Etait-ce un homme que l'on voyait, là assis sur cette chaise ? La masse était en avant. Sa chevelure gonflée, d'argent tombait sale et mouillée. Tremblotant, il claquait des dents. Son visage était caché sous cette dense cascade. Les mains liées, attachées au siège coulé dans le sol, la silhouette tenta de se débattre une fois, mais la fatigue dévorait ses chairs à nu. Le corps couvert de plaies, les chaînes qui la retenaient claquaient comme celles d'un lugubre spectre.
L'homme derrière elle passa ses doigts gantés de cuir entre ses cheveux et tira son crâne en arrière d'un geste brut. Elle n'eut pas la force de crier, et retint son souffle les yeux voilés. Les lèvres déchirées, il scruta son agresseur. Une fois de plus, il hurlait dans cette langue qu'il ne connaissait que trop bien.
« Hurenkind… »
Les yeux transparents de cet homme n'avaient pas d'âme. Et sourire naissant lui avait glacé le sang.
La porte s'ouvrit avec fracas.
Le captif baissa les yeux, scrutant le nouvel arrivé. Un nouveau spectateur pour venir admirer sa délicieuse agonie. Un homme était là. Et il le connaissait très bien, car il l'avait déjà vu dans les journaux, et avait déjà entendu sa voix à la radio.
- Dieu merci, capitaine vous êtes là, murmura son bourreau, nous essayons de la faire parler depuis près de quatre heures. Il nie toute implication dans les attentats…
L'homme blond avait les cheveux rabattus en arrière, il retira sa main et s'éloigna du prisonnier, qu'il évalua du regard : méprisant et glaçant.
- Bonsoir, Deidara.
La salle était spacieuse, mais particulièrement vide. Seul un évier négligé et un bureau restaient : unique mobilier. Et cette chaise, au milieu, au-dessus de laquelle pendaient quatre chaînes bouffées par la rouille.
- Le Führer a précisé qu'il s'agissait bel et bien d'un sceau de Sharingan, dit le visiteur en ôtant ses gants de cuir.
Ses doigts étaient vernis, sombres et délicats. Il lança un regard à cet homme réduit à l'état de bête : attachée et mise au supplice. Il ne dit rien, et fit quelques pas lentement. Ses yeux rouges étaient profonds, prenants. Son visage, d'une grâce et d'une noblesse absolue était une œuvre d'art – dont le maître était le plus beau de tous les Dieux. L'homme retira sa casquette, sertie d'une croix gammée, et d'une tête de mort. Il la coinça sous son bras.
- Dis-moi, dit-il en se penchant face au prisonnier, tu dois te sentir très puissant de ce que tu as fait.
Aucune réponse.
L'homme avait les yeux fermés. Sa respiration se faisait de plus en plus lente.
Gifle.
Les doigts du capitaine avaient saisi son visage avec, cette fois-ci une douceur dérangeante.
- Je ne suis pas là pour te regarder partir, ni pour te faire partir, Kakashi-san.
- Je continuerai de répéter ce que je dis depuis qu'on m'a emmené ici…
Mr le Capitaine se redressa avec lenteur. Il accorda un bref regard à Deidara, qui avait les bras croisés, près de lui. Aussitôt, il saisit le prisonnier à la gorge, le redressa de tout son poids, et l'attacha, crucifié à ces angoissantes attaches qui lui pénétraient les chairs. Deidara se mordit les lèvres à l'entente du cliquetis des attaches.
Il tourna les yeux vers le capitaine.
- Il dit avoir reçu ce don d'un membre de la famille Uchiwa, souffla Deidara, mais qui voudrait donc léguer un tel don à un enfoiré d'anglais ? Non, non… Je vous le dis, Itachi-sama. Si cette ordure possède cette faculté, c'est parce qu'il l'a sans conteste dérobé à un homme mort !
- Vous avez toujours avancé de grandes hypothèses, Deidara…
Itachi déboutonna la chemise du dénommé Kakashi, puis ôta sa ceinture avec lenteur. Il se tourna vers Deidara.
- …Mais, hélas un brin simplistes.
Deidara fixa Itachi sans cligner des yeux.
- Mais vous avez toutes les preuves, capitaine ! Il faut fusiller cet homme !
- Je sais, et c'est ce que vous allez faire. Demain, à l'aube.
Le visage du détenu était inexpressif, martyr.
- Hélas pour vous, vous n'aurez probablement jamais la vraie version. Cet homme a l'air déterminé à tout raconter au bon Dieu. Penses-tu être un Dieu, Deidara ?
- Non, capitaine, souffla-t-il déstabilisé.
- Le Führer serait probablement honteux de savoir qu'un étranger a réussi à maîtriser l'essence de son art pour des raisons qui n'ont jamais été réellement prouvées.
Il fit glisser la ceinture en cuir de Kakashi entre ses doigts, et la tendit à Deidara.
- Maintenant, amuses-toi, dit-il, il te reste bien dix heures avant de le mettre en joue.
Lentement, Deidara saisit l'objet, interloqué. Itachi l'avait toujours troublé, ses paroles l'envoûtaient. Ce n'était pas ce Mangekyou qui tournait au creux de sa pupille – mais bien un tout. Oh, Deidara savait exactement qui avait le mérite de se mesurer au ciel et qui ne l'était pas. Et Itachi était le plus digne et de loin.
Deidara le regarda partir.
- Où allez-vous, capitaine ?
- Il ne faut jamais manquer les bals de Berlin, Deidara. Malheureusement pour vous, ce soir vous passe sous le nez !...
Il mit sa casquette de nouveau.
- Vous parlez de la réception donnée par Hidan ?
- Oui.
Le capitaine poussa la porte.
- Capitaine ?
Il se tourna.
Deidara entrouvrit les lèvres, puis sourit.
« Passez une bonne soirée… »
Alors, la porte se ferma, et les cris se firent entendre, puissants et incessants. Les bottes cloutées d'Itachi percutèrent le sol trempé du corridor insalubre et le taxi l'attendait.
« Hiver 1944,
L'Allemagne nazie est à son apogée. Les troupes de la Wehrmacht prêtent serment à la croix gammée sertie du stade le plus évolué du Sharingan : le Mangekyou, maîtrisé par le Führer : Madara Uchiwa.
Ses idéaux sont extrêmes. Sa politique de terreur est sans limite. Sa police, la Waffen SS est hautement célèbre pour ses méthodes de surveillance et de cruauté. Le Reichsführer, Itachi Uchiwa dirige des millions d'hommes, dont la proche élite de Madara respectivement composée de Naruto Uzumaki Oberst-Gruppenführer, Deidara, Obergruppenführer, et des autres gradés.
Les domaines exploités par Madara-sama sont multiples. L'armée, l'éducation, la religion, mais aussi la science. Le Docteur Sasori réalise des expériences à long terme dans un périmètre alors inconnu, dans les campagnes reculées du territoire, une zone blanche. Il a pu démontrer à la population et au monde entier la supériorité du Sharingan. »
Hirako Fieldwar présente un récit anciennement publié réécrit.
« Son influence sur toute l'Europe est grandiose. La France entretient une politique de collaboration sévère avec le III° Reich. Ses ennemis sont multiples, de par l'Union Soviétique jusqu'à l'Amérique, émergente et très puissante.
Dès lors, Madara exploite le monde. Il cherche et détruit tous ceux qui se mettent sur son chemin : c'est-à-dire, tous ceux qui n'accepteront pas de s'adonner aux dangereuses illusions du Sharingan, considéré comme symbole de pureté. Les non-adeptes sont dirigés vers des camps de la mort, ou subissent des lavages de cerveaux intenses. »
« Mais Madara a un plan, qui pourrait bien faire entrer son Reich dans l'éternelle victoire.»
« Face à l'adversité, et en pleine guerre, l'Allemagne de Madara se saoule lors des plus beaux bals, colorés, burlesques et joyeux. La musique y est alors grandiose et l'on oublie les Königstiger : on danse. Et la beauté des uniformes se relève : plus figée et plus fascinante encore. »
« Les Bals de Berlin »
« Heil'ge Nacht, du sinkest nieder;
Nieder wallen auch die Träume
Wie dein Mondlicht durch die Räume,
Durch der Menschen stille Brust.»
Le piano était enjoué, ce soir-là. La douce mélodie s'envolait en douceur, puis de plus en plus vite. Les jupons tournaient, et les décorations illuminaient les vestes de ces messieurs. Les officiers discutaient, sous un chandelier chargé, noble et lumineux. Le violon était festif et les buffets étaient divins, sucrés et salés. Les grappes de raisin étaient gorgées d'un jus extraordinaire et coulaient contre les lèvres des femmes assoiffées. Il était encore tôt, et pourtant les esprits déjà, s'échauffaient dans ce beau palais.
Le plus jeune gradé, Naruto Uzumaki flânait près des fenêtres, l'œil rêveur. Les balcons étaient vides, il poussa un bref soupir. Il était vêtu de son uniforme habituel, et tenait une coupe de champagne dans la main. Ses doigts délicats soutenaient le verre, et il but doucement les yeux clos. Le jeune lieutenant était venu mais préférait fuir la présence de ses coéquipiers qu'il jugeait trop abrupts, peut-être trop brutes avec lui.
Une main s'était posée à son épaule.
Il sursauta.
- Capitaine, dit-il une main sur le cœur, je vous croyais parti…
Il avait retiré sa casquette, calée sous son bras. La tête de mort luisait. Sa longue chevelure noire était lisse – parfaitement coiffée et retenue en arrière. Il portait une paire de lunettes rectangulaires qui sublimaient ses traits d'une finesse des plus extraordinaires. Sa veste cintrait sa taille, sa carrure était si imposante.
Le lieutenant rougit sur l'instant. Cette beauté le foudroyait à chaque fois. Et ce sourire était si rare.
C'était Itachi Uchiwa. Son capitaine, et certainement l'homme le plus puissant de l'Axe derrière Madara-sama.
- Encore à l'écart, Naruto-kun, murmura-t-il d'une voix grave et sensuelle.
- Pardonnez-moi capitaine… Mais, j'aimerais aller fumer.
Il déposa le verre sur une commode, à côté de lui et fouilla dans une de ses poches.
- Tu fumes ? s'étonna le capitaine.
- Je travaille sous vos ordres depuis près de deux ans et vous ignorez tant de choses à mon sujet, soupira-t-il en passant par une des portes qui menaient aux balcons.
Le capitaine le suivit. Le jeune Naruto s'avança, son briquet était à court de gaz. Agacé, il poussa une exclamation embêtée. Itachi tendit un briquet enflammé sous sa cigarette et Naruto leva ses grands yeux bleus vers lui. Il tira une bouffée d'air impur, figé.
« Merci, capitaine. »
- Tu ne viens pas assez souvent aux bals, Naruto-kun.
- Si c'est pour finir sur les balcons de ces bals…
La vue était splendide. Les lumières de la ville étaient belles, éparpillées en poussière. Naruto esquissa un faible sourire en s'avançant. Il parcourut d'un regard large cette magnifique cité qui était sienne.
- N'est-ce pas infiniment plus beau, ici, Itachi-sama ?
Il expira la fumée, les yeux plissés. Le capitaine observa ce faciès qu'il n'appréciait que trop. Itachi s'avança, alors que Naruto portait toute son attention sur la ville qu'il avait là. Il leva les yeux au ciel. Il neigeait faiblement. Il sourit largement cette fois, et ce malgré l'imposante présence de ce capitaine derrière lui. Il leva un bras, saisissant les flocons qui tombaient avec lenteur. Il serra le poing.
« Il neige… »
Naruto sentait les bras d'Itachi entourer sa fine taille. Il baissa doucement le bras et se retourna. Il croisa son regard, les hélices rouges étaient si paisibles.
« Et je suis en train de rêver, n'est-ce pas ? »
Note de fin de prologue : Je viens de mettre de côté Bella Storia Rivoluzione pour me consacrer à la publication de ma nouvelle « version » des Bals de Berlin – quelques détails rajoutés mais aucun changement majeur au niveau du scénario donc, je garde la même trame narrative. Alors, je tiens à vous dire premièrement que je ne suis pas nazi je suis seulement un grand passionné du III° Reich – c'est une période historique qui me parle énormément. Pour ceux qui ont déjà lu cette fiction je vous invite à me faire partager vos impressions quant à cette nouvelle approche qui je l'espère, gardera toute sa saveur et saura même la sublimer encore. Je vous remercie de votre fidélité, et vous invite à me faire part de vos ressentis. Le texte en allemand, ce sont les paroles de « Nuit et rêve » de Schubert, je vous ai donc fait une traduction en français ci-dessous. Bien à vous, Hirako.
« Chère nuit, tu t'enfonces désormais, tout comme les rêves. Semblable à la lune au travers des chambres, au travers des poitrines silencieuses de ces gens. »
P.S : Je vous invite à écouter l'interprétation de cette chanson par Elizabeth Schumann sur youtube : watch?v=xeCXPa3KC1w&feature=related
