Elle me brule
Harry ferma les yeux. Encore une fois assis sur ce petit muret laid et si longtemps excecre. Encore une fois, apres tant d'annees. Privet Drive. Il passa une main lasse dans ses cheveux rendu ternes et reguliers par l'age et la tristesse. L'age... Il en a de bien bonnes le temps ! Harry avait pris tant d'annees d'un coup. Il avait tellement souffert, que le temps, pensant sans doute qu'il n'y prendrait pas garde, lui avait deja donnee l'apparence d'un vieillard. Enfin, un tout jeune vieillard, Un vieillard de dix-neuf ans qui en paraitrait douze de plus.
Assise la, c'est une autre que j'aurais vue... Murmura une voix souriante, celle du vieux directeur.
Ne remue pas trop le passe. Il est bien assez boueux et sale.
Mais celui-ci est un beau souvenir, Harry.
Mmm... J'ai du avoir des beaux souvenirs, un jour.
Un rire saugrenu lui coupa la parole.
Professeur Snape, prononca Harry avec delectation. Ca faisait combien de temps ?
Trois semaines, deux jours, 4 heures et 27 minutes, repondit machinalement l'homme.
Quelque chose dans le genre, en effet. Pourquoi riiez-vous ?
Elle me brule. Elle est la, a me mettre a ses pieds, elle voudrait que je brule avec lui, que je parte, emporte dans sa chute comme tous les autres. Elle... Elle me veut encore. Et elle m'aura.
Snape, apres ces quelques mots desabuses, s'assoit sur le muret a son tour.
Qu'attendons-nous ? Demande joyeusement Dumbledore.
Le trio se leve et se retourne vers le 4 de la rue. Ils savent tous ce qu'ils ont a faire, et ils n'ont que ca a faire, alors ils vont prendre leur temps.
Pourquoi accepte-tu de faire ca avec nous, Albus ? Demande innocement Harry.
Si les annes sont effacees dans ton etre, elles n'ont plus de lieu d'etre sur Terre.
Harry acquiesce lentement. D'un meme mouvement, les trois hommes levent leurs baguettes. De celle de Dumbledore jaillit d'abord un immense dome de protection bleu, qui englobe les trois hommes et la maison, les coupant du monde et les effacant aux yeux des autres.
Puis le Survivant murmure d'une voix lente "Incendio". Malgres la voix mesuree, un large rayon de flamme jaillit du bout de sa baguette, avec lequel il balaie methodiquement la maison de son enfance. Ses yeux sont fixes en permanence sur la pointe de feu qui dechire les murs et les meubles, sa main maintenant le rayon rouge et meurtrier d'une poigne de fer, apparement sans aucun effort.
Enfin, de la baguette de Snape, accompagnee d'un rire egare, surgit la marque des tenebres, l'horrible tete noire et rouge temoin de tant de massacres.
Seule trace de ce lieu, un vieux mur sur lequel semble veiller l'ombre d'un chat chausse de lunettes.