Disclaimer : Final Fantasy et ses personnages ne m'appartiennent pas.
A/N : Bonjour à toutes et à tous, et bienvenus! Pour cette toute nouvelle histoire, je ne me base que sur l'univers de Final Fantasy, tous épisodes confondus. J'ai envie de changer un peu de ce que j'ai l'habitude de faire et de m'amuser avec des personnages plus matures et plus sombres. Kingdom Hearts, c'est bien beau, mais ça ne colle pas forcément avec toutes les idées que je peux avoir. Mais qu'est-ce qu'elle nous chante-là? vous demandez-vous. Je crois que le mieux, pour que vous compreniez, c'est encore de vous laisser lire ce chapitre, qui sert plutôt d'introduction à l'histoire. J'espère que vous vous amuserez bien avec celui-ci et, qui sait, avec cette nouvelle fanfiction. Oh, et une dernière chose : si vous n'êtes pas particulièrement friands de boys love, mieux vaut ne pas continuer. Pour tous les autres, bonne lecture!
_-Introduction ou L'Avenue du Sans-Abri-_
Neuf-mille-huit-cent-cinquante-six pas toutes les dix minutes. Huit-million-quatre-vingt-dix mots prononcés durant le même laps de temps. Telles étaient les estimations faites pour on ne sait quelles obscures raisons concernant l'avenue la plus empruntée de Midgar. Y passaient quotidiennement hommes et femmes d'affaires, postiers, coursiers, promeneurs et ouvriers. Le nombre de pas avait considérablement baissé, et le nombre de mots prononcés augmenté, le jour où un malheureux piéton fut renversé par une voiture. Les discussions étaient allées bon train, mais l'affaire avait vite été oubliée en l'espace de quelques heures seulement.
« Tu te rends compte? Cinquante pour cent sur la dernière collection! C'est carrément - »
La jeune femme qui s'extasiait de sa toute dernière trouvaille – une magnifique paire de chaussures hors de prix achetée en solde – était tellement absorbée par le sujet qu'elle ne vit pas qu'elle était sur le point de percuter une personne de plein fouet. La malheureuse tomba à terre de façon peu gracieuse, et son sac s'ouvrit pour répandre son contenu sur le bitume. Son amie l'aida à se relever.
« Je suis navrée, je ne vous avais pas vu. » s'excusa-t-elle auprès de l'inconnu.
Ce dernier tourna vers elle un regard dénué d'expression, voire glacial. Mais ce que notre amie remarqua en premier, ce fut le physique impeccable de l'individu. Des vêtements luxueux qui semblaient sortir tout droit d'un magazine de mode branché, une chaîne en argent ornée d'un pendentif à forme animale, et des cheveux châtains soigneusement décoiffés qui donnaient un style un peu rebelle à celui qui n'allait pas tarder à briser l'image d'Apollon que la malheureuse femme s'était faite en quelques secondes.
« Au lieu de jacasser, vous feriez mieux de regarder devant vous. »
Et voilà. Onze mots de plus à ajouter à tous ceux prononcés sur les dix dernières minutes.
La jeune femme se sentit rougir des pieds à la tête. Non pas qu'elle se sentit émoustillée; bien au contraire. Elle était vexée du peu de considération dont ce rustre venait de faire preuve. S'excuser ne devait pas être assez pour lui... Elle continua son chemin, son amie toujours à ses côtés, en proférant des mots tous plus grossiers les uns que les autres à l'encontre de l'étranger. Ce dernier, pour sa part, n'y prêtait déjà plus attention.
Il fallait dire qu'il ne se trouvait pas à cet endroit par hasard. Il se tenait à l'emplacement même où un homme s'était fait écraser. L'individu en question, Seifer, lui avait révélé la zone exacte de l'accident et il s'y était rendu pour mener sa petite enquête; enquête pour l'instant infructueuse. Tout ce qu'il pouvait voir, c'était que les traces de l'incident avaient complètement disparu de la chaussée.
Pourquoi tout cela l'intéressait-il? Eh bien, c'était en partie à cause des circonstances pour le moins inhabituelles dans lesquelles ce Seifer s'était fait renverser. Il avait affirmé ne pas avoir vu de voiture au moment où il avait voulu traverser et des témoins – qui avaient été bien difficiles à retrouver d'ailleurs – avaient appuyé ses propos. Il était alors revenu sur les lieux de l'accident mais il devait encore trouver quelque chose d'intéressant. Et justement, à ce propos...
Sur le trottoir d'en face, il y avait une demoiselle qui attendait là depuis un bon moment. Elle semblait très calme, un peu trop même. L'individu soupira, conscient qu'elle était probablement la seule qui accepterait de répondre à quelques questions. Et puis si elle attendait là, c'était certainement parce qu'elle connaissait l'endroit. Il traversa donc la rue avec précaution et s'approcha d'elle. Vue de plus près, elle n'avait pas l'air engageante. Ses cheveux gris couvraient une partie de son visage et elle portait un cache-œil. Le seul qu'il pouvait voir le fixait avec méfiance.
« Vous êtes qui? demanda-t-elle en croisant les bras.
- Squall Leonhart. J'aurais quelques questions à vous poser, répondit Squall en mettant les mains dans les poches.
- Vous êtes flic?
- Pas vraiment, non, mais j'enquête sur un incident qui a eu lieu ici il n'y a pas très longtemps. Vous en avez peut-être entendu parler?
- Pourquoi ça vous intéresse si vous êtes pas de la police?
- Eh bien-
Squall n'eut pas le temps de finir sa phrase. Sortant d'une ruelle toute proche, un chien déboula dans leur direction, ses babines retroussées révélant ses crocs. Squall le sentit immédiatement : ce chien ne s'en prendrait pas à lui. À la place, la fille qu'il était en train d'interroger se fit agresser par le molosse. L'animal lui attrapa le bras et ne lâcha prise qu'après qu'un coup de pied le fasse crier et se sauver à vive allure.
Sans qu'elle le sache, cette femme venait d'avoir la réponse à sa question : c'était le troisième incident à survenir à cet endroit précis de l'avenue.
Squall avait suivi Fujin – la victime la plus récente – jusqu'aux urgences de Midgar. L'hôpital de la ville était au moins aussi accueillant que la mégalopole – c'est à dire pas du tout. L'extérieur du bâtiment était gris, l'intérieur l'était aussi et pour parfaire le tableau, les lieux étaient mal éclairés, à tel point que l'on aurait pu se demander si les chirurgiens ne travaillaient pas à l'aveuglette. Ses doutes mis de côté pour l'instant, Squall attendit patiemment qu'une infirmière lui donne la permission d'entrer dans la chambre de la patiente. Elle se faisait encore ausculter et devrait rester un moment, le temps de recevoir les résultats de son analyse sanguine. Un quart d'heure s'écoula. Un quart d'heure à regarder le personnel passer devant lui, sans jamais lui jeter le moindre regard. Peu importait. Il n'était pas là pour discuter avec eux de toute façon.
« Monsieur? »
Le châtain leva la tête en entendant une voix l'appeler depuis la porte en face de lui. L'infirmière semblait avoir fini son travail. Elle sortit de la chambre et laissa la porte ouverte en partant; une façon de lui dire qu'il pouvait entrer à présent. Il ne se gêna pas. Squall prit soin de bien refermer la porte derrière lui, soucieux de ne pas laisser l'opportunité à des oreilles indiscrètes d'écouter leur conversation. Sans y avoir été invité, il vint s'asseoir sur la chaise placée près du lit sur lequel Fujin s'était assise. Elle le fusilla presque du regard.
« Vous êtes encore là?
- Je n'en avais pas tout à fait terminé avec mon interrogatoire, répondit-il calmement. Vous avez dû comprendre pourquoi je suis cet incident de près. »
La jeune femme baissa la tête et fixa les draps du regard. « Quand ce chien nous a foncé dessus, vous n'avez pas cherché à vous enfuir.
- Parce que je savais qu'il ne me ferait rien.
- Comment..? demanda-t-elle, les sourcils froncés.
- C'est vous qu'il a regardée en sortant de la ruelle. Il ne vous a jamais lâchée du regard.
- Pourquoi vous n'avez rien fait alors? » s'énerva Fujin en serrant la main autour de son bras bandé. La peau autour de la plaie commençait déjà à noircir. Elle allait la faire souffrir pendant un petit moment.
« Par expérience, je sais que ce genre de fait ne se produit pas sans raison. J'imagine que vous avez fait quelque chose qui aura fini par vous attirer des ennuis. »
Sa réponse eut pour effet de définitivement faire enrager la patiente. « Je vous emmerde. Ce que je fais vous regarde absolument pas.
- Alors j'ai vu juste. 'Seifer', ça ne vous dit rien? C'est la personne qui a été -
- Renversée par une voiture. Oui, je le connais; et non, ça vous regarde pas non plus. Maintenant, foutez le camp d'ici. »
Conscient qu'il n'y avait plus rien à tirer de Fujin, Squall se retira sans faire d'histoire. Ce n'était pas grave, il avait eu des éléments de réponse. Ces deux-là filaient un mauvais coton et ils avaient récolté ce qu'ils avaient semé. Le châtain ignorait encore quels avaient été ces agissements mais une chose était certaine : ils s'étaient produits dans cette avenue, à l'emplacement même où ils avaient été blessés. Il aurait probablement plus de réponses là-bas qu'auprès des blessés.
« Je tourne en rond. » se dit Squall en poussant un long soupir. Si ses enquêtes étaient plus simples, il n'aurait pas besoin de faire autant d'aller-retour, mais il n'avait jamais vraiment cherché à faire simple. En fait, rien n'était aisé avec lui et il était rarement en tort.
De retour dans le plus grand boulevard de Midgar, Squall ne put s'empêcher de se sentir un peu intimidé par la foule compacte qui y circulait en permanence. Il avança donc avec prudence pour ne pas se faire bousculer. De mauvais tours lui avaient appris à ne jamais laisser des inconnus l'approcher de trop près, au risque de se retrouver avec des poches plus légères. Fort heureusement pour lui, il dégageait une aura qui repoussait généralement les gens et il n'avait donc pas à se donner trop de mal. Cependant il ne serait jamais assez prudent et il préférait donc ne pas trop se reposer sur l'impression qu'il donnait à son entourage.
Enfin de retour près de la ruelle, il s'adossa contre le mur d'un immeuble et scruta les environs. Près d'une heure passa sans qu'il ne se passe quoi que ce soit. Agacé d'avoir perdu tout ce temps à ne rien faire, le châtain se mit à interpeler les passants pour se renseigner. Peu d'entre eux acceptèrent de lui répondre, soit trop pressés, soit trop méfiants. Une vieille dame voulut bien lui accorder un peu de son temps.
« Est-ce qu'il y a eu quelque chose en particulier dans cette rue? demanda patiemment Squall.
- En particulier? Quelque chose comme..?
- À peu près n'importe quoi : un incendie, un meurtre, un cambriolage, l'aida le châtain.
- Il y a bien eu une chose de ce genre, oui. » répondit la vieillarde. Squall se redressa subitement, intrigué. « Un garçon a été renversé par une voiture. »
Le châtain se retint de soupirer de façon trop évidente. « Et avant ça?
- Avant? Euh... Je ne saurais pas vous dire, jeune homme.
- Ce n'est pas grave. Merci quand même. » la remercia poliment Squall.
Il était toujours cloué à la case départ. Il regarda la vielle dame s'éloigner et reprit appui contre le mur derrière lui. Distraitement, il plongea une main dans la poche de son blouson et en sortit une petite fiole en cristal remplie d'eau. La bouteille était un véritable témoignage de patience et de délicatesse. Les motifs qui la décoraient étaient fins et parfaitement symétriques, autant que la plupart des objets produits à la chaîne. Cependant, cette fiole était unique en son genre. Squall la leva près de son visage et préféra en observer le contenu. L'eau qu'elle contenait était claire et totalement plate. Il en fut sincèrement déçu.
« Oh! »
Ravi qu'il se passe enfin quelque chose de potentiellement intéressant, le châtain rangea la petite bouteille dans sa poche et leva les yeux. Il battit des paupières à plusieurs reprises en remarquant que la rue était presque vide à présent. S'était-il donc écoulé tellement de temps? Mais là n'était pas le plus important. Juste devant lui, une jeune femme s'était accroupie au sol. Squall la félicita mentalement de tant d'audace. La robe jaune qu'elle portait était courte et menaçait de révéler ses sous-vêtements tant le tissu s'était tendu. L'inconnue se releva avant même qu'il ne songe à la mettre en garde. Elle tenait une enveloppe dans les mains et en étudiait le contenu d'un œil inquiet. Elle se tourna alors vers lui. Des yeux verts l'étudièrent soigneusement avant de se baisser vers le pli. En bougeant la tête, ses cheveux châtains s'agitaient comme l'aurait fait un flan sur une table chancelante.
« Est-ce à vous? » finit-elle par demander à Squall.
Il haussa un sourcil. « Tout dépend de quoi vous parlez.
- De cette enveloppe, évidemment, dit la châtaine.
- Alors non. » La jeune femme sembla bien embêtée par cette réponse. « Vous auriez préféré?
- Franchement? Je sais pas trop. Ça fait un sacré paquet...
- Je peux me permettre de vous demander ce qu'elle contient? »
La femme se méfia, ce qu'il comprit aisément. « Une grosse somme d'argent. » répondit-elle néanmoins.
Squall écarquilla les yeux. Encore un fait inhabituel au même endroit. Ça ne pouvait pas être une coïncidence. Visiblement, d'après ce qu'il avait appris de Fujin, les personnes visées ne l'étaient pas sans raison. Celle-ci avait eu plus de chance que les autres apparemment. À moins qu'il ne s'agisse d'argent volé...
« Si seulement il était encore là. J'aurais pu lui en donner au moins la moitié. » dit la jeune femme, plus pour elle-même que pour Squall. Cependant il entendit très clairement ses mots.
« Qui ça?
- Un homme qui était toujours assis sur ces marches, dit-elle en désignant l'entrée de l'immeuble devant lequel ils se trouvaient. Le pauvre avait été expulsé de chez lui et s'était retrouvé à la rue du jour au lendemain. Un homme très gentil.
- Où se trouve-t-il actuellement? demanda Squall, bien qu'il se doutât de ce que l'inconnue allait lui répondre.
- Il est mort pendant l'hiver. Il a été particulièrement rude cette année. Le pauvre homme n'aura pas su passer la nuit. »
Une bien triste fin. Peut-être était-ce cet homme qui avait provoqué ces événements? Squall se réjouit intérieurement de pouvoir enfin avancer un peu. À son tour, il aiderait cette femme à se sortir de la situation délicate dans laquelle elle se trouvait. Cette somme d'argent appartenait peut-être à une personne qui la recherchait – il serait naïf de sa part de penser la retrouver, mais on ne savait jamais.
« Allons au poste de police le plus proche pour signaler que vous avez trouvé cette enveloppe. » proposa-t-il.
La châtaine écarquilla les yeux. « Mais ils vont tout garder pour eux si je fais ça!
- Mais si vous ne dites rien, le propriétaire de cet argent ne le retrouvera jamais. Ne vous inquiétez pas. Laissez-moi faire et vous pourrez être certaine que cet argent restera entre de bonnes mains. »
Elle sembla hésiter un instant, mais elle décida de lui faire confiance. Quel autre choix avait-elle de toute façon? Le duo se rendit donc au commissariat le plus proche et, comme promis, Squall se chargea de parler aux agents. Il se présenta, accompagné de Selphie (elle lui avait révélé son prénom en chemin) à l'accueil et expliqua la situation.
« Alors vous n'avez aucune idée de l'identité du propriétaire de l'enveloppe? questionna l'homme en tapant quelque chose sur son ordinateur. On pourrait passer une annonce et la garder en attendant que son possesseur se présente. »
D'après les quelques regards d'autres agents dans leur direction, Squall avait la très nette impression que l'annonce ne serait jamais passée. « En fait, il vaudrait mieux que nous le gardions et que vous nous contactiez quand vous aurez une réponse.
- Vous pouvez faire confiance aux policiers de Midgar, monsieur.
- Je n'en doute pas, mentit aisément le châtain, mais le problème, c'est que cet argent est maudit.
- Maudit?
- Mon amie ici présente a voulu l'utiliser pour me faire un cadeau, mais à peine l'ai-je déballé que des choses se sont produites.
- Des choses comme? » demanda le policier, intrigué. Autour d'eux, les autres agents tendaient discrètement l'oreille.
Squall se retint de sourire sournoisement. Il les tenait dans le creux de sa main. « Je me suis d'abord coupé avec le papier de l'emballage. J'aurais dû me douter de quelque chose, mais comme tant d'autres, j'ai mis ça sur le compte de ma maladresse. Finalement, quand j'ai ouvert le paquet et que j'ai voulu essayer le magnifique briquet qu'elle m'avait acheté, il m'a littéralement explosé dans la main. » Voyant que l'inspecteur ne semblait pas tout à fait convaincu, Squall leva les mains et entreprit de retirer l'un de ses gants. « Si vous le souhaitez, je peux vous montrer.
- Ce ne sera pas nécessaire. » l'interrompit l'homme avant qu'il ne puisse retirer ne serait-ce qu'un doigt. Le regard nerveux qu'il lança en direction de l'enveloppe que tenait toujours Selphie fut le seul signe dont Squall eut besoin pour savoir qu'ils repartiraient avec l'argent. « Je vais devoir prendre vos coordonnées pour pouvoir vous contacter si on répond à l'annonce. Et aussi le numéro de série inscrit sur l'un des billets. »
Après avoir laissé son numéro de téléphone portable, Squall sortit du commissariat, suivi par la jeune femme. Cette dernière était extatique.
« Vous avez été formidable! Je n'aurais jamais osé leur mentir comme ça, lui confia-t-elle. Mais qu'est-ce que vous auriez fait s'il vous avait demandé de lui montrer votre soi-disant brûlure?
- J'aurais fini d'enlever mon gant. Je me suis vraiment brûlé la main il y a peu.
- Ah bon? Qu'est-ce que vous vous êtes fait?
- Ce que j'ai dit. Un briquet qui a pour ainsi dire explosé dans le creux de ma main. »
Selphie fronça les sourcils, pensive. « C'est possible, ça?
- En principe, non. Je n'avais pas de produit inflammable sur la main ou quelque chose qui aurait pu provoquer d'explosion.
- C'est vraiment bizarre. »
Squall eut un sourire amer. « Ce genre de chose est fréquent pour moi, bien que je ne sois pas toujours visé aussi directement. »
Selphie hocha distraitement la tête, perdue dans ses pensées. « Dites-moi, Squall, qu'est-ce que vous faites comme travail qui soit aussi dangereux?
- Vous ne me croiriez pas.
- Essayez toujours. Je suis une personne très ouverte d'esprit, insista-t-elle.
- Eh bien, soupira-t-il, ce que je fais n'a pas vraiment de nom. En gros, j'enquête sur des affaires inexplicables, comme celle dont vous faites à présent partie.
- Je fais partie de ce genre d'histoire? demanda Selphie, sincèrement surprise.
- Il y a eu plusieurs incidents à l'endroit même où vous avez trouvé cet argent. D'après moi, ce n'est pas un hasard. J'imagine que vous devez déjà avoir une petite idée de ce que je veux dire par là.
- Il y aurait une raison pour que tout se soit produit là où traînait Biggs?
- C'est ce SDF?
- Oui. »
Selphie parut vouloir continuer, mais elle n'osa pas; ce que le châtain comprit parfaitement. Il le fit donc à sa place.
« Vous croyez aux fantômes?
- Je m'y intéresse un peu, mais sans plus. Ça m'effraie. Je sais que c'est stupide, mais -
- C'est l'un d'entre eux qui m'a blessé. Vous avez toutes les raisons de vous méfier. »
Il s'en souvenait encore très bien. Il s'était rendu chez un homme qui avait fait appel à lui suite à des pannes récurrentes chez lui : des télévisions neuves qui ne fonctionnaient pas, l'électricité qui se coupait sans raison apparente... Squall avait voulu utiliser un briquet pour ne pas être complètement plongé dans la pénombre et avait fini aux urgences. L'affaire avait été particulièrement pénible et il était heureux d'en être enfin débarrassé. Fort heureusement, tous les cas qu'il étudiait n'étaient pas aussi dangereux. Celui-ci, par exemple, ne le visait pas lui, et il pouvait donc travailler sans trop de risques.
« Je pense que Biggs est derrière tout ça.
- Vraiment? Mais pourquoi est-ce qu'il ne m'a rien fait à moi? demanda Selphie tandis qu'ils retournaient dans le boulevard.
- Certainement parce qu'il n'a pas de raison de vous en vouloir. Je me trompe en disant que vous l'avez aidé?
- Non. Je lui donnais souvent de l'argent quand j'en avais sur moi. Je me souviens lui avoir même acheté un sandwich et un café un jour. Je n'ai jamais vu quelqu'un se réjouir de si peu de choses. Le pauvre devait avoir la vie dure... »
Squall la regarda du coin de l'œil, un sourire discret aux lèvres. « Si mon intuition est bonne, vous pourrez garder cet argent alors.
- Ah bon?
- Oui. C'est certainement sa façon de vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour lui. »
Comme Squall l'avait prédit, une semaine plus tard, le commissariat l'appela pour lui apprendre que personne n'avait réclamé l'argent. Bien évidemment, il y avait eu de nombreux prétendants, mais aucun ne fut capable de donner un numéro de série. Si beaucoup s'étaient plaints de ne pas avoir fait attention à ce genre de détail, les policiers leur avaient répondu que c'était la première chose à faire si l'on était en possession d'une grosse somme d'argent. Squall avait contacté Selphie pour lui transmettre les informations et elle avait tenu à l'inviter à prendre un café pour le remercier.
« C'est la moindre des choses que je puisse faire, lui dit-elle. Grâce à vous, je vais pouvoir utiliser cet argent pour ceux qui en ont le plus besoin.
- C'est à dire? voulut savoir le châtain avant de boire une longue gorgée du liquide noir et amer.
- Il y a près d'ici un refuge pour sans-abris qui a bien besoin d'être remis à neuf. J'ai déjà parlé avec le directeur et les travaux pourraient commencer très bientôt. »
La châtaine se lança dans le récit détaillé de tout ce qui se ferait sur place et Squall ne l'écouta plus qu'à moitié. Il comprenait pourquoi l'esprit s'était montré aussi généreux envers elle. De toute évidence, Selphie avait le cœur sur la main. Seifer et Fujin, eux, n'avaient pas dû être aussi sympathiques. Il n'en saurait pas davantage à leur sujet; en tout cas, ils ne lui diraient rien. S'il pouvait voir ce Gibbs, par contre, il aurait tous les éléments en main et pourrait boucler l'affaire une bonne fois pour toutes. L'esprit ne semblait pas spécialement mauvais, mais il n'était pas non plus totalement bon. Il valait mieux le renvoyer sans trop tarder. Qui savait ce qui arriverait à sa prochaine cible? Seifer avait eu de la chance de ne pas mourir écrasé par cette voiture.
« Si je vous ai demandé de venir, ce n'était pas uniquement pour vous remercier, en fait, confia subitement Selphie.
- Ah? fit Squall en levant la tête vers elle.
- Vous avez entendu parler de la demeure de Heidegger?
- Pas vraiment, non, admit Squall.
- C'est un homme très riche. Il paraît qu'il a fait l'acquisition d'une très jolie harpe récemment.
- Et vous m'en parlez parce que..?
- Eh bien, depuis qu'il a cet objet, des choses se passent chez lui; rien de très beau d'après ce qu'on m'a dit. Des personnes auraient été retrouvées mortes, leurs yeux arrachés. »
La jeune femme ne put retenir un frisson d'effroi. Squall, lui, leva une main à son menton, intrigué. Pourquoi n'avait-il rien entendu de tout ça pendant son séjour en ville? Probablement parce que Heidegger étouffait l'affaire. Il avait les moyens de le faire apparemment. Oui, il irait très certainement lui rendre visite dès qu'il en aurait terminé ici.
« Je savais bien que ça vous intéresserait, dit Selphie en souriant malicieusement.
- En effet. Merci de m'en avoir parlé. »
L'expression de la châtaine s'assombrit légèrement. « Faites attention à vous quand vous serez là-bas, d'accord? Je ne voudrais pas qu'il vous arrive malheur par ma faute.
- Ne vous inquiétez pas pour ça. Je ne peux pas encore mourir. Trop de choses à faire d'ici là. » Selphie parut un peu plus inquiète, mais il l'ignora. Il se leva de table et laissa un pourboire. « Je vous remercie pour le café. Bonne chance pour la suite. »
Sans rien ajouter d'autre, il quitta l'établissement et se rendit à nouveau là où Biggs passait ses journées de son vivant. En levant les yeux au ciel, le châtain remarqua que les lampadaires étaient déjà allumés. La nuit ne tarderait plus à tomber, même s'il était difficile de s'en rendre compte à cause de la quantité de fumées toxiques qui flottaient constamment au dessus de la ville. À cette heure avancée de la journée, le boulevard paraissait bien vide. Il n'y avait plus autant de piétons ni de voitures. C'était mieux comme ça. L'esprit apaisé, Squall se dirigea vers l'immeuble où son enquête avait débuté. Le châtain ne fut pas déçu d'y voir un homme en haillons, assis sur la première marche, le regard dans le vague. Squall le rejoignit.
« Je peux? » demanda-t-il en désignant la marche d'un coup de menton.
L'inconnu leva vers lui des yeux surpris. « Vous pouvez me voir?
- Vous êtes Biggs, je présume, répondit le châtain en prenant place sur la marche.
- En effet.
- Ça tombe bien. J'ai à vous parler. »
Le fantôme se méfia. Il observa son voisin des pieds à la tête pendant de longues minutes avant de parler à nouveau. « À quel sujet?
- Seifer, Fujin et Selphie. Ces noms ne vous sont pas inconnus.
- Qu'est-ce que vous voulez à la petite Selphie?
- Plus rien maintenant. Elle m'a bien aidé. C'est une brave fille. »
Biggs baissa les yeux vers le bitume, l'air soudain nostalgique. Un sourire fatigué fit s'étirer ses lèvres. « Jamais vu quelqu'un d'aussi serviable qu'elle. Elle a trouvé mon cadeau?
- Oui. Elle en fera bon usage. Vous voulez peut-être plus de détails?
- Non, je lui fais confiance. Je sais qu'elle s'en servira de la meilleure façon qu'il soit, dit l'esprit en fermant doucement les yeux.
- Et pour les deux autres? Qu'est-ce qu'ils vous ont fait pour être blessés à ce point? » osa Squall.
Le vagabond fronça les sourcils et les traits de son visage se durcirent. « Ces bons à rien s'imaginent que tout leur est dû. Eux aussi pourraient bien se retrouver à la rue comme moi. Ils ne comprennent pas ça.
- Ils se sont moqués?
- Ils ont détruit le peu de fierté que j'avais encore. Je me suis senti minable, assis sur cette maudite pierre jour et nuit. Quand la petite Selphie m'a parlé pour la première fois, j'ai retrouvé un semblant de dignité. Elle passait parfois beaucoup de temps à me parler, vous savez. Elle se fichait complètement des regards écœurés que les passants nous jetaient. Ça ne l'empêchait jamais de rester avec moi. Le temps me semblait moins long et je ne pensais plus à ma misérable personne. J'étais vraiment heureux d'attirer encore l'attention de quelqu'un, mais je crois qu'il valait mieux que je parte.
- Vous n'êtes pas mort de froid?
- J'aurais pu aller dans l'un de ces refuges. Un bénévole est venu me voir ce soir-là. Il m'avait prévenu que la nuit serait plutôt rude, qu'il valait mieux que je me mette à l'abri. Mais j'ai refusé. Je me suis laissé crever de froid sur cette marche. Selphie n'aurait plus à dépenser de l'argent pour un bon à rien comme moi. Je n'avais plus rien à attendre de la vie, de toute façon, alors qu'elle...elle est encore jeune. Elle peut encore faire des tas de projets. »
Squall soupira et mit les mains dans les poches de son blouson. Les nuits étaient encore très fraîches.
« Je doute qu'elle ait eu aussi peu de considération pour vous. Elle avait vraiment l'air triste quand elle m'a parlé de vous. » Il regarda un homme passer devant lui d'un pas pressé. Il devait le prendre pour un fou à l'entendre parler tout seul.
« Si vous restez là à me parler comme ça, vous aussi on va vous prendre de haut, l'avertit le fantôme. Pourquoi vous perdez votre temps avec moi? Y a plus rien à faire.
- Je le fais parce que je le dois. C'est comme ça. Et détrompez vous; il y a encore une chose à faire.
- Vraiment?
- Vous laisser reposer en paix. » Biggs évita son regard en entendant ses paroles. « Qu'est-ce qui vous retient ici?
- C'est... Je sais pas trop. J'imagine que ça m'effraie un peu.
- Si l'Au Delà était un endroit aussi terrible, je pense qu'on verrait plus d'esprits qui s'en sont échappés. Tous ceux que j'ai rencontrés jusqu'à présent n'y étaient encore jamais allés.
- Et si on les voit pas parce qu'ils peuvent pas en partir?
- Croyez-moi, quand on veut s'en aller, on finit toujours par y parvenir, dit Squall en levant la tête pour observer les environs. Je pense que le décor doit être vachement plus sympa là-bas. »
Biggs laissa échapper un petit rire amusé. « C'est pas compliqué de trouver plus beau que Midgar. Tout est gris, les gens font la gueule à longueur de journée et ça pue les ordures à tous les coins de rue.
- Alors pourquoi hésiter plus longtemps? »
Le fantôme réfléchit un instant à ce que Squall venait de lui dire, puis il se leva brusquement et se tint devant lui, le dos tourné. « Vous avez raison. À quoi ça sert de mourir si c'est pour être encore plus malheureux qu'en étant vivant? »
Malgré le côté sombre de ces paroles, Squall ne put s'empêcher de sourire. Cet homme ne savait pas à quel point il comprenait ce qu'il devait ressentir.
« Selphie s'en sortira, n'est-ce pas? voulut savoir l'esprit sans se retourner.
- Elle s'en sort déjà très bien. Ne vous inquiétez plus pour elle. » le rassura Squall.
Biggs se contenta de hocher la tête avant de disparaître lentement sous les yeux du châtain. Quand ce dernier se retrouva seul, il étendit les jambes pour réveiller ses muscles engourdis et se leva. À peine eut-il fait trois pas qu'il entendit quelqu'un l'appeler.
« Vous êtes encore ici? Quelle coïncidence! s'exclama Selphie en s'approchant, un bouquet dans les mains.
- Il est un peu tard pour se promener seule, lui fit remarquer le plus grand.
- Je n'en ai pas pour longtemps. Je voulais juste déposer des fleurs, expliqua la châtaine en laissant le bouquet sur la première marche. Je ne sais pas s'il les verra, mais je voulais le remercier de sa gentillesse. »
Elle joignit les mains devant sa poitrine, ferma les yeux et pria pour le défunt. Quand elle eut fini, elle souhaita une bonne soirée à Squall et se retira. Il la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle tourne au coin de la rue et quand il baissa les yeux vers le bouquet, il avait déjà disparu.
Se disant qu'il n'avait plus rien à faire ici, Squall s'éloigna à son tour, sachant déjà ce qu'il aurait à faire dès le lendemain matin.
_-À suivre-_
A/N : Déçus? Comblés? Curieux? Sceptiques? Endormis? (ça peut arriver) N'hésitez pas à laisser vos impressions! Merci d'avoir lu cette introduction et rendez-vous peut-être au premier chapitre. =) Et un autre merci à Flammula pour sa relecture avant publication. X3
