Disclaimer : L'univers de One Piece appartient à Eiichiro Oda.
Note de l'auteur : Bonjour / Bonsoir à tous ! Me revoilà avec un tout nouveau recueil de ficlets, cette fois-ci. J'en ai eu l'idée de la pire façon qui soit : en faisant mes devoirs de littérature. C'était une question sur l'importance des objets dans Madame Bovary de G. Flaubert (Flauflau pour les intimes). Pour vous dire à quel point mes études empiètent sur ce que je fais à l'extérieur pour "me détendre"... Mon cerveau a vraiment un sens de l'ironie pourri, avouons-le. Ce bouquin m'a traumatisé, je me suis endormie deux fois devant en faisant l'erreur de le lire en allant dans mon lit, bien calée sous mes couettes. Je ne pensais pas qu'il était plus efficace que des somnifères. (Je le conseil pour ceux qui ont du mal à s'endormir le soir : effet garanti, même lorsque vous avez l'impression d'être pleinement éveillé, après trois pages vous ronflerez !) Enfin bref. Ce ficlet-là en particulier m'a aussi été inspiré par l'OS Une place pour les Enfers, de just-one-dream que je vous conseille tant j'ai adoré. Sur ce, bonne lecture ! (Et n'hésitez pas à laisser des reviews pour donner votre avis, positif comme négatif.)
ROUGE À LÈVRES
Eustass Kid
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Un sourire suffisant étira les lèvres écarlates de Kid. Après plus de dix minutes à batailler avec son bâton de rouge à lèvres, soucieux de ne pas en gaspiller une miette, le pirate l'inséra soigneusement dans son tube. Ses doigts s'apprêtèrent à le ranger avec délicatesse dans le tiroir de sa commode, mais la porte de sa chambre s'ouvrant à la volée le surprit tant qu'il le lâcha. Le capuchon du rouge à lèvres sauta et, en s'écrasant contre le sol, le bâtonnet rougeâtre se détacha de son socle.
Killer commença à psalmodier des prières, désireux de rejoindre le Ciel maintenant que sa vie s'achevait mais Kid ne pipa mot. Pourtant, son second était persuadé qu'il s'apprêtait à lui écraser le crâne dans son casque. Sinon, pourquoi serrait-il le poing ?
— Dégage.
— Excuse-moi, Kid. C'est urgent et j'ai...
— Dégage.
Killer n'attendit pas que son supérieur le lui répète une troisième fois : il fila, refermant silencieusement la porte dans son dos. Aujourd'hui, le Ciel ne l'accueillerait pas. Aujourd'hui, le Ciel préférait pleurer, en hommage à la disparition d'une femme fabuleuse. D'une Eustass au caractère bien trempée, si semblable à son homonyme mais pourtant si différente. Plus forte, peut-être.
Délicatement, Kid ramassa les deux morceaux de son rouge à lèvres brisé. Il se mordit l'intérieur des joues rageusement.
Je m'en vais, Kid.
Le goût du métal envahit sa bouche. L'odeur de l'acier s'insinua dans ses narines. La saveur et la fragrance du sang. Les pupilles de Kid accrochèrent le cadavre du rouge à lèvres. Inutilisable. Après des années de bons et loyaux services, le bâtonnet finirait au fin fond de l'océan, pourrissant entre deux récifs.
Alors qu'il fit rouler l'objet entre ses doigts, son rouge graisseux salit sa peau.
Aucun son ne sortait de sa bouche. Pas même un grognement, pas même un soupir, pas même une plainte. De toute façon, il n'arrivait même plus à respirer. Son cœur ne palpitait plus, inerte. Un étau d'acier l'enserrait, réduisant petit à petit la distance entre ses deux pinces pour réduire à néant l'organe du pirate. Enfin, c'était ce que sa tête lui chuchotait. Entre ça et...
Soit fort, Kid.
Son poing métallique s'abattit avec une violence inouïe contre sa commode. Elle éclata en morceaux, répandant tout son contenu sur le sol. Pots de vernis à ongles, lime, ciseaux, vêtements... Kid ne laissa rien au hasard : il écrabouilla chaque flacon, déchira chaque monceau de tissu et balança un tiroir par le hublot, brisant par la même occasion la vitre.
Ne leur montre jamais tes faiblesses, Kid.
Dans sa rage, il ne se rendit pas compte que son poing droit s'était resserré autour du cadavre de son rouge à lèvres, le réduisant en bouillie infâme. Ses genoux rencontrèrent le sol en le découvrant. La moiteur du bâtonnet s'infiltra entre ses doigts manucurés, rendu glissant par la sueur qui s'échappait de ses pores. Cette fois, la voix résonna avec plus d'intensité dans son crâne, apaisant la tempête qui ravageait ses neurones. Le rouge à lèvres s'effaçait de sa bouche, emporté par ses larmes. En même temps que son dernier souvenir d'elle. Elle qui s'était sacrifiée pour lui, elle qui avait vendu ses maigres possessions pour le nourrir. Elle qui offrait son corps contre de quoi le nourrir, elle qui avait plaidé coupable pour le sauver de la potence. Elle qui avait perdu la tête pour que la sienne ne quitte jamais ses épaules.
Et n'oublie jamais que je t'aime, mon fils.
