Yo !
Nous sommes réunis en ce jour pour célébrer l'union de … ah, non, mauvais speech. Nous sommes ici présent pour célébrer le DemRoku day ! Et pour l'occasion, je me lance dans une histoire à chapitre sur ces deux tourtereaux. C'est une histoire longue, donc la publication sera assez … vague et diffuse, mais j'ai un plan et un peu d'avance. J'ai à peu près le titre, et donc la musique de tous les chapitres. J'ai honte de commencer avec du Taylor Swift.
(Oh, et aujourd'hui, la patinoire de Bercy rouvre ses portes ! Ouais !)
Bonne lecture !
Et joyeux DemRoku day !
You know I'm no good
Chapitre 1 : Enchanted
Please don't be in love with someone else,
Please don't have somebody waiting on you
This night is sparkling don't you let it go
I'm wonderstruck, blushing all the way home
(Taylor Swift)
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Il est arrivé, comme ça, normalement, comme si c'était la chose la plus naturelle au monde, d'entrer ici, et peut-être que ça l'était parce qu'après tout, ici, c'était un café, de prime abord, mais – et ça, sans doute qu'il pouvait pas le savoir avant d'avoir franchi la porte – ici c'était mon monde, mon horizon et mes passions diurnes, mes mélopées nocturnes.
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Qu'est-ce qu'on est devenus ? On en est arrivés là, je ne sais pas comment, c'est sûrement de ma faute, non ? Moi j'essaie de comprendre ce qui a bien pu se passer, où ça a planté, je me remémore chaque scène, j'assemble des éclats de mémoire, les notes que j'ai prises. Ça a commencé un matin d'hiver, le premier février. C'est écrit sous mes yeux – Premier février : j'ai poussé la porte du café, il était là. Je ne me souviendrais pas de la date si ça n'était pas écrit. Je suis heureux d'avoir tant noté, parce que tu connais ma mémoire, elle flanche, elle divague, elle se perd en route et parfois elle mélange les rêves et tes sourires.
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Le pire, c'est que je l'aime, vous savez ? Je peux pas arrêter de l'aimer, pas comme ça. Ça fait plutôt mal. Je l'aime, mais je lui dis plus. J'aime sa colère. Elle est justifiée, non ? C'est un peu de ma faute, je crois, j'ai l'habitude d'enchaîner les bourdes. Quand je me regarde, amaigri, dans le miroir, je me dis que ma première erreur a été de le faire entrer. Mais j'arrive pas à regretter. Et quand je pense à lui, assis sur le canapé d'Axel, je ne sais pas si je souris ou si je pleure. Axel dit que j'ai l'air vague.
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Peut-être que je savais que ça allait finir comme ça. Et que c'est pour ça que j'ai tout noté. J'ai toujours aimé écrire les choses qui se passaient, mais c'était la première fois que j'écrivais si frénétiquement, que je sentais que je devais le faire.
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1er février
Il faisait bien plus chaud dedans que dehors, et ça fit courir des fourmis brûlantes sur les doigts de Roxas. Il aurait voulu avoir le temps de prendre un véritable café, assis ici, mais son cours de syncrétisme allait bientôt commencer et le professeur était du genre à refuser les retardataires. En amphi. Parfois, Roxas se demandait pourquoi il avait choisi ce cours, qui n'avait a priori rien à voir avec ses envies professionnelles, mais il savait. L'intitulé, Religion et syncrétique lui avait paru si mystérieux qu'il s'était empressé de s'y inscrire. Ah, ça, on ne l'y reprendrait pas, choisir un cours parce qu'il ne comprenait pas le nom n'était définitivement pas l'idée du siècle. Aussi, il n'y avait plus de place au cours de Littérature classique. Bah, ce n'était qu'un semestre, dans quatre mois, il n'en entendrait plus parler – et s'il devait redoubler, il crèverait plutôt que de reprendre ce cours.
Il passa une main dans ses cheveux humides. Une sale bruine tombait sur toute la ville. Roxas ne détestait pas la pluie, loin de là, mais cette espèce de demi-flotte, moitié brume moitié pluie avait le don particulier de le mettre de mauvaise humeur. En jetant un regard autour de lui, il nota qu'il n'était pas le seul dans ce cas. La quasi-totalité de la clientèle du café tirait une tronche de six pieds de long. La quasi-totalité, ça voulait dire tout le monde sauf ce type assis au comptoir, qui faisait la conversation au barman d'un ton enjoué. Comment pouvait-on être de bonne humeur à un moment pareil ? La journée avait commencé, à sept heures, par un attentat sur la ligne sept – par chance, le terroriste était assez nul, et malgré sa kalachnikov n'avait réussi à faire que six morts et dix blessés avant de se faire arrêter. Il était mort en garde à vue une heure plus tard, en avalant de l'arsenic qu'il avait gardé dans sa poche. Rien n'énervait plus Roxas que les suicides prétentieux. Et malgré tout, ce type, là, avec une coupe étrange, un T-shirt moche – un débardeur bleu délavé, plus exactement, avec des étoiles et une tête de mort à demi recouverte de strass – et un étui de guitare aux pieds, il souriait. Roxas avait du mal à comprendre.
Il s'avança vers le comptoir, et le barman eut l'air réjoui qu'on le détourne de la conversation à sens unique que menait l'énergumène.
« Un café à emporter, s'il-vous-plaît. Sans sucre. »
Le type – qui, soit dit en passant, avait aussi une gueule d'énergumène, aves ses tifs rouges comme les feux de circulation et des tatouages sous des yeux vert pomme nucléaire – acquiesça et commença à préparer sa commande. Il sortit son portefeuille et en tira … Deux pièces de cinquante centimes. Joie. Il interpela le barman.
« Je suis désolé, vous prenez la carte à partir de combien ?
—Dix euros, c'est écrit là. »
Merde. Le café tout seul coûtait deux euros trente, et il n'avait pas forcément envie de gâcher près de huit euros pour avoir le compte. Il fouilla dans ses poches, et quelques pièces de dix et cinq centimes rejoignirent sa fortune. Il jura.
« Je peux annuler ma commande ? »
Le rouquin eut une moue pensive.
« Il te manque combien ? »
En plus, il tombait sur un type sympa. Le café était tiré, si seulement le barman avait pu l'envoyer chier proprement, il n'aurait eu aucun scrupule à claquer la porte du café derrière lui.
« Euhm … Quatre-vingt-dix centimes. »
Le barman eut l'air de réfléchir un long moment – d'un côté, ça n'était pas grand-chose, d'un autre c'était presque la moitié du prix du café. Le guitariste intervint.
« Attends, j'te les avance, si tu veux. J'dois bien avoir ça quelque part ! »
Roxas lui jeta un regard stupéfait. De plus en plus incompréhensible. Et le blond se mit à vider ses poches de jean sur le comptoir, puis les poches de sa veste gisant à côté. C'était assez surprenant. Il y avait des pièces, bien entendu, des préservatifs avec des messages humoristiques – ou le truc le plus débandant du monde pour Roxas –, des tickets de caisse, des gâteaux, des bonbons, trois briquets, et quelques objets non-identifiables.
« Dégueulasse pas mon comptoir, toi ! »
La perche rousse avait froncé les sourcils mais les coins de ses lèvres s'étiraient en un sourire habitué. Le blond tendit finalement le compte juste à son ami, avant de s'attaquer à la pénible tâche de remplir ses poches à nouveau – il ne pourrait pas mettre ça à la poubelle ? – et de sourire à Roxas. Ce dernier regarda sa montre. Il devait filer.
« Je vous revaudrai ça …
—Demyx. Demyx Stêriad. Je suis souvent là. »
Roxas acquiesça, déposa sa propre monnaie sur le comptoir et partit sans regarder en arrière, café en main.
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Ça ne m'avait pas paru important, sur le moment, ou plutôt, tu ne m'avais pas paru important. Mais je devais savoir, quelque part, que ça compterait, parce qu'il y a ton nom – mal orthographié, Démique Stériade – sur mon journal.
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Je me demandais comment il s'appelait. Il avait l'air mystérieux, avec ses yeux immenses comme une très grande porte fermée. Je me suis demandé s'il comptait revenir, ou pas. Il avait l'air d'être un homme d'honneur, mais un homme pressé, aussi. Il m'avait tapé dans l'œil, je le savais. Axel le savait, aussi.
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10 février
Plus qu'une petite semaine et les vacances seraient là. Enfin. Roxas ferma son ordinateur d'un geste vif. Il avait tout sauf envie de rester dans cet amphithéâtre bondé une seconde de plus. Ça faisait trois jours qu'il subissait les cours seul. Habituellement, il y avait bien Hayner assis à côté de lui, pour lui parler de choses insignifiantes qu'il écoutait par intermittence, mais cet abruti n'avait rien trouvé de mieux à faire que de tomber malade. Genre.
Il avait besoin de se détendre. Il aurait voulu rentrer chez lui, se faire un thé et passer la soirée – non, mieux, le week-end – à lire cocooné dans ses couvertures et ses oreillers, mais il savait déjà que la pile de vaisselle le démotiverait à faire quoi que ce soit. C'était un genre de cercle vicieux. Il rentrait chez lui, il se posait, il se disait qu'il faudrait qu'il fasse la vaisselle, mais pas tout de suite. Il n'ouvrait pas de livre parce que s'il le faisait il y resterait des heures et n'aurait plus le temps de faire la vaisselle, alors il restait à regarder dans le vide. Il naviguait sur internet, puis il se rappelait de la vaisselle. Il ne la faisait pas, mais il s'interdisait de faire quoi que ça soit tant qu'il ne l'aurait pas faite. Il n'osait pas utiliser de tasse, ou de quelque couvert que ce soit, alors il mangeait des sandwich et buvait à la bouteille. Le dimanche soir, il était enfin motivé à faire la vaisselle mais se souvenait de ses devoirs à rendre, et y passait la nuit. Et c'est ainsi qu'il reprenait lundi matin, avec des cernes monstre, sans avoir fait quoi que ce soit.
Donc, élimination de l'option rentrer chez lui – plus tard, peut-être, quand il aurait la motivation de faire la vaisselle directement puis de se reposer.
Restait donc : Traîner en ville ou aller prendre un thé ailleurs. Non seulement Hayner n'était pas là, mais en plus il faisait froid. Va pour le thé. Son salon de thé était fermé pour travaux – ils installaient une mezzanine, ce qui promettait d'être génial, mais Roxas aurait pu se passer de la fermeture. L'histoire de la semaine précédente lui revint en tête. Il regarda l'intérieur de son portemonnaie. Un billet de dix euros et quelques pièces. Parfait.
Il jura en s'engouffrant dans le froid extérieur et enfonça la tête dans son écharpe. Il sortit son paquet de cigarettes de la poche de son manteau et batailla de longues secondes avec son briquet – la faute à ses doigts congelés – pour en extirper une flamme potable. Le tube à cancer réchauffait maigrement les deux doigts qui le tenaient, et à défaut de pouvoir les enfoncer dans ses poches, il fut reconnaissant de la sensation.
Il avança à grands pas vers le café – qui, par chance, se trouvait à à peine dix minutes de marche de l'université. Quand il arriva devant l'enseigne, il avait déjà jeté sa cigarette et ses doigts se réchauffaient dans ses poches. Il examina la salle du regard, et fut à peine surpris de trouver là le blond de la dernière fois. Comme s'il avait intégré que le personnage faisait partie du lieu. Il hésita quelques secondes avant de l'aborder – mais il avait de la chance, il avait une bonne raison pour le faire. Pour une fois qu'il pouvait aborder quelqu'un aussi facilement, il n'allait pas se priver.
Roxas n'était pas particulièrement timide. Juste relativement silencieux, et les gens qu'il abordait tendaient à prendre son silence comme une marque de déception ou de désintérêt, et il n'avait envie ni d'avoir l'air d'un enfoiré ni de se forcer à parler. Il s'assit au comptoir à son tour, laissant un tabouret vide entre eux deux, et, voyant le comptoir vide devant le blond commanda un citron pressé chaud et un thé aux épices. Le barman – le même que la dernière fois – haussa un sourcil mais ne protesta pas. À son grand malheur, le blond semblait très concentré sur les papiers qu'il tenait dans sa main et ne l'avait même pas remarqué. La première fois qu'il l'avait vu, Roxas n'aurait pas cru qu'il puisse sembler si sérieux une seule seconde. Il avait l'air rigolard, le gai luron toujours souriant. Comme quoi, la première impression est rarement complète, voire bonne. Le barman déposa les deux boissons et Roxas prononça, sans regarder l'autre.
« Lequel tu veux ? »
Finalement, le guitariste leva le nez de son cahier, pour fixer Roxas, surpris. Il ne s'attendait pas à ce que quiconque lui adresse la parole, visiblement. Roxas désigna du menton les deux boissons chaudes et l'autre n'eut pas l'air de comprendre plus.
« Pour mercredi dernier. En remboursement.
—Ah ! Mais je suis à peu près sûr que ces trucs sont pas à quatre-vingt-dix centimes.
—Je suis pas à quelques euros près. »
Demyx eut le sourire du type devant qui Dieu vient apparaître pour lui annoncer que l'Enfer n'existe pas et que le paradis, c'est Disneyland gratuit et sans queue. Il remercia chaleureusement Roxas et prit le verre de citron avec la cruche d'eau chaude, y ajouta trois paquets de sucre et commença à touiller. Roxas grimaça. Le sucre, c'était loin d'être son truc.
« Au fait, toi, tu m'as pas dit ton nom !
—Roxas.
—Eh bah enchanté Roxas ! T'habites dans le coin ?
—Un peu plus loin, vers le quartier wutaien. Ma fac est juste à côté, en revanche.
—Ah ouais ? T'es étudiant, donc, c'est quoi qu't'étudies ?
—La civilisation wutaienne, justement.
—La vache, ça doit pas être simple. Moi, j'fais d'la musique, au conservatoire juste à côté. »
Si Roxas ne se trompait pas, le conservatoire juste à côté, c'était le Conservatoire National. Ou le truc où tu dois déjà être un super musicien pour entrer.
« T'as d'jà fait d'la musique ? Tu joues d'un instrument ?
—J'ai fait de la guitare au lycée, comme un peu tout le monde.
—Et t'as pas continué ? Ça d'vait pas être ton instrument. Moi j'adore la guitare, c'est genre toute ma vie, mais j'comprends qu'on accroche pas tout de suite. Si jamais t'as envie de t'y remettre, téléphone-moi, ou même, si tu veux tester d'autres instruments. »
Ou comment donner son numéro en deux lignes de conversation. C'était assez facile, de parler à ce garçon. Roxas récupéra le bout de papier avec les chiffres alignés dans une écriture peu soignée et brouillonne.
« Merci.
—T'inquiètes. J'aime bien donner des cours de musique, si jamais ça t'intéresse, hésite surtout pas.
—Si, hésite, il est dingue, comme prof'.
—Mais, y en a avec qui ça marche ! »
Le barman rit et frotta le crâne de Demyx comme s'il était un enfant.
« En fait, lui, c'est Axel, mon meilleur pote.
—Enchanté. Tu fais de la musique aussi ? »
Le roux grimaça. Roxas fronça les sourcils, peu sûr de comprendre. Demyx rit à son tour et expliqua.
« Il le dit pas trop parce que ça colle pas à son image, mais il a fait du chant lyrique. »
Roxas sentit ses sourcils se rapprocher dangereusement de la plante de ses cheveux et fixa le roux d'un air étonné. Ah, ça, pour ne pas coller à son image, ça ne collait pas. Roxas l'aurait plus vu faire de la batterie, ou bien de la basse, quelque chose de rythmique et énergique.
« Tu sais, Dem', si je le dis pas trop, c'est pas pour que toi tu le dises à tout le monde.
—Ouais, mais c'est Roxas.
—Bien, tu connais son nom depuis cinq minutes.
—Y a pas que ça. Tu lui dis pas, mais en fait, il me plaît. »
Roxas s'étouffa avec son thé. Demyx regardait Axel droit dans les yeux avec un sourire large et imbécile. Il devait avoir mal entendu. Le barman posa la main sur le crâne du blond pour le tourner vers Roxas, qui put lire dans ses yeux un quelque chose de tendre. Alors il n'avait pas rêvé. Demyx baissa les yeux en se grattant l'arrière du crâne. Lui-même avait du mal à croire à son audace.
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Ça avait pas si mal commencé, pourtant. Je me souviens. J'étais juste content de te rencontrer, t'étais un nouveau soleil dans ma vie pluvieuse.
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J'ai beau y penser encore et encore, je le retourne dans ma tête, je sais que j'ai bien fait, à ce moment, de le choisir lui. D'essayer. Je savais qu'ça valait le coup. Je le crois encore.
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All I can say is I was enchanted to meet you.
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Et voilà pour le premier chapitre ! Qu'est-ce que vous en pensez ? Dites-moi !
À plus !
