. La cloche va bientôt sonner et je n'ai pas envie qu'un élève me surprenne en nage sur le terrain.
― Pourquoi ? Tu as plutôt bonne mine.
Rolanda s'arrêta également en ébouriffant ses cheveux courts et dégaina sa bouteille d'eau à laquelle elle but une longue gorgée. Son sifflet d'arbitrage pendait à son cou, entre ses seins bien fermes dans son débardeur qui lui dévoilait un bout de son ventre plat. Ses jambes étaient bien galbées. Pomona se demandait si, à force de s'entraîner, elle obtiendrait aussi une silhouette athlétique comme la sienne. Son amie était superbe.
Les grands anneaux des buts scintillaient sous les rayons du soleil. Étouffantes de chaleur, Pomona et Rolanda marchèrent dans l'ombre des tribunes du stade, en direction du vestiaire. Lorsqu'elles franchirent la porte, une délicieuse fraîcheur les soulagea.
― Ah, merci Merlin ! soupira Pomona en se laissant tomber sur un banc. Je commençais à cuire.
― Faut en profiter, l'automne arrive bientôt.
― Qu'il se pointe, je préfère courir sous la brise. Au fait, c'était bien le premier cours de vol de tes premières ?
― Le petit Crivey s'est pris un manche dans l'œil, mais à part ça, ça s'est plutôt bien passé.
Rolanda ramassa ses vêtements de rechange dans sa case et se dirigea vers une cabine de douche dont elle disparut derrière le rideau. L'eau s'écoula en formant des nuages de vapeurs sous le plafond.
― Et toi ? continua-t-elle derrière le rideau. Comment étaient tes élèves ce matin ?
― Très bien, répondit Pomona qui entreprit de rejoindre aussi une cabine de douche avec ses effets personnels. Neville Londubat m'épate toujours. Il est le seul à avoir retiré convenablement les gousses de son Snargalouf. Les autres, à la fin du cours, avaient des épines plein les cheveux.
― Encore ce Neville, railla Rolanda au moment où le deuxième jet d'eau vint se mêler aux sons du premier. À t'entendre parler de lui sans cesse, on te croirait presque amoureuse.
― Rolane ! s'indigna Pomona en frappant contre la paroi de la cabine. Ne dis pas des choses comme ça ! C'est un élève !
― Et alors ? lança nonchalamment Rolanda. Élève ou pas, il est plutôt mignon, non ? Ce sera peut-être le grand amour quand il deviendra un homme.
― Impossible ! Je dois être asexuelle, parce que je t'avoue que je n'ai pas vraiment d'intérêt pour les hommes ni pour qui que ce soit. Je suis très bien célibataire et j'envisage de le rester.
Pomona termina de se déshabiller et entra sous la douche. L'eau tiède coula agréablement le long de son corps.
Tout en se savonnant, elle prit plaisir à observer les progrès de son entraînement. Elle était passée de très ronde à joliment potelée. C'était la première fois qu'elle appréciait vraiment sa silhouette. D'aussi loin qu'elle se souvenait, elle avait toujours été en surpoids et ses camarades de classe n'avaient pas manqué de l'inonder de moqueries. Ce n'était quand même pas de sa faute si elle aimait un peu trop la nourriture. Maintenant, depuis un an, elle était fièrement au régime et elle se sentait merveilleusement bien dans sa peau de femme.
Après la douche, Pomona se sécha d'un coup de baguette, enfila derrière le rideau sa robe de sorcière, son chapeau rapiécé sur sa tignasse bouclée, et accompagna Rolanda sur le chemin du retour.
― Attention la flaque d'eau ! prévint Rolanda avant de franchir les grandes portes du château.
― Oups...
Pomona entra dans le hall en répandant des traces de boue dans son sillage. Ce ne fut pas de chance, car le concierge Rusard surgit au même moment en soufflant comme un bœuf et profana des injures à son encontre. Pomona et Rolanda déguerpirent dans l'escalier de marbre en s'esclaffant comme de petites filles. Elles coururent si bien à l'étage qu'elles manquèrent de percuter le professeur Trelawney qui surgissait d'un couloir.
― Mais enfin, regardez où vous allez ! s'offusqua-t-elle en resserrant autour de son maigre cou ses nombreux châles vaporeux. Ne troublez pas la clairvoyance de mon Troisième œil !
― Celui qui aurait dû nous voir venir ? répliqua Pomona si promptement qu'elle s'attira un regard admiratif de la part de Rolanda.
Les yeux déjà exorbités du professeur Trelawney s'agrandirent davantage derrière ses épaisses lunettes, mais Pomona ne lui laissa pas le temps de réagir. Elle la contourna sans s'arrêter et Rolanda la suivit en étouffant un fou rire.
― Tu ne manques pas de toupet, murmura Rolanda.
― C'est de ta faute, grommela Pomona. Avec toi, j'ai tendance à me comporter comme une adolescente complètement immature. Qu'est-ce que dirait Minerva ?
― Elle dira ce qu'elle voudra. Il faut bien s'amuser, non ? Ce n'est pas comme si cette pauvre Sibylle ignorait qu'on se moque tous de son Troisième œil bidon. Elle nous soûle avec ça. J'espère qu'elle ne viendra pas au congrès. D'ailleurs, tu y seras, toi, hein ? Même si tu n'auras personne pour t'accompagner ?
Pomona la regarda sous son chapeau pointu, surprise.
― Je pensais que c'était toi qui m'accompagnerais, dit-elle. Ce n'est plus le cas ?
― Bah... heu..., fit Rolanda en se grattant le nez. C'est parce que j'y vais avec Alastor, finalement. Il m'a invitée ce matin.
Pomona eut l'impression de recevoir un seau d'acide sur la tête. Elle ne savait pas exactement ce qui l'embarrassa le plus : le fait que le nouveau professeur de défenses contre les forces du Mal lui enlevait son amie ou le fait que les yeux jaunes de Rolanda scintillaient d'émotions en cet instant.
― Mau... Maugrey Fol Œil ? glapit Pomona tandis qu'elles s'étaient arrêtées dans le couloir.
― Oui, le professeur Maugrey, confirma Rolanda en rougissant. Il est très tendre avec moi depuis une semaine. Tu n'es pas contente pour moi ? Je crois que je l'aime bien.
― Mais... mais il n'est pas beau...
Rolanda expira brusquement l'air de ses poumons, les yeux au plafond.
― Mais je me fiche de l'apparence physique ! déclara-t-elle en se remettant à marcher dans le couloir. Ce n'est pas ça qui compte, Popo. Moi, je tombe amoureuse de la personnalité des gens. Pas de leur physique. Et il se trouve qu'Alastor a une belle personnalité.
― D'accord, d'accord, tempéra Pomona en se précipitant derrière elle. C'est juste que je ne m'y attendais pas. Maugrey me fait encore un peu peur, mais si tu dis qu'il est tendre...
La cloche retentit dans le château et une foule d'élèves bruyants se déversa dans les couloirs.
― Je dois y aller, dit Rolanda. On se revoit plus tard.
― Oui, moi aussi. Je dois encore m'occuper de ma plante malade et j'ai aussi des schémas de chou mordeur de Chine à corriger. Mais attends ! Il ne faut pas oublier notre poignée de main rituelle !
― Ah oui, c'est vrai !
Elles exécutèrent alors une série de gestes compliqués avec les doigts, qu'elles s'étaient amusées à apprendre comme deux gamines durant un samedi soir orageux. Elles terminèrent avec une accolade, s'esclaffant, puis elles s'éloignèrent chacune de leur côté.
Cependant, Pomona resta un peu amère. Qu'est-ce qu'on pouvait trouver à ce Maugrey Fol Œil ?
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Severus Rogue patientait devant le bureau du professeur Chourave. Une couronne de Champifleurs séchés était accrochée à la porte rongée d'humidité. Pendant qu'il regardait distraitement les petits champignons orangés en forme d'œuf, il repensait au professeur McGonagall. Quand elle lui était tombée dans les bras, il s'était passé quelque chose. Du moins, elle l'avait fixé d'une drôle de manière, comme si elle avait désiré, durant un moment, l'embrasser...
Severus ricana silencieusement. Il n'y croyait pas, bien sûr. C'était un effet de son imagination. Jamais personne ne l'avait trouvé désirable. Même Lily, du temps qu'ils étaient encore amis, malgré les nombreux compliments qu'elle lui avait faits sur ses talents et sa gentillesse, n'avait jamais osé le toucher de ses lèvres. Il était repoussant et l'avait toujours été.
Lily... si seulement elle était encore en vie... Severus se maudissait d'être le responsable de sa mort. Il aurait dû réfléchir deux fois avant d'envoyer sur elle le Seigneur des Ténèbres. Depuis, il nourrissait envers ce dernier une terrible soif de vengeance. Il allait revenir, Severus en était sûr. C'était même pour bientôt. La Marque des Ténèbres, qui s'était matérialisée dans le ciel lors de la coupe du monde, n'était pas due à un hasard. Quelque chose se tramait en cet instant, et il serait prêt à intervenir. Le Seigneur des Ténèbres allait payer cher ce crime qui lui avait arraché la seule personne au monde qui avait compté pour lui.
― Bonjour Severus. Que puis-je faire pour vous ?
Arraché brusquement à ses pensées, Severus éprouva une onde de choc, mais il n'en laissa rien paraître. Il se retourna lentement, le visage imperturbable, et dévisagea de haut le professeur Chourave.
― J'ai besoin de quelques Bulbes sauteurs, répondit-il sans donner plus de détails.
Le professeur Chourave, qui avait perdu beaucoup de poids durant l'été, sourit sous son chapeau rapiécé et lui ouvrit la porte pour l'inviter à entrer.
― Vous avez de la chance, j'en ai justement fait sécher l'autre jour. C'est pour une potion Potiron ?
― Non, dit Severus, toujours laconique.
― Pour quel genre de potion, alors ? Vous voulez des rosés, des marrons ou des couleurs crème ?
― Les marrons feront l'affaire.
La pièce encombrée de plantes empestait l'engrais. Severus grimaça en passant devant un massif Snargalouf autour duquel se répandait beaucoup de terre. Plus loin, dans un coin, une étrange fougère émettait de légers bruits de pétards. Le professeur Chourave se rendit à son bureau, y caressa au passage un hideux Bubobulb, qui ressemblait à une épaisse limace entre ses feuilles luisantes de pus, et ouvrit un tiroir.
― Voilà ! dit-elle d'un ton joyeux. Ils sont tous frais.
Severus repoussa une tige de lierre qui pendait du plafond et se saisit du bocal qu'elle lui tendit. À travers la vitre, on pouvait voir les Bulbes sauteurs frémir l'un contre l'autre.
― Merci.
Puis il s'empressa de quitter le lieu nauséabond. Mais au moment où il allait franchir la porte, un long tentacule hérissé d'épines s'enroula autour de sa cheville et le fit perdre l'équilibre.
― Attention ! s'écria le professeur Chourave.
Il tomba en avant contre le mur. Le bocal lui échappa des mains et se fracassa sur le sol dans un bruit de vitre brisée. Aussitôt, il sortit sa baguette et lança un sort sur le Snargalouf pour le forcer à le relâcher. Dans le halo de lumière rouge, la souche émit un craquement sonore avant de rétracter ses tentacules entre ses branches noueuses. Severus put se redresser en secouant le pied pour le débarrasser des épines.
― Mon Snargalouf ! s'indigna le professeur Chourave qui se précipita vers sa plante inerte. Mais qu'est-ce que vous avez fait ?
― Il m'a attaqué ! protesta Severus.
Sa main gauche saignait. Il avait écorché sa paume contre le mur en bois râpé.
― Je n'en reviens pas ! Vous savez combien de temps ça me prend pour amener ce genre de plante à sa maturation ? Vous me l'avez complètement abîmée !
― J'ai réagi par réflexe !
― Déjà qu'elle est malade ! continua le professeur Chourave sans l'écouter, tandis qu'elle inspectait la souche d'un air atterré. Regardez son écorce, elle est infestée de larves de Billywig ! Ça fait une semaine que je la soigne ! Et vous, vous arrivez, avec vos grandes manières, vous la dérangez d'un coup de votre cape trop longue et ensuite vous la...
― Je vous dis que ce n'est pas de ma faute !
― Si, c'est votre faute ! C'est vous qui l'avez frappée d'un sort ! Maintenant, elle risque de ne jamais se réveiller !
― Eh bien, vous n'aviez qu'à ne pas la laisser près de la porte ! s'emporta Severus d'une voix plus forte.
Le professeur Chourave se tut, l'œil humide, la respiration bruyante. Un tentacule épineux pendait entre ses mains aux ongles sales. Ils s'observèrent en silence, tandis qu'à leurs pieds, éparpillés sur le sol, sautillaient les Bulbes marron, puis le professeur Chourave baissa la tête, comme si elle voulait soudain disparaître sous son chapeau.
― Je... excusez-moi..., balbutia-t-elle à mi-voix. Bien sûr que vous n'avez pas fait exprès... c'est la fatigue, sans doute... Comment est votre main ?
Sans répondre, Severus se contenta de réparer d'un coup de baguette le bocal qui décolla d'à terre pour revenir intacte entre ses doigts.
― Voulez-vous que je jette un coup d'œil à vos blessures ? J'ai de quoi vous soulager dans mes tiroirs.
D'un second sortilège, les Bulbes sauteurs s'élevèrent dans les airs et retombèrent dans leur bocal avec une série de bruits secs. Severus referma le couvercle.
― Non merci, répondit-il froidement. Je peux me soigner tout seul.
Et dans un envol de cape, il quitta enfin l'infect bureau.
S'il y avait une chose après l'injustice que Severus ne supportait pas, c'était l'humiliation. Cette horrible plante avait mérité son sort, comme le professeur Chourave avait aussi mérité sa froideur. Il ignorait ce qu'il lui avait pris de lui avoir parlé de cette manière, mais la prochaine fois, il serait moins clément. Le respect entre collègues était la moindre des choses. Personne n'avait le droit de le traiter en inférieur. Le temps où il avait été élève était révolu.
Les élèves se dirigeaient vers la Grande Salle pour le dîner. Severus fendit la foule dans le hall en direction de l'escalier qui menait aux cachots ― tout en décochant quelques regards noirs autour de lui pour entretenir sa réputation ― et s'engouffra dans les couloirs froids et humides. Les torches fixées aux murs de pierre émanaient des lueurs tremblotantes. L'atmosphère y était sinistre, mais Severus s'y plaisait bien. Ce décor sombre s'harmonisait à merveille avec son âme misérable.
Quelqu'un l'attendait devant la porte de son bureau.
― Bonsoir Severus, dit le professeur Dumbledore en inclinant la tête.
Sa longue barbe argentée luisait dans le halo d'une torche proche, tout comme ses lunettes en demi-lunes, perchées sur son nez aquilin. Avec les reflets sur les vitres, on aurait dit deux étoiles dans la pénombre du couloir.
― Vous vous souvenez que ce samedi, le congrès se déroulera aux Trois Balais ?
― Vous m'en avez parlé ce matin même, rappela Severus en s'arrêtant devant lui, les sourcils froncés. Qu'est-ce qui se passe ? Les plans ont changé ?
― Non, rien de changé. L'évènement est toujours prévu aux Trois Balais. Ce sont les potentiels malintentionnés qui m'inquiètent.
― Je comprends. C'est pour ça qu'on s'est donné le mal de faire croire à la population que le congrès se déroulera à Londres.
― Beaucoup de sorciers sont invités à l'évènement et les nouvelles se propagent vite, même s'ils sont tenus de garder le silence.
Severus scruta le visage de son supérieur, dont le jeu d'ombres causé par la flamme lui creusait les joues et les rides, lui donnant un air un peu redoutable.
― Qu'attendez-vous de moi, au juste ? interrogea Severus d'une voix basse, à peine audible.
Un éclat passa alors dans les lunettes de Dumbledore, qui les rendit durant un moment complètement opaques.
― Je serais rassuré, Severus, si vous passiez le plus de temps possible aux Trois Balais durant les jours précédant le congrès, murmura-t-il. Seulement pour vérifier qu'aucun de vos... anciens amis ne vient à s'intéresser de trop près aux activités du pub. J'ai besoin que vous soyez vigilant avec moi. Ça rassurerait aussi Madame Rosmerta. Je peux compter sur vous ?
― Tout à fait.
― Merci beaucoup. Je n'ose imaginer le malheur que ce serait si ce Localisateur d'objets maléfiques tombait entre les mains d'un Mangemort.
Merci d'avoir lu !
La suite ne tardera pas. En attendant, vos commentaires font toujours plaisir. :)
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