Titre : No One Ever Talked in the Darkness

Auteur : Verasteine

Traduction : moi

OOO

I remember the nights I watched as you lay sleeping
Your body gripped by some far away dream
Well, I was so scared and so in love then
And so lost in all of you that I had seen
But no one ever talked in the darkness...

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Merlin aimait la pluie.

Il rigolait quand il pleuvait, et il secouait la tête pour la retirer de ses cheveux, et pour la première fois de sa vie, Arthur rigolait alors qu'il était debout sous l'humidité en provenance du ciel.

Ils s'étaient rencontrés un mois auparavant, dans la bibliothèque, et Arthur avait presque ignoré ce gars avec ses oreilles jusqu'à ce que Merlin sourit, car son sourire avait éclairé la pièce.

Arthur lui avait couru après de manière audacieuse, et il lui avait demandé de sortir quelque part.

Ils s'étaient revus pour boire un café, ensuite pour dîner, ensuite encore pour un café, ensuite pour un repas, ensuite… Ensuite, ils s'étaient embrassés, et les baisers s'étaient finis dans de dortoir d'Arthur, et il avait compris que Merlin était spécial.

Parceque Merlin aimait la pluie. Et Merlin aimait les comédies alternatives, qu'Arthur ne comprenait pas. Et Merlin disait que ça allait, et il le frappait dans le bras, et il se rapprochait d'Arthur pour plus de popcorn alors qu'Arthur faisait le goinfre avec le plat. Et Merlin était d'accord avec ça, aussi.

Merlin aimait la pluie. Et Merlin semblait aimé Arthur, aussi.

OOO

Ils arrivaient timidement à trois semaines de leur six mois d'anniversaire, quand ça arriva.

Ils s'embrassaient sur le lit d'Arthur, qui était juste en train de penser qu'il commençait vraiment à connaître le corps de Merlin, quand Merlin s'éloigna subitement.

« Stop, » Dit Merlin à haute voix, et il bascula ses jambes sur le bord du lit.

Arthur s'assit surpris, faisant partir en quelques secondes ses mains confortablement installées sous le t-shirt de Merlin, pour observer la courbe de sa colonne alors que Merlin fixait le sol.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

Merlin jeta un coup d'œil par-dessus son épaule, le regard presque indéchiffrable. Il y avait quelque chose à l'intérieur, une sombre douleur, un durcissement autour de son regard, et ensuite Merlin avait encore détourné le regard.

Arthur tendit une main, pour la poser sur le dos de Merlin, avant de la laisser tomber sur les couvertures. Il y avait quelque chose de définitif sur la façon dont Merlin s'était retourné, pour le garder à distance d'un contact. « Merlin ? » Demanda-t-il, essayant de maintenir sa voix.

Merlin haussa les épaules en réponses, ce qui n'était pas du tout une réponse. « Je dois y aller, » dit-il, et il se leva en cherchant ses chaussures.

« Quoi ? » Arthur s'assit correctement.

« Désolé, » marmonna Merlin, sans le regarder, en mettant ses baskets.

Arthur balança ses jambes au bord du lit, et il essaya de rattraper Merlin avant qu'il ne parte. Merlin s'éloigna de ses doigts inquisiteurs, et il ferma la porte de manière décisive derrière lui.

OOO

Toute la soirée, il songea à l'idée d'appeler Merlin, mais il laissa tomber. Il ne savait pas quoi dire, ni comment parler sérieusement de ça. Alors, aussi mature qu'il était, il laissa passé un jour ou deux.

Il commençait juste à penser qu'ils avaient rompus sans que Merlin ne lui dise, quand Merlin lui sonna.

« Je suis désolé pour Mardi, » dit-il spontanément.

Arthur voulait dire quelque chose, mais il ne savait pas quoi. Finalement, il essaya, « c'est quelque chose que j'ai fait ? » Il détestait que sa voix tremble un peu en parlant.

« Non, » répondit Merlin trop rapidement. « Ce n'était pas toi. »

« D'accord, » répondit lentement Arthur, et ensuite il ajouta, « Tu vas bien ? »

« Oui, » répondit Merlin, trop rapidement encore. « Je vais bien. »

« Tu veux venir ? »

« Tu veux toujours de moi ? »

Arthur s'étrangla. « Bien sûr que je veux. »

OOO

L'incident avait presque totalement disparu de sa mémoire quand ça arriva pour la seconde fois.

Il y avait un temps de chien, car on était en Angleterre, et la pluie ne faisait pas défaut. Arthur rouspéta car son essai était trempé dans son sac, et Merlin se moqua de lui en lui disant d'acheter un sac imperméable, comme tous le reste d'Oxford.

Arthur le poussa d'agacement.

Merlin sourit et le repoussa en réponse.

Ils s'emmêlèrent l'un l'autre contre un mur de brique du hall de littérature, se poussant et tournant l'un l'autre, les mains de Merlin sous la veste d'Arthur sur ses hanches, les doigts d'Arthur dans les cheveux sombres de Merlin.

Il se pencha pour embrasser Merlin, en observant les traînées de pluies sur son visage, en fixant son regard, plein d'hilarité et de quelque chose d'autre, quelque chose d'indéfinissable.

Les yeux de Merlin se rétrécirent, et il attira Arthur d'une main sur son côté. Arthur se repoussa encore, pour joindre leurs bouches ensemble. Il léchait le haut des lèvres de Merlin, et soudain Merlin tira sa tête en arrière d'un coup sec, les yeux écarquillés.

Il recula, pour s'éloigner vivement, et Arthur relâcha sa prise, pour le laisser partir. « Merlin ? » dit-il, tout à coup inquiet.

« C'est…je suis… » Bégaya Merlin, en posant ses doigts sur ses lèvres pour les touchers avec précaution. « Je vais devoir y aller. »

« Quoi ? » Demanda Arthur, mais Merlin s'était retourné pour partir en courant, pour s'éloigner de lui en descendant la rue.

OOO

Il appela Merlin au soir, vraiment inquiet. Merlin ne répondit pas, pas une seule fois sur les quatre où Arthur l'appela. Ensuite, il répondit vers 23h.

« Je vais bien, » dit-il, mais sa gorge était serrée.

« Merlin, » répondit Arthur, la colère pointant dans sa voix, « Merde, qu'est-ce qu'il se passe ? »

« C'est… » La voix de Merlin trembla. « Ne t'inquiète pas pour moi, d'accord, Arthur ? »

Arthur haleta un moment, comme un poisson. « Comment ? »

« Juste…ne t'inquiète pas, » répéta Merlin. « Je vais bien. »

« Attends… » Dit Arthur, mais Merlin lui raccrocha au nez.

OOO

Il était accablé et désolé, trois jours plus tard, quand il arriva chez Arthur avec des bières, du popcorn et des dvd, et Arthur le laissa entrer.

Ils passèrent le premier film sans incident, une paix fragile entre eux, où Arthur ne posa pas de question et où Merlin n'offrit pas de réponse, passant lentement de la camaraderie et peut-être à l'acceptation.

Un fois qu'Arthur mit le deuxième dvd dans le lecteur, Merlin se pelotonna plus près de lui, une main sur le ventre d'Arthur sous son t-shirt. Les mains d'Arthur jouaient avec les cheveux sur la nuque de Merlin, tandis qu'il mangeait ses popcorns d'un air heureux de l'autre.

A la moitié du deuxième film, Merlin se pressa un peu plus, pour embrasser la mâchoire d'Arthur, en glissant sa main dans le jeans d'Arthur.

Arthur se décala pour recevoir Merlin, et il fut surpris quand Merlin se pencha pour ouvrir sa braguette, et le prendre dans sa bouche.

Arthur bougea ses mains sans but, distraitement, vers la télévision. « Je devrais… »

Merlin releva la tête sur lui, le visage indéchiffrable, fermé. « Non, continue à regarder la télévision. »

Arthur fronça les sourcils, mais le froncement disparu rapidement quand Merlin reprit. Il jouit, si rapidement que ça fut embarrassant, et Merlin le laissa jouir dans sa bouche, c'était quelque chose qu'ils n'avaient jamais fait avant.

« Hé, » dit Arthur, en prenant en coupe la joue de Merlin, essayant de le faire revenir vers lui. « Viens ici. »

Merlin se dandina pour se redresser, et Arthur se pencha pour l'embrasser, mais Merlin détourna le visage. La bouche d'Arthur atterrit sur son oreille. Arthur passa une main apaisante sur le côté de Merlin, le laissant agir bizarrement, mais quand il posa une main sur la fesse de Merlin, Merlin l'éloigna de son corps.

Arthur fronça les sourcils, en reculant pour observer l'expression sur le visage de Merlin. Il pensa y voir de la culpabilité, et il voulut dire quelque chose, quand Merlin dit, « Regarde le film. Je vais bien. »

OOO

Il garda un œil sur Merlin après ça, mais ce fut difficile, car les examens approchaient et qu'ils devaient étudier tous les deux. Les examens de vétérinaire de Merlin demandaient beaucoup plus de révisions que les examens d'anglais d'Arthur, et Arthur ne voulait pas distraire son petit ami de son travail.

Merlin ne semblait pas être intéressé par quelqu'un d'autre, et depuis le dernier incident, il était charmant comme d'habitude, plein d'entrain. Arthur ne le comprenait pas, mais il ne voulait pas non plus prendre le risque de demander à Merlin si il voulait rompre. A dire vrai, il ne voulait pas vraiment avoir une réponse à tout ça.

Une fois les examens terminés, ils allèrent avec leurs amis dans un bar d'étudiant, pour fêter ça.

Pour la première fois depuis qu'Arthur le connaissait, Merlin était vraiment bourré.

Il chuta lourdement sur Arthur alors qu'ils rentraient, et à un moment Merlin eut le vertige, et se cramponna au bras d'Arthur. « Tu ne sais pas, » dit-il en marmonnant ses paroles, en pointant un doigts sur le visage d'Arthur. « Tu n'as pas idée. »

Le sang dans les veines d'Arthur se glaça tout à coup, et il s'arrêta en pleine marche. « je ne sais pas quoi ? »

Merlin sourit, mais oh combien il était triste. Durant un moment, Arthur pensa que Merlin allait lui avouer qu'il le trompait, ou quelque chose de pire, même si il ne pouvait pas s'imaginer ce qui pourrait être pire. Merlin ouvrit la bouche, et dit, « je ne peux pas te le dire. »

Il trébucha en s'éloignant d'Arthur, et Arthur suivit.

OOO

Ils étaient chacun chez eux pour les vacances, et Arthur essaya de ne pas trop y penser, mais il n'y arrivait pas. C'était dans sa tête, cette petite chose, la demi confession de Merlin, son étrange comportement. Par quatre fois, il avait pris son téléphone pour appeler Merlin et lui demander, et par quatre fois il avait reposé le téléphone, effrayé de demander, effrayé que Merlin se moque de lui et lui dise qu'il n'y avait rien de louche.

Le cinquième jour de congé, Merlin le réveilla en l'appelant en plein milieu de la nuit.

Arthur tâtonna après son téléphone, essayant de l'attraper avant qu'il ne réveille toute la maison, et il alluma la lampe de chevet en décrochant. « Merlin ? »

« Tu es là ? » Demanda Merlin dans un soupir, et sa voix semblait si faible.

« Oui, » répondit Arthur d'agacement. « Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Rien. »

« Ne fais pas ça, » cracha Arthur. Il était fatigué de s'inquiéter, de voir des ombres là où il n'y en avait peut-être pas.

« Pardon, » dit Merlin.

« Qu'est-ce qu'il y a ? » Répéta Arthur.

« Je ne pense pas que je devrais te le dire. » Merlin inspira profondément, de façon audible à l'autre bout de la ligne. « Je pensais vraiment que je n'aurais pas à le faire. »

« Me dire quoi ? » Arthur passa une main dans ses cheveux. « Merlin seigneur… »

« Je ne peux pas te le dire au téléphone, » bredouilla Merlin, exaspéré.

« Quand vas-tu me le dire ? » Arthur se mordit les lèvres, se préparant. « Tu veux rompre avec moi ? C'est ça ? »

« Quoi ? » Merlin en perdit la voix. « Non. Pourquoi, tu voudrais ? »

« Non, » répondit Arthur, toujours méfiant. « Non, je ne veux pas. »

« Je t'expliquerai quand on rentrera à l'université. » La voix de Merlin était basse, ensuite il ajouta de manière presque inaudible. « Je te raconterai à ce moment. »

OOO

Il y avait de l'agitation quand ils revinrent, des nouvelles classes, des nouveaux horaires, livres, assignements. Arthur insista, et il fallut quelques jours avant que Merlin prenne le temps de le voir, et Arthur fut choqué quand il aperçut Merlin.

Son petit ami avait des cercles noirs sous les yeux, ses cheveux désordonnés car il avait passé plusieurs fois sa main durant la journée, et la fine ligne autour de ses yeux indiquait qu'il était tendu.

« Merlin, » dit Arthur, en le tirant par le coude sans y réfléchir pour trouver un coin calme dans le café. C'était le choix de Merlin, de se rencontrer dans un lieu publique, mais à présent Arthur espérait l'intimité de leur dortoir.

« Hé, » répondit Merlin, en se laissant guider.

Arthur décida de ne pas s'en inquiéter maintenant, et à la place il commanda deux cafés, observant Merlin tandis qu'il noyait du sucre dans celui-ci.

Merlin mélangea avec précaution, ses doigts minces et blancs autour de la cuillère. Arthur attendit qu'il parle. Enfin, Merlin releva les yeux de sa franche, toujours hésitant.

Arthur lui fit un petit sourire, car si ils n'allaient pas rompre, alors qu'allait-il se passer…il ne le savait pas du tout.

« Je pensais, » commença lentement Merlin, délibérément, « que je n'aurais plus jamais à le raconter à quelqu'un de ma vie. »

Arthur voulait tendre le bras pour prendre sa main, pour éloigner les doigts nerveux de Merlin de sa cuillère qui tremblotait. Mais ils n'avaient jamais été du genre à se prendre la main, alors il n'osa pas. Il hocha la tête à la place.

Merlin baissa à nouveau la tête sur sa tasse, pour recommencer à touiller. « J'y croyais vraiment, Arthur. »

« Comment ça ? » Demanda-t-il, incapable de garder le silence. « Qu'est-ce qu'il se passe, Merlin ? »

Merlin soupira, les yeux brillants de quelque chose, et il mâchouilla sa lèvre entre ses dents. « Arthur, je… » Merlin s'arrêta encore, et il releva les yeux, pour regarder Arthur droit dans les yeux, et dire, « Quand j'avais 13 ans, quelqu'un m'a violé. »

Le souffle d'Arthur se bloqua dans sa gorge, son sang se glaça, et il le fixa d'un air perdu.

« Je…je ne…ce n'était pas… » Merlin inspira profondément pour continuer à parler, d'une voix lasse. « Je ne voulais pas. C'était un prof de mon école, et et…il est en prison, et je suis là, et je vais bien, d'habitude, et… »

Enfin, Arthur parvint à sortir de l'état paralytique qui l'avait saisi, et il tendit sa main vers les doigts tremblants de Merlin, pour tempérer le torrent de paroles de Merlin.

Merlin ferma la bouche, il le regarda, ensuite il baissa les yeux sur leurs mains.

Arthur enroula ses doigts à ceux de Merlin, pour joindre leurs mains sur la table. Il éclaircit sa voix et trouva les mots. « Je suis désolé, » dit-il à Merlin, et quand Merlin releva encore la tête, il maintint son regard. « Je suis si désolé que ça te soit arrivé. »

OOO

Ils étaient dans la chambre de Merlin, et là, aussi, il y avait les traces récentes de la détresse de Merlin, les bagages non défait par terre, des livres empilés de manière hasardeuse sur les surfaces, des papiers de bonbons sur le sol.

Arthur observa un moment, prenant note de tout ça. Ses jambes lui faisaient mal, et son esprit tournoyait, une étrange sensation tapie dans le fond de son estomac qui n'était pas de la peur. Il n'était pas certain de savoir si c'était pire de tout connaître aujourd'hui.

Puis, il regarda Merlin, qui était debout près de la porte, les bras drapés autour de la taille, blottis dans sa veste, toujours en train d'observer Arthur du dessous sa frange.

Arthur tendit le bras, pour levé une main avec précaution.

Merlin recula et lui sourit d'un air ironique. « Je ne suis pas différent de ce que j'étais il y a deux semaines. »

Arthur se sentit rougir. « Je le sais. »

Merlin soupira, et il prit la main d'Arthur avant qu'Arthur le tire à ses côtés. Et Arthur le tira plus près de lui encore, pour passer ses bras autour de Merlin, et de son corps toujours tendus. Après un moment, Merlin se relaxa un peu, se collant lui-même au corps d'Arthur.

Ils restèrent comme cela un temps, jusqu'à ce que Merlin recule.

« Ce que je voulais dire, » dit-il en regardant Arthur droit dans les yeux. « Ne me traite pas différemment. »

Arthur acquiesça, sérieusement. Il attendit un moment, retenant quelques envies subites, ensuite de façon déterminée il laissa ses doigts parcourir les doux cheveux de Merlin. Merlin appuya sa tête contre son toucher, et Arthur sourit.

Merlin sourit en retour.

OOO

Une semaine passa, et Arthur absorba calmement toutes les informations qu'il pouvait. Il fit des recherches sur Google, pour essayer de comprendre, d'obtenir des informations, et ce qui revenait la plupart du temps lui laissait un goût amer en bouche, et son impression était qu'il y avait un peu trop de compassion dans le monde.

Merlin était la personne qu'il avait toujours été.

Le même, sauf que ce regard qu'il avait parfois sur le visage, quand il pensait que personne ne le regardait et qu'il fixait le vide, avait bien plus de sens. Le même, sauf que ces fois où il détournait son visage quand Arthur voulait l'embrasser, en publique ou dans le lit, avait beaucoup plus de sens. Le même, sauf que les trois appels téléphoniques qu'il avait chaque semaine de sa maman, des appels dont Arthur avait l'habitude de se moquer un peu, avait beaucoup plus de sens maintenant, aussi.

Ils étaient couchés dans le lit, tous les deux fatigués d'avoir fait l'amour, et Arthur avait réussi à convaincre Merlin de rester cette fois ci, car Merlin avait ces cernes sous les yeux et Arthur comprenait à présent pourquoi, et donc, Arthur avait passé un bras autour de la taille de Merlin, alors que Merlin fixait le plafond.

« Combien de personne sont au courant ? » Demanda-t-il.

Merlin tourna les yeux vers lui, avant de résumer sa pensée. « Je ne sais pas. »

Arthur fronça les sourcils. « Comment tu ne peux pas savoir ? »

Merlin haussa à moitié les épaules. « Il y avait les avocats, et la police. Je ne sais pas. »

« Désolé. » Arthur frotta son nez contre l'épaule de Merlin. Merlin se décala un peu à ce contact.

« Je l'ai seulement dit à quatre personnes. Ce que je veux dire, » Merlin détourna les yeux encore, « de moi-même. Sans y être forcé. »

Arthur fut un peu étonné du nombre, une fois avoir réalisé qu'il était compris dedans.

« Ma prof d'anglais Miss Gloucester, » continua Merlin, « ma maman, mon meilleur ami Will, et toi. »

Arthur sentit le corps de Merlin se tendre sous son bras, et il frotta son pouce sur la peau chaude et frémissante du ventre de Merlin. « Tu l'as dit à ta prof d'anglais ? »

Merlin détourna la tête, et puis, un moment après, il roula sur le côté, s'éloignant d'Arthur.

Arthur resta à sa place un moment, incertain, ensuite il roula avec lui, passant à nouveau son bras autour de la taille de Merlin, plus fermement cette fois, pour avoir Merlin contre lui. Il ne dit rien.

Merlin s'appuya un peu contre lui, acceptant l'étreinte. Sa voix était enrouée quand il parla. « Elle…elle a été la seule qui…elle a vu que quelque chose n'allait pas. »

Arthur pressa ses lèvres sur le lobe de l'oreille droite de Merlin.

« Tu ne peux pas comprendre comment c'était, » dit Merlin, comme un fait établi, et avec une peine vive dans la voix qu'Arthur voulait faire s'en aller. « Je pensais que tout le monde allait savoir, après la première fois. Je pensais que tout le monde pouvait voir ce qu'il s'était passé, que c'était écrit sur mon visage, qu'ils pouvaient le lire. » Il expira lentement. « C'était comme si j'avais été…comme si tout avait été anéanti, à l'intérieur de moi, mais personne ne l'a vu. »

Arthur frotta en cercle le ventre de Merlin. « Et ta maman ? »

Merlin soupira. « Elle pensait qu'il se passait quelque chose de mal. Et puis, j'ai commencé à déconner, et elle a pensé que c'était juste la puberté. »

Arthur essaya de se rappeler de sa propre enfance, de sa puberté, et il se rappelait principalement de la défiance et des portes qui claquent, et puis plus tard, de beaucoup d'alcool. Mais il ne pouvait pas comparé ce qu'il avait vécu, avec le vécu de Merlin.

« Miss Gloucester… » La voix de Merlin se perdit. Il éclaircit sa gorge. « Elle a dit qu'elle l'avait vu dans mon écriture. »

« C'est elle qui a demandé ? »

« Oui. » Merlin prit une autre inspiration, et Arthur n'avait pas besoin de voir ses yeux pour deviner qu'il y avait des larmes. « Elle s'est assise avec moi et elle m'a demandé. Et je ne voulais pas lui dire, seulement elle a dit… »

Merlin s'arrêta, le son d'un sanglot étranglé dans sa gorge. Arthur resserra son étreinte et demanda, « Qu'est-ce qu'elle a dit ? »

La voix de Merlin trembla. « Elle a dit que certaines choses étaient trop grande pour être contenue par une personne, et que je devais m'en libérer avant que ça devienne trop envahissant. Et que d'en parler à voix haute ne rendrait pas les choses moins, ou plus vraie. »

Arthur ne pensait pas que ses professeurs avaient été aussi investis, et il se posa des questions à propos de cette femme qui avait vu en Merlin. Et il tenait Merlin, qui tremblait, dans ses bras, et il savait qu'il avait vu toutes ces choses en lui également. « Alors tu lui as dit ? » dit-il, et même sa voix était rauque.

« Oui, » répondit simplement Merlin. « Je lui ai dit. »

OOO

Sincèrement, la vie continua comme avant, et l'information changea, et ne changea pas, ce qu'il y avait entre eux. Il avait l'impression de mieux comprendre Merlin à présent, mais le fait de savoir ne changeait en rien ce qu'était Merlin.

C'était confus, mais ce n'était pas quelque chose dont il pouvait parler avec quelqu'un.

Et si Parfois, Merlin le surprenait en train de le regarder, au final, ils n'en parlèrent plus beaucoup.

Pas jusqu'à cette nouvelle histoire.

Arthur n'y avait jamais pensé, c'était une habitude qu'il tenait de son père, il regardait le journal de 20h chaque jour. Et il mettait le volume à fond sans y réfléchir, alors qu'il était assis dans l'un des deux fauteuils de Merlin.

Il avait déjà vu ce genre de nouvelle une centaine de fois.

C'était le quatrième sujet du journal, quand la journaliste prit un ton grave et approprié alors qu'elle commençait à parler d'une arrestation dans une école primaire près de Glasgow. Un directeur, de ce qu'ils disaient, était accusé de viol sur plusieurs élèves, et la police enquêtait toujours.

Il fallut un moment ou deux à Arthur pour le réaliser, et son sang se glaça, et puis il frappa sur le bouton mute alors que les images d'une école défilait, le visage des enfants brouillés sur l'écran.

Merlin arriva, juste derrière lui, les plats chinois à emporter dans chaque main.

Arthur ne pouvait pas déchiffrer son expression, alors qu'il s'asseyait loin de l'écran, mais les yeux de Merlin étaient rivés sur la télévision et il ne disait rien.

Ensuite, il se reprit et il s'installa près d'Arthur, en lui tendant l'un des plats. « Le repas, » ajouta-t-il, d'une voix vide.

« Merlin… » Dit Arthur, en remarquant que la journaliste était passée au sujet suivant, un désastre naturelle quelque part.

« Je ne veux pas en parler, » le coupa Merlin, en plantant sa fourchette dans sa nourriture.

Arthur le jaugea du regard, ensuite il remit le son.

OOO

Ce soir là, Merlin le poussa dans son lit, pour l'embrasser voracement.

Cette fois, c'est Arthur qui détourna le visage. Il essayait d'être doux à cause l'agression de Merlin, car il ne pouvait pas l'ignorer, il ne pouvait plus ignorer ces cernes autour des yeux de Merlin.

Merlin souriait, mais c'était faux, alors Arthur se redressa pour saisir l'épaule de Merlin.

« Hé, » Dit-il, d'un ton léger mais dérouté, « ralenti. »

Merlin secoua la tête et se pencha pour un autre baiser. Arthur fut distrait, durant un moment, par l'humidité chaude de la bouche de Merlin et les choses que Merlin, comme ici, faisait avec son corps.

Quand ils s'arrêtèrent pour respirer, il recula, pour s'appuyer contre la tête du lit. « Pourquoi tu fais ça ? »

Merlin releva un sourcil. « Arrêtes de poser autant de questions. »

Arthur pressa ses lèvres ensemble. « Merlin. »

« Je suis toujours la même personne, » répéta Merlin.

« Oui, » dit Arthur. « Mais le journal…tu… »

« Quoi ? » Merlin s'assit sur ses talons, les yeux brillant de colère. « Parceque maintenant tu sais ? »

« Oui ! » Cria Arthur, et puis ils restèrent assis, à se regarder l'un l'autre.

« Et bien, merci, » répondit Merlin de façon sarcastique. Après un moment, il inspira profondément. « J'aimerais que tu t'en ailles maintenant, s'il te plait. »

Arthur ouvrit la bouche par protester, mais si il y avait une chose qu'il avait appris avec ses recherches, c'est que Merlin cachait de la peur derrière son regard. « D'accord, » dit-il, et il se retira, en cherchant ses vêtements pour les remettre.

« Je… » Ajouta-t-il, alors qu'il était près de la porte, en mettant son sac sur son épaule. « Je t'appelle demain. »

Merlin ne le regarda pas, toujours agenouillé sur le lit.

OOO

Il n'appela pas Merlin, mais il lui envoya un court message d'excuse.

Merlin le rappela. « Tu ne peux pas prendre des décisions pour moi, Arthur, » dit-il.

« Je sais. »

Merlin soupira. « Je suis plus que mon passé. »

« Je le sais aussi. Merlin… Je suis désolé, d'accord ? »

« Ouais. »

Arthur attendit, mais rien ne suivi. « C'est ta décision, » dit-il.

« Oui. » Merlin semblait catégorique. « Ma décision. »

« Je peux venir ? » Demanda Arthur.

« Oui, » répondit Merlin.

Et quand il baisa Merlin sur le lit, ce soir là, il ne pensa à rien du tout, sauf au goût de la sueur qui cheminait sur le bas du dos de Merlin, aux muscles qui ondulaient sous sa peau, et au bruit que faisait Merlin quand il jouissait.

OOO

« Tu viendrais chez moi ? » Lui demanda Merlin, en dehors d'un jour de déprime.

Les vacances de pâques approchaient, et Arthur pouvait rentrer chez lui sauf qu'il n'en avait pas envie. Son père lui avait déjà annoncé qu'il avait beaucoup de travail, et Arthur ne se voyait pas étudier et jouer à la WII dans un manoir vide, ni dans son dortoir.

« Quoi ? » Demanda-t-il, pas sûr d'avoir compris.

« Tu viendrais avec moi, chez moi ? » Répéta patiemment Merlin, et il ajouta, « Maman voudrait te rencontrer. »

Il pouvait rentrer chez lui, ou il pouvait passer la semaine avec Merlin. L'idée de passer ces jours sans Merlin dans une maison vide ne l'intéressait pas du tout, et il se retrouva à accepter. « Bien sûr. »

Merlin se pencha par-dessus la table pour l'attirer et lui faire un bisou mouillé.

OOO

Ils prirent le train, et ils passèrent beaucoup de temps à faire des choses débiles, comme reprogrammé la sonnerie du téléphone de l'un et de l'autre, et commenter sous leur souffle ce que les autres passagers pouvaient bien faire.

Les yeux de Merlin étaient brillants, ils se rapprochaient de Cumbria, et quand ils commencèrent à traverser les collines et les lacs, Merlin eut ce doux sourire qu'Arthur voulut simplement embrasser.

Une femme à l'autre bout de l'allée leurs sourit quand ils se séparèrent. Merlin lui sourit en retour.

Arthur se sentit légèrement pris de vertige, et il se demanda quand était la dernière fois où il s'était senti comme ça.

OOO

La mère de Merlin les ramena à la réalité, avec un rapide sourire, prête à les accueillir, ce qui intimida Arthur, déjà rien que pour son côté maternel.

Il l'aimait, il pensait, quand elle lui dit de l'appeler Hunith car personne ne l'avait jamais appelé Madame Emrys et que ça n'allait pas commencer, et Arthur rougit à ça, mais Merlin ne semblait pas s'en soucier.

« Vous avez fait un bon voyage les garçons ?" Demanda-t-elle alors qu'ils sortaient du parking de la gare, en leur jetant un coup d'œil dans le rétroviseur à tous les deux.

« Oui, merci, » répondit poliment Arthur, et Merlin roula les yeux et dit, « C'était bien, maman. Long, comme toujours. »

« Et bien, » répondit-elle, et son sourire et les ridules de ses yeux ressemblaient tellement à celles de son fils qu'Arthur manqua un battement, « tu es celui qui a choisi d'aller vivre très loin. »

Merlin rigola, joyeux et libre.

OOO

Le lundi de Pâque, Arthur se leva tôt car il était génétiquement incapable de faire la grasse matinée. Quand il descendit les escaliers, il trouva Hunith en train de préparer le déjeuner.

« Je peux aider ? » Demanda-t-il.

Elle releva les yeux et sourit, en roulant la pâte à croissant dans le bon sens. « Bonjour, Arthur. Oui, si tu sais comment préparer des œufs ? »

Il sourit. « Bien sûr. »

Ils travaillèrent côte à côte, et elle lui demanda de parler de l'université et de sa famille. Il essaya de répondre sans être trop précis, une habitude tenace qu'il essayait vraiment de faire disparaître. Hunith ne sembla pas s'en soucier. Elle lui demanda comment il avait rencontré Merlin, et il lui raconta, les livres de Merlin tombant hors de son sac pour atterrir sur les orteils d'Arthur.

Elle rigola, et les ridules autour de ses yeux ressemblaient tellement à celles de son fils.

« Tu l'aime, » dit-elle, et son regard se fit plus net.

« Oui, » répondit Arthur, sans devoir trop y réfléchir. « Énormément. »

« Merlin n'a jamais ramené personne à la maison avant, » ajouta-t-elle.

« Je l'avais deviné. »

Hunith passa à côté de lui pour allumer la cuisinière sous les œufs. « Il a mentionné qu'il t'avait raconté. »

Il n'eut pas à demander de quoi elle parlait. « Oui. » Quand il lui jeta un coup d'œil, la peine était inscrite sur son visage. « Hunith, » dit-il, et puis il ne savait plus quoi lui dire. Il n'y avait pas de mot pour la rassurer, et ce n'était pas son devoir. Merlin, le fragile Merlin, dormait à l'étage. Pas fragile comme certains pouvaient l'entendre.

Elle le regarda, avec une expression indéchiffrable, mais affectueuse.

« Il va bien, » dit-il enfin.

« Je sais, » répondit-elle, mais son sourire était faux, triste.

Arthur se dirigea vers elle pour la prendre dans une étreinte rapide. Ils étaient un drôle de duo, réuni par Merlin, qui choisit ce moment pour apparaître dans la cuisine. Le pantalon de pyjama bas sur ses hanches, les cheveux en batailles, le t-shirt chiffonné, il bailla et il s'arrêta quand il les vit ensemble.

« Heu ? » Dit-il très éloquent, et Hunith lui ébouriffa les cheveux. « Salut, maman, » dit-il, la voix rauque du sommeil, et il l'embrassa sur la joue. « Joyeuse pâque. »

« Toi aussi, » répondit sa mère.

Merlin regarda par-dessus elle, pour voir Arthur, qui lui souriait, car juste là, devant lui, se tenait l'homme qu'il aimait, maintenant et toujours. Merlin fit timidement un pas vers lui, et Arthur s'approcha pour le tirer contre lui, sans se soucier de la présence de sa mère. Il fit à Merlin un doux baiser, et il dit, « Bonjour. » Sa voix était irrégulière, et Merlin releva un sourcil.

« Bonjour, » répondit-il légèrement. « Tout va bien ? »

« Tout va bien, » répondit Arthur. « Les œufs sont presque fait. »

« Bien, » dit Merlin, en lui souriant de travers.

Par-dessus l'épaule de Merlin, Arthur croisa le regard de Hunith, tendre et chaleureux, brillant de larmes, mais elle n'avait pas l'air triste du tout.

OOO

Merlin l'emmena à Ullswater, dans l'après midi, en conduisant la voiture de sa mère avec des mains habiles, réfléchies, prudentes, mais avec un sourire pour le village qu'ils sillonnaient.

Arthur le laissa, et quand ils marchèrent le long d'un lac, Merlin donna un coup de pied dans un caillou sur le sol, une écharpe autour du cou contre le froid, et il dit, « j'avais souvent l'habitude de venir ici. »

Arthur hocha la tête, en observant l'étendue presque paisible des ondulations de l'eau.

Merlin lui lança un coup d'œil, avant de laisser son regard glisser sur la surface de l'eau. « Surtout après… Quand la police… » Il soupira. « Quand je… »

« Tu n'es pas obligé de le dire, » se sentit le besoin de dire Arthur.

Merlin s'arrêta au milieu du sentier, pour se retourner vers lui. « Je sais. »

« Pas pour moi, je veux dire, » ajouta-t-il. « Je sais… Et tu n'as pas à parler si tu n'en as pas envie. J'en sais assez. »

Merlin secoua la tête à ça, mais ne dit rien. Il se retourna et il recommença à marcher, enfonçant les mains dans les poches de sa veste. « C'est le genre d'endroit, » dit-il, la voix si basse qu'Arthur du se rapprocher de lui, « où tu peux entendre ton propre cœur. »

Arthur regarda Merlin de côté pour le voir déglutir. Il alla dans la poche droite de Merlin, pour enrouler leurs doigts ensemble. « Oui, » dit-il doucement. « On dirait. »

« J'avais l'habitude de venir ici, » dit Merlin, « quand j'étais fatigué d'en parler. Il y a eu cette période…quand une personne différente voulait que j'en parle chaque jour. Les officiers de police, les avocats, les assistants sociaux… Je voulais juste m'éloigner de tout ça. Je voulais que ça finisse. »

Arthur serra leurs doigts.

Merlin le regarda. « D'une certaine manière, ça ne finira jamais. Ça fera toujours partie de moi. Je pense que j'ai fini par l'accepter, et tu… »

Arthur s'arrêta, et il lui fit face. « Merlin, » dit-il, et il y avait une boule dans sa gorge car il voyait la douleur dans les yeux de Merlin, et il voulait, pas seulement l'éloigner, mais aussi trouver celui qui lui avait fait ça pour le blesser en retour. Il serra encore les doigts de Merlin, et Merlin tourna sa main pour les joindre ensemble. « Je t'aime, » confessa Arthur.

Merlin sourit. Il jeta un coup d'œil au lac à côté d'eux, et puis il revint sur Arthur. « Moi aussi. »

Arthur ne pouvait pas trouver les mots. Il n'avait jamais été bon à ça de toute façon. Il se pencha pour embrasser Merlin, en l'attirant plus près de lui avec leurs mains jointes, toujours à l'abri dans la chaleur des poches de Merlin, et il passa son bras libre autour des épaules de Merlin. L'écharpe de Merlin lui grattait le visage, et Merlin rit près de son oreille. Merlin décala sa tête pour aller dans le creux du cou d'Arthur, et là tout de suite, à ce moment, Arthur tenait le monde dans ses bras.

« Je pense, » dit Merlin, « que nous serons bien. »

Arthur inspira profondément, renfilant l'odeur du shampoing de Merlin et son aftershave, un mélange unique à Merlin, et il appuya sa joue contre les cheveux de Merlin. Il pouvait voir l'avenir, pensa-t-il, leur futur commun, et il pensa, comme Merlin, que c'était possible.

« Ouais, » souffla-t-il dans les cheveux de Merlin. « Ouais, nous serons bien. »

FIN