Chapitre 1 : L'enlèvement.
Malgré tous les efforts que Renji avait fait, il avait été incapable d'attirer l'attention de son commandant, Byakuya. Celui-ci, froid et distant, faisait office de figure de proue de la Sixième Division ; évidemment, il en était le capitaine. Cela dit, Renji avait observé tous les autres capitaines et n'avait pu que constater l'évidence : ils étaient tous en parfaite harmonie avec leur lieutenant.
Alors, pourquoi Kuchiki Byakuya, le noble, puissant et froid, ne prêtait-il jamais attention au pauvre Abarai Renji ?
Il avait fait tout son possible pour qu'on le remarque. Il était devenu puissant, déterminé, imposant. Au fil de toutes les longues années qu'il avait passées à la Soul Society, il s'était forgé un nom, une réputation ; tout le monde l'adulait et craignait ce qu'il représentait.
Oui, tous, sauf Byakuya, son capitaine.
Byakuya était un homme de grande valeur - toujours froid, il ne laissait transparaître aucune émotion. Ou du moins, Renji ne l'avait jamais vu laisser libre cours à ses sentiments. Il s'était même demandé s'il en avait parfois. Et cet aspect de sa personnalité l'avait charmé presque immédiatement. Byakuya était aussi puissant, il faisait partie des hommes les plus forts de la Soul Society, et en son fort intérieur, Renji pensait même qu'il était le plus puissant. Il était tout bonnement impossible de le battre.
Renji se retourna dans son lit et soupira. Tous les soirs, il avait à faire au même problème. Il se demandait constamment quel était le meilleur moyen d'attirer l'attention sur lui. Il voulait que son commandant le remarque, le salue pour sa bravoure ou sa puissance, qu'importait, mais tout ce qu'il désirait était de se sentir vivre à travers les yeux de son capitaine, pour qui son admiration grandissait de jour en jour.
Fatigué de ne pas trouver le sommeil à une heure si tardive (il ne savait pas vraiment mais le soleil avait disparu depuis bien longtemps), il se leva d'un bond et enfila son hakama, sans kimono. Il faisait chaud à l'extérieur, et de toute façon les Shinigamis ne craignaient pas le froid. Par habitude plus que par précaution, il glissa Zabimaru à sa ceinture et sortit.
La fraîcheur fut une bénédiction. Il prit une grande inspiration et referma la porte de sa chambre derrière lui. Il s'appuya sur le balcon et regarda en contrebas. La cour, vide à cette heure nocturne (ou bien matinale), avait un aspect rassurant bien qu'elle parût très froide et sans vie. Renji savait qu'il était chez lui, il connaissait cet endroit, il s'y sentait bien. Oui, il s'y sentait à l'aise.
Il commençait à peine à se relaxer lorsqu'il sentit une présence, faible tout d'abord mais grandissante ; un ennemi approchait. Les yeux et les oreilles aux aguets, il se retourna et, dos au balcon, attendit d'identifier la personne qui venait troubler le sommeil de ses camarades.
Il n'eut pas à attendre très longtemps. Un Shinigami sauta sur le balcon, juste en face de Renji. Les cheveux noirs et sombres, tout comme ses yeux et son esprit, ne pouvaient signifier qu'une chose : les deux hommes se connaissaient.
- Kuchiki Taichô, murmura Renji, se mettant en seiza rapidement de peur de manquer de respect à son supérieur.
Byakuya ne dit rien et s'attela à son tour au balcon. Tout comme le lieutenant un peu plus tôt, il prit une grande inspiration et regarda la cour.
- C'est un bel endroit, déclara-t-il de sa voix froide et suave.
Toujours à genoux, Renji gardait le silence. Il avait beaucoup de mal à contenir sa surprise. C'était la première fois que son supérieur lui adressait la parole en dehors des devoirs que leur rang les contraignait à effectuer. Il ne pouvait peut-être pas considérer la courte phrase comme une adresse directe, mais Renji venait d'avoir l'occasion d'écouter la voix de son commandant en des circonstances bien différentes de son habitude.
- Tu m'ennuies, Abarai Renji. Lève-toi et viens donc me tenir compagnie.
Estomaqué, Renji se leva, plus par réflexe que par réel désir. Ses membres ne semblaient plus répondre de sa volonté, s'il en avait une. Les yeux écarquillés, il se plaça à la droite de Byakuya, deux mètres plus loin, sans dire un mot.
Pendant un moment qui parut durer une éternité à Renji, ils ne se dirent rien, se contentant d'observer les étoiles et la cour. Renji, lui, jetait quelques coups d'œil à son commandant, attendant peut-être des ordres qui ne venaient pas.
- Approche, lança Byakuya.
Un frisson glacial parcourut le lieutenant. Il avait tout à coup un mauvais pressentiment ; quelque chose allait se produire, il ne savait pas encore quoi, mais il était conscient que c'était quelque chose qu'il ne désirait pas.
Il s'approcha tout de même.
Le commandant de la 6ème Division semblait posséder une aura attractive cette nuit, alors qu'en temps normal, Renji l'avait connu glacial et sans cœur. Mais cette nuit, le lieutenant s'était suffisamment approché de lui pour que leurs deux bras se touchent : ce simple contact avait répandu une chaleur dans tout le corps du jeune homme, qui cligna des yeux pour ne pas laisser paraître ne fusse qu'une once de plaisir.
- C'est bien, approuva Byakuya. Tu vois, quand tu veux.
Renji, se laissant gagner par la soudaine sympathie de son supérieur, hocha la tête et lui lança un regard en coin.
Le visage de son supérieur paraissait serein. Il avait les yeux mi-clos et un faible sourire éclairait son visage. Renji ne l'avait jamais vu sourire. Il trouvait que ça lui allait bien. Son kimono volait tout autour de lui, phénomène du à la fraîche brise qui agitait quelques arbres au loin. Renji frissonna. Il ne savait pas s'il avait froid ou si c'était encore ce mauvais pressentiment qui le hantait, mais il fit comme s'il ne s'était rien passé. Il voulait profiter d'un moment privilégié avec son commandant.
- Vous devriez sourire plus souvent, Kuchiki Taichô. Cela vous va mieux.
Byakuya eut un rire fin et regarda plutôt son lieutenant droit dans les yeux :
- Vraiment ?
Il se décolla du balcon et du bras de son lieutenant, ce qui déçut momentanément ce dernier. Byakuya ouvrit la porte de la chambre de Renji et pénétra dans son intimité.
- Kuchiki Taichô, ce n'est pas… commença Renji.
Byakuya se retourna brusquement et fusilla Renji du regard, de son regard glacial qui pénétrait jusqu'à la moelle et dont il était impossible de se départir par la suite.
- Je ne crois pas avoir besoin de ton autorisation.
Abarai Renji baissa la tête, en signe de soumission et de demande de pardon.
- Viens plutôt m'inviter à entrer.
Le ton soudainement dur de son commandant alarma Renji mais il choisit de ne pas parler. Il ne voulait pas gâcher ce moment et pour rien au monde il n'aurait voulu que Byakuya s'en aille. Il se plaça donc à l'entrée de sa chambre et tendit une main vers l'intérieur.
- Je vous en prie, Kuchiki Taichô. Entrez donc.
- Oh, et, arrête avec ce titre ridicule, ordonna Byakuya tout en pénétrant une bonne fois pour toute dans la chambre de son subalterne. Nous ne sommes pas en réunion, ou en quelconque cérémonie officielle. Appelle-moi Byakuya.
Malgré l'envie folle qui lui dévorait les entrailles, Renji tint sa langue et ne dit rien. Il invita plutôt son commandant à boire du saké, offre que celui-ci refusa, ajoutant qu'il n'aimait pas ça.
- Tu es devenu fort, fit plutôt le commandant. Bien plus fort que lorsque tu as été nommé lieutenant.
Renji planta un regard résolu dans les yeux noirs de son aîné, dans le but de montrer que sa force n'avait pas été la seule chose qu'il avait améliorée. Il avait aussi travaillé son courage, son honneur, et surtout ses convictions.
- Tu me sembles être un homme valeureux, continua Byakuya en arpentant lentement la petite pièce.
Un silence de plomb s'abattit soudainement dans la chambre de Renji. Ce dernier sentit une sueur froide rouler le long de sa colonne vertébrale. Pendant un instant, il crut que les frissons qu'il ressentait se voyaient dans son regard, mais il fit beaucoup d'effort pour que ce ne fût pas le cas. Les pas de Byakuya étaient la seule chose vivante dans la pièce. Renji était comme hypnotisé. Il ne savait pas quoi dire, ni quoi faire, comment se comporter, en présence de cette facette de la personnalité du commandant qu'il ne connaissait pas.
Finalement il s'arrêta et fit face à Renji, les bras le long du corps, mais pourtant avec un détachement étonnant.
- Veux-tu te mesurer à moi ?
Cette demande, presque sauvage, brutale, sans préambule, fit sursauter le lieutenant en son for intérieur. Il n'aurait osé le dire, mais il se sentait flatté.
En effet, à la Soul Society, lorsqu'un capitaine décide que son lieutenant est suffisamment puissant, et lorsque les deux personnages sont proches, le capitaine peut décider de provoquer le plus jeune en duel. C'est un duel amical, qui se termine lorsque l'un des deux combattants n'est plus capable de bouger, mais dont l'issue n'est jamais mortelle. Tous les coups sont permis, une arène est ouverte spécialement, dans laquelle les Bankai sont autorisés et utilisés de matière quasi-systématique. Ce duel est une sorte de test, amical toujours, dans le but d'évaluer les progrès du lieutenant et de vérifier que les capacités du capitaine sont toujours à son maximum, ce qui est nécessaire à chaque intervention extérieure.
Mais Renji voyait ce test comme un honneur, qu'il ne pourrait jamais atteindre, puisque les deux dirigeants de la 6ème division ne parlaient presque jamais. Il savait que s'il faisait ce duel, il serait encore plus adulé, et peut-être irait-il même jusqu'à gagner le respect de son supérieur. De plus, il avait peu de chance de l'emporter face à cet homme dont la puissance dépassait l'entendement, mais il aurait le mérite d'avoir essayé.
Voyant que son subalterne ne répondait pas, sans doute plongé dans ses pensées, Byakuya s'approcha jusqu'à ce que son visage ne soit plus qu'à une vingtaine de centimètres de celui de Renji.
- Qu'en dis-tu ? Demanda-t-il, sortant Renji de sa transe.
Renji tomba au sol, en position seiza, et colla le front contre le col :
- Je vous remercie infiniment de l'honneur que vous m'accordez, Kuchi… Byakuya ! Ce sera avec grand plaisir que je combattrai quand bon vous semblera !
- Quand bon me semblera, hein … ? Murmura Byakuya. Et avec grand plaisir… Que demander de mieux ?
Renji releva la tête pour remercier son capitaine du regard, mais il n'était plus là. Il scruta la pièce mais il n'y avait aucune trace de Byakuya, comme s'il n'avait jamais été là. Il se leva précipitamment, mais avant qu'il ait pu rejoindre l'extérieur, un croche-patte bien placé le projeta au sol. Il étouffa un grognement sourd et se retourna sur lui-même, pour se poser sur ses coudes. Il se retrouva le nez à seulement quelques centimètres de la pointe de Senbonzakura, le zanpakuto de Byakuya.
- Que…
Il n'eut pas le temps de protester d'avantage. Byakuya, en un éclair, s'agenouilla sur lui, posa une main sur sa bouche et laissa Senbonzakura s'aventurer sur le torse nu puis le cou de son lieutenant.
- Shh, fit-il en se penchant vers son oreille, shh… Ne dis rien.
Renji ravala une réplique cinglante. « Si je parle, tu me tranches » pensait-il. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait, et son esprit hésitait entre la peur, la colère, et le doute. La peur, parce qu'il savait très bien que Byakuya était en position de force et qu'il était facilement cinq fois plus puissant que lui, la colère parce qu'il se sentait trahi, quand il repensait aux dix précédentes minutes, et le doute, parce qu'il ne savait pas ce qu'il se passait, ni pourquoi.
Ses yeux, involontairement écarquillés sous l'effet de la surprise, amusèrent Byakuya qui rit légèrement pour la deuxième fois de la soirée.
- Tu ne t'y attendais pas, hein ? Ah. J'en étais sûr. Après tout, ça fait longtemps que je planifie tout ça.
Bon Dieu, mais de quoi parlait-il ? Le Shinigami aux cheveux rouges n'en avait aucune idée, mais il commençait à craindre pour sa vie. Son énergie spirituelle aurait du avertir les personnes habitants dans les environs que quelque chose n'allait pas. Mais personne ne semblait venir. Byakuya avait-il empêché son reiatsu de dépasser les murs ?
Renji se rappela soudain que Zabimaru était à sa ceinture. Il devait agir très vite, car Byakuya était rapide, mais surtout bien. Le trancher du premier coup, ou au moins se débarrasser de ce katana qui exerçait une pression grandissante de seconde en seconde sur sa gorge offerte.
Byakuya se pencha à nouveau pour lui murmurer quelque chose à l'oreille. Renji ne lui en laissa pas le temps. Il tira Zabimaru hors de son fourreau et fit le geste d'enfoncer la pointe de son katana dans le plexus de son agresseur…
Il ressentit une vive douleur au poignet qui le contraint à lâcher son arme. Zabimaru vola à travers la pièce et se ficha dans son futon. Byakuya tordit le poignet de son lieutenant d'un seul mouvement. La douleur remonta dans son avant-bras, puis dans son bras tout entier, jusqu'à atteindre l'omoplate. Le capitaine, ayant prévu cette éventualité, rangea sa lame dans son fourreau et reposa sa main libre sur la bouche de sa victime juste avant que celle-ci ne hurle de douleur. Le visage de Renji se déforma, et un cri étouffé parvint aux oreilles des deux hommes. Lorsque Byakuya relâcha enfin la pression qu'il maintenait sur son bras tout entier, ce fut tout le corps du lieutenant qui se détendit d'un seul coup. Byakuya enleva enfin sa main de la bouche du jeune homme qui reprit son souffle sans même appeler à l'aide. Il avait compris que cela ne servirait à rien de toute façon. Les réflexes de Byakuya étaient bien trop grands comparés aux siens, tout comme sa force.
Le capitaine se releva, considérant sa victime avec un mélange de curiosité et de plaisir non feint.
- C'est bien, c'est bien, fit-il. Tu ne cries pas. Tu as compris. Bon !
Il s'empara de Zabimaru et s'entailla le bout de l'index avec la pointe du sabre. Lorsque la garde de son katana fut en contact avec la peau de Byakuya, Renji ressentit un frisson dans tout le corps. Dans les écrits, ils disaient que si un homme était considéré comme un ennemi par le katana et qu'il touchait celui-ci, alors le possesseur du katana en question en était informé. Renji ne savait pas que c'était vrai.
Byakuya s'empara de la mâchoire inférieure de Renji et lui leva la tête de force. Le lieutenant le repoussa de sa main gauche, la seule qu'il pouvait encore bouger – il soupçonnait le commandant de lui avoir déplacé quelque chose.
Furieux que sa victime lui résiste, Byakuya lui asséna une gifle qui envoya sa tête cogner contre le mur de derrière, assommant Renji sommairement. Byakuya en profita pour appliquer son index sanguinolent sur le front du Shinigami et prononça les mots suivants :
- Mippū sa reta seishin-tekina chikara.
Il profita de l'inconscience de Renji pour le hisser sur son épaule, ouvrir la porte et filer, laissant Zabimaru, taché de sang sur sa pointe, sur le lit de son propriétaire.
Et voilà pour le premier chapitre d'une fiction qui ne devait être qu'un OS, mais qui, pourtant, sera plutôt longue.
Le début est étrange, c'est vrai, mais c'est essentiellement parce que justement, cette histoire devait être un one shot. Et puis, l'imagination guidant mes petits doigts sur le clavier, l'histoire s'est développée, encore et encore... Et en souvenir de ce que cela aurait dû être, j'ai voulu laisser la phrase d'accroche telle quelle. Ne voyez pas là un simple manque d'inspiration pour une première phrase, ce n'est pas du tout ça. Je trouvais juste qu'un début "In Medias Res" sonnerait bien.
Merci de laisser des reviews, pour que je puisse m'améliorer, mais aussi pour me dire si vous aimez ma façon d'écrire (ou pas), ma façon d'imaginer l'histoire (ou pas), etc, etc... J'ai soif de vos avis !
Un grand merci à tous ceux qui passeront par là. C'est la toute première fic que je publie. J'espère qu'elle sera une réussite.
A bientôt pour la suite !
