Voici une nouvelle histoire différente; je n'ai pas pu attendre de terminer celle en cours car j'avais ces idées en tête et il fallait que je les écrive. Je m'inspire des personnages de la série, mais je prends aussi plus de liberté... J'espère que vous ne serez pas déçus.

Elle courait depuis maintenant presque une heure. Ses poumons commençaient à la brûler douloureusement et son souffle devenait de plus en plus saccadé. Elle décida de ralentir peu à peu son allure, afin de calmer son pouls qu'elle sentait résonner dans tout son corps. Elle finit par se mettre à marcher, son cœur retrouvant progressivement son rythme normal et s'arrêta pour boire une longue gorgée de la bouteille qu'elle avait accrochée à la ceinture. Tout en continuant de marcher, elle inspirait de grandes bouffées d'air, laissant ses poumons se renouveler en oxygène. Elle prit le temps d'observer et d'admirer le paysage autour d'elle : elle appréciait le calme de la forêt , que seul le gazouillis des oiseaux venait troubler, et aimait cette odeur si particulière de la terre mouillée après la pluie.

Son débardeur et son short plaquaient sur sa peau trempée de sueur et des mèches humides avaient réussi à s'échapper de sa queue de cheval. Elle avisa un petit banc près d'un arbre et s'y assit, puis entreprit de se rafraîchir en s'aspergeant d'eau. Son corps tout entier semblait lui reprocher l'effort intense qu'elle venait de lui infliger et force était de constater que l'absence d'activité physique de ces derniers mois se faisait cruellement ressentir.

Six mois...Six longs mois, qui lui avaient semblé une éternité. Six longs mois sans être libre de faire ce qu'elle aurait du faire...Six longs mois enfermée pour rien...Pour un acte qu'elle, Julia Ogden, n'avait pas commis. Cette douloureuse pensée raviva ses souvenirs et son cœur se serra, tout autant de tristesse que de rage. NON, elle ne craquerait pas. Pas maintenant. Il n'était pas question de flancher alors que tout cela était derrière elle. Elle avait été élevée de cette façon ,d'ailleurs, et avait connu d'autres coups durs dans sa vie. Alors, même si l'année écoulée avait en tout point été éprouvante, que les cauchemars n'avaient toujours pas fini de hanter ses nuits, elle savait qu'elle parviendrait une nouvelle fois à surmonter cette épreuve. Elle devait repartir de zéro, elle n'avait pas d'autre choix. Il fallait qu'elle tire un trait sur son passé, ici, dans l'anonymat de cette ville de Toronto, où personne ne la connaissait et n'aurait eu vent de son histoire.

Prenant une grande inspiration, elle savoura ces instants de liberté retrouvée et de sa nouvelle vie qui pouvait enfin commencer, puis retourna à sa voiture garée en contrebas du sentier.


- Inspecteur !

Le jeune officier de police pénétra dans le bureau de son supérieur et le trouva occupé à éplucher un rapport concernant une enquête en cours. L'endroit où il travaillait disparaissait sous une montagne de documents et à la vue de tout ce fouillis, il se dit que cette pièce toute entière aurait bien besoin d'un grand nettoyage.

- Oui, George, répondit le jeune homme en levant son nez vers lui.

- Nous avons du nouveau : les résultats sont revenus du labo et c'est confirmé, les traces d'ADN relevés sur le corps de la victime et la scène de crime concordent avec l'ADN du suspect.

- Parfait, cela devrait permettre de confondre notre individu, alors. Nous pourrons en informer le juge qui pourra lancer la procédure d'inculpation. Très bien, merci George.

Il regarda son collègue sortir et sourit intérieurement : depuis que le nouveau médecin légiste avait pris ses fonctions, George ne répugnait plus à se rendre à la morgue et semblait totalement tombé sous le charme de cette nouvelle et agréable jeune femme.

L'inspecteur William Murdoch était l'un des plus brillants de la ville de Toronto et nombreux étaient les chefs de districts qui auraient souhaité l'avoir dans leur équipe. Il travaillait depuis plusieurs années dans ce poste et avait ses preuves au cours de nombreuses affaires, dont certaines avaient été délicates. Son flair était devenu quasi légendaire et son intuition le conduisait la plupart du temps au coupable. Le capitaine Thomas Brackenreid, qui le connaissait depuis ses débuts, avait une confiance absolue en lui : il savait que William était un enquêteur hors pair et n'avait pas son pareil pour déjouer les évidences et traquer les dangereux criminels. Là où d'autres se seraient arrêtés aux évidences, lui savait que la plupart du temps la vérité était bien plus perfide, et qu'il fallait toujours s'attacher au moindre indice, même s'il semblait être sans importance.

Outre son indéniable talent, William était également bel homme et son charme ne laissait personne insensible. Il faisait tourner la tête de la plupart des femmes, mais s'il avait eu quelques aventures par le passé, aucune de ces femmes n'avaient su comment conquérir son cœur. Son supérieur, qui était devenu son ami au fil de ces années, aimait le taquiner de temps en temps :

« Bon sang, Murdoch, quand est-ce-que vous allez vous décider à enfin sauter le pas ? s'amusait-il. Avec toutes ces femmes qui vous tournent autour, ne me dites pas qu'il n'y en a pas une qui ne vous a pas tapé dans l'oeil ! » ricanait-il. « Attendez que l'une d'entre elles finisse par vous mettre le grappin dessus ! Vous verrez ! » continuait-il en lui mettant des coups de coude.

William préférait ignorer à ces gentilles moqueries et se contentait de sourire, car il savait que derrière son côté rustre, son chef n'en avait pas moins un grand cœur et souhaitait réellement son bonheur. Et si William plaisantait volontiers avec ses collègues à propos de son célibat, il n'était pas rare de voir une lueur de tristesse traverser furtivement ses grands yeux sombres, tristesse qu'il se dépêchait de faire disparaître au plus profond de lui-même.


Il était presque minuit et Julia tournait en rond dans son petit appartement du centre ville de Toronto. L'atmosphère était étouffante et elle n'avait pas de climatisation, seul un petit ventilateur essayait tant bien que mal de rafraîchir l'air ambiant. N'y tenant plus, elle sortit sur son balcon d'où elle surplombait la ville, admirant toutes ces petites lumières qui brillaient au loin.

Elle avait été une grande psychiatre de renom et elle avait aidé par le passé les forces de police à résoudre de nombreuses affaires criminelles grâce à l'analyse de suspects, dont elle savait si bien percer les secrets de l'esprit dérangé...Et pourtant... elle ne s'était pas assez méfié de cet individu, dont la vengeance s'était révélée terrible et avait bien failli la détruire complètement.

La ville de Buffalo avait été ébranlée un an auparavant par une sordide affaire de meurtre : le docteur Ogden, éminent psychiatre qui collaborait très souvent avec le FBI, s'était retrouvée bien malgré elle au centre de celle-ci, accusée du meurtre de son mari, le réputé neuro-chirurgien Darcy Garland. Elle se souvenait encore de ce soir de juillet où elle était rentrée chez elle après une longue journée de travail : la cour de leur grande demeure était envahie par les voitures de police et l'ambulance dont les lumières bleues clignotaient l'avait aussitôt mise en alerte. Il ne lui avait pas fallu plus d'une minute pour descendre de sa voiture et se précipiter à l'intérieur, malgré les protestations des officiers chargé de boucler le périmètre. Elle ne pourrait jamais oublier ce qu'elle avait vu ce soir-là : son mari gisait dans une mare de sang qui s'étendait de sa tête jusqu'à son dos, tué par une balle tirée à bout portant. Elle s'était précipitée vers ce corps sans vie, sans réfléchir, avant qu'un policier ne l'a retienne juste à temps. Voilà la dernière image qui lui resterait de l'homme qu'elle avait aimé...

Tout s'était ensuite très vite enchaîné : les rumeurs d'un mariage qui battait de l'aile, les soupçons qui s'étaient rapidement portés sur elle, l'arme du crime retrouvée dissimulée et portant une empreinte de son pouce...

Elle était rapidement devenue la coupable idéale avec un mobile et un alibi impossible à confirmer, puisqu'elle avait passé sa journée à travailler seule dans son bureau et n'avait vu personne qui puisse venir appuyer ses propos.

L'inspecteur chargé de l'enquête, un jeune novice dont c'était la première « grosse » affaire, avait tiré des conclusions hâtives au vu de toutes ces preuves accablantes, et il n'en avait pas fallu plus pour que l'audience préliminaire soit vite expédiée et que Julia se retrouve enfermée dans une cellule à attendre un procès qui semblait jouer d'avance, anéantie par l'ampleur des événements. Non seulement il lui avait fallu supporter le choc de la mort brutale de Darcy, mais elle avait du également subir tout le battage médiatique que l'affaire avait suscité auprès d'un public avide de telles histoires. Il y avait ceux pour qui la culpabilité de Julia ne faisait aucun doute, et ceux pour qui elle n'était que la malheureuse victime d'une effroyable machination...