Prologue : La fille dans la cheminée.
S.S. Madame de Pompadour LIème siècle de l'ère chrétienne humaine.
« La France, c'est une planète différente… »
Une planète qu'il aimait visiter pourtant mais la France de la Révolution était sa France favorite, celle de Madame de Pompadour, il la découvrait encore. Et il l'aurait beaucoup apprécié si la vie-même de la maitresse du roi de France n'avait pas été en danger. Et pourquoi ? Parce que ces mécaniciens d'un vaisseau du LIème siècle croyaient que seul son cerveau pouvait réparer leur vaisseau ? Que cherchaient-ils donc en scannant son cerveau ?
Reinette lui ouvrait son esprit, et il voyait tout ce qu'il avait représenté pour elle depuis son enfance, depuis ses sept ans. Elle n'essayait même pas de le lui cacher. Elle voulait qu'il le voie. Et elle sentait que le Docteur entrait dans sa tête. C'était son âge qu'ils voulaient savoir, comprit vite le Docteur. Mais quelque chose de plus étrange encore le déboussola : Jeanne-Antoinette Poisson venait de lui parler de son enfance solitaire, de l'enfance solitaire d'un petit garçon et non pas d'une petite fille… Et elle l'avait appelé « Docteur ».
Il ne lui avait jamais donné son nom. Et ni Rose, ni Mickey ne l'avaient appelé « Docteur » devant la maitresse de Louis XV. Et voilà que Madame de Pompadour le nommait par son titre et lisait dans son esprit.
« Une porte une fois ouverte peut être traversée dans plusieurs directions Ô Docteur, mon si solitaire Docteur, danse avec moi. »
C'était presque un ordre… Et il voulait lui dire non, il lui disait non. Mais elle répéta sa requête alors que le Docteur lui rappelait qu'il s'agissait de la nuit où elle devait « danser » avec le Roi de France. Mais elle avait lu plus que son enfance solitaire sur Gallifrey dans son esprit. Elle avait vu ce que son nom signifiait, que c'était plus qu'un secret. Et voilà qu'elle lui disait qu'il arrivait un temps où tout petit garçon solitaire doit apprendre à danser.
Que pouvait-il dire à présent que la main de Reinette s'était emparée de la sienne et l'emportait déjà vers la salle de bal de Versailles ? Apprendre à danser… Il n'avait pas le temps pour ça, pas maintenant. Pas alors que Rose et Mickey l'attendaient. Mais il était fasciné par Reinette Poisson depuis qu'elle l'avait embrassé et il faisait partie de sa vie depuis plus longtemps encore, depuis l'instant où son visage lui était apparu derrière le feu d'une cheminée…
(…)
Ce n'était pas le premier bal où il dansait contrairement à ce qu'avait dû penser Reinette. Mais jamais encore il n'avait eu l'occasion de se rendre à Versailles au temps du siècle des Lumières. Et si l'art et la science domineraient bien la Cour sous l'impulsion future de la Pompadour, dont il était pour l'instant le cavalier, les seules lumières qu'il voyait à présent étaient celles des chandeliers qui illuminaient la Galerie des Glaces. La cour de France était encore celle, festive, de Louis XIV, l'arrière-grand-père du roi actuel de France.
Le vin coulait aussi à flot. Et la musique entrainait les restes de conscience. Le roi posa immédiatement les yeux sur sa cavalière. Ils s'éloignèrent et le Docteur sentit que l'Histoire reprenait son cours, sans lui. Il regarda de loin le reste de la fête, muet devant la grâce de la future Madame de Pompadour, et inconsciemment jaloux du roi de France.
Il but plusieurs verres de vin et trouva le goût du raisin peu habile à contenter son palet. Heureusement qu'il avait des bananes dans la poche de son pantalon. Après s'être confectionné un banana daiquiri, qu'il se rendit compte plus tard avoir inventé plusieurs siècles trop tôt et qui devint rapidement l'attraction de la fête, et alors que les bonnes vitamines de son fruit favori lui montaient à l'esprit, il regarda un verre de vin qu'il avait laissé à côté de lui, le remua légèrement alors qu'une idée de génie lui venait. Bien plus simple et amusant pour berner ces horloges qu'un canon-extincteur de vaisseau spatial, non ?
(…)
Le déguisement d'un homme saoul et donc inoffensif était parfait pour approcher de ces robots d'horlogerie. Un bandana dans les cheveux et un verre de « vin » à la main, il sortit du TARDIS à la recherche de ses compagnons. Rose allait sûrement le traiter de fou en le voyant ainsi vêtu, mais elle en rirait sûrement ensuite. Et Mickey… Eh bien, Mickey le traiterait de fou également et peut-être qu'il aurait peur et ne voudrait pas continuer de voyager avec eux ?
De toute façon, il avait d'abord pour but d'arrêter ces horloges parlantes avant qu'il n'enlève à Madame de Pompadour son précieux cerveau. Et il devait reconnaitre que c'était bel et bien celui d'un génie. Mais où donc étaient Rose et Mickey ? Et Arthur ?
(…)
Quelques hennissements plus tard, le Docteur reconnut son nouveau compagnon qui se remit à le suivre comme s'il était sa mère. Mais le Docteur ne se retourna pas pour l'arrêter Il marmonna seulement que Rose aurait au moins pu le surveiller même si elle ne voulait pas qu'il le garde plus tard, dans le TARDIS. Mais non, elle avait disparue avec son petit-ami. Disparue… Mais peut-être pas de gré, se dit le Seigneur du Temps. Il avait bien envoyé les deux humains à la poursuite des automates ! Qu'avait-il bien pu leur arriver pendant qu'il dansait ?
(…)
Il les avait trouvés. Les automates étaient encore là, déjà stoppées. Mais il n'y fit pas attention. Les deux sièges étaient inclinés et épousaient encore les corps humains de Rose Tyler et Mickey Smith. Mais hormis cette empreinte, seuls les lambeaux de leurs habits et quelques mèches de cheveux témoignaient de leur précédente présence.
Il était arrivé trop tard… Il avait suivi Reinette au bal et avait perdu la seule femme avec qui il aurait voulu s'y rendre jamais. Il avait perdu deux compagnons en une fraction de seconde et il avait perdu Madame de Pompadour en même temps. Même s'il lui sauvait la vie – et il le ferait quoi qu'il en coûte, au moins pour leur mémoire,- s'il ne devait pas revenir, il n'avait aucune raison de le regretter.
Le Seigneur du Temps solitaire s'approcha des vestiges du t-shirt moulant de la jeune femme et les prit entre ses mains. Ils étaient encore chauds et sentaient son odeur, pas celle d'un barbecue, mais bien celle de son parfum. Un parfum qu'il ne retrouverait jamais, un parfum qui persisterait pourtant dans toutes les pièces, ou presque, du TARDIS et qui le hanterait. Les larmes lui montaient aux yeux alors qu'il rangeait les précieux lambeaux dans sa poche et que toute sa tristesse née de ce désolant spectacle se muait en une haine incontrôlable. Des cris attirèrent son attention et il siffla pour attirer son fidèle Arthur.
Quelques minutes plus tard, il avait sauté à travers un miroir en se jurant de venger celle qui l'avait bien trop souvent sauvé. Un cri de rage et il avait traversé.
