Est-ce pour toujours?
Je me souviens de t'avoir posé cette question, un jour. Nous étions tous les deux couchés, enlacés chacun dans les bras de l'autre. Il faisait encore noir dehors. Tu pensais que je dormais toujours mais, en fait, j'écoutais tes paroles se perdre dans les ténèbres de la chambre. Tu disais que jamais tu n'aurais dû faire ça et que plusieurs personnes en souffriraient. J'étais un peu perdu alors j'ai relevé la tête pour plonger dans tes si beaux yeux foncé. Tu n'avais toujours pas remarqué que je t'observais. J'ai alors approché ma main lentement vers ton visage.
Malgré la douceur de mon geste, lorsque j'ai touché tes lèvres de mes mains glacées, tu as sursauté et m'as regardé avec une expression d'inquiétude. Je t'ai demandé pourquoi tu disais de telles choses et tu m'as répondu que ce n'était rien. Je me suis inquiété et j'ai insisté. Tu m'as repoussé et tu es allé t'assoir sur le rebord du lit, te couvrant d'un drap pour cacher ta nudité. Je me suis redressé et je t'ai regardé. Éclairé par la lumière de la lune, ta peau semblait lisse et douce. Te caressant le dos, mes pensées divaguèrent vers toi. Seul le silence de la lune assistait à ce triste moment.
Tu t'es retourné et m'as regardé avec désolation. J'ai tâté ton visage, redessinant ses contours avec mes doigts fins. J'ai essuyé, du rebord de ma main, une larme qui s'était égaré sur ton si beau visage. J'ai relevé la tête, fixant mes yeux d'ors dans les tiens. Tu as baissé les yeux et m'as répondu que tu ne pouvais me dire la vérité, au puéril de me perdre pour toujours. Tu as enchaîné avec un ``Je t'aime`` et as déposé un chaste baisé sur mes lèvres avides de la saveur des tiennes. Sur le coup de l'émotion j'avais fermé les yeux mais cela ne fut que de courte durée. J'ai ouvert les paupières pour découvrir tes pupilles humides des larmes que tu versais. C'est alors que je t'ai chuchoté ces mots ``Est-ce pour toujours ?``, car j'avais compris. Je savais que tu allais t'en aller. Aller loin de moi. Comprenant ce que je voulais dire, tu as retourné ton visage vers le mur, refusant obstinément de me regarder en face.
À mon tour, j'ai compris que j'avais fait une erreur, en te disant cela. Je voulais juste te consoler en déposant ma main sur ton épaule. Mais, toi, emporté par la violence qui prenait possession de toi, tu m'as giflé. Abasourdi, le souffle court, la lèvre inférieure en sang, je te regardais, horrifié par le geste que tu venais de poser. J'ai reculé vers le fond du lit et me recroquevilla sur moi-même, te faisant dos par la même occasion. Mes larmes coulaient à flots. Mes sanglots empiraient de secondes en secondes. Regrettant ton geste, tu as essayé de me consoler, mais chaque fois que tu m'approchais, je m'éloignais. Reconnaissant ta faute et ne voulant me faire souffrir plus, tu es parti. Trop faible pour te retenir ou faire quoique ce soit, je me suis endormi, emportant avec moi le dernier souvenir que j'avais de toi.
