Carol resserra les pans de son gilet autour d'elle, frissonnante sous l'air frais du soir. Ils étaient à Alexandria depuis un peu plus de trois semaines à présent, ici, le temps avait un sens, le temps s'écoulait normalement. Ils savaient l'heure et le jour qu'il était.
Ils avaient deux maisons aussi, deux maisons avec plusieurs chambres, c'était plus qu'idéal après ce qu'ils avaient tous vécus.
Pourtant, quelque chose ici la gênait, elle avait encore beaucoup de mal à faire confiance à Deana, et aux autres personnes qui vivaient ici. Il y avait notamment un homme dont elle ignorait encore le nom, qui lui faisait tellement penser à Ed que ça la faisait frémir chaque fois qu'elle le croisait. Elle reconnaissait son attitude, celle d'un homme qui battait sa femme, et peut être aussi ses enfants.
Elle-même ne se laisserait plus jamais frapper par quiconque, et elle aurait tellement voulu aider cette jeune maman chez qui elle se reconnaissait. Mais celle-ci niait tout en bloc. Carol aussi avait nié à l'époque.
Elle fronça les sourcils pour mieux voir dans l'obscurité. Elle était sur le perron de la maison qu'elle partageait avec Rick Michonne et Daryl. Enfin , quand Daryl daignait y mettre un pied, ce qui était rare.
Si elle , avait du mal à s'intégrer, Daryl lui, ne s'intégrait pas du tout. Il avait refusé les différents travaux proposer par Deana, il refusait tout contact avec les personnes qui n'étaient pas de leur groupe, et même avec eux, il était distant, froid. Il préférait dormir dans une tente qu'il avait plantée dans le jardin attenant à la maison, plutôt que dans un lit, dans cette maison.
Justement en pensant à lui, elle le vit passer sur le côté de la maison pour regagner sa tente, sans lui adresser un seul regard.
D'abord vexée, puis agacée par son comportement , elle le suivit d'un pas assuré. Quand il se rendit compte qu'elle était derrière lui, Daryl la fixa, mais continua son chemin jusqu'a sa tente.
- Qu'est-ce que tu me veux.
- Je voudrais que tu arrêtes ce petit jeu. Nous sommes tous affectés par les pertes que nous avons subies, par la vie qu'on a du mener ces temps-ci, mais toi tu ... tu t'es juste arrêté de vivre, et tu ne t'en rends même pas compte !
- ...
- Tu vois, l'ancien Daryl ne m'aurait jamais permis de lui parler sur ce ton ! As-tu pris la moindre douche depuis que l'on est ici ? Et je parle d'une vraie douche, pas de ce jeter une bouteille d'eau sur le visage ? Non bien sûr que non, as-tu pénétré au moins une fois dans la pièce ou tu es sensé dormir ? Non plus. Je sais que Beth te manque, mais ...
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que Daryl la coupait d'une voix forte et autoritaire.
-NON ! Tu ne sais rien justement !
- Daryl ... Parles moi, qu'en est il de nos conversations nocturnes, à l'époque de la prison, nos confessions, nos discutions, ça me manque tout ça, TU, me manques. J'aimerais retrouver mon ami.
- C'est fini le temps de la prison. On est plus les mêmes personnes.
- C'est vrai ... ce que je t'ai dit quand nous étions seuls à Atlanta, c'était vrai, tu ne me connais pas. Il y a encore plein de choses que tu ignores à mon propos, mais que tu pourrais connaitre, si tu t'y intéressais un tant soit peu ! Pourquoi la mort de Beth t'a t'elle autant marquer ? Je veux dire que nous l'aimions tous, elle m'a sauvé la vie ! Elle était fraiche et pleine de vie, mais personne ne semble aussi touché que toi, j'aimerais que tu me dises pourquoi, est-ce que toi et elle vous ...
Elle ne continua pas phrase , qui était douloureuse pour elle à prononcer. Imaginer Daryl et Beth ensemble, c'était juste , douloureux.
- Pfff n'importe quoi, jamais j'aurais pensé à Beth de cette manière, c'était qu'une gamine bordel !
Le voyant s'énerver, elle essaya de le calmer comme elle le faisait avant, elle posa juste sa main sur son avant-bras , et lui parla d'une voix plus douce.
- Alors pourquoi ? Pourquoi tu es redevenu l'homme si distant que tu était avant ? J'aimerais juste comprendre, pour t'aider ...
Sa tactique sembla fonctionner puisqu'il continua de parler, mais sur une voix plus douce.
- J'ai pas besoin qu'on m'aide.
- Pas d'aide d'accord ... mais une oreille attentive ?
- Tu piges vraiment rien ...
Il se détacha de son contact et commença à tailler ses flèches, assis à même le sol.
- Alors, explique-moi si je ne comprends pas, Daryl ...
- Mais c'est toi Carol, c'est POUR toi ! Tu comprends pas que Beth, c'était une autre Sophia, une autre foutue gamine que je devais retrouver et protéger ! Et j'ai échoué, encore une fois ! Et toi, toi qui continue à me regarder avec tes yeux de merlans frits, tu continues à me respecter, à me soutenir, comme si j'étais un putain de héros ! En perdant Beth, on a pas simplement perdu une membre , on a perdu un espoir ! J'ai passé plusieurs jours avec elle, je me suis attaché à elle, et je l'ai perdue et je refuse de te perdre toi !
Carol resta bouche bée, regardant simplement l'homme en face d'elle, qui enfin, lâchait tout ce qu'il avait sur le coeur. Il avait peur de la perdre, elle, Carol Peletier. À ce moment précis, elle ne souhaitait plus que le consoler, le rassurer. Sans prévenir, elle le prit contre elle, pour une étreinte réconfortante.
D'abord tendu et réticent, il finit par ce laisser-aller et lui rendit son calin.
Ils restèrent ainsi quelques minutes puis Carol s'écarta, et l'obligea à le regarder droit dans les yeux.
- Daryl tu ne peux pas continuer de vivre dans la peur de perdre une personne, que ce soit moi ou quelqu'un d'autre. Si ça doit arriver, ça arrivera, alors autant faire en sorte d'avoir de bons souvenirs ... j'ai peur moi aussi, Sophia, ... Dale, Hershel, Beth, Tyreese, T-Dog et tant d'autres, ils me manquent tous, mais quand je me sens triste, je me mets à repenser à tous les bons moments que j'ai passés, avec chacun d'entre eux, et je me sens un peu mieux. Je ne supporterais pas de te perdre toi non plus. Tu es la personne à laquelle je me suis raccroché quand j'ai perdu Sophia, tu as été le seul qui a pu me rassurer, c'est grâce à toi que j'ai remonté la pente, je t'aime Daryl et tu es un idiot si tu ne l'avais pas encore deviné. Et j'en ai marre de te voir broyer du noir, je voudrais simplement que tu profites de ta chance d'être en vie !
Daryl resta silencieux, il s'était arrêté au moment ou Carol lui avait dit qu'elle l'aimait. Il n'avait pas entendu la suite, choqué par l'aveu de la femme en face de lui.
Carol soupira et posa la main dans ses cheveux.
- Laisse-moi t'aider, s'il te plait. Laisse-moi couper cette tignasse, à moins que tu ne préfères que la coiffeuse sexy d'Alexandria s'en charge.
Elle avait prononcé cette phrase sur le ton de l'humour, mais au fond elle avait peur qu'il la préfère à elle même.
- Bpn ... vas-y.
Elle rit doucement en voyant l'état de saleté dans lequel il était.
- Ce serait avec plaisir, mais vraiment il va falloir que tu passes par la douche avant, tu veux que je t'aide pour ça aussi ou ça ira ?
Elle lui adressa le sourire coquin qu'elle avait l'habitude lui faire avant, et immanquablement il rougit comme d'habitude. Elle adorait ça.
Ils partirent côte à côte vers la maison, et Carol l'accompagna jusqu'a la salle de bain à l'étage. Elle lui sourit.
- Et frotte bien.
Il grommela pour seule réponse.
- Quand tu auras fini, rejoins-moi dans la chambre.
Il ouvrit grand les yeux et eux un mouvement de recul. Elle éclata de rire en voyant son air horrifié et précisa.
- Pour la coupe de cheveux.
Daryl entra dans la salle de de bain et pris la peine de verrouiller derrière lui.
Il se dévêtit prudemment comme si quelqu'un risquait d'entrer et d'attaquer, il avait vécu dans la peur trop longtemps. Une fois nu il grimpa dans la douche et alluma l'eau. Elle était tiède, mais c'était libérateur. Il appuya le front contre la paroi de la douche savourant l'eau ruisselante sur sa peau nue.
Il prit le savon posé sur la petite étagère et ce mit à frotter la moindre parcelle de son corps, foutu que sa sentait bon, il ce sentait comme une gonzesse, mais il s'en foutait , il avait accumulé trop de sueur, de crasse, de sang sur le corps, il avait besoin de s'en laver.
Quand il prit la décision de sortir de la douche, il pensa soudain qu'il n'avait pas pensé à prendre de vêtement de rechange avec lui. Peu importe, il ce sécha, et remis son pantalon sale, avec sa chemise noire à manches courtes. Maintenant que lui sentait bon, il se rendait compte que ses vêtements sentaient aussi fort que les morts vivants qui étaient dehors.
Il sortit les cheveux en bataille, et rejoignit la chambre qu'il était sensé partager avec Carol. Quand celle-ci le vit arriver, elle retroussa le nez, signe qu'il sentait mauvais.
-Aaah Daryl Dixon, qu'est ce que je vais faire de toi. Tiens, c'est tout ce que j'ai trouvé dans les tiroirs.
Elle lui tendit un petit tas de vêtements propres, pliés, et visiblement repassés. Il les prit d'un air douteux et les inspecta.
Un boxer noir, un jean noir, et une chemise noire à manches déchirées, comme il avait l'habitude de porter.
Il esquissa un début de sourire quand Carol brandit sous ses yeux les manches d'origine de la chemise, qu'elle avait apparemment coupées pour que ça lui plaise.
- Je te laisse te changer, mais ne remets pas ta chemise, il faut que tu restes torse nu pour que je puisse couper tes cheveux.
Elle vit son regard hésitant, et elle savait ce qui le gênait.
- Je les ai déjà vues ... tes cicatrices. Je sais ce que c'est ... tu n'as pas à t'en cacher de moi ... je reviens quand tu auras fini.
Carol sortit dans le couloir, patientant devant la porte, attendant le signe que Daryl aura fini de se changer. Elle faisait l'indifférente, mais elle savait que voir ces cicatrices les mettrait tous les deux mal à l'aise, parce qu'elle ne pouvait pas supporter qu'on ai pu faire du mal à cet homme, et parce qu'être seule dans une chambre avec lui a moitié nu l'angoissait terriblement, elle avait peur de ses propres réactions.
La porte s'entrouvrit doucement, Daryl pieds et torse nu, ne portant que son jean, était debout dans la chambre, aussi rouge qu'elle. Prenant grand soin de ne pas trop le regarder, elle le fit assoir sur une chaise au milieu de la pièce. Elle avait déjà préparé le matériel nécessaire, rasoir ciseaux et peigne. Elle se mit à toucher ses cheveux, les ébouriffer, prendre mèche par mèche, et couper, couper. Les mèches tombaient au sol, Carol maniant le ciseau d'une manière impitoyable. Daryl était silencieux, les yeux clos, il semblait apprécier le geste.
Quand elle cessa de couper, ses cheveux étaient aussi courts que lorsqu'elle l'avait vu pour la première fois. Elle fit le tour pour égaliser sur le côté, et inspira bruyamment quand elle se rendit compte que sa poitrine était presque sous le nez de Daryl. Celui-ci choisit ce moment pour ouvrir les yeux et se retrouva face à face avec les rondeurs féminines de Carol.
Celle-ci avait fini de couper, et voyant quelques cheveux collés sur les épaules de Daryl, elle avança sa main, hésitante, et frotta doucement, pour enlever les mèches. Aucun d'eux ne parlait, la tension était beaucoup trop forte.
Carol ouvrit la bouche pour parler, mais aucun son ne sortit, elle était physiquement incapable de faire autre chose que de le regarder. Même son corps refusait de bouger, et elle était toujours dans la même position,sentant le souffle chaud de Daryl sur sa poitrine. D'un coup il leva la tête vers elle et leurs regards se croisèrent pour ne plus se lâcher. Leurs visages s'approchent l'un de l'autre, doucement, à leur vitesse.
Au moment où leurs lèvres allaient se toucher, Carl entra dans la chambre. Réalisant ce qu'il venait d'interrompre il se mit à bégayer et sortit aussi vite qu'il était entré.
Son intrusion avait jeté un froid entre Carol et Daryl qui s'était aussitôt éloigné l'un de l'autre.
Elle avait baissé la tette, regardant ses pieds, tandis que lui resta debout les bras ballants, sans oser bouger. Soudain il prit le chemin de la porte, et Carol le regarda, persuadée qu'il retournait dehors. a la place, elle le vit pousser la commode contre la porte, et faire demi-tour vers elle. Avec un courage et une audace qu'elle ne lui connaissait pas, il la prit contre lui et l'embrassa.
Enfin, elle connaissait le plaisir d'embrasser Daryl comme elle le voulait depuis si longtemps. Elle passait les mains dans ses cheveux maintenant cours, caressais son dos , et osa même poser une main sur une de ses fesses, ce qui lui arracha un petit grognement qui la fit sourire.
D'un mouvement commun ils avancèrent vers le petit lit d'une place situé à droite de la pièce, ou ils se déshabillèrent et se prouvèrent physiquement , leur affection réciproque. Longtemps après, quand ils furent épuisés, et heureux, Daryl se releva pour pousser le second lit d'une place contre celui où Carol était couché, de manière à ne faire plus qu'un seul lit. Il s'allongea près d'elle, et la prit dans ses bras, savourant le moment. Quand elle se fut endormie, la tête posée contre son torse, bercée par les mouvements réguliers des caresses hésitantes de Daryl, il s'autorisa enfin à lui murmurer un petit : "Je t'aime tellement."
Il n'était pas encore prêt pour lui avouer quand elle était éveillée et attentive, mais dans son sommeil, il sut qu'elle avait entendu, car elle se blottit un peu plus contre lui le sourire aux lèvres.
