Fandom : A Song of Ice and Fire / Game of Thrones.
Disclaimer : Les personnages ne m'appartiennent pas, ils sont la propriété de G. R. R. Martin.
Pairing : Jon Snow/Ygritte principalement, Samwell Tarly/Gilly.
Rating : T, principalement pour les mentions de transphobie et de grossophobie.
Genre : Romance/Mistery, Modern!AU, Jon est une personne trans.
Note : Après La Belle et la Bête je m'attaque à un nouveau Modern!AU dans l'univers d'ASOIAF/GOT. Cette fois-ci Jon est le personnage principal. Pourquoi avoir fait de lui une personne trans ? Sa situation de bâtard n'est pas directement transposable dans notre monde moderne. J'ai donc choisi d'en faire une personne transgenre ( il est moqué pour qui il est, il doit faire deux fois plus d'efforts que d'autres personnes pour s'intégrer, se battre même pour être considéré à sa juste valeur, même tout simplement respecté ). Ça m'a semblé d'autant plus approprié en sachant qu'à plusieurs reprises Jon est moqué pour son visage féminin ( comme s'il pouvait être pris pour une fille alors qu'il est un garçon ).
L'histoire a pour but de mettre en scène la relation Jon/Ygritte ainsi que la recherche des origines de Jon. Dans sa quête il sera aidé par Sam, Ygritte et Aemon Targaryen. Le Mur, la Garde de Nuit et les Sauvageons ont leur place dans l'histoire. Il devrait y avoir huit/neuf chapitres. Bonne lecture !
Hors-norme
ou
Comment Jon a rencontré son meilleur ami
À sa naissance, son père l'avait appelé Lyanna : Jon ne pourra jamais s'y faire.
Il lui avait demandé, vers ses huit ou neuf ans – à peu près à la même époque où il avait commencé à refuser de porter des robes, parce que selon Robb et Theon, ça faisait trop « fille » –, quel prénom il aurait choisi pour un garçon. Son père, Ned, avait prénommé son fils aîné d'après son meilleur ami, Robert. Il aurait donc opté en toute simplicité pour celui de son père d'adoption, Jon. À partir de ce jour-là, le deuxième fils de Ned Stark ne répondit plus que par ce nom.
Catelyn avait bien essayé de protester en lui demandant de cesser ses enfantillages, mais après quelques tentatives vaines – durant lesquelles Jon s'était contenté d'ignorer sa belle-mère – et l'aide de son père, il s'était fait accepter comme tel au sein de sa famille. Robb et Theon – le meilleur ami son frère aîné, pour qui les Stark avaient servi de famille d'accueil pendant un temps – s'étaient même gentiment moqués de lui en lui disant qu'il était temps qu'il se décide parce que « Lyanna, c'est vraiment trop bizarre pour un garçon ».
Au lycée, il était du genre solitaire, surtout en classe quand il ne pouvait pas rester avec Robb. Il se cachait au fond de la classe, derrière ses longues boucles brunes, ses t-shirts trop grands et ses livres de cours. Il n'avait pas vraiment d'amis, hormis ceux de Robb, et s'en contentait à peu près bien. Après les cours, il s'adonnait à ses deux activités favorites : le handball pour se défouler et la guitare pour se détendre. À vrai dire, ce n'est que lors d'un de ces entraînements de handball qu'il rencontra le seul véritable ami qu'il ait jamais eu – si on omettait son frère et Theon.
Un garçon, si gras qu'il débordait de son maillot, trébucha jusqu'au bord du terrain. L'arbitre siffla l'arrêt du jeu et l'entraîneur Thorne, un sale type grisonnant qui avait été joueur dans l'équipe national de Westeros avant de se blesser au genou et de voir sa carrière s'envoler, traîna au milieu du terrain le nouvel arrivant.
« Tarly arrive d'un coin perdu dans le Bief. Son père me l'a confié pour que j'en fasse un vrai mec. Comme je sais pas trop ce qu'il vaut, on va le mettre au but et vous allez tour à tour passer pour me faire vos plus beaux tirs. »
Tous les joueurs créèrent une fil devant la zone du goal tandis que ledit Tarly se plaçait entre les deux poteaux. Il se tenait droit comme un piquet sur ses deux énormes jambes qui le soutenaient tant bien que mal. Sa poitrine se soulevait de manière frénétique. Il paraissait nerveux et même mal à l'aise. Jon se demanda un instant s'il avait déjà pratiqué ce sport.
Après le premier tir, il comprit que ce n'était probablement pas le cas. Le joueur qui tira, un loubard que Jon abhorrait autant pour son comportement que pour sa personnalité, envoya un boulet de canon dans le filet. Tarly s'écarta et se replia sur lui-même pour éviter la balle. C'était mal parti.
Une fois la balle renvoyée maladroitement par le nouveau goal, les autres joueurs enchaînèrent les tirs sous les ordres que leur hurlait Thorne.
« Plus fort, il va pas se briser ! Bordel, Tarly, touche la balle au moins une fois. Au pire, si tu te la prends dans le bide, tu vas pas sentir grand-chose ! Bouge un peu ton gros cul ! Du nerf les gars ! »
Jon détestait Thorne. Il avait failli ne jamais faire partie de l'équipe à cause de lui parce qu'il ne voulait pas de fillette parmi ses joueurs. Pour se moquer de lui, il l'avait surnommé Miss Stark et n'employait jamais le bon pronom. Jon fulminait à chaque fois, mais il se reprenait. Thorne faisait tout pour lui donner l'envie de partir, mais Jon aimait trop ce sport pour laissait tomber à cause d'un crétin. Après tout, la plupart des autres joueurs l'appréciait à sa juste valeur et il était connu comme l'un des meilleurs atouts de l'équipe.
Il était le souffre-douleur de Thorne, mais avec l'arrivée de Tarly, les choses semblaient être sur le point de changer.
Ça enrageait encore plus Jon. Il savait encaisser, lui, contrairement au nouvel élève. Tarly palissait à mesure que les balles le frôlaient. Il se mettait même à couiner, devenant complètement pathétique. Les joueurs finirent par se prendre au jeu de Thorne en reprenant ses paroles.
« Du nerf gros lard ! »
« Eh, la baleine, y a pas de plage ici, tu vas pas t'échouer ! Mais si tu fais pas attention, tu vas finir dans le filet ! »
« C'est à cause de ses pieds de porc, entraîneur ! Il peut pas tenir un ballon ! »
Seuls Grenn et Pyp restèrent muets. Ils se tenaient tous les deux devant Jon. Pyp murmura :
« Thorne y va vraiment fort. Ça s'voit, ce gars n'a jamais touché une balle de sa vie.
- Il ne peut pas s'en empêcher. Il faut toujours qu'ils rabaissent les autres, grommela Jon. Tu devrais y aller doucement, Grenn. »
Le grand gaillard qui le dépassait de presque deux têtes, costaud comme un bœuf, qui était sur le point de tirer, hocha de la tête. Un peu brute et quelques fois brouillons, il n'en était pas moins un des meilleurs tireurs de l'équipe. Il pouvait tirer des balles si fort qu'il avait un jour réussi à déchirer un filet.
Grenn lança la balle en plein sur Tarly qui la rattrapa.
Thorne se mit à hurler :
« C'était quoi ce truc ?! Tu me refais ton tir et sérieusement cette fois-ci ! T'es pas venu là pour jouer aux billes ! »
Grenn récupéra le ballon lancé par un goal devenu livide. Il se retourna vers Jon et Pyp, avec un air triste dans ses yeux de bœuf. Il n'avait rien d'un mauvais gars. Il avait beau être imposant, il était plutôt du genre à éviter la bagarre – et les insultes par la même occasion. Jon l'avait tout de suite compris, Grenn était un chic type, effrayant par l'aspect, mais bien trop conscient de son faible esprit qui trouvait rarement les mots pour répliquer.
Le joueur tira alors véritable missile à la droite de Sam qui bondit au coin opposé des buts pour éviter au mieux tout contact avec le projectile. Il roula sur le sol jusque dans les buts. Des rires s'élevèrent dans le terrain.
La colère de Jon ne fit qu'augmenter. La méchanceté gratuite le révoltait.
Quand ce fut son tour de tirer, il baissa les bras.
« Ça sert à rien de continuer, monsieur. Il n'y arrive pas.
- C'est pas le moment de faire ta tapette, Jon ! Montre-nous ce que tu sais faire, rétorqua l'entraîneur.
- Je n'ai pas envie de le ridiculiser.
- Je ne t'ai pas demandé ce que tu avais envie de faire. Je t'ai ordonné de tirer et tu vas tirer. »
Thorne s'était approché du terrain, furieux.
Il n'avait jamais apprécié qu'on le contredise, sans doute un reste de sa carrière déchue et des regrets amères qui pourrissaient dans le fond de sa gorge.
Jon se résigna, à contrecœur. Le garçon le regarda avec des grands yeux mouillés.
Ce n'était tout de même pas de sa faute s'il n'était pas capable d'arrêter une balle. Il avait envie de le secouer et de lui dire de se remuer. Le garçon n'avait qu'à faire semblant de vouloir rattraper le ballon. Il n'en faisait même pas l'effort.
Il serra les dents et se prépara à tirer.
« Tu vas la voir en action, Tarly. Miss Stark, notre meilleure joueuse. »
Le rire de Thorne se répercuta entre ses deux oreilles.
Jon détesta ça.
Il tira dans le coin. La balle n'approcha pas le goal qui n'avait pas bougé. Le garçon semblait reprendre ses esprits, comme s'il venait à peine de comprendre qu'il s'était passé quelque chose.
Jon retira à la hâte son t-shirt pour rejoindre les vestiaires. Le rire de Thorne le suivit jusqu'à ce qu'il claque la porte derrière lui. L'entraîneur avait gagné.
Jon avait retrouvé son frère un peu plus tard et lui avait demandé à ce qu'il ne l'attende pas pour rentrer. Il comptait passer un moment dans la salle de musique, histoire de se vider la tête et de s'entraîner. Il avait la possibilité de le faire chez lui, mais aussi bizarre que cela puisse paraître, la salle de musique du lycée était bien plus calme que sa maison – avec cinq frères et sœurs, autant de chiens et, bien souvent, de nombreux visiteurs, il était plus simple pour lui de s'isoler dans une salle qui ne comprendrait que quelques étudiants que de devoir passer outre les rires et les cris qui feraient trembler sa chambre toute l'après-midi.
En s'approchant de la salle, il n'entendit que la mélodie d'un piano. Il reconnut bien là Rachmaninov.
Sa surprise fut des plus complètes quand il découvrit qui jouait.
Il entra dans la pièce, une grande salle où s'entassait les vents, les cordes et percussions entre les chaises et les partitions que quelques étudiants avaient laissé traîner. Un seul des luminaires avaient été allumé, juste au-dessus du pianiste, donnant au morceau un effet encore plus mélancolique.
Tarly, le garçon grassouillet qui s'était ridiculisé sur un terrain de handball faisait courir ses doigts sur le clavier avec une agilité insoupçonnable. Toute trace de tension s'était envolée sur son visage pour n'y laisser que de la concentration.
Il ne se redressa que lorsque Jon fut assez près du piano pour l'apercevoir du coin de l'œil. Il se dégagea du siège, non sans manquer de le faire tomber, et tendit la main à Jon.
« Samwell Tarly, mais je préfère qu'on m'appelle Sam. Grenn et Pyp m'ont dit que je pourrais peut-être te trouver ici, alors j'ai attendu. »
Tarly – Sam – lui sourit, attendant sa réponse. Jon attrapa machinalement la main de Sam.
« Pourquoi est-ce que tu me cherchais ? »
Il n'avait même pas réfléchi avant de poser cette question. Il restait autant interloqué par la présence de Sam dans cette pièce que par le fait qu'il veuille le voir.
« Je voulais te remercier pour ce que tu as fait tout à l'heure, sur le terrain de handball. Tu ne me connais pas, tu n'étais pas obligé d'intervenir, mais j'ai trouvé ça très courageux de ta part. »
Le remercier ? Parce que Jon avait dit à haute voix ce que tout le monde pensait ? Que Sam était tout simplement ridicule sur un terrain de handball et qu'il n'avait rien à y faire.
« Je n'ai pas été courageux –
- Tu as tenu tête à l'entraîneur, coupa Sam. Ça me semble assez courageux.
- Je n'ai pas fait ça pour toi, rétorqua Jon. »
Il n'avait pas vraiment envie de s'éterniser. Il était venu ici pour se défouler sur sa guitare et se retrouver seul, oublier à quel point il pouvait détester Thorne et le fait qu'il puisse parvenir à le dégoûter, parfois, de mettre les pieds sur un terrain de handball.
« Ça n'a pas d'importance, insista Sam, qui gardait le sourire. »
Ça lui donnait un air de bêta. Son sourire était quelques peu forcés et un brin malaisé. Sam triturait le bout de sa chemise un peu trop courte de ses doigts boudinés et se balançait sur ses deux pieds.
« Pourquoi tu l'as fait, ce n'est pas très important, c'est le geste qui compte. Personne d'autre n'est intervenu. »
Certainement pas. En majorité, les garçons de l'équipe partageaient l'avis de Thorne et s'étaient aussi ouvertement moqués de Sam. Les autres préféraient éviter le conflit avec l'entraîneur.
Jon avait du mal à taire sa langue. C'était pour les nombreuses fois où il avait dû subir les moqueries des autres. Il n'avait jamais porté dans son cœur les petites brutes.
« J'espère que la prochaine fois l'entraîneur ne sera pas aussi exigeant. »
La prochaine fois.
La prochaine fois.
Parce qu'il comptait vraiment retenter l'expérience après cette catastrophique démonstration ?
C'en était trop pour Jon.
« Pourquoi est-ce que tu t'es inscrit au cours de handball ? »
Il sous-entendait clairement que Sam n'avait rien à faire dans l'équipe. Il ne comprenait même pas comment l'idée avait pu lui traverser l'esprit.
Le sourire de Sam s'affaissa – peut-être se sentit-il vexé, mais Jon avait du mal à croire que le garçon ne puisse pas s'être rendu compte que sa performance avait été pitoyable.
« En fait, le sport ce n'est pas trop mon truc. J'aurais préféré ne pas en faire du tout, mais … c'est mon père, tu vois. Il a longtemps été dans une équipe de handball et il tient absolument à ce que j'y joue aussi, déclara-t-il.
- Pourquoi est-ce que tu ne lui expliques pas tout simplement que tu n'aimes pas ça et que c'est une perte de temps ? demanda Jon. Ce n'est pas comme si tu n'avais aucune autre activité, tu es un excellent pianiste – Sam esquissa de nouveau un sourire à ce compliment et se mit à rougir, légèrement.
- J'aurais aimé que ce soit aussi simple, mais mon père ne veut rien entendre et il dit que la musique – le piano – c'est fait pour les gonzesses et les tarlouzes. »
Sam leva les yeux au ciel, mais il ne fit pas illusion. Ce dédain simulé ne pouvait couvrir la tristesse qui se lisait sur son visage. L'incompréhension séparait le père du fils et Jon se retrouva pris d'un remord soudain.
« Je suis désolé. »
Et presque sans le vouloir, il lâcha :
« Ça te dit de jouer quelques morceaux à deux ? »
Après tout, ils avaient tous les deux une colère commune à évacuer – et une blessure qui n'était pas encore prête à cicatriser.
