Disclaimer : Les personnages, sortilèges, lieux et créatures que vous reconnaissez appartiennent à JKR, donc, par conséquent, je ne les possède pas du tout (mais alors là qu'est-ce que j'aimerais ça !).
Rating : Pour ne pas changer, M. Même si ça risque de prendre un moment avant qu'il soit justifié.
Pairing : Fleur/Charlie (ne me regardez pas comme ça, je vais m'expliquer).
« Euh, t'es au courant que Fleur va se marier avec Bill ? » : Oui, parfaitement. Mais il se trouve qu'à l'époque où j'ai écrit cette fic, le tome 5 n'était même pas sorti, alors encore moins le sixième. Je viens de la retrouver au fond d'un tiroir et, en la relisant, j'ai regardé mon ordinateur et je me suis dit : « Pourquoi pas ? ». Suite aux deux derniers tomes, elle est désormais dans la partie « parfaitement invraisemblable », mais j'assume complètement ! Je vais la diviser en chapitres, les retranscrire (chose que je déteste mais c'est pour la bonne cause), les retravailler parce que ça date et y'a des trucs qui me plaisent moins qu'ils me plaisaient à l'époque (en plus, ça va rendre la tâche moins emmerdante) et les poster au fur et à mesure… ;)
« Ce qui veut dire ? » : Que les tomes 5 et 6 ne sont pas pris en compte, tout simplement.
Silver and Red
Chapitre 1 : Mère d'un dragon
- Delacour, non ! cria un roux en voyant la blonde s'élancer dans l'enclos.
- La ferme, Weasley ! répondit-elle en sautant à plat ventre sur le sol rocheux pour éviter le jet de flammes.
Le soigneur prit la décision la plus sage qui s'imposait à lui dans la situation présente : il se tut. Les voix fortes excitaient les dragons. Et la terrible Norvégienne à Crêtes qui se trouvait dans l'enclos n'avaient vraiment pas besoin d'être excitée davantage. Il déglutit, baguette en main, prêt à intervenir dès que la situation dégénérerait. Comme si elle n'avait pas déjà assez dégénéré comme ça.
Fleur courait, sautait avec l'agilité d'une gazelle sur le terrain escarpé et traître. Vive comme l'éclair, elle bondit pour s'accrocher à une paroi verticale afin d'éviter le nouveau jet de flammes brûlantes que projetait la dragonne. Presque immédiatement, la terrible créature donna un violent coup de queue en sa direction. Heureusement, la jeune femme eut le temps de s'éloigner de la portée de la queue de la dragonne.
Malheureusement, le coup était si fort qu'il ébranla la paroi et la sorcière perdit pied. Elle s'écrasa douloureusement sur le sol, près de la dragonne. Dangereusement près de la dragonne.
Mais comment, pourrait-on se demander, comment une jeune Française d'apparence raffinée et délicate, voire frêle, avait-elle pu être emmenée à se jeter tête baissée dans cet enclos pour faire face à cette terrible Norvégienne à Crêtes ? Comment, mais surtout… pourquoi ?
La réponse est simple. Et il suffit de reculer de deux mois pour la trouver…
Deux mois plus tôt
- Charlie, tu n'as pas le choix.
- Mais je ne veux pas de stagiaire ! s'exaspéra le jeune homme. Depuis quand on prend des stagiaires ici, d'abord ? Je croyais que c'était contraire à la politique de l'équipe !
- Elle a un dossier impressionnant qui nécessitait qu'on fasse une exception. Elle a été capable de dérober un œuf à un Vert Gallois Commun en une dizaine de minutes à peine. À l'improviste. (NdA : Je rappelle que, selon le règlement, les Champions ne devaient pas connaître la nature de la tâche. Aux yeux de tout le monde, donc, ils ont affronté un dragon sans en être d'abord avisé).
- Si elle est tellement douée, cette stagiaire, pourquoi vous ne l'engagez pas directement comme soigneuse ?
- Elle manque d'expérience dans le domaine, déclara le patron d'un ton sec. Un mois avec toi, et elle pourra devenir l'une de nos soigneuses. Elle pourra remplacer Jane.
Jane était une soigneuse expérimentée qui, à cause d'une erreur d'inattention, se trouvait présentement aux soins intensifs de Sainte-Mangouste au département des blessures magiques. Les médicomages se demandaient sérieusement si elle allait survivre. Dans l'éventualité où elle le ferait, il était clair que sa carrière était terminée.
- Elle arrive quand ? demanda le rouquin entre ses dents.
- Dans une petite minute, répondit l'homme derrière son bureau en jetant un regard négligent à sa montre de luxe.
- Et elle s'appelle comment ?
Alors que son supérieur ouvrait la bouche pour répondre, on cogna à la porte.
- Entrez !
La porte du bureau spacieux s'ouvrit sur une jeune femme, qui devait avoir dix-huit ans tout au plus. Immédiatement, Charlie la reconnut et se maudit de ne pas y avoir pensé lorsque son patron lui avait parlé de cette fille qui avait volé un œuf à un Vert Gallois Commun. Fleur Delacour. Comment avait-il pu oublier la magnifique Française ?
Le chef de l'équipe de soigneurs se leva pour lui serrer la main. La semie-Vélane répondit à son sourire chaleureux par un léger sourire en coin, qui, sans être froid, ne dégageait aucune émotion particulière. Il s'agissait d'une simple marque de politesse. En voyant son patron offrir un siège à la blonde – offre qu'elle déclina poliment – Charlie comprit pourquoi il avait accepté qu'elle soit stagiaire dans son équipe, alors qu'il refusait toujours d'embarrasser un de ses six soigneurs d'un stagiaire incompétent et inexpérimenté.
L'homme était complètement sous le charme de la Française, bien qu'il aurait aisément pu être son père. En parlant de père, celui de cette Fleur Delacour devait avoir un compte à Gringotts extrêmement bien rempli, à en juger par l'allure que la jeune femme avait. Une telle posture et une telle élégance ne s'acquiert qu'avec de longues années de (très dispendieux) cours de maintien et de danse.
- Miss Delacour, je vous présente Charlie Weasley, il sera votre directeur de stage.
- Je suis enchantée, Monsieur Wizlay, dit-elle avec un sourire beaucoup plus chaleureux que celui qu'elle avait adressé à l'homme aux cheveux grisonnants.
Elle lui tendit une main aux ongles discrètement mais parfaitement manucurés. Au passage, il remarqua la fine montre d'or blanc qu'elle portait au poignet. Décidément. Mais, après tout, se dit Charlie en serrant cette main délicate, dont la paume était douce contre la sienne, beaucoup plus rugueuse, avoir été Championne de l'Académie Beauxbâtons lors du dernier Tournoi des Trois Sorciers, c'était un sacré coup de pouce pour se faire embaucher pour n'importe quel travail exigeant du cran.
- Weasley, corrigea-t-il machinalement.
Il avait l'habitude.
- Je suis désolée, dit-elle avec un sourire d'excuse. J'ai toujours un problème avec les noms anglais.
« Allez, Charlie, sois un chic type, elle est adorable », souffla une voix dans sa tête. « Pour l'instant en tout cas… »
- Je vais vous faire visiter, proposa-t-il.
- C'est très gentil.
Ils sortirent du bureau. En marchant dans les couloirs, Charlie fut pris d'une soudaine envie de savoir. Il voulait comprendre ce qu'elle fichait là.
- Simple curiosité, dit-il d'un ton naturel, qu'est-ce qui vous a poussé à vouloir devenir soigneuse de dragons ?
- Le Tournoi, répondit Fleur tout simplement.
- Vous savez, ici, on n'attaque pas les dragons, on en prend soin, nuança Charlie en haussant un sourcil.
La remarque n'eut aucun effet sur Fleur.
- Oui, je sais, évidemment. Mais les recherches que j'ai faites avant la première épreuve m'ont permis de me découvrir une véritable fascination pour les dragons.
- Vos recherches ?
- Je suppose que je peux le dire, maintenant que ça n'a plus d'importance, dit-elle avec l'ombre d'un sourire triste. Madame Maxime avait vu les dragons et m'en avait parlé. J'ai donc commencé à faire des recherches. Au début, je me suis axée sur la façon de neutraliser un dragon. Lorsque j'ai eu l'idée du Sortilège de Morphée, j'ai continué à faire des recherches. Pas pour le Tournoi. Juste pour mon information personnelle.
« Merde » pesta mentalement Charlie. Contrairement à ce qu'il pensait/espérait, elle n'était pas seulement magnifiquement belle, elle était aussi intelligente en plus d'être courageuse. Et, comme si ce n'était pas suffisant, elle semblait sincèrement passionnée des dragons. Il se racla la gorge.
- Voici l'infirmerie. Si vous vous blessez, ce qui est relativement courant ici, Maeve s'occupera de vous. Maeve, voici ma stagiaire, Fleur Delacour.
Maeve était une jeune femme au visage ovale et d'apparence calme. Ses cheveux, bruns et lisses, lui caressaient doucement les épaules. La médicomage était plutôt jolie, mais c'était ses yeux qui fascinaient. En forme d'amandes, leur iris était noisette à l'extérieur mais, plus on se rapprochait de la pupille, il devenait graduellement vert. Souriante, elle s'approcha de Fleur et lui serra la main. Son être tout entier respirait la sérénité. C'était le genre de femme auquel on fait tout de suite confiance. Sans même la connaître, Fleur se surprit à penser qu'elle remettrait sans hésiter sa vie entre ses mains, tout en espérant qu'elle ne serait pas un jour blessée au point d'être en danger de mort.
- Je suis enchantée de faire votre connaissance, Fleur.
- Tout le plaisir est pour moi.
- Excuse-nous, Maeve, je dois continuer à faire visiter Miss Delacour, si je ne veux pas être en retard sur mon horaire de la journée.
L'Anglais et la Française sortirent de l'infirmerie. Charlie fit visiter rapidement à sa stagiaire tout le bâtiment.
- Et voici la cafétéria du centre, conclut-il en entrant dans la pièce, où cinq hommes étaient assis autour d'une table.
- Qui c'est, ça, Charlie ? demanda un homme au teint basané, aux cheveux noirs et à l'accent roumain.
- Ma stagiaire, répondit le soigneur en se servant une tasse de café. Fleur Delacour.
- Enchantée, messieurs.
- Je m'appelle Luka, dit l'homme, apparemment déjà subjugué par la beauté de la jeune femme.
Un à un, les soigneurs se présentèrent. Ils semblaient, pour la plupart, être natifs de la Roumanie… et charmés par Fleur. Fleur répondait poliment à leurs questions, tout en ayant la désagréable impression d'être draguée à outrage par les cinq hommes. Sans le savoir, Charlie vint à sa rescousse :
- Miss Delacour, je vais vous montrer votre chambre.
Fleur le suivit, sentant distinctement les regards qui convergeaient vers son postérieur alors qu'elle sortait. Ils montèrent à l'étage et traversèrent un couloir. Charlie ouvrit une porte et pénétra dans la pièce.
- J'ai le droit de redécorer ? demanda Fleur en balayant la pièce, relativement petite, du regard.
- Si ça vous fait plaisir, répondit le roux en levant les yeux au ciel.
La Française sortit sa baguette de sa poche et, en moins d'une minute, la pièce se métamorphosa complètement, se décorant avec élégance dans les tons de bleu pastel et de lilas.
- Si vous avez fini de jouer aux décoratrices, dit Charlie d'un ton un peu sec, j'aimerais bien commencer mon travail.
- Laissez-moi me préparer. Deux minutes.
Il sortit de la chambre en grommelant intérieurement. Quelle Barbie ! Qu'est-ce qu'elle allait faire ? Se recoiffer ? Se remaquiller ?
Fleur se dirigea vers sa valise, qu'elle ouvrit. Elle se doutait bien du genre de travail qu'elle allait faire et, n'en déplaise à ce Charlie Weasley qui devait la prendre pour une petite fille superficielle sous prétexte qu'elle était belle et riche, elle avait pensé à prendre des tenues appropriées.
La jeune femme retira les vêtements qu'elle avait mis pour le voyage et enfila un pantalon de soie bleu marine, relativement ample et très confortable, un débardeur argenté, des gants sans doigts et la veste qui allait avec l'ensemble. Après avoir attaché les lacets de ses baskets en cuir noir, elle noua ses cheveux en une queue de cheval haute. (NdA : En résumé, elle est exactement comme elle était pour la Première Tâche). Ceci fait, elle ouvrit la porte de sa chambre.
- Et bien ? demanda-t-elle en voyant le silence de Charlie, qui, apparemment, ne s'était pas attendu à la voir respecter son délai et/ou vêtue convenablement. Nous y allons, ou pas ? J'ai cru comprendre qu'il était urgent que nous commencions.
- Que je commence, rectifia-t-il avec une pointe d'agacement. Moi, j'agis. Vous, vous vous contentez de regarder, sauf si je vous demande de faire quelque chose.
Il s'éloigna d'un pas vif. Surprise de ce brusque changement d'attitude, Fleur le suivit docilement. Il pénétra dans la pièce qu'il lui avait présentée comme étant la plus importante : la clinique. C'était l'endroit où étaient notés les horaires de chaque soigneur. C'était aussi là qu'on retrouvait toutes les informations sur les dragons dont s'occupait le centre.
- Svetlana, dit-il après avoir regardé son horaire. C'est une Magyar à Pointes. Selon nos calculs, ses œufs vont éclore aujourd'hui. Il faut qu'on supervise la naissance, parce qu'il faut se dépêcher d'examiner les dragonneaux pour s'assurer qu'ils vont bien.
- Mais la mère va nous attaquer si on s'approche trop, non ?
- Si près de l'éclosion, elle s'en occupe beaucoup. De plus, l'enclos est vaste. Nous nous tiendrons à bonne distance.
- Et comment on fait pour voir les œufs éclore si on est « à bonne distance » ?
D'une main, Charlie attrapa deux paires de jumelles. Elle rougit légèrement sous son regard narquois en prenant celle qu'il lui tendait. Ils sortirent, traversèrent une grande étendue d'herbe et de terre, puis, Charlie devant, pénétrèrent dans un enclos.
- Pas de bruit, surtout, lui intima Charlie à voix basse en commençant l'escalade d'une paroi rocheuse.
Fleur hocha la tête silencieusement et le suivit. L'exercice était pénible et lui faisait mal aux doigts, mais aucune plainte ne franchit ses lèvres. Lorsqu'il arriva en haut, Charlie lui tendit la main pour l'aider. La tête haute, la jeune Française se hissa à son niveau.
L'endroit était beaucoup moins escarpé que tout le reste. Charlie s'assit sur la pente douce et la blonde l'imita, collant les jumelles à ses yeux. Et ce qu'elle vit lui coupa le souffle.
La majestueuse mais dangereuse créature ailée soufflait de douces flammes orangées qui léchaient les œufs gris et luisants, sur lesquels le feu se reflétait. Le spectacle était aussi impressionnant que magnifique.
- Elle augmente la puissance, commenta Charlie. Ça veut dire qu'ils vont bientôt naître. Lorsqu'elle cessera de cracher du feu…
La dragonne cessa alors de projeter des flammes sur sa couvée, et Fleur décolla les jumelles de son visage pour se tourner vers Charlie, interrogative, attendant la suite.
- Et bien, quoi, « lorsqu'elle cessera de cracher du feu » ?
- On y va, dit précipitamment l'homme aux cheveux roux en se levant et en commençant à marcher vers le nid, qui était à plusieurs dizaines de mètres d'eux.
La stagiaire lui emboîta immédiatement le pas.
- Écoutez-moi bien, dit Charlie en marchant. Pas de mouvements brusques. Restez à l'écart et laissez-moi agir. N'oubliez pas que, même si nos intentions sont bonnes, pour la dragonne, nous sommes deux créatures qui tentons de lui ravir ses petits. Deux créatures qu'elle n'aura aucune difficulté à tuer si elle est contrariée.
Malgré elle, Fleur déglutit.
- Restez-là, ordonna-t-il alors qu'encore six ou sept mètres les séparaient du nid.
Avec prudence, Charlie continua à s'avancer vers la dragonne. À trois mètres, il s'arrêta, dissimulé derrière une formation rocheuse. L'un des trois œufs bougeait. Lentement, sous le regard attentif de Charlie et le regard émerveillé de Fleur, la coquille grise se craquela et se perça en son bout. Puis, elle éclata complètement, laissant voir un dragonneau.
Il battait légèrement des ailes, crachant des étincelles et de la fumée. Visiblement, il était bien portant. Un second œuf se mit à remuer et, au bout d'une minute, le deuxième petit dragon était né.
C'est là que tout dérapa.
Les deux nouveaux-nés commencèrent aussitôt à se montrer hostiles l'un envers l'autre. Immédiatement, Charlie s'élança. Fleur le vit très nettement. Ce qu'elle vit aussi nettement, c'était la queue couverte de pointes mortelles que la mère projetait vers le soigneur. Immédiatement, la semie-Vélane sortit sa baguette et la braqua sur la dragonne.
- DORMENS !
La tête de la créature se mit à dodeliner avec lenteur et, malgré la lutte visible entre l'animal et le sortilège, ses paupières se refermèrent sur ses yeux jaunes et cruels. Charlie, tout concentré qu'il était sur la couvée, n'avait absolument pas remarqué l'amorce d'attaque de Svetlana. Aux yeux du rouquin, donc, la Française venait de plonger dans un puissant sommeil magique un magnifique spécimen de Magyar à Pointes… sans raison.
- Delacour ! aboya-t-il. Qu'est-ce que je t'ai dit ?
- Mais… commença Fleur, outrée de l'injustice qui était en train de se produire.
- Silence !
L'inattention du jeune homme lui valut une gerbe d'étincelles sur la main, crachées par l'un des deux bébés dragons. La jeune femme, énervée de devoir rester en retrait, s'élança vers lui, malgré ses protestations.
- Premièrement, dit-elle, elle a faillit vous balancer un coup de queue. Deuxièmement, où devons-nous emmener les dragonneaux ?
- Premièrement, répliqua Charlie avec un fort énervement, je l'aurais vu. Deuxièmement, il faut les emmener à la clinique.
- Premièrement, vous n'aviez qu'à mieux regarder. La prochaine fois, je vous laisserai vous faire mettre en pièces. Deuxièmement, comment est-on sensés faire ça ?
Avec sa baguette, Charlie fit apparaître trois cages individuelles.
- Nous en reparlerons plus tard, dit-il en s'évertuant à faire entrer les dragons déjà nés dans les cages.
Fleur, quant à elle, s'était approchée du troisième œuf en le voyant bouger doucement. Elle s'accroupit pour mieux regarder. Émerveillée, elle vit la coquille se fendiller et le bébé dragon en émerger avec lenteur. Il était plus petit que les deux autres. Lorsqu'il leva la tête vers la jeune femme, celle-ci ne put s'empêcher de sourire.
- Salut, petit dragon, murmura-t-elle.
Du bout des doigts, elle lui caressa la tête. Étonnamment, la créature se laissa faire. La caresse hésitante de la sorcière semblait même lui faire plaisir. Quelques étincelles sortirent de ses narines lorsque Charlie appela Fleur. Celle-ci se redressa et le rejoignit.
- Bon, on va faire léviter les…
Il s'interrompit, le regard posé sur la jambe de Fleur. Enfin, pas tout à fait. Il avait plutôt le regard posé sur le dragonneau qui avait marché vers la jeune femme lorsqu'elle s'était déplacée, et qui se trouvait présentement juste à côté d'elle.
- Quoi ? demanda Fleur en suivant son regard.
- Delacour, ne me dis pas que c'est toi qu'il a vue en premier.
- Je crois que si, répondit la semie-Vélane. Qu'est-ce que ça fait ?
- Les dragons sont de ces créatures qui croient que la première créature qu'ils voient est leur mère.
- Ce dragon croit vraiment que je suis sa mère ?
- C'est ce que je te dis.
Il retint à grand-peine un soupir abyssal. Comme si le simple fait d'avoir une stagiaire n'était pas assez compliqué, il fallait que celle-ci s'arrange pour qu'un dragonneau la prenne pour sa mère. Pourquoi est-ce que ça lui arrivait à LUI ? Il y avait six soigneurs dans l'équipe, pourquoi est-ce que c'était à LUI qu'on avait assigné une stagiaire, et pourquoi avait-il fallut que cette stagiaire soit Fleur Delacour ?
- Il n'y a qu'une solution, c'est toi qui va devoir t'en occuper. Tant qu'il ne sera pas adulte, il refusera d'être nourri par quiconque n'est pas sa mère. On n'a même pas besoin de le mettre dans une cage, dit-il en faisant disparaître la troisième. Il va te suivre.
De sa baguette, il fit léviter les deux cages et commença à avancer. Au début, Fleur était profondément sceptique : peut-être que Charlie avait voulu se moquer d'elle. Elle commença donc à marcher, lentement, en se retournant régulièrement, et se rendit vite compte que le bébé dragon la suivait effectivement.
La jeune femme le fit monter sur une table d'examen de la clinique, pendant que Charlie faisait de même avec l'un des deux autres. Elle remarqua au passage que son propre dragon était beaucoup moins récalcitrant que celui de Charlie, qui l'avait griffé au bras lorsqu'il l'avait soulevé dans ses bras. Fleur retira sa veste et la déposa sur un comptoir.
- Très bien, dit Charlie en lui tendant une planchette sur laquelle était retenue une liste par une pincette. Remplis sa fiche.
La stagiaire posa la fiche sur la table et attrapa un stylo. Elle inscrivit d'abord les informations qu'elle connaissait déjà : date de naissance, espèce, nom de la mère.
- Comment s'appelle son père ? demanda-t-elle à l'adresse de Charlie.
- Armstromov, répondit distraitement le soigneur.
- Et comment il s'appelle, le dragonneau ?
- Tu lui donnes le nom que tu veux.
Après s'être assurée du sexe du dragon (mâle), elle se mit à réfléchir. Barthélemy, ça sonnait bien. Elle inscrivit le nom dans la case appropriée et continua son travail, prenant diverses mesures (certaines auxquelles elle s'attendait déjà, telles l'envergure de ses ailes, d'autres moins, comme par exemple l'écartement entre ses dents). Lorsqu'elle eut fini, elle demanda à Charlie ce qu'elle devait faire.
- Maintenant que tu as fait le travail du soigneur, il va falloir que tu fasses le travail de la mère.
Il lui lança un chiffon humide.
- Pour le nettoyer. Normalement, la mère lèche ses petits pour ça. Je te fais grâce de ce détail.
« Trop gentil », songea la Française en commençant à nettoyer soigneusement les écailles du dragon. La créature émettait de légers sons, qui ressemblaient étrangement à des couinements, pour manifester son contentement. Lorsque cette tâche fut terminée, Charlie lui tendit un biberon, qui devait bien contenir trois litres d'un liquide dont la couleur, qui était d'un blanc verdâtre, alliée à sa consistance épaisse, était très peu ragoûtante.
- Tu plaisantes, j'espère, dit Fleur, dont les yeux bleu sombre passaient de Charlie au biberon.
- Pas le moins du monde. Un biberon aux trois heures. Au moins les deux premières semaines. Après, ça va dépendre de lui.
- Aux trois heures ? s'étrangla la jeune femme.
- Y compris la nuit.
« Bien fait » songea Charlie en la voyant réprimer un grognement. Ça lui ferait les pieds, à cette princesse. Il retourna à sa tâche, la laissant faire.
La « princesse » en question souleva le biberon, approchant la tétine de la bouche du dragon. Méfiante, la créature renifla un peu avant de le gober, buvant avidement le lait de dragonne que lui donnait la jeune femme. Fleur laissa échapper un léger éclat de rire en le voyant agir de la sorte.
Charlie releva la tête en l'entendant. Son rire était doux, mélodieux, caressant pour les oreilles. Il était communicatif et donnait envie de rire aussi, sans raison particulière. Juste parce qu'elle le faisait. Inconsciemment, il sourit en la voyant rire à nouveau et caresser doucement le dessus de la tête de son dragonneau avec l'une de ses mains. Non seulement elle acceptait de prendre soin du dragon, mais, en plus, ça l'amusait. Vraiment surprenant.
À cette pensée, son sourire s'élargit. Fleur releva alors la tête et lui rendit son sourire. En croisant son regard bleu, il sentit son cœur fondre et il s'en fallut de peu pour ne pas que ses genoux se dérobent sous lui. Le charme fut rompu lorsque son dragon souffla un petit jet de flammes qui faillit mettre le feu à ses vêtements, comme pour le réprimander de son manque d'attention.
Fleur baissa la tête et vit que le biberon était déjà vide. Elle le déposa dans l'évier, et le dragonneau laissa échapper un rot éloquent. La tête penchée sur le deuxième né de la couvée, Charlie laissa un sourire se dessiner sur ses lèvres en entendant la jeune femme réprimander gentiment Barthélemy pour son impolitesse.
- Alors, Charlie, dit le directeur de l'équipe de soigneurs en entrant dans la clinique. La couvée de Svetlana se porte bien ?
- Comme vous voyez, répondit le jeune homme en mesurant les pointes de la queue du dragonneau.
- Lorsque vous aurez fini, remettez-les avec la mère. À propos, pourquoi l'avez-vous endormie ?
- Ça, il faut le demander à Delacour.
- Elle lui aurait fichu un coup de queue à la figure si je n'étais pas intervenue ! répliqua Fleur.
- Mais elle va bien ?
- Parfaitement. Ce sortilège est inoffensif.
- On a un autre problème, intervint Charlie. La première personne que le troisième né ait vue, c'est Delacour. Vous savez ce que ça veut dire. On ne peut pas le mettre avec les autres, il va refuser d'être nourri par sa mère.
- Miss Delacour n'a qu'à aller dans l'enclos pour le faire.
- Aux trois heures, et pendant la nuit ? Dans un enclos où il y a quatre dragons dont trois hostiles ? Je ne m'y risquerais même pas.
- Et bien, trouve une solution, si tu es si brillant.
- On pourrait le garder dans une pièce vide du centre. Simplement le temps qu'il apprenne à se nourrir seul.
- Fais ce que tu veux, du moment que tu trouves moyen de l'empêcher de mettre le feu à l'endroit, répondit l'homme en se dirigeant vers la sortie.
Charlie remit son dragonneau dans une cage.
- Sacha, Dimitri ! Venez chercher les petits de Svetlana pour les remettre dans son enclos !
Les deux hommes concernés entrèrent et s'exécutèrent, non sans adresser des sourires à Fleur, qui s'efforçait de les ignorer en se concentrant sur Barthélemy.
- On va lui aménager un coin qui va lui rappeler son environnement naturel, dit Charlie en regardant autour de lui. Heureusement qu'il y a quelques pièces vides.
« C'est dans des moments comme ça qu'on a besoin d'une Salle sur Demande » songea-t-il avec une pointe d'amertume.
- Suis-moi.
Fleur souleva doucement le bébé Magyar à Pointes dans ses bras et suivi docilement le soigneur roux, qui la mena dans une pièce relativement près de sa chambre. De sa baguette, Charlie fit apparaître des parois rocheuses irrégulières tout autour de la pièce, masquant parfaitement les murs de bois. Il fit de même pour le sol et le plafond. L'effet était bluffant : on se serait vraiment cru dans une caverne. Dans une cavité rocheuse qu'il avait créé sur le sol, Charlie fit apparaître une eau cristalline.
La semie-Vélane se pencha pour déposer Barthélemy sur le sol. Il trottina gauchement sur le sol irrégulier et battit des ailes, s'élevant de quelques centimètres au-dessus du sol. Charlie repartit, mais Fleur décida de rester avec Barthélemy. Après une quinzaine de minutes, elle se rendit compte qu'elle avait laissé sa veste à la clinique. Elle sortit donc de l'enclos improvisé, refermant la porte avec soin derrière elle. Arrivée dans l'embrasure de la porte, elle se figea en entendant Sacha qui disait :
- Moi, la nouvelle, c'est quand elle veut pour une partie de jambes en l'air…
- C'est ça, rêve, répliqua Igor, ou peut-être était-ce Dimitri.
Le petit groupe de cinq personnes était placé de telle façon qu'ils lui tournaient tous le dos, inconscient que le sujet principal de leur conversation était à quelques mètres.
- Je me méfierais, à votre place, dit une femme que Fleur n'avait pas vue durant sa visite. On ne peut pas faire confiance à une femme qui a du sang de Vélane dans les veines. Elles sont mesquines avec les hommes et vicieuses. Ce sont des diablesses, de vraies succubes.
Le visage de Fleur s'empourpra et ses yeux s'arrondirent sous l'insulte. SUCCUBE, ELLE ?
- Qu'est-ce que t'en pense, Charlie ? T'as pas pensé que tu pourrais profiter de ton statut de directeur de stage pour te payer du bon temps ?
- Elle ne m'intéresse pas, répondit celui-ci avec un léger haussement d'épaules.
- Oh, je t'en prie, tu ne vas pas me dire que tu ne la trouves pas canon.
- Mon vieux, sache qu'il arrive à certains hommes de penser à autre chose. C'est une petite gosse de riche nombriliste.
- Mais canon.
- Et manifestement creuse.
- Mais canon.
- On pourrait croire que tu fais une fixation, répliqua la femme.
- On s'en fout, de savoir si elle est creuse ou pas ! répliqua l'homme qui n'avait pas encore parlé. Dans ton lit, tu ne vas quand même pas entamer un grand débat philosophique avec elle !
C'en était trop. Elle se recula, se détourna et partit au pas de course vers la pièce où se trouvait Barthélemy. En voyant sa « mère » entrer en trombe et se laisser tomber assise sur le sol de pierre, le dragonneau s'approcha doucement de Fleur. La jeune femme, qui avait senti ses yeux brûler tout le long de la conversation qu'elle avait épiée, laissa ses larmes couler sur son visage.
Possédant la même passion pour les dragons qu'elle ou pas, ils étaient tous pareils. Entre la femme qui l'avait qualifiée d'aguicheuse mangeuse d'hommes et ceux qui la considéraient comme un objet, elle se demandait sincèrement comment elle allait tenir le coup dans le centre.
La jalousie des autres femmes, elle connaissait, et elle avait l'habitude. Elle était née pour être jalousée. Elle avait appris à se tenir au-dessus de ces bassesses. Mais les mots de cette femme avaient pénétré son âme pour se planter directement dans son cœur, tels des poignards. Parce qu'elle savait le nombre de personnes qui voyaient les filles comme elle de cette manière.
La convoitise des hommes, elle avait l'habitude aussi. En général, elle était plutôt flattée d'entendre dire qu'elle était belle. Mais, en ces termes, c'était la pire des insultes. Elle se doutait bien aussi des envies peu honorables que certains pouvaient avoir envers elle. Mais jamais elle ne l'avait entendu directement.
Le seul qui ne s'était pas montré détestable au premier abord était Charlie. Au moins, il ne la traitait pas comme une chose. Mais il la considérait comme une fille stupide et creuse, sans même la connaître.
Et ça, ça faisait terriblement mal.
Le mot de la fin : Rah, c'est des poooorcs (ça fait du bien de le dire) ! En attendant la suite, reviews pliiiiz !
