UA. Le Seigneur des Ténèbres est de retour. L'Angleterre le nie. La communauté sorcière internationale œuvre en silence, pour faire reconnaître la vérité.

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Chapitre 1, ou comment reconnaître une situation désespérée.

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« Tout le malheur des hommes vient de l'espérance » (Albert Camus)

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C'était la nuit. La lune éclairait un manoir sombre et délabré, d'où suintait une atmosphère malveillante. Les hauts murs noirs se dressaient, menaçants, face à un cimetière abandonné. Un de ces cimetières que l'on disait hantés. Les habitants, provinciaux, avaient peur de cette bâtisse, et surtout de ce qui s'y trouvait. Des rumeurs, toutes plus folles les unes que les autres circulaient. Les gens partaient – non pas qu'ils croyaient ces histoires de grand-mères, non, bien sûr, mais ils ne pouvaient pas rester. C'était trop… sombre, trop macabre. Surtout depuis quelques temps. Il y avait eu des meurtres. On en parlait au bar du Pendu. Mais pas trop. On avait peur. Il se passait des choses. Que personne ne pouvait expliquer. C'était… étrange, presque monstrueux. Et on se méfiait du vieux cimetière. Et du manoir à côté. On se méfiait des Jeux du Sort. On se méfiait à Little Hangleton. Il s'y passait des choses bizarres.

Alors on avait peur, à Little Hangleton.

Et les habitants de ce petit village du nord de l'Angleterre avaient raison d'avoir peur. La noirceur avait envahi leurs vies et les vieillards se souvenaient. Ils se souvenaient des respectables Jedusor, ils se souvenaient des étranges Gaunt. Ils se souvenaient, et tremblaient lorsqu'ils repensaient au jeune Jedusor.

Le village se vidait, peu à peu. Les quelques habitants restant apercevaient des silhouettes enveloppées de capes noires sillonner les rues. Silencieusement. Le malaise se renforçait.

Des gamins s'étaient aventurés près de l'immense bâtisse sombre. Deux enfants. L'un avait vu ces silhouettes entrer dans le manoir, il était reparti dès ce moment. En courant, s'enfuyant pour retrouver la sécurité de son foyer, près de ses parents. L'autre gamin l'avait traité de lâche et était resté. Et il avait vu des choses. Et quand on l'avait retrouvé, trois jours plus tard, il tremblait dans une ruelle sombre et humide, ses yeux roulant dans leurs orbites. Il avait été ramené à ses parents. Fou. Il était mort une semaine après avoir observé le Manoir. Des spasmes l'avaient agité toute la nuit, au désespoir de ses parents, qui n'avaient rien pu faire. Ils n'avaient pu que rester impuissants face à l'agonie de leur fils adoré. Ils n'avaient pu que l'entendre délirer. Et plusieurs fois il avait murmuré. « Pas le serpent… non… Pas le serpent… J'n'ai rien fait, j'voulais pas, m'sieur… Rouge… Pas le serpent » Et il finissait en hurlant. Il était mort à l'aube. Ses parents étaient déjà partis au crépuscule. On ne sut jamais, et on ne saura jamais ce qui est arrivé à ce petit garçon.

Mais les ombres noires continuaient à affluer au Jeu du Sort. Ces ombres noires, inquiétantes, qui pénétraient dans le manoir délabré.

Si les villageois avaient su, ils seraient partis en hurlant.

Les hurlements, dans les sous-sols de la bâtisse, on les entendait. Les rires aussi. Des rires cruels et méprisants, des ricanements et des pleurs.

Derrière la haute porte d'entrée obscure, les murs de pierre étaient nus. Le couloir conduisait à une grande salle sombre. Devant l'entrée qui y conduisait, la seule envie que l'on pouvait avoir était celle de s'enfuir. De courir. Loin de cette noirceur. Insoutenable. Comment un seul être pouvait-il supporter et même créer cela ? Et pourtant…

Les silhouettes vêtues de capes noires et de masques d'argents s'approchaient, hésitantes, de l'homme, ou du moins, ce qu'ils désignaient comme un homme, même s'ils savaient que ce n'en était pas un. Que ce n'en était plus un. Ils s'approchaient avec crainte, conscients du danger. Ils le sentaient dans chaque pore de leur peau, ils le ressentaient dans leurs tripes, et avaient envie de vomir, jusqu'à en crever.

C'était une immense pièce, qui avait dû être très luxueuse dans un autre temps. Les murs étaient ornés de portraits immobiles, aux cadres sales et aux représentations morbides. Au milieu de cette pièce se trouvait une longue table de chêne. Au bout de cette table, assis sur un trône noir, trônait celui qui les sorciers avaient appris à craindre sous le nom de Lord Voldemort.

Les quelques sorciers présents s'assirent à la place qui leur avait été assignée avec crainte et appréhension. Les convocations des mangemorts les plus actifs par le Seigneur des Ténèbres étaient rares, et souvent douloureuses. Pourtant, cela semblait être différent cette fois-ci.

Un immense serpent glissait sur la table. Certains ne pouvaient s'empêcher de faire un mouvement de recul alors que ses yeux aussi rouges que ceux de son maître se posaient sur eux. Un gémissement se fit entendre à la droite du Lord. Un mangemort, c'est comme cela que l'on appelait les fidèles du mage noir, jeta un discret coup d'œil. Ce qu'il vit le rendit malade. Mais il le cacha. Il savait bien trop ce qu'il risquait. Il connaissait pourtant le sorcier, ou ce qui en restait, effondré à terre, baignant dans son sang. Funestar. Langue-de-plomb au Département des Mystères. Avait-il parlé ? Certainement. Est-ce que ce qu'il avait avoué avait été utile au Seigneur des Ténèbres ? Non. Il était encore vivant. Le mangemort observa son maître. Ce devait être important.

Lorsque que le mage noir prit la parole, sa voix sifflante résonna dans la vaste pièce. Un murmure froid qui résonna dans la haute salle comme s'il avait été hurlé.

« Mes chers mangemorts » susurra-t-il « Vous vous demandez pourquoi vous êtes ici. » Ce n'était pas une question, et les mangemorts baissèrent la tête. Lord Voldemort ricana. « Sachez que nous avons un invité. » Il s'écarta, dévoilant la masse de chair informe et gémissante. D'un coup de baguette, il le propulsa sur la table, éclaboussant le visage des mangemorts présents. Ils ne portaient pas leurs masques, bien sûr. « Le connaissez-vous ? ».

Le mangemort qui avait reconnu Funestar répondit. « Oui, Monseigneur » Il marqua une pause. « Un Langue-de-plomb, Monseigneur ».

Voldemort se tourna vers celui qui venait de prendre la parole. « Bien, Severus, » le Lord continua. « Et peux-tu me dire, mon fidèle espion, sur quoi travaillait-il ? »

Severus Rogue se tut. Il n'en savait rien, le département des Mystères portait bien son nom. Nul ne sait sur quoi travaillent les Langues-de-plomb. Il remarqua également l'utilisation du passé. Il n'en a plus pour longtemps.

Severus fit rapidement le tour de la table, tous n'étaient pas présents, certains étaient encore à Azkaban. En face de lui, Lucius Malefoy. L'aristocrate arborait un habituel air hautain, mais Severus décelait la peur qu'il cachait bien. Il connaissait Lucius. Ils s'appréciaient mutuellement, à leur manière, bien sûr. Ensuite venait Yaxley, Avery Jr, Macnair, Nott, Selwyn, Alecto et Amycus Carrow. Severus savait que tous avaient échappé à Azkaban et avait une influence importante au Ministère. Et il se doutait que le retour du Lord noir n'était pas un enchantement pour tous.

Voldemort repris la parole. « Une chose, qui m'est précieuse, est cachée au Département des Mystères, » il regarda tour à tour chacun de ses mangemorts. « C'est une prophétie. »

Severus sursauta imperceptiblement. Il savait ce qu'était cette prophétie. Une vague de culpabilité l'envahit. Il la repoussa. Ce n'était pas le moment. Mais si le Seigneur des Ténébres voulait la prophétie, il allait déployer tous les moyens pour l'obtenir. Vide ton esprit, vide ton esprit. Il ne devait pas pénétrer ses pensées, à aucun prix.

« Il me la faut ».

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Le regard écarlate vrillait ses yeux dans les siens. La terreur glaçait ses membres, il se sentit prit dans un étau. Il haletait, il avait du mal à respirer. « Non… ». Il était sans défense. A la merci de celui qui avait voulu le tuer, des années plus tôt. Cette… chose, monstrueuse, qui leva la fine baguette blanche vers lui. A ses pieds, un corps, le corps.

Les larmes lui montèrent aux yeux. C'était sa faute. Les mots lui revinrent. « Tue l'autre ». Seulement ça. Et la lumière émeraude aveuglante. Et ces deux mots, ces deux mots si simples, qui faisaient basculer la vie, sa vie. Le bruit sourd. Sa chute. Le visage figé, les yeux vides, l'air de surprise. Et puis plus rien. Il n'avait rien vu venir. Peut-être pas le temps de souffrir. C'était fini.

Il recroisa un instant les yeux cruels et hurla. Ses os étaient en feu, sa tête allait exploser, des milliers de lames chauffées à blanc épousaient chaque millimètre de son corps. Ses yeux tournaient dans leurs orbites, comme fous… Il voulait que ça s'arrête, que tout s'arrête… Il ne voyait plus de lumière, que les ténèbres… Il avait peur du noir… Mourir…

Le calvaire s'arrêta soudain, comme il avait commencé. Son corps, inerte, ne pouvait plus rester debout. Il s'écroula, à peine conscient des rires moqueurs et du dédain, sentant le regard brillant sur lui. Puis la voix glaciale qui s'adressait à lui. « Affronte-moi comme un homme… Droit et fier, comme est mort ton père ». Une rage sourde s'empara de lui, il n'avait pas le droit. Cette abomination n'avait pas le droit.

Mais il n'avait plus la force. Ils étaient morts par sa faute, tous. Il devait mourir. C'était évident. Et ils riaient. Lui entendait leurs voix. « Tu nous as tué Harry… C'est ta faute… Le monstre c'est toi… ».

Papa… Maman… Cédric… Non…

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Harry se réveilla en hurlant. L'adolescent aux cheveux en bataille et aux yeux verts se redressa brusquement sur son lit, hagard, en sueur, cherchant à savoir où il était. Il se souvint. Un cauchemar. Encore. Comme d'habitude. Il chercha ses lunettes sur la table de chevet et les enfila. Il espéra que les Dursley ne l'avaient pas entendu. Espoir vain. Il vit la lumière sous la porte et entendit la démarche lourde de son oncle. Celui-ci ouvrit brusquement la porte. Il s'épongea machinalement le front, en frottant sa célèbre cicatrice.

« Qu'est-ce que tu as encore, toi ! », siffla-t-il. Le ton méprisant rappela à Harry son cauchemar. Non, pas un cauchemar, la réalité. La triste réalité. Il garda les yeux baissés, il n'affronterait pas le mépris de son oncle. Pas aujourd'hui. Pas encore. C'était trop dur. Il avait conscience du regard suspicieux de son oncle sur lui.

« Rien, oncle Vernon, juste un… cauchemar… » Souffla doucement Harry. Il prit conscience que sa réponse lui apporterait certainement des ennuis. Il n'eut pas tort. Il sentit son oncle se rapprocher dangereusement. Il ferma les yeux un instant. Il aurait dû se taire, vraiment.

« Tu as fait un cauchemar ? » La voix de Vernon Dursley se fit menaçante. « Et c'est pour cela que tu hurles ! Les gens de ton espèce ne sont que des bons à rien, comme tes parents ! » Harry leva les yeux vers son oncle et se pétrifia. Le dédain de l'homme lui rappela à quel point il était coupable. C'était sa faute si Cédric était mort, sa faute si ses parents étaient morts, sa faute si Voldemort était de retour.

Il surprit pourtant un éclair de crainte sur le visage de son oncle. Il eut alors une idée. Typiquement serpentarde… Il chassa cette pensée de son esprit. Ce n'était pas le moment.

« En fait, oncle Vernon, je me suis réveillé en sursaut, car je pensais que j'avais de la visite… » Vernon ouvrit la bouche, certainement pour lui demander qui se soucierait de lui, mais Harry ne lui en laissa pas le temps. « Tu te souviens, oncle Vernon, les professeurs Lupin et Hagrid, le loup garou et le géant… » A ces mots, le visage de Dursley exprima sa fureur. Les poings serrés, le souffle rauque, Harry pensa qu'il allait finir par exploser tellement son visage était rouge.

« Toi, espèce de sale… Ils n'ont pas le droit de venir ici, les gens comme toi ne peuvent pas… » Le regard goguenard de Harry le stoppa. Vernon Dursley ne se souvenait que trop bien de l'arrivée des sorc… de ces gens, par sa cheminée. Il décida de s'éloigner de son neveu non sans avoir lancé au passage, d'un air mauvais, « N'oublie pas tes corvées demain ! ».

Une fois la porte fermée, ou plutôt claquée, Harry soupira. Il décida de se lever. Il ne se rendormirait pas. C'était certain. Il se dirigea vers sa malle, et prit les derniers exemplaires de la Gazette du Sorcier. Il les avait déjà lus et relus dans tous les sens. Mais rien. Le monde sorcier semblait délibérément vouloir ignorer le retour du plus grand mage noir de tous les temps. Harry savait ce qu'il passait, ils le traitaient de menteur. Lui et Dumbledore. Dumbledore… le directeur de Poudlard ! Harry se demanda combien de temps de plus il allait rester sans rien faire, à supporter sa chère famille et les accusations du ministre. Il allait vraiment finir par écrire à la Gazette pour leur affirmer le retour de Voldemort. Il soupira de nouveau. Non, pas la bonne solution. Pas du tout.

Il pesta contre Dumbledore, qui voulait sa protection. Pourquoi devait-il rester chez les Dursley ! Pourquoi n'aurait-il pas pu aller avec Remus ou les Weasley ! Ils étaient plus que capables de le protéger ! Mais non, Dumbledore avait refusé.

Il l'entendait encore d'ici, « Harry, comprend-moi mon enfant, c'est pour ton bien ». Bien sûr, c'était pour son bien qu'il devait rester cloitré chez les Dursley. Il se laissa tomber sur son lit et laissa son regard errer sur le plafond immaculé. Bizarrement, il lui rappela celui de l'infirmerie. Harry eu un léger sourire, l'infirmerie… Pomfresh n'en pouvait plus de l'y voir ! Il rit doucement, puis son rire se bloqua dans sa gorge. L'infirmerie… Cédric…

Il eut l'impression d'un trou béant dans sa poitrine. Il sentit les larmes lui monter aux yeux. Il se refusait à pleurer. Ca ne servirait à rien. C'était lui qui était porteur de mort. Il se leva enfin. Quelle heure était-il ? Le soleil ne s'était pas encore levé. Il haussa les épaules. Il pouvait commencer les corvées des Dursley, ou bien commencer ses devoirs de vacances.

Harry tira sa malle d'en dessous son lit et y chercha plume et parchemins. Son regard se porta sur la cape. La cape d'invisibilité. La cape de son père. En dessous, l'album que Hagrid lui avait offert, lors de sa première année. Il le prit délicatement dans ses mains, comme s'il s'agissait d'un objet fragile, il feuilleta un moment les pages, et effleura du doigt les photos jaunies où ses parents lui faisaient des signes de la main et lui souriaient. Son cœur se serra. Jamais il ne connaîtra ses parents, jamais il n'aura de famille… Jamais. Au fur et à mesure des pages tournées, sa culpabilité enflait puis soudain, il s'arrêta sur une photo. Une photo qui paraissait bien innocente, qui transparaissait le bonheur et la joie de vivre. Et pourtant, pour Harry, cette photo n'était que mensonges et trahison.

Il sentit la rage l'envahir, et ne fit rien pour la contrôler. Son corps tremblait. Ses yeux se voilèrent. Il aurait voulu hurler sa colère et sa détresse. Il aurait voulu… Peut-être même qu'il aurait voulu revenir au moment où cette maudite photo avait été prise, où tout semblait aller pour le mieux… Il aurait voulu les prévenir, leur dire de ne pas…

Il laissa tomber l'album. Harry s'effondra, et pour la première fois depuis un mois et demi, il pleura, il pleura Cédric. Il pleura ses parents, il pleura sur son destin qui l'avait lié à Voldemort, il laissa s'échapper sa peine et son ressentiment, laissant couler ses larmes en silence. Enserré dans sa peine, sans espoir, ne trouvant que les ténèbres autour de lui. Il finit par se laisser glisser au sol, immobile, la respiration lourde, vidé, comme s'il n'avait plus rien en lui. Comme si sa douleur était partie, ne lui laissant plus rien pour avancer.

Et là, à quelques dizaines de centimètre, l'album était resté à la même page. Cette photo qui lui montrait la mort des siens. Cette photo où ses parents rayonnants de bonheur riaient. Cette photo où l'homme semblait lui adresser un rictus moqueur, le défiant par-delà le temps, le narguant. Cette photo où le mangemort qui avait trahit ses parents plaisantait avec eux, partageait leur joie.

Cette photo qui représentait Sirius Black.

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Il faisait noir. Ce n'était pas la nuit pourtant. Pas exactement. Mais ici, seuls les ténèbres régnaient. Les hauts murs noirs paraissaient délabrés, couvert d'une substance malsaine, mais on ne distinguait que quelques ouvertures. A l'intérieur, l'obscurité était plus intense encore.

Des ombres tournoyaient sans cesse autour de cette bâtisse d'un autre monde. Un monde d'horreur et de désespoir. Elles étaient fines ces ombres, elles flottaient, recouvertes de capes noires qui dansaient autour d'elles dans un ballet dont l'on ne percevait pas la musique.

Jusqu'à ce que l'on s'en approche.

Folie, douleur, désespoir, mort… mort… Ce n'était que cela. S'approcher de ces créatures plongeait notre corps et notre esprit dans un abyme de souffrances. La pire damnation possible. Etre à jamais condamné à revivre vos pires souvenirs. Encore et encore. Jusqu'à ce qu'il ne vous reste plus rien à vous raccrocher. Jusqu'à ce que vous basculiez. Tout simplement.

C'était ça, Azkaban. Et ses terribles gardiens. Les détraqueurs.

Ces gardiens qui vous réservaient un sort encore pire que la mort. Ils aspirent, ils dévorent l'âme. Dévorant avec eux toute chance de salut, emportant dans leur souffle l'essence d'un être humain, comme s'il n'avait jamais existé. Comme si… comme s'il n'y avait plus rien. Plus qu'un corps. Une coquille vide.

En s'approchant encore, on commençait à entendre des gémissements. Qui vous tordaient le ventre. Puis des cris. Et des hurlements qui vous glacent le sang. Empreints d'une folie pure, immaîtrisable. Une folie qui donnait envie de vomir tripes et boyaux, de pleurer et de s'enfuir en courant. Loin d'une réalité dont personne ne voulait avoir conscience. Loin des sorciers les plus dangereux du monde. Loin de l'Horreur.

Car à l'intérieur de ces murs, de dévoilait un Autre Monde. Si dur, si cruel, si abominable, que personne ne peut imaginer. Hormis les condamnés. Ceux pour qui le monde ne se résumait plus qu'au mot « douleur ». Plus qu'à la peur, plus qu'au néant.

Et plus l'on gravissait cette tour de malheur, plus on les entendait. Des corps décharnés se battaient contre les barreaux, dans le vain espoir de briser ce qui les arrachaient à la liberté. Et d'autres qui se terraient dans leur cellule, ramassés sur eux même, à l'aguets, comme des bêtes sauvages. Les yeux fous, enfoncés dans leurs orbites, les joues creuses. Le corps sale et squelettique, les habits déchirés. Les ongles longs, sales qui griffaient la pierre dure, écorchant leurs mains, sans que les condamnés ne s'en rendent compte, perdus dans les méandres de leurs maux.

La déchéance de l'humanité. Pure et simple.

Plus l'on avançait, plus le désespoir envahissait chaque membre, chaque pore de notre être, comme une crasse tenace et malsaine. Les détraqueurs s'agglutinaient autour d'une cellule, délaissant les autres. Ces sorciers fous, hurlant à la mort, où ces sorciers vidés et épuisés par une lutte perdue d'avance.

Bizarrement, un silence de plomb régnait, un silence tendu. Où les bourreaux délaissaient leurs habituelles victimes pour s'attaquer à la plus coriace. Celle qui résistait. Encore et encore.

Après quinze ans passés en compagnie des détraqueurs, Sirius Black était toujours vivant. Bien sûr, tous les prisonniers sont physiquement en vie mais mentalement, ils sont détruits au bout de quelques années, trois ans, pas plus.

Mais pourtant, il y avait une exception.

Depuis quinze ans, les détraqueurs s'acharnaient, déployaient toute leur puissance sur un homme, Sirius Orion Black. Supposé mangemort et traitre qui s'était rendu coupable de la mort des Potter, James et Lily, ses soi-disant meilleurs amis.

Et Sirius Black souriait. Et c'est pour cela que le Ministre de la Magie, Cornélius Fudge, lors de sa visite à Azkaban, deux ans plus tôt, avait pris Black pour un fou de plus, il souriait. Fudge n'avait rien vu d'autre que son sourire. Il avait vu tellement de corps décharnés pour faire plus attention à ce détenu qu'aux autres. Mais s'il s'était attardé, tout aurait été différent.

Sirius luttait, continuellement. Et particulièrement dans ces moments où les détraqueurs l'assaillaient. Il avait l'habitude d'utiliser sa forme animagus, un chien, prenant la forme supposé du Sinistros, porteur de mort. Quelle ironie… Sa forme animagus dupait les détraqueurs. Ceux-ci ne voyaient pas et n'entendaient pas. Ils ne pouvaient qu'utiliser leur perception, pour s'attaquer au bonheur. Et aujourd'hui, Sirius était particulièrement heureux. Il savait qu'il allait le payer. Cher. Mais il n'y pouvait rien.

Il aurait voulu être là pour lui souhaiter. C'était son anniversaire. Il aurait tant voulu être présent pour lui dire… Lui dire quoi ? Il ne savait pas. S'il n'avait pas été à Azkaban, ces dernières années auraient à coup sûr été bien différentes et tellement plus heureuses. C'était évident. Il savait que tout allait bien, il le sentait. Son instinct ne le trompait pas, pas sur sa vie. Il savait. Et c'est tout ce qui importait. Ce n'était que quinze ans. Il avait encore toute une vie. Il pourrait en profiter. Il en était sûr. Il n'avait pas trahi ses amis.

Les rumeurs circulaient vite, et il suffisait de voir le comportement d'autres détenus pour savoir que le Seigneur des Ténèbres était de retour. Et s'Il était de retour, eh bien, le rat devrait sortir de son terrier. Et là… sa liberté lui serait acquise.

Il leva les yeux et frissonna de dégout face à ces ombres avides qui rejetaient le désespoir de monde sur lui. C'était du moins son impression. Il lui fallait espérer. L'espoir… Les détraqueurs adoraient s'en repaître.

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