Chapitre 1

Heure à la montre d'Hermione Granger : 10 h 54.

Aujourd'hui 15 Mai 2005 :

6 h 00 : Réveil … Fait.

6 h 15 : Séance de jogging sur Regent's Park … Fait.

7 h 30 : Rentrer + Douche + Nourrir Pattenrond. Vérifier email … Fait.

8 h 00 : Départ pour le Ministère. En route, passer des appels et répondre aux messages en retard … Fait.

8 h 55 : Arrivée au bureau. Checker des nouveaux dossiers. Café … Fait.

9 h 30 : Petit déjeuner avec la déléguée moldue … Fait.

10 h 15 : Retour au bureau. Valider l'affaire des salaires des délégués moldus et celle sur la fraude des échanges de Galions + Porter les dossiers à signer sur le bureau Hedge … Fait.

10 h 25 : Passer au département de la protection moldue pour compléter et signer le dossier de Percy sur l'affaire de l'explosion de l'usine de Chewing-gum détonnant … Fait

10 h45 : Passer au département de la défense interne pour voir Harry. Lui signer son mandat … Fait.

11 h 00 : Retour d'Hedges. Présentation du dossier…

- … Oh ! Merlin ! Le dossier des accords financiers Moldus-Sorciers !

La jeune femme tourna les talons, quitta son bureau et se précipita au département des finances.

10 h 56.

En juin de cette année, on célèbrera les sept ans de capitulation de la guerre civile sorcière. Le Royaume-Uni du côté de la frontière des sorciers ressort à peine de sa reconstruction. Le monde magique a subi une complète restructuration des pouvoirs législatifs, judiciaires et militaires. L'administration a été bouleversée après l'infiltration dévastatrice des mangemorts au cœur des rouages du ministère.

Tout d'abord, au lendemain de la victoire d'Harry sur Voldemort, une vague de procès a été lancée à travers le pays afin de le « purger » des fidèles du Seigneur des Ténèbres. Pendant des mois des Aurors délégués par l'Ordre du Phoenix ont poursuivi sans relâche tous ceux qui avaient commis des crimes au nom de l'idéologie du Maître Noir. Quelques uns n'ont pas voulu se rendre et ont préféré le suicide. En majorité, ils ont été prit alors qu'ils tentaient de s'enfuir en territoires moldus – ce qui fut observé comme un comble par l'opinion publique aux vues de leurs idéologies et de leurs actes. Ils ont été jugés pour crimes contre l'humanité et emprisonnés à Azkaban à perpétuité. Pour les autres, certains ont été tué alors qu'ils refusaient de se rendre et d'autres ont malgré tout réussi comme Greyback ou Rosier à échapper aux prises de la défense interne naissante. Au ministère, beaucoup de places avaient du être remplacées, et pour cause, le « départ précipité » des mangemorts avait fait de lui un vrai gruyère administratif.

Dans un deuxième temps, dans un optique de reconstruction, le ministère de la Magie avait conclut des accords avec Gringotts et l'ensemble des principales banques sorcières pour le débloquement de fonds visant au redressement économique et institutionnel. Une compagne de désarmement mené l'aide de l'Ordre Phoenix a également été lancée afin de mettre fin aux réseaux terroristes de Voldemort. Des aides et des associations ont été créées afin de venir en aide aux victimes directes du conflit, à ceux que la guerre avait touchés par son horreur ainsi qu'aux populations exilées. A la sortie du conflit, Sainte Mangouste fut mis en relation avec des hôpitaux du reste de la Grande-Bretagne.

Enfin, dans le but majoritaire d'éviter un nouveau conflit de la sorte, l'Ordre du Phoenix dont Arthur Weasley avait été mis la tête pour assurer une régence, avait pris provisoirement la dictature du ministère malgré la présence effective de Kingsley Shacklebolt à sa tête et mis en place un nouveau programme de défense interne dont Harry Potter était le chef. Des accords de maintien de la paix et des traités de non-production et de non-commerce de magie noire avaient été ajoutés aux droits juridiques sorciers. Un nouvel amendement sur l'égalité droits et des devoirs des sangs-mêlés et des sangs-purs avait été exceptionnellement rédigé et voté à l'unanimité par le Magemagot pour être apporté à la constitution du gouvernement magique.

De plus, un développement des relations Moldus-Sorciers avait été observé ainsi qu'une amélioration notable de la protection apportée aux sans-pouvoirs. Une armée alliant les deux mondes avait été crées dans ce but et des délégués défendant les intérêts de chaque partie furent intégrés dans chacun des gouvernements.

Conséquence de ces réformes et de changements fondamentaux, de nouveaux départements avaient été créés au sein du ministère tel que celui de la défense interne et celui des relations Sorciers-Moldus.

Hermione était secrétaire déléguée de direction au département des intérêts Moldus. A la fin de la guerre, elle avait œuvré dans de nombreuses associations qui s'occupaient des populations exilées et notamment des moldus qu'on avait fait s'expatrier à cause de la Terreur des mangemorts et du climat dangereux de Londres comme ses parents. Active, militante et travailleuse qu'elle avait été au cœur même du problème et avait rapidement pris, presque malgré elle, des places plus importantes dans ces œuvres et puis peu à peu d'autant plus dans cette administration naissante.

Aujourd'hui, aux talons du directeur d'un des nouveaux départements en pleine expansion au ministère de la magie, celui des intérêts moldus, elle était chargée du compte-rendu de l'ensemble des dossiers qui impliquaient les Moldus de près ou de loin ainsi que de la gérance quasi-complète des principaux dont son supérieur était en charge de représenter. Son département travaillait en étroite collaboration avec celui des relations Moldus-Sorciers, celui de leur protection ainsi que celui des nouvelles forces armées qui abritait la force conjuguée. Si son directeur était l'image du département, elle en était, sinon la tête pensante, du moins la naïve et pieuse clé de voûte de cette nouvelle idéologie de paix entre les Sorciers et les Moldus, entre les Sangs-Purs, les Sangs-Mêlés et les enfants de Moldus. A ses ordres, elle avait une secrétaire de vingt ans plus âgée qu'elle qui lui simplifiait au plus sa vie « matérielle » - du moins au bureau – dont la jeune fille n'avait pas soucis.

10 h 58. Hermione franchit les portes du département financier, un des plus anciens, des plus vastes et naturellement des plus riches départements du ministère. Basé au centre de l'administration, il jurait franchement avec l'agrandissement périphérique des nouvelles sections – ou plutôt était-ce l'inverse. La jeune femme ne fit pas attention au décor faste et à la majesté du grand hall – au grand plafond – qu'elle traversait en courant mais se préoccupa seulement de ne pas glisser sur la dalle en marbre avec ses talons « réglementairement » imposés par sa secrétaire – au département des Intérêts moldus, on avait mis de la moquette exprès. Elle évita les chefs industriels venus vendre leurs victoires pour gagner de nouveaux marchés. Elle se précipita dans l'ascenseur en s'excusant après avoir bousculé un homme qui en sortait à peine. Elle se rendit au premier, à l'étage des transactions internationales et de l'accueil des affaires poly-patriotiques.

A vrai dire, elle n'avait jamais vraiment aimé ce département : trop superficiel, trop d'hypocrisie et trop de propres souvenirs très désagréables. Elle y venait le plus rarement possible : peut-être d'ailleurs était-ce la raison pour laquelle elle avait « oublié » d'y venir chercher ce dossier – malgré tout le poids politique et juridique que ce dernier représentait. Quant à l'hypocrisie et au côté superficiel, il fallait qu'elle corrige ses préjugés sur le monde du bien parlé et de l'élégance : le collège était fini et l'idéologie d'une bucheuse de bibliothèque avait pris fin pas qu'elle ne le soit plus – on ne change pas sa nature – mais le monde adulte a ses réalités que l'adolescence ignore : la société entre autre. La faute aux mauvais souvenirs si elle gardait malgré les années ses préjugés.

Inspirant pour chasser tout cela, elle finit sa course au comptoir du secrétaire des transactions. Elle lui sourit et redressa son tailleur. Elle était sortie avec lui, trois ans plus tôt. Peut-être était-il le seul du quartier financier qu'elle appréciait – bien qu'après elle, il soit sortit avec le frère d'Eric Hedge, son directeur à elle.

Le dossier des accords financiers Sorciers-Moldus, s'il te plait, demanda-t-elle à bout de souffle.

- Je t'attendais plus tôt, s'amusa-t-il.

Hermione leva les yeux au ciel, sourit et tendit la main pour attraper le dossier. Il rit et lui donna le dossier de la première pile. Elle ouvrit la première page pour vérifier et signa son registre. Elle repartit en rougissant alors qu'il lui fit un clin d'œil. 10 h 59 min 45s.

La jeune femme se précipita à son bureau. Lorsqu'elle passa la porte, le téléphone – les affaires moldues en nécessitait un – sonna. Hedge venait apparemment de rentrer à peine : il contournait son bureau pour venir s'y asseoir. Hermione jura poliment et à mi-voix. Elle jeta un coup d'œil inquiet à sa secrétaire qui lui sourit et prit pour elle l'appel, qu'elle mit gracieusement en attente. La jeune femme la remercia avec la poitrine soulagée de cette inquiétude. Elle se précipita dans le bureau de son directeur.

Ils se saluèrent. Hedge s'assit et elle vient à ses côtés lui donner le document des accords financiers.

- Avez-vous le dossier des Chewing-gum détonnant ? L'interrompit-il dans son mouvement.

- Le… Le voulez-vous ? S'étonna-t-elle le plus élégamment qu'elle put pour cacher sa surprise.

- Je voudrais le signer avant que vous ne me présentiez ce dossier qui à coups sûrs va nous prendre un temps fou.

Il lui sourit pour appuyer sa demande. La jeune femme lui sourit maladroitement en retour. Elle sortit du bureau, posa ce qu'elle portait sur le sien, en fit le tour et chercha le dossier du matin qu'elle avait arrangé avec Percy.

Son bureau, adjacent à celui de son directeur, était, comme on peut aisément l'imaginer lorsque l'on connaît le personnage, débordant de dossiers et de papiers qui, même s'ils étaient, et pour le coup ils l'étaient vraiment, classés et rangés donnaient l'impression d'être éparpillé dans un parfait désordre. Peut-être l'impression était-ce due au fait que la comparaison faite avec ses deux collègues, son plan de travail était absolument rempli d'un coin à l'autre. On ajoutait facilement aux documents empilés à outrance, un ordinateur portable, un téléphone et une télévision en hauteur et toujours allumés dont personne au ministère hormis ceux qui travaillaient dans les trois départements chargés des moldus – et encore… – en connaissait l'utilité, et aucun de ces sorciers ne trouvaient le bruit de ces objets ni agréable ni passionnant.

Heureusement pour elle, et par ce que d'autres auraient pu appeler un miracle, Hermione trouva son dossier en moins de quelques secondes. Elle fit à nouveau le tour de son bureau tout en prenant soin d'éviter les notes de services et autres communications ministérielles qui volaient avec impatience et s'accumulaient assez rapidement au dessus de son bureau. Elle récupéra le dossier des accords financiers Moldus-Sorciers et rejoignit son directeur.

Lorsqu'elle sortit de sa présentation, moins d'une demi-heure plus tard, elle avait le sourire aux lèvres. Sa secrétaire, dont le bureau faisait face au sien, venait à peine de partir déjeuner en lui laissant sur ses dossiers une note en fluo éclatant – pour être certaine que la jeune femme ne le manque pas – sur laquelle elle rapportait le nom, le numéro et la requête de la personne qui l'avait appelée plus tôt.

Hermione soupira et sourit quand son directeur passa derrière elle en prenant son manteau. Elle déposa ses papiers sur son bureau et alla pour s'asseoir.

- Vous ne venez pas manger ? Lui demanda-t-il alors qu'il passait son manteau, visiblement à peine moins surpris qu'amusé.

- Hum… Non, répondit-elle avec un charmant sourire. J'ai du travail encore.

Il rit doucement et lui jeta un coup d'œil brillant avant de sortir de la pièce. Hermione ne le remarqua pas, et après avoir vérifié sa boîte mail, elle composa le numéro de téléphone que lui avait laissé sa secrétaire. Elle prit à peine le temps de s'amuser du fait qu'elle appelait le ministre de l'économie du Royaume-Uni en personne, un poste et un homme qui avait toujours fasciné son père. Sa secrétaire décrocha.

Alors qu'ensemble elles fixaient un rendez-vous qui pouvait convenir aux deux partis, Hermione remarqua un dossier à l'endroit même où elle avait posé un instant le dossier des échanges financiers pour prendre celui de Percy. Alors qu'elle raccrochait, elle se pencha pour s'en saisir. Il provenait du département financier et n'avait aucun rapport avec le monde moldu. Elle en déduit que le secrétaire du département financier le lui avait remis par erreur. Elle se promit de le lui rapporter à la fin de son service.

Néanmoins, sa curiosité étant très grande, elle ne put se retenir de l'ouvrir pour le feuilleter de plus près. Il s'agissait d'un nouveau plan économique pour « améliorer la bourse magique ». Hermione s'intéressa de plus près au dossier. Ce n'était plus un simple de dossier, mais une proposition en vue d'être appliquée. Il ne manquait plus que l'autorisation du conseil constitutionnel. A vrai dire, l'affaire paraissait classique : un plan de relance économique. Pourtant, peu à peu, plus Hermione avançait dans la lecture plus ses sourcils se fronçaient. Ce projet visait à exempter d'impôts les plus riches actionnaires afin qu'ils puissent « continuer à jouer leurs actions et booster le marché économique ». La jeune femme dut relire à deux fois l'exposé du projet avant d'y croire vraiment ses yeux. Qu'y avait-t-il de plus absurde ?

Hermione se demanda comment un tel projet avait pu être ne serait-ce que tolérer par les institutions inférieures. Certes, ce projet avait des avantages financiers qui permettraient aux plus riches d'investir encore plus aisément, plus facilement et avec moins de risques. Cela serait alors un filet économique qui éviterait une crise économique – et encore, elle avait des doutes. Mais ce projet était totalement absurde.

D'abord, ce plan d'imposition, beaucoup moins que pour « booster » l'économie du pays, servirait principalement à engraisser les plus riches, au dépend évident de l'Etat et de ceux qui travaillent pour eux : faire des plus riches du pays, des gens encore plus riches. Où était la logique de progression ?

Ensuite, ce plan était parfaitement sectaire et implicitement complètement contraire au nouveau principe d'égalité des Sangs-purs et des Sangs-mêlés. Car qui disait les plus riches sorciers, disait pour la plus grande majorité, les plus vieilles dynasties, et qui disait vieilles dynasties sorcières, disait Sang-purs. Hors il était inacceptable qu'une proposition aussi novatrice qu'elle se présentait l'être soit si plaisamment acceptée par un parlement d'autant plus un parlement qu'on voulait progressiste et évolutif.

Hermione s'échauffa tant et si bien, qu'elle se promit fermement qu'elle ne laisserait pas une telle proposition bafouer les nouveaux principes du ministère de la magie et quel qu'en soit son pouvoir, elle mettrait tout en œuvre pour stopper ce projet dont clairement on avait ignoré l'injustice.

Alors qu'elle s'armait de sa plume et d'une feuille pour alerter le conseil constitutionnel, elle jeta un œil à la dernière page du dossier de proposition pour y voir le nom du commanditaire.

Lorsqu'elle vit la signature son cœur manqua un battement et elle retint un râle de colère. Il s'agissait du nouveau grand actionnaire qui possédait une immense fortune qui avait triplé depuis la fin de la guerre. Draco Malfoy.


Go on ?