UN DESTIN CRUEL

La nuit était tombée depuis bien des heures sur la ville de Londres. Bordée par la Tamise, la capitale de l'Angleterre venait de s'endormir. Seules quelques personnes, déambulaient encore dans les rues sombres et balayées par un vent chaud. La température ambiante n'était plus passée sous les trente degrés depuis plus de dix jours. Les traces de la fête du quartier jonchaient les rues. Tous les ans, pendant la nuit du 4 au 5 juin, les habitants du quartier populaire de Southwark célébraient l'anniversaire du fondateur de la grande bibliothèque. Prostrée entre deux caisses de bouteilles d'alcool vides, une jeune femme d'environ vingt-cinq ans dont le stade avancé de la grossesse ne faisait aucun doute, se tenait le ventre en gémissant de douleur. Le travail avait commencé et elle allait accoucher là, dans la rue, sous les yeux de quelques fêtards plus occupés à boire leurs bières au goulot que de s'occuper d'une femme en grande détresse.

Aidez-moi… ; murmurait-elle avec grandes difficultés.

Mais les quelques personnes qui auraient pu l'entendre était beaucoup trop bruyante pour pouvoir discerner cet appel au secours. Les heures passèrent, les douleurs redoublaient de puissance et se manifestaient maintenant de manière beaucoup plus rapprochée. La jeune femme perdit les eaux, quelques secondes à peine, avant que l'église du quartier ne sonne à cinq reprises. Cinq heures du matin… cela faisait maintenant près de sept heures qu'elle souffrait dans l'anonymat le plus total. Le ciel d'un noir ténébreux mais étrangement chaleureux était épuré de tout nuage. Un nombre incalculable d'étoiles scintillaient aux côtés d'une Lune majestueuse à l'éclat presque surnaturel.

Soudain, alors qu'une contraction beaucoup plus douloureuse que les autres lui transperçait le ventre, elle laissa échapper un hurlement déchirant. Un hurlement qui ne passa pas inaperçu, puisque de l'autre côté de la rue, un groupe de jeunes se tourna dans sa direction. Un des adolescents lâcha immédiatement la canette qu'il avait en main et se rua vers la jeune femme.

Madame ! Madame ! lança l'adolescent en s'agenouillant à ses côtés. Ca va ?

Pour toute réponse, la jeune femme poussa un nouveau gémissement. De sa position, il pouvait mieux la voir, c'est alors qu'il vit le ventre de la future maman et se retourna instinctivement vers son groupe d'amis qui n'avaient pas bougé d'un iota.

Eh les gars !!! hurla-t-il. Appelez une ambulance ! Vite !

Après une concertation éclair, le groupe accourra à l'exception d'un qui entra dans la cabine téléphonique la plus proche pour avertir les secours.

Naann… pas d'ambu..lance… ; gémit la jeune femme. Emmenez-moi … à .. Sainte-Mang….ouste… AAAAHH !!

Une énième contraction encore plus douloureuse la fit souffrir. La douleur fut telle qu'elle perdit connaissance. L'adolescent eut tout juste le temps de l'attraper pour la maintenir assise. Puis, ayant quelques notions de secourisme, il la plaça en position de sécurité.

C'est quoi Sainte-Mangouste ? demanda un garçon ayant une corpulence relativement imposante.

Je ne sais pas, je ne connais pas… ; répondit l'adolescent. Mark, ton père est médecin, c'est peut-être un hôpital ou une clinique…

Je ne crois pas, en tout cas il ne m'en a jamais parlé ; rétorqua Mark.

Quelques secondes plus tard, une sirène à peine perceptible se fit entendre dont l'intensité se faisait de plus en plus audible. Après une courte et angoissante attente pour le groupe, des gyrophares bleus firent leur apparition au bout de la rue. L'ambulance roulait à tombeau ouvert. La sirène hurlante ameutait les rares habitants, encore debout à cette heure, à leurs fenêtres. Le véhicule des secours s'arrêta à quelques mètres de la jeune femme et deux médecins accoururent vers elle, en demandant aux adolescents de s'écarter afin de les laisser intervenir.

James, sors le brancard ! lança le plus jeune des hommes en blouse blanche.

Dans la foulée, James, un jeune homme âgé d'une vingtaine d'année, sortit le brancard de l'ambulance et l'amena à ses deux collègues qui venaient d'installer une perfusion au bras de la jeune femme. Mais le travail était déjà trop avancé pour pouvoir espérer la transporter à l'hôpital, les médecins décidèrent de la faire accoucher sur place…

Madame, comment vous appelez-vous ? demanda James qui tentait de la calmer du mieux qu'il le pouvait.

Narcissa… Narcissa Malefoy ; répondit-elle avec difficulté.

Bien… ; poursuivit-il. Tout va bien se passer ! Comment se prénomme le père, que nous puissions le prévenir ?

NON ! protesta-t-elle avec vigueur. Il ne doit pas être courant, il est mauvais, il me cherche depuis des semaines ! Amenez-moi à Sainte-Mangouste !

Sainte quoi ? s'étonna James en lançant un regard perplexe à ses collègues.

A l'Hôpital Sainte-Mangouste ! C'est à Londres ! précisa-t-elle comme si c'était une évidence pour le monde entier.

Les médecins se regardèrent alors dans les yeux avec une incompréhension non dissimulée, jamais de leur vie ils n'avaient entendu parler d'un quelconque hôpital ou autre clinique portant ce nom. Ils en conclurent rapidement que la douleur ajoutée aux effets secondaires des médicaments qu'ils avaient administrés à Narcissa la faisait délirer.

Eh mais ça ne va pas ! gronda un des adolescents qui venait de se faire bousculer sans ménagement.

Un homme à la chevelure noire et grasse avec le teint pâle et cireux, se dégageait un passage pour rejoindre Narcissa dont les yeux se mirent à briller lorsqu'elle l'aperçut. Les médecins, décontenancés par la tenue portée par l'homme, se regardèrent, désabusés.

S'il vous plait, laissez-nous travailler, cette femme a besoin de soins urgents ! protesta un des médecins.

Vous n'êtes que des moldus, vous n'êtes pas compétents ! siffla l'homme dont la grande cape noire retenait encore l'attention des adolescents.

Il se croit à Halloween ce plouc ou quoi ? ricana le plus petit des jeunes hommes.

Fulminant, Severus Rogue fit volte-face et pointa sa baguette magique tout droit vers les adolescents. D'inquiétants crépitements sortirent de son extrémité et le nez de celui qui l'avait interpelé se transforma en un petit groin aussi rose que le postérieur d'un bébé. Des cris de terreur s'élevèrent dans les environs, les adolescents, horrifiés, se sauvèrent sans demander leur reste. Les médecins, quant à eux, étaient terrifiés, ils ne semblaient plus être capables du moindre mouvement.

SEVERUS !!!! tonna alors une voix venue de nulle part, faisant sursauter toute l'assistance.

Mais avant que le professeur de potions de Poudlard ne puisse réagir, un puissant rayon rouge vient le toucher en pleine poitrine et il fut projeté à quelques mètres de là. Le sorcier finit sa course dans un bruit sourd contre une benne à ordure remplie au maximum, il était complètement sonné. Les secouristes, terrorisés, étaient partagé entre protéger Narcissa et fuir le plus loin possible pour échapper à ces étranges évènements. Soudain, sortant de l'ombre, un sorcier entièrement dissimulé sous une cape gris anthracite apparut comme par enchantement devant Narcissa et il fut rapidement rejoint par un second sorcier arborant une chevelure blonde qui n'arrangeait en rien son air malveillant.

Tu as essayé de fuir Narcissa ! vociféra Lucius Malefoy. Tu as essayé de m'enlever mon fils !

Noon Lucius… laisse-le… laisse-nous ! supplia-t-elle en laissant échapper des larmes sur ses joues.

Laissez cette femme ! lança alors une voix bien connue du monde des sorciers.

Albus Dumbledore, le célèbre et puissant sorcier, directeur de l'école de sorcellerie de Poudlard s'avançait d'un assuré vers Voldemort et Lucius. D'un signe de la main, rassurant pour les médecins, il les invita à prendre la fuite le plus rapidement possible. Ce qu'ils firent sans se le faire répéter.

S'attaquer à une femme enceinte… je te connaissais un peu plus courageux Tom… ; lança Dumbledore en menaçant Voldemort de sa baguette magique.

Ce n'est pas elle qui m'intéresse ! répliqua Voldemort. Mais son fils !

Son fils ? reprit Dumbledore avec un ton faussement étonné. Il n'est pas un peu jeune pour rejoindre tes sympathisants ?

C'est mon fils !!!! gronda Lucius Malefoy.

Tiens tiens… Lucius Malefoy… : continua Dumbledore en lui lançant un regard à demi surpris. Alors c'était donc vrai …

Comme si vous l'ignoriez ! ironisa Malefoy.

Mais avant que Dumbledore ne puisse répondre, Severus Rogue se releva et pointa sa baguette vers Lucius Malefoy. Son regard laissait paraître une détermination sans égale.

Expelliamus !!

Pris de court, Lucius Malefoy n'eut pas le temps de réagir et fut heurté de plein fouet par le sortilège. Ce qui le propulsa brutalement contre le mur le plus proche. Egalement surpris par la vivacité de l'attaque, Voldemort s'apprêtait à répliquer, lorsque…

N'essaye même pas !!! gronda une voix rocailleuse venant de derrière le Seigneur des Ténèbres.

Lorsque ce dernier se retourna, il vit Maugrey Fol'œil, accompagné d'une véritable horde d'Aurors prêts à attaqué. Quand il refit face à Dumbledore, il remarqua qu'une dizaine d'autres Aurors avaient rejoints le directeur de Poudlard. Cerné, Voldemort était perdu s'il restait sur place et il le savait pertinemment. Il prit alors rapidement la décision de transplaner et disparut dans un craquement sonore. Une demi-douzaine d'Aurors se ruèrent sur Lucius Malefoy, toujours inconscient, et le ligotèrent fermement avant de l'emmener vers sa nouvelle demeure, la prison d'Azkaban.

Dumbledore, quant à lui, se chargea de transporter Narcissa Malefoy, également inconsciente, à l'hôpital moldu le plus proche. Dès que la jeune femme fut prise en charge par les médecins, Dumbledore quitta anonymement la clinique. Ce qu'il ne savait pas, c'est que Narcissa Malefoy décéda lors de l'accouchement, laissant son fils, Drago Malefoy, sans mère ni père. Dès qu'il apprit la nouvelle, le directeur de Poudlard décida de laisser l'assistance publique placer le jeune Drago dans un orphelinat moldu. Il jugea qu'il en était mieux ainsi pour la sécurité de l'enfant. Mais il ne l'abandonna pas pour autant et le plaça sous surveillance jusqu'au moment où il pourrait rejoindre Poudlard, le jour de ses onze ans.

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