La comptine s'intitule "Early One Morning", pour ceux que ça intéresse.


The One That Got Away

C'était un matin et le soleil se levait…

Sting n'aimait pas cette chanson. Non, en fait, il la détestait carrément. Il la haïssait avec une passion pour le moins déconcertante.

Heureusement pour lui, la comptine n'était plus très bien connue, ce qui faisait qu'il ne l'entendait que très rarement. Mais il y avait des occasions où cela arrivait tout de même.

Lecter avait été terrifié le jour où il avait démoli la radio alors qu'elle diffusait le refrain dans le cadre d'une émission pour enfants. Résultat, Rogue lui était tombé dessus comme trois tonnes de briques.

Il s'était excusé, il avait racheté une radio et juré qu'il ne recommencerait pas. C'était juste qu'il détestait cette chanson.

Enfin, pas réellement. C'était plutôt le souvenir qui l'accompagnait qu'il abhorrait.

Ça devait être son tout premier souvenir, parce qu'il ne pouvait se rappeler de rien avant. D'un autre côté, c'était pas étonnant. Il avait eu quoi ? Deux ans ?

Il était dans les bras de quelqu'un – une femme – et elle le berçait doucement. C'était sans doute la seule occasion où les mouvements réguliers ne lui avaient pas donné le mal des transports.

Il ne se souvenait pas de son visage. Seulement qu'elle avait les cheveux blonds – comme les siens. Et qu'il avait le nez dedans. Et ça sentait bon, une odeur de fleur, du jasmin ou de la violette ? Un truc comme ça.

Il se souvenait aussi d'une voix qui fredonnait doucement :

C'était un matin et le soleil se levait

Dans la vallée d'en bas chantait une jeune fille

Oh ne me trahis pas ne m'abandonne jamais

Comment as-tu faire ça à cette pauvre fille ?

Elle avait une si jolie voix, elle chantait avec une telle tendresse et à chaque fois qu'il se remémorait cette voix, Sting sentait des larmes de rage lui brûler les paupières.

Parce qu'elle l'avait abandonné. Le souvenir venant tout de suite après cela, c'était celui où Weisslogia lui était tombé dessus dans la forêt et avait décidé de le ramener dans son antre.

Elle lui avait chanté une chanson disant combien c'était affreux de laisser tomber les gens, et elle l'avait laissé tomber. Autrement, comment aurait-il atterri chez son père-dragon ?

C'était un mensonge. C'était forcément un mensonge, cet amour dans la voix de sa – cette femme. C'était obligé.

Elle avait fait seulement mine de l'aimer avant de se débarrasser de lui, voilà tout. C'était la seule explication possible. C'était la seule explication qu'il réussissait à imaginer.

Parce que si, vraiment, elle avait tenu à lui…

Comment as-tu pu me faire ça ?