PROXIMITY
Chap. 1
- « C'est toujours la même chose avec toi! J'arrive , les enfants sont pas prêts, il faut attendre une heure qu'ils rassemblent leurs affaires sans être surs qu'ils aient bien tout pris.
Faites gaffe les gosses, vous savez que l'on ne reviendra pas chercher un livre si vous en oubliez un, je refais pas la route ! Et grouillez vous, Isa aime qu'on mange à sept heures! »
- « God Oliver! Tu étais moins prompt à rentrer tôt quand on vivait ensemble et qu'il aurait été sympathique de m'aider à changer ou nourrir les jumeaux!
Les enfants sont prêts et leurs affaires aussi, comme toujours... mais ton heure à toi pour venir les chercher est aussi variable que l'invariabilité de ta mauvaise humeur! »
Oliver: « tu sais très bien que ce n'est pas ma faute, j'ai un poste à responsabilité, c'est le client qui commande et je suis à sa disposition…tu ne sais pas ce que c'est toi/
« oui, je sais être enseignante, c'est ne rien foutre & bénéficier des vacances scolaires …le débat est vieux et me fatigue!
Allez go les zous, passez un bon réveillon du Nouvel An , je vous aime! ».
Après une étreinte raisonnablement affectueuse, la jeune femme laissa partir ses deux garçons avec leur père. Tous deux ne se saluèrent même pas , évitant l'un et l'autre de croiser le regard afin de ne pas se sentir obligé de se souhaiter une bonne fin d'année…ni l'un ni surtout l'autre n'auraient été sincères…
Presque à la porte Oliver se retourna et lui cria « tu n'oublieras pas de préparer le planning des Mercredis de l'année 2008, tu ne l'as toujours pas fait! »
Puis sans attendre de réponse, il se précipita vers la sortie et s'engouffra dans sa voiture.
Libérant la nostalgie de son cœur et la laissant enfin exploser sur son visage, la jeune femme leva la main pour saluer ses petits puis se détourna pour regagner son appartement.
Passant le plus discrètement possible devant la porte de son voisin, elle entendit une voix grave marmonner « old crap! »…
Se retournant vivement, peu sure d'avoir bien entendu elle lança « beg your pardon? »
GH: « He is an idiot…an old crap…Comme vous le dites si bien vous , les Français, une crétine… ».
Stupéfaite, le jeune femme ne put s'empêcher de rire.
Depuis un an qu'elle vivait dans l'immeuble, jamais elle n'avait eu l'opportunité ni même osé prendre l'initiative, de parler à son prestigieux voisin.
Quand elle avait postulé pour l'appartement, elle avait été copieusement interrogée et avertie par le syndic de la co-propriété: l'homme qui occupait l'appartement jouxtant le sien , était irascible et verrait d'un mauvais œil l'arrivée d'une famille à proximité.
Qu'ils se tiennent tranquilles , surtout ses adolescents ou ils se verraient expulser sans autre forme de procès.
Ils avaient finalement passé le test des premiers mois haut la main et elle commençait au bout d'un an à se sentir rassurée et enfin installée chez elle!
Et voila que tout à coup le Dr House entrait en contact de la manière la plus insolite avec sa voisine!
Chap.2
- « Bonsoir Dr House, mon nom est Aurore Réniers…et en Français pour un homme , on dit crétin…pas crétine…mais je dois dire qu'en ce qui concerne la personne en question …les deux lui vont comme un gant! ajouta -t-elle tentant de renvoyer à l'homme toujours dans l'ombre son plus charmant sourire.
House s'avança , hésitant légèrement et tendit la main vers sa voisine.
De plus en plus surprise, celle-ci tendit la sienne spontanément et comme toujours mit la force de sa sincérité dans cette poignée de bienséance.
Aurore ne faisait jamais les choses à moitié et vivait à l'instinct.
Depuis un an,
elle avait eu l'occasion d'entendre et parfois même de voir de ses propres yeux les pires choses concernant cet homme , mais à cet instant précis elle ressentait pour lui un élan de sympathie presque fraternel.
Elle le savait solitaire tout comme elle et ils n'avaient ni l'un ni l'autre besoin d'échanger une foultitude de mots pour faire passer un message.
Un peu gêné et emprunté, House ne savait pas où il mettait les pieds.
Aurore se décida à le soulager et rompit la première cette ébauche de contact.
Aurore: « eh bien Docteur House, j'ai été ravie de faire votre connaissance. Je vous souhaite une bonne soirée . »
Elle poursuivit prestement le peu de distance qui lui restait à parcourir pour se retrouver enfin dans son cocon bien à l'abri quand une nouvelle fois, la voix grave de House interrompit son élan.
House: « Pourquoi ne jouez vous plus de piano depuis quelques mois? »
Aurore se raidit et se retourna, décontenancée par une question aussi personnelle posée de manière aussi abrupte par un quasi inconnu.
Elle répondit vivement mais avec une froide émotion: « mon père est mort le mois dernier .C'était lui le musicien .Bonsoir Docteur House. »
Cette fois, elle n'attendit pas une nouvelle interruption pour refermer rapidement la porte de son appartement.
Chap3.
Aurore tournait en rond dans son loft.
C'était toujours comme cela durant quelques heures après le départ de ses garçons.
Ensuite la vie reprenait son cours et elle profitait enfin de ces instants de détente pour lire, écrire ou prendre de longs bains parfumés et très chauds…sans s'arrêter de lire.
Parfois elle se servait un bon verre de Chardonnay ou de Saint Estèphe pour la saveur, la volupté de l'alcool mais aussi pour tenter de glisser plus vite dans un sommeil sans trop de rêve.
Ce soir elle avait choisi un vin blanc à la fois fruité et un peu sucré qui aurait pu merveilleusement s'allier avec une tranche de foie gras…si elle avait été pour une fois en galante compagnie.
Toute seule c'était un peu moins plaisant aussi décida-t-elle d'aller se nicher dans son canapé pour déguster son nectar.
Elle était presque assoupie quand les premières notes d'une nocturne de Chopin vinrent effleurer sa conscience…Ce n'était pas le morceau favori de son père, il le savait sans doute et l'avait sans doute choisi en conséquence…mais la musique était douce à son cœur, mélancolique et passionnée, communiquant presque une certaine foi en l'avenir…
Aurore ne savait plus qui parlait à travers ces notes, si Chopin lui murmurait cet adieu à son père ou si House tentait à sa façon de lui transmettre un peu de chaleur et d'humanité…
Des larmes glissèrent sur son visage mais pour une fois la houle de la tristesse ne l'emporta pas.
Pour une fois elle s'endormit paisiblement sur une fugue de Bach…son favori.
Chap4.
House avait peu dormi cette nuit. Les élancements dans la cuisse avaient commencé dans l'après midi et ne l'avaient plus quitté malgré la triple ration de Vicodine agrémentée de whisky qu'il s'était généreusement octroyé au cours de la soirée.
Il ne savait pas trop ce qui l'avait poussé ce soir là, à lui parler à cette Aurore.
Ce n'était pas la première fois qu'il l'observait derrière la porte; elle avait une vie rythmée par les week-end et mercredis octroyés à son ex compagnon et il avait fini par repérer les jours « avec » et les jours « sans ».
Elle était devenue sans le savoir son professeur d'émotions.
Ce qu'il guettait avidement sur son visage,depuis quelques temps, c'étaient les sentiments qu'elle ne pouvait s'empêcher de laisser affleurer, qu'ils soient noirs ou qu'ils soient gais.
Pour quelque un comme lui, qui maîtrisait tout et ne savait pas toujours ce qu'il devait ressentir , elle était une mine inépuisable!
L'autre par contre l'agaçait terriblement! Il était d'une suffisance et d'un égocentrisme qui le stupéfiait!
Lui dont on disait qu'il avait un ego sur dimensionné et un sens des responsabilités des plus émoussés, n'en revenait pas de voir cet homme cracher à ce point dans une soupe qui avait du être en son temps délectable.
Et les garçons pour peu qu'il avait pu le constater, étaient vifs, beaux et intelligents…House ne se sentait pour l'heure aucune fibre paternelle mais ne pouvait comprendre le dédain de cet homme pour ses fils et son aveuglement.
C'Est-ce qui l'avait conduit hier soir à sortir de sa réserve et il se sentait presque prêt à le lui renvoyer au visage directement la prochaine fois.
House s'agita, tentant de mettre fin à ce débat intérieur et stérile…Il ne comprenait pas bien les sentiments qui l'agitaient.
Il agissait depuis quelques temps d'une manière qui le déconcertait.
Il ressentait parfois des émotions intenses qui le laissaient pantois.
Il y avait cette Aurore qui l'avait fait sortir de sa réserve.
Il y avait aussi Lisa Cuddy; oui il y avait Lisa…
Depuis qu'il partageait avec elle le « rituel de l'injection »; depuis qu'elle l'avait mêlé directement à ce projet de maternité qui aurait du rester si personnel, House se sentait déboussolé.
A présent qu'il savait, il lui semblait hors de question de se retirer .
Et pourtant il aurait voulu ne jamais prendre conscience de ce besoin impérieux de Cuddy de devenir mère et ce à tout prix.
Il se sentait profondément jaloux de la semence de cet anonyme qui allait peut être bientôt transformer le corps de Lisa en lui donnant un enfant.
Jaloux. Furieux.
Lui Grégory House était jaloux et furieux. Et c'était encore à cause de Cuddy.
Il fallait qu'il bouge!
Il ne pouvait pas courir mais marcher dans le froid et la neige seraient pénible et astreignant.
Quand il rentrerait, il serait épuisé et pourrait enfin dormir.
Il ouvrit brusquement la porte et se trouva nez à nez face à Aurore, tout aussi surprise que lui, sinon plus.
Elle était presque aussi grande que lui, brune , les cheveux coupés très courts, trop courts selon ses critères féminins à lui et plutôt forte.
Mais quand ses yeux souriaient , on oubliait volontiers le reste pour se plonger dans ce petit moment de bonheur.
Et même dans les heures les plus sombres, elle souriait encore…il le savait, il l'avait observée…
House ne put s'empêcher de lever un sourcil interrogateur, prenant plaisir à la déstabiliser et à la voir rougir…
Aurore balbutia, s'énervant de réagir comme l' adolescente énamourée qu'elle n'était plus depuis longtemps.
Finalement, sans dire un mot elle tendit à son voisin , bougon ce matin, l'objet qui l'avait amenée sur le pas de sa porte.
House ne fit pas un geste pour la soulager, attendant qu'elle se détende enfin pour entamer un dialogue.
Voyant qu'elle n'y parvenait pas, il s'effaça un peu et lui fit signe de le suivre…dans son appartement.
Sans prendre la peine de vérifier qu'elle le suivait, il pénétra dans la cuisine, saisit la cafetière encore brûlante et servit deux mugs de café.
Il en posa un à l'opposé du sien puis s'assit lourdement à table.
Aurore finit par le rejoindre et s'installa elle aussi.
Elle posa la bouteille de vin, un St Estèphe 1979 nota-t-il du coin d e l'œil et réchauffa ses mains un peu tremblantes autour du bol de café.
Après un silence partagé, léger, elle put enfin parler
« je viens de recevoir ce vin, un héritage de ma famille maternelle en France et j'ai eu envie de vous en offrir une bouteille ».
Elle hésitait un peu sur les mots. Il savait qu'elle était professeur de Français et s'était expatriée en Amérique pour suivre le père de ses enfants . Quand ils s'étaient séparés, elle n'était pas pour autant repartie dans son pays, ayant pris goût à cette vie à l'étranger.
Elle semblait craindre qu'il n'accepte pas son présent.
Il tendit donc la main pour saisir la bouteille et la remercia.
Ils finirent leur café en silence.
Aurore se leva , souriante enfin et quitta la pièce.
Avant de claquer la porte derrière elle, elle cria: « bonne promenade Dr House ».
Il lui répondit sur le même ton: « House, appelez moi House! ».
Chap5.
Lisa Cuddy ne savait pas trop ce qui l'amenait ce soir à la porte de House.
La journée avait été épouvantable, il était arrivé d'une humeur de chien et il s'était lamentablement défoulé sur ses larbins avant de se déchaîner sur elle.
Alors qu'habituellement, il prenait plaisir à l'agacer ou à l'effleurer sensuellement quand ils se retrouvaient seuls pour « l'injection » ; aujourd'hui il s'était montré rude, brutal, grossier et ses références aux saillies des étalons lui avaient presque donné la nausée.
Il avait fini par partir en claquant la porte et avait même délibérément « séché » deux heures de consultation en clinique.
Elle n'avait donc aucune raison valable de se trouver là , devant chez lui, presque inquiète de ce qui avait pu lui arriver.
Elle allait faire demi tour quand il ouvrit brusquement la porte, la retenant du regard.
Il l'avait vue arriver mais attendait qu'elle se manifeste.
Malgré tout, c'était encore à elle de faire le premier pas!
Sentant la colère gronder de nouveau en elle, Cuddy se mordit la lèvre pour s' empêcher d'envenimer les choses.
Elle leva le visage vers House et ressentit un choc en découvrant combien il était pâle, ses traits tirés . De nouvelles rides étaient apparues sur son front , entre les yeux…
Lisa murmura « Combien de Vicodine aujourd'hui? »
House répondit d'un ton las « j'ai dépassé le surdosage depuis 16heures cet après midi »
Lisa « je peux entrer? »
House « si vous êtes venue me sermonner pour les heures de clinique, j'ai eu mon quota de douleur pour aujourd'hui…je préfèrerai remettre à demain…profitez en pour avantager un peu plus votre décolleté ajouta-t-il avec un léger sourire.
Lisa répéta, un peu soulagée de retrouver son House « je peux entrer? ».
Il hocha finalement la tête et la laissa passer.
Il s'aidait de sa canne et s'appuyait sur les meubles sur son passage pour avancer, ce qui était rare et le signe d'une aggravation inexpliquée de son état.
Lisa « vous en avez parlé avec Wilson? Vous avez passé une nouvelle Irm? »
House « Wilson est Wilson, mon état est psychologique et je refuse d'affronter mes démons .Fin de l'histoire .
Quant à vous , votre dernière piqûre de morphine était un placebo…
Fin de l'histoire. »
Après un long silence qu'il se refusait à rompre de lui-même, Lisa lui demanda « vous accepteriez qu'on boive un peu tous les deux? J'ai le moral à plat, vous voir dans cet état me terrifie et mon test est revenu négatif ce matin… »
House releva vivement la tête et s'en voulut d'avoir ressenti quelques secondes un intense soulagement , proche de la joie.
Il espérait qu'elle n'avait pas guetté un signe sur son visage, il était sûr qu'elle ne pourrait jamais comprendre.
House « Aurore m'a apporté une bouteille de St Estèphe ce matin, un 1979, je sais que vous aimez les vins Français »
Lisa répliqua de façon un peu automatique « qui aime le vin aime la France…si vous aviez été élevé par mon père, vous le sauriez » puis elle ajouta d'un ton vif « Aurore? Qui est Aurore? Votre dernière prostituée en date ? »
House répondit d'un ton rogue « Aurore est ma voisine depuis un an, elle est la mère célibataire de jumeaux âgés de treize ans, professeur au lycée Français de Princeton…Brune, de très beaux yeux » …ajouta-t-il moqueur…
Un peu honteuse de s'être laissée surprendre par un accès de jalousie, Lisa revint au vin « je pourrai l'ouvrir cette bouteille? Pendant ce temps vous vous reposerez ».
House grommela un peu sur la capacité instinctive des femmes à s'approprier le bien d'autrui mais n'argumenta pas davantage et s'allongea lourdement sur le canapé tandis que Lisa se dirigeait vers la cuisine.
Il ne l'aurait avoué à personne, pas même sous la torture, mais cette fois la tension insupportable qui lui déchirait la cuisse depuis vingt quatre heure ,s'était considérablement atténuée …et ce peu de temps après que Cuddy lui ait confié que la Fiv avait de nouveau échoué.
Un malaise psychologique était entrain de remplacer la douleur physique, semblant donner raison à Wilson.
House ferma les yeux.
Il aurait donné sa vie pour écouter un peu de jazz mais ne pouvait plus bouger un muscle.
Et puis Miles Davis pénétra doucement dans son esprit… « round midnight »… »seven steps to heaven »…la sensualité de la musique s'emparait de son corps …
Aurore ce soir lui donnait tous les atouts pour faire de lui un séducteur…le vin…l'ambiance musical langoureuse …
Piano et trompette se mêlaient avec volupté pour « Stella « alors même que Cuddy s'avançait doucement vers lui , deux verres à la main et un sourire mutin aux lèvres.
Il continua à l'observer entre ses paupières feignant de s'être assoupi, profitant du spectacle de ses courbes à présent à portée de ses doigts…
Lisa n'était pas dupe mais voulait jouer le jeu.
Quand House laissa échapper un soupir un peu lascif, elle se mordit la lèvre et retint sa main qui se tendait , prête à caresser le duvet fin de ses cheveux…
Elle sentit alors une autre main qui s'était infiltrée au creux de son mollet et commençait doucement à remonter vers le haut de sa cuisse puis se mit à jouer sa propre partition, l'effleurant légèrement, remontant et descendant, remontant toujours un peu plus haut.
House avait toujours les yeux fermés et sa main semblait agir selon sa propre volonté…il n'y était pour rien…il aurait pu le jurer…
A son tour Lisa laissa échapper un soupir…ses jambes la trahissaient, elle devait s'asseoir au plus vite , ne pas céder à la langueur…
Des années passées à reconstruire ce mur entre elle et lui , à regagner sa confiance, à établir une solide amitié professionnelle et personnelle, ne pouvaient pas s'évaporer en une seconde dans les vapeurs d'un grand cru classé non consommé et sur l'ironique musique de Miles « un jour mon prince viendra ».
House n'était pas un Prince de conte de fée et pourtant quand sa bouche s'empara de celle de Lisa , elle ne put se défendre d'une secrète satisfaction…
Elle était enfin rendue là où son corps l'appelait depuis leur première dernière fois…
House caressait ses lèvres avec ses longs doigts, les faisant frissonner de son pouce…Il approfondit son baiser et quand leurs langues se rencontrèrent enfin, ils sentirent tous les deux au creux de leur corps le désir sourdre violemment.
à suivre...
