Avertissements : cette histoire n'a pas pour but de donner une morale ni de faire l'apologie de la violence. Je ne défends aucune idéologie ou philosophie à travers mes personnages, si ce n'est un certain antiracisme au début. Voyez cette fic comme un pari, l'art pour l'art, comme disaient les Parnassiens. Si je prends la peine de préciser ça, c'est pour dissiper toute ambigüité : la plupart des personnages sont des assassins, des meurtriers, des criminels de toutes catégories, des monstres parfois, dans le sens moral du terme, même si justement, ils n'ont pas de morale.
Pour ce qui est de la version originale (Corrompue), je la laisse encore en ligne pour l'instant, mais sachez que des éléments seront repris, d'autres totalement modifiés (noms de personnages, leur passé…). Voilà, je crois que c'est tout.
Disclaimer : Tout appartient à Tolkien et à Peter Jackson (je préfère suivre la version du film), sauf quelques (nombreux) OCs.
Chapitre I
La nuit était déjà tombée, les bois plongés dans l'obscurité. Cachés derrière les arbres, Azog et les autres Orcs observaient de loin la maison où s'étaient réfugiés les Nains, le magicien et leur compagnon d'une espèce inconnue. Au loin, le changeur de forme dans sa peau d'ours veillait à ce qu'ils n'approchent pas de la compagnie qui dormait à l'abri de tous dangers.
-Attaquons-les maintenant, suggéra un des Orcs en s'approchant d'Azog. Tuons ces sales Nains dans leur sommeil.
-Non, cracha son chef à la peau blanche. La bête monte la garde.
Ils retournèrent tous deux vers les autres guerriers qui pour s'occuper organisaient un combat entre leurs wargs. Parmi eux, légèrement en retrait, une Elfe assise sur un rocher aiguisait son sabre avec tant de soin que ça aurait rendu nerveux n'importe qui.
-Nous les tuerons en chemin, continua Azog.
C'est alors que des craquements se firent entendre. Tous les Orcs (et l'Elfe) se mirent en garde, jusqu'à ce qu'un des leurs surgisse de l'obscurité, maîtrisant son warg qui feulait juste devant le visage courroucé d'Azog. Celui-ci reconnut son fils, Bolg.
-Ils se rassemblent à Dol Guldur, commença le fils du Profanateur. Le Maître vous convoque !
Azog grogna. Il n'avait vraiment pas envie d'abandonner la traque maintenant. Pas alors que sa cible, Thorïn Ecu-de-Chêne, était si proche… Il enfourcha sa monture et partit suivi des autres, Bolg et l'Elfe à ses côtés. La présence de cette dernière dans le groupe faisait lever plus d'un sourcil, et pourtant, elle se montrait aussi cruelle que ses compagnons pendant les combats. En plus d'être une guerrière redoutable, elle n'avait plus à prouver à quel point elle était fourbe, vicieuse et manipulatrice. Elle s'était bien intégrée, et hormis Azog et Bolg, tous la craignaient, redoutant ses pulsions de rage et les vagues de meurtres sanglants qui s'en suivaient. Les Orcs la surnommaient entre eux, hors de portée de ses oreilles pointues, la «furie blonde». Mais ça, c'était après qu'elle ait coupé en morceaux l'un des leurs qui avait osé l'insulter, sous-entendant qu'elle n'était parmi eux que par favoritisme et liens familiaux. Bolg n'avait jamais été aussi fier d'être son fils
OoOoOoOoO
Lorsqu'on osait interroger Mîrsila sur son enfance, la jeune Elfe se contentait de hausser les épaules en lançant à son interlocuteur un regard las, vide. Ce sujet, parce que tabou depuis de nombreuses décennies, n'était devenu qu'un vague flou dans son esprit. Peut-être avait-elle tout occulté inconsciemment, ou peut-être n'était-ce que de l'indifférence. Elle avait des bribes de souvenirs, des images et des restes épars de conversation, mais la jeune Elfe se demandait parfois si ça ne venait pas de récits d'autres personnes. «Tu te rappelles, quand tu avais cent trente ans, tu ne voulais jamais manger de mûres…». Elle ne se souvenait pas réellement de ces détails, mais en avoir entendu parler faisait illusion, se confondant avec de réelles impressions. Mais ça ne l'inquiétait pas. En fait, elle s'en moquait complètement.
Le premier souvenir marquant avait été celui de la mort de son père. Elle avait quarante ans, mais un humain lui aurait donné à peine sept ans. Calben n'était pas l'Elfe le plus aimant, ni le plus aimable qui soit. Il respectait son épouse et sa fille, mais de là à dire qu'il les aimait plus que tout, il y avait un univers entier. Calben était un rebelle, un fauteur de troubles, un parasite dans le Royaume de Vertbois le Grand. Oropher puis Thranduil avaient entendu parler de lui comme quelqu'un de colérique et parfois violent. Tyrannique. Mîrsila et surtout sa mère Alquariel en étaient très affectées, mais ne le montraient jamais en public, soutenant ce père ou cet époux face aux médisances. Jusqu'à ce que l'impensable ne se produise. En l'an 996 du Troisième Age, Calben tenta d'assassiner le Roi, après avoir massacré plusieurs de ses gardes. Tout le Royaume en fut scandalisé, et lorsque l'exécution prochaine du coupable et de ses complices fut annoncée, un certain soulagement se lut sur les visages. Quant à Alquariel et Mîrsila, elles n'eurent pas d'autre choix que de s'exiler, loin de cette forêt où plus rien de bon ne les attendait. Elles se mirent en route pour rejoindre Arnaras, un ami d'enfance d'Alquariel qui vivait en marge de toute présence civilisée de la Terre du Milieu.
-Sois forte, dit Alquariel à sa fille lorsqu'elles s'installèrent une nuit dans une ferme abandonnée. Ne laisse personne t'atteindre.
-Promis, mère.
Elles arrivèrent à destination quelques jours après ce bref échange. Arnaras vivait dans une vaste maison perchée sur une colline et camouflée par d'immenses arbres, même en hiver. Mîrsila observait les lieux, émerveillée. Cet endroit lui paraissait paisible, sécurisant. L'Elfe qui sortit de la maison et vint les accueillir était brun et portait de riches étoffes noires. On aurait dit un Prince des Ténèbres emprisonné dans un jardin.
-Soyez les bienvenues, déclara-t-il. Entrez, vous avez besoin de repos après votre long voyage.
-Merci, Arnaras, répondit Alquariel. Je te serai éternellement reconnaissante de nous avoir accueillies sous ton toit. Ce que nous venons de traverser a été douloureux, encore plus pour ma fille.
L'enfant en question baissa les yeux et se retint de pleurer. «Sois forte. Ne laisse personne t'atteindre». Elle se répéta mentalement cet ordre en boucle jusqu'à ce que l'envie d'éclater en sanglots ne passe. Elle et sa mère entrèrent dans le salon lumineux de la maison de l'Elfe solitaire, où une tisane reposante et un repas léger mais suffisant les attendaient. L'enfant s'endormit presqu'immédiatement, et sa mère la porta jusqu'à une chambre où elle put enfin avoir un sommeil tranquille.
Le lendemain, une fois réveillée, nourrie et habillée, Mîrsila sortit dans le parc qui entourait la demeure de son bienfaiteur. Prenant garde à ne pas se perdre, elle marchait entre les arbres et les rayons du soleil perçant nuages et feuillages lorsqu'elle se trouva face à un étrange trio : un Nain, un Homme et un Orc, qui tous trois la regardaient avec des yeux ronds. Ils devaient être aussi surpris qu'elle. La petite Elfe se souvint avoir laissé sa dague dans sa chambre, sous son oreiller. Son père aurait eu honte de son étourderie. Comprenant sa faiblesse, elle tourna les talons et s'enfuit en courant vers la maison. Une fois devant la porte, un regard en arrière lui apprit avec étonnement que le trio atypique ne s'était pas lancé à sa poursuite. Elle préféra néanmoins entrer, claquant presque la porte. Arnaras passait justement par là, et voyant la jeune Elfe complètement terrorisée, il vint à sa rencontre.
-Que se passe-t-il, ma petite ?
-Il y a trois personnes étranges dans le parc.
-Comment ça ?
-Un Nain, un Homme et un Orc !
-Portaient-ils des manteaux noirs ?
-Oui. Pourquoi ?
-Alors tu n'as rien à craindre. Ils ne te feront aucun mal, ce sont des… des amis.
-Vous êtes ami avec un Orc ?
Mîrsila semblait choquée. L'amitié entre les différents peuples de la Terre du Milieu était strictement conditionnelle. Les Elfes et les humains s'entendaient souvent très bien, et leurs mariages peuplaient les légendes. L'amitié entre Elfes et Nains était déjà un peu plus problématique, son père lui avait raconté les origines de cette querelle interminable, mais un respect mutuel n'était pas non plus impossible. En revanche, pour ce qui était des Orcs, il y avait des questions à se poser. Comment une telle relation pouvait-elle exister, et réunir autant d'individus issus d'espèces différentes, ayant appris depuis leur plus jeune âge à se haïr les uns les autres ? Mîrsila était jeune, mais pas idiote : elle en avait entendu, des paroles effrayantes sur les créatures de Morgoth et leur cruauté, et se doutait bien que les parents Orcs tenaient exactement les mêmes discours à leurs enfants sur les Elfes, les Nains ou les Hommes.
-Tu comprendras quand tu seras plus grande, mais sois sûre que Lughorn ne te fera aucun mal. Si tu le croises à nouveau, reste calme et courtoise comme avec n'importe qui d'autre, et tout ira bien. Maintenant, peux-tu dire à ta mère de me rejoindre dans le grand salon ? Il y a certaines choses à propos desquelles nous devons discuter.
La petite obéit, gardant son étonnement et ses questions pour elle-même. Elle trouva sa mère dans la bibliothèque et lui transmis le message de leur hôte. Alquariel envoya sa fille dans sa chambre et lui ordonna de ne pas en sortir puis rejoignit son ami.
-Je voudrais te présenter quelques amis, commença Arnaras. Tu seras certainement surprise, mais je te prierai de rester calme.
Quelques instants plus tard, en effet, le trio qui avait tant effrayé Mîrsila entra dans le salon. Arnaras les présenta de manière un peu plus formelle : le Nain s'appelait Herin, l'Homme, Talenos et l'Orc, Lughorn. Alquariel marqua un temps d'arrêt, ne s'attendant pas du tout à se trouver en présence d'une telle compagnie. Elle reprit néanmoins ses esprits, et les salua tous, tout en s'efforçant de ne pas dévisager l'Orc avec trop d'insistance.
-Alquariel, commença Arnaras, si je t'ai fait venir ici, c'est pour une raison bien précise. Pardonne ma façon brutale de présenter les choses, mais il est inutile d'y aller par quatre chemins. Ces trois personnes que tu vois sont des chasseurs de primes, ils appartiennent à un large réseau que je dirige depuis des années. La plupart de leurs missions sont des assassinats, mais d'autres possibilités peuvent s'offrir à eux. N'importe qui peut être recruté, à condition d'avoir fait ses preuves et d'être capable de faire face aux aléas de ses missions. Homme, femme, humain, Elfe, Orc, Nain, Gobelin…
-Pourquoi me parles-tu de tout cela ?
-Je sais que Calben t'a appris à te battre. Mais si tu nous rejoins, tu auras l'occasion de te venger. Si tu veux que Thranduil paie, c'est le seul moyen.
Il y eut un long silence durant lequel Alquariel réapprenait à respirer correctement. Le trio des assassins l'observait, attendant une réaction, n'importe quoi qui puisse faire avancer la situation. L'Elfe ne répondit qu'au bout de quelques interminables secondes qui parurent durer des heures :
-Le seul avantage d'avoir épousé Calben se trouve justement dans le fait qu'il m'ait appris à me battre. Tout ce qui compte pour moi est de m'assurer que ma fille soit en sécurité, et heureuse. Et ce n'est pas en me lançant dans une quête suicidaire que j'y parviendrai.
Alquariel n'alla pas plus loin dans son argumentation, mais elle savait que Mîrsila pourrait peut-être avoir envie de venger son père, bien qu'elle n'éprouve pour lui que la loyauté d'un sujet à son commandant, pas l'amour d'une fille à son père. Il l'aurait rendue malheureuse, tout comme il avait détruit le bonheur de son épouse.
-Je te remercie pour ta compassion et ta volonté de m'aider, mais une telle entreprise ne ferait qu'empirer les choses. En revanche, l'idée même d'intégrer cette confrérie de chasseurs de primes présente un intérêt.
-Je croyais que vous vouliez protéger votre enfant, intervint le Nain.
-C'est ma principale motivation, ne vous y trompez pas.
Arnaras eut un sourire presque attendri. Il retrouvait enfin son amie d'autrefois, la femme combattive toujours prête à en découdre. Il se demanda un instant pourquoi il ne l'avait pas épousée plus tôt, mais chassa cette pensée de son esprit. Lughorn, Herin et Talenos souhaitèrent la bienvenue à leur nouvelle consœur, comme si son arrivée était déjà prévue depuis longtemps.
Alors, que pensez-vous de cette nouvelle version ?
Joyeux Noël à tous :)
