-Vous vous engagez à nous céder les droits sur votre invention : « Baymax l'assistant médicale ». Nous pourrons utiliser votre invention, la modifier comme bon nous semblera. Vous devrez réaliser l'entretien, et toutes les innovations que l'on vous imposera.

-Et si je refusais, opposa Tadashi ?

-Nous ne vous laissons pas le choix. Vous n'avez même pas la liberté de quitter les lieux sans qu'on vous en donne la permission. Nous n'hésiterons pas à utiliser tout les moyens nécessaires pour vous y forcer. Vous désirez que je sois plus clair quand je dis : tous les moyens nécessaires ?

-Non. C'est pas la peine.

-Tant mieux. Coopérez, c'est la meilleure chose que vous aillez à faire.

Tadashi se pencha sur la feuille posée devant lui. Un contrat qui faisait de lui l'esclave de la Milice. Cette organisation militaire avait déjà pris possession d'un tiers du pays. Leurs méthodes étaient connues pour être brutales. Le massacre de la ville Kyotos-Angeles l'avait traumatisé, comme tout le monde. La Milice voulait le pouvoir et elle était prête à tout pour l'avoir. Tadashi les avait en horreur. Signer ce contrat était la dernière chose qu'il ait envie de faire. Pourtant ces hommes pouvaient tout lui demander. Ils étaient armés et ils l'avaient pris en otage.

Tadashi attrapa le stylo et signa le contrat. Qu'allaient-ils bien pouvoir faire de Baymax de toute manière ? Soigner leurs soldats ? Si son invention sauvait des vies dans le mauvais camp Tadashi s'en remettrait. L'important c'était de ne pas apporter la mort dans le leur.

-Sage décision.

Ce type assis en face de lui avait une tenue de gradé. Lorsque Tadashi termina sa signature. Il se leva et le raccompagna à la porte. Ils étaient dans l'un des nombreux bureaux de l'université de San-Fransokyo. Tadashi n'aurait jamais cru possible d'être menacé ici. Les combats avaient lieu beaucoup plus à l'Ouest. Et la ville de San-Fransokyo sans doute la mieux surveillé par l'Etat. Pourtant, la vérité était là ! La Milice avait pris en otage l'Université de San-Fransokyo et lui avec. Et s'il n'y avait que lui !

Deux Miliciens armés de leurs mitraillettes l'emmenèrent jusqu'au laboratoire commun. Celui où Gogo, Honey et Wasabi avaient l'habitude de travailler. La porte se referma derrière-lui.

Devant elle un garde armé montait la garde. Tadashi sentit une main se poser sur son épaule et sursauta. Il se retourna brusquement et constata qu'il ne s'agissait que de Honey-Lemon. Elle lui fit un sourire désolé.

-Je t'ai fais peur ?

-Non. Enfin, si un peu.

-Tu vas bien ? dit-elle avec douceur comme si elle était inquiète.

-Oui.

-Tu as signé leur truc ?

-Oui, et toi ? Ils t'ont fait signer ce contrat ?

Elle haussa les épaules en signe d'affirmation.

-Honey ? Tu sais où est Hiro ?

Cette question lui brûlait les lèvres depuis qu'un groupe armé était venu le menacé dans son propre bureau. Si Tadashi avait été pris en otage, si Honey aussi, si des miliciens se trouvaient partout dans l'Université, Hiro aussi était menacé.

-Non ! Je ne sais rien. Il n'y a que moi ici.

Tadashi sentait une inquiétude insoutenable monter en lui. De mauvaises pensées traversaient sa tête mais il les repoussait aussitôt.

Honey et lui s'inquiétèrent du temps qu'ils devraient passer enfermés dans cette pièce. Ils évaluèrent les chances d'être secouru par l'Etat. Après tout l'Etat avait plus de moyens que la Milice. On allait leur venir en aide.

Gogo arriva une bonne heure plus tard. Elle avait l'air sinistre et portait un vilain œil au beurre noir.

-Gogo, tu vas bien ? s'exclama Honey.

-Pas vraiment, j'ai capitulé.

La blessure morale semblait plus intense que la blessure physique. C'est pourtant ben cette dernière qui les choquait.

-Ils t'ont frappé ?

La question était idiote, pourtant Tadashi la posa.

-J'ai été si faible.

On avait levé la main sur eux. Ce n'était pas étonnant. Il fallait se douter que la Milice était capable de violence, même sur une femme … même sur un enfant !

-Mais où est Hiro ? Où sont les autres ?

Ne pas savoir allait le rendre fou.

-On va se rencarder.

Gogo avait déjà un plan. Tadashi ne savait pas qu'elle était aussi douée pour l'électronique et l'espionnage. Elle avait inventé un système pour intercepter les conversations des téléphones cellulaires. Il n'en revenait pas.

Ils s'assirent dans un coin à l'abri des regards. Gogo lui tendit des écouteurs, à lui, à Honey. Ils passèrent l'heure suivante à tester les fréquences et à espionner toutes les conversations susceptibles de les intéresser.

Il était parfois question d'eux. Les preneurs d'otages discutaient du temps et des aménagements nécessaires pour les surveiller.

-S'ils savaient qu'on est déjà en train de les espionner ? dit Tadashi.

-Amateurs ! cracha Gogo.

« Allo. »

Ils se turent pour écouter cette nouvelle conversation volée. C'était une fréquence qu'ils n'avaient pas encore testé.

« Vous aviez demandé des nouvelles, caporal ?

-Oui, alors ? On en est où avec le gamin ? Il va nous fabriquer ces micro-robots ? »

Gogo et Honey tournèrent aussitôt leur yeux en direction de Tadashi. Bien sûr, il venait lui aussi de comprendre. Instantanément, son cœur s'était emballé, sa respiration s'était tue comme s'il avait peur de couvrir le son avec le bruit de son souffle.

« Toujours rien. Il est coriace.

-Je croyais que Bull le travaillait au corps ?

-C'est le cas. Mais il nous mène en bateau. Il nous jure qu'il fera tout ce qu'on lui demande pendant les interrogatoires. Mais dès qu'on arrête pour qu'il s'exécute, il nous crache à la gueule. Mais Bull va finir par le briser, caporal.

-Je l'espère aussi pour vous. Dites bien à Bull de ne pas l'abimer. Il doit pouvoir travailler pour nous.

-J'y veille.

-Rappelez-moi quand vous aurez du nouveau. »

Tadashi arracha les écouteurs de ses oreilles. Gogo et Honey le regardaient mais il ne croisa pas leur regard rempli d'inquiétude, de peur et de pitié. Il ne regardait rien. Son regard était perdu dans le vide. Les mots faisaient sens les uns après les autres dans son esprit. L'angoisse devenait vertigineuse.

-Tadashi ? Murmura Honey d'une voix méconnaissable. Ce n'est peut-être pas ce qu'on croit ? Hors du contexte, un discours peut être mal interprété.

-Non. articula-t-il sans parvenir à la regarder. C'était très clair et tu le sais bien.

Hiro. Qu'est-ce qu'ils étaient en train de lui faire ?

-Hiro ! murmura-t-il

Elles s'approchèrent de lui mais il les repoussa. Il se releva maladroitement et s'en alla en direction de la porte en verre coulissante qui servait d'entrée. Honey derrière lui éclata en sanglots. Tadashi frappa sur la porte.

-Ouvrez-moi ! hurla-t-il. Ouvrez-moi !

Le soldat ne se retournait même pas.

Tadashi frappa sur la porte de toutes ses forces mais il ne parvenait qu'à se faire mal.

-Rendez-moi Hiro ! Rendez le moi !

Toujours aucune réaction et cette foutu porte qui était la meilleure des technologies. Tadashi hurla de toutes ses forces en donnant un dernier coup de pied sur la porte. Il se retourna et s'écroula dans un coin.

Il se recroquevilla. Il se mit à pleurer fortement. Son corps tout entier été secoué d'incontrôlables tremblements. Il se sentit devenir fou, alors que ses pensées l'emmenaient dans de dangereuses spéculations. Il repassait en boucle la conversation volée, comme un vieux disque rayé. Que pouvait vouloir dire « travaillait au corps » ? Qu'est-ce qu'on lui faisait ? Hiro était trop jeune, trop doux pour qu'on lui fasse du mal. C'était un ange. On ne maltraite pas un ange. On l'aime. L'amour que Tadashi portait à Hiro était plus fort que tout. Cela comptait plus que sa propre vie. Pourquoi était-il là et lui là-bas ? Ne pouvaient-ils échanger leur place ?

Qu'entendaient-ils par « travaillait au corps » ?

Est-ce qu'on le frappait comme Gogo ? Electricité ou lames de rasoir ? La folie le guettait. Tadashi referma ses mains sur ses cheveux. Et si on le tuait ? S'il ne le revoyait jamais ? Le souvenir de l'enterrement de ses parents lui revenait aussi à l'esprit. Il ne pourrait pas supporter une nouvelle épreuve pire que la précédente. Il ne voulait pas se retrouver seul.

Est-ce qu'il était toujours entier ? Les doigts fracturés ou yeux crevés ? Mais qu'entendaient-ils par « travaillait au corps » ?