Titre : Tout est dans le mot « survit »
Disclaimer : J.K Rolling, sauf pour l'histoire
Résumé : Harry en a assez que l'on dirige sa vie, alors il décide de ne plus écouter les recommandations de l'ordre « pour sa sécurité ». Il décide de prendre sa vie en main...
Prologue
Harry se promenait tranquillement sur le chemin de Traverse, incognito sous un déguisement. Il avait fait pousser ses cheveux jusqu'aux omoplates et les avait fait onduler, un peu à la manière d'un Black. Il avait corrigé sa vue, n'avait donc plus besoin de ses affreuses lunettes et avait noirci ses iris. Il avait modifié ses traits, les durcissant, les rendant plus mature, âgé. Il avait étoffé et grandi sa silhouette, et avait masqué sa cicatrice sous du fond de teint et sa frange, les sorts n'ayant aucun effet dessus. Cela faisait deux semaines, maintenant –depuis le début des vacances, en fait- qu'il venait presque quotidiennement faire un tour sur le Chemin de Traverse. Dans les premiers temps, il venait sous sa cape d'invisibilité, mais il avait trouvé dans un ouvrage –sûrement illégal, trouvé dans une boutique louche de l'Allée des Embrûmes- qui expliquait comment contourner l'interdiction de faire de la magie pour les mineurs. Il lui avait fallu quelques jours pour contrôler l'incantation, mais il y était parvenu, et, à présent, il était libre. Il en avait profité pour bien faire comprendre aux Dursleys de le laisser tranquille, pour se refaire une garde-robe plus… seyante, dirons-nous, à partir des vieux vêtements de Dudley dont il avait hérité, et enfin, il en avait profité pour se créer une nouvelle –fausse- identité, qu'il revêtait lors de ses fréquentes sorties. Il en avait marre, ras-le-bol de n'avoir le droit de rien faire, soi-disant pour sa sécurité, assez de ne recevoir de nouvelles, ni de réponses, de personnes, et d'être traité comme un chien par les Dursleys ! Tout ça à cause d'une prophétie à la con prononcée quinze ans plus tôt par une vieille bique complètement tarée ! Il grogna sourdement à ses pensées, faisant de fait s'écarter plusieurs personnes. Il fallait dire qu'il avait choisi –en toute connaissance de cause- un physique impressionnant, limite inquiétant, du genre de celui qu'on n'aimerait pas rencontrer dans une ruelle sombre, la nuit. Il s'assit à la terrasse d'un café dont il était devenu habitué, et commanda un chocolat chaud. C'était une paisible matinée, la rue était plutôt calme, le ciel pervenche comme c'était rare en Angleterre, et un soleil chauffant juste ce qu'il fallait.
« Permettez que je m'installe ici ? »
Harry tourna la tête vers celui qui lui avait adressé la parole. Tout de brun vêtu, il était dissimulé presque intégralement sous une cape et un chapeau à large bord. Le Survivant jeta un rapide coup d'œil autour de lui et se rendit compte qu'aucune table de la terrasse n'était plus libre. Il soupira intérieurement et marmonna un vague assentiment. L'autre le remercia d'un hochement de tête et s'assit. Il commanda un granité à la framboise et sortit de sa cape une chemise cartonnée assez conséquente. En silence, il commença à travailler dessus. Quelques mois plus tôt, Harry aurait été taraudé par l'envie de savoir ce que contenait cette chemise. A présent il comprenait mieux que personne ce qu'était le luxe d'avoir des secrets, une vie privée. Il continua donc à observer le ciel, les gens qui passaient, des points imaginaires, tout en buvant son chocolat. L'autre ne relevait pas la tête de ses papiers, aspirant juste de temps en temps quelques gorgées de sa boisson glacée avec sa paille.
Aux alentours de onze heures, Harry paya sa consommation et partit. Il flâna encore un peu sur le Chemin de Traverse et l'Allée des Embrumes avant de retourner dans le Londres muggle et de prendre le Magicobus pour rentrer chez lui. Après avoir repris sa véritable apparence, il déjeuna rapidement seul, puis monta dans sa chambre. Il ouvrit sa valise et en sortit un livre de sortilèges. Depuis qu'il n'avait plus de restrictions de magie, il s'entraînait régulièrement. Après tout, il était la clef d'une guerre. Il aurait l'air fin s'il ne savait rien faire ! Il s'exerça sur un mannequin qu'il avait fait apparaître et ne s'arrêta que lorsqu'il fut satisfait des résultats. Depuis un peu plus d'une semaine, déjà, il alternait les matières qu'il travaillait, et il avait déjà touché à peu près tous les sujets, même les potions. Ainsi, il s'était aperçu que c'était beaucoup plus facile quand il n'y avait personne pour lui saboter ses potions –une certaine maison rivale avec un certain blondinet à sa tête-, le distraire par ses bavardages incessants –un certain rouquin-, ou le rabaisser et le déconcentrer par des piques et des remarques permanentes –un certain maîîître des potions (et des cachots). Donc, lorsqu'aucun de ces facteurs n'intervenait, il pouvait dire qu'il tenait un peu plus que ses yeux de sa mère. Bon, il n'était pas un génie, non plus, mais il s'en sortait plutôt haut la main sans trop de difficultés.
Quelques jours après, alors qu'il était de nouveau à la terrasse du café, l'homme enveloppé dans une cape se réinstalla à ses côtés. Ce manège dura près d'une semaine, durant laquelle ils prenaient une boisson sans qu'aucun d'eux ne lâche un mot, sans pour autant qu'ils en soient gênés, quand bien même, l'inconnu, à partir deuxième jour, avait arrêté d'amener du travail. Au bout d'une semaine environ, donc, ils entamèrent la conversation, naturellement, un peu à la manière de vieilles connaissances perdues de vue depuis longtemps : un peu complices, ils ne s'attardaient pour autant pas sur eux-mêmes, leurs passés ou leurs opinions, restant sur des sujets triviaux, tels que le temps qu'il faisait, les différents mets proposés dans différents restaurants, ou le nouveau vendeur de la librairie. Harry arguait qu'il n'était que très peu engageant de par ses manières, tandis que l'autre soutenait qu'il ne pouvait être pire que le précédent. Ils discutaient donc tranquillement à mi-voix, et, sans qu'ils ne s'en rendent compte, la matinée était passée. Ce fut l'estomac de Harry qui les fit s'en apercevoir par un gargouillis du plus bel effet. L'autre pouffa derrière le grand col de sa cape et Harry grogna.
« Ho, ça va ! C'est normal à mon… »
Il se tut. Il avait failli échapper qu'il était plus jeune qu'il n'en avait l'air. Les yeux de l'autre brillèrent sous l'ombre de son chapeau.
« A votre âge, n'est-ce pas ? »
Harry resta une seconde abasourdi avant de chercher à répliquer, mai l'autre ne lui en laissa pas le temps.
« Ne vous inquiétez pas, je sais depuis quelques temps déjà que vous n'êtes pas celui que vous vous efforcez de paraître.
-Pardon ?
-Et oui ! Navré, mais vous avez quelques fois des réactions trop infantiles pour quelles soient jouées. Elles sont trop… spontanées.
-Je ne vous permets pas ! S'insurgea Harry, haussant légèrement le ton.
-Ne vous inquiétez pas, avec moi, votre secret est bien gardé. Après tout, vous devez avoir remarqué que je me camouflais moi aussi, même si moins bien et moins discrètement que vous.
-…
-Mais dîtes-moi plutôt votre nom, que je puisse vous nommer, et je vous donnerai le mien. »
Harry pesa un moment le pour et le contre, puis :
« Oronte Dursley, et vous ? répondit-il finalement, du défi dans la voix.
-Ariel Smith, enchanté.
-Ce n'est pas votre vrai nom.
-Ni le votre.
-Tch !
-Ne soyez pas vexé, il est normal pour des amis de connaître leurs noms, fussent-ils seulement des pseudonymes, et de savoir que ce qu'ils voient n'est pas la réelle apparence de leur interlocuteur.
-Je ne pense pas avoir notifié le fait que nous soyons des amis.
-Pas encore, mais nous pouvons le devenir, voire bien plus. Nous pourrions devenir… des complices…
-Vous vous foutez de moi ?
-Pas du tout, juste qu'il se peut que j'aie besoin de vous, et que vous, vous n'alliez pas bien loin sans mon aide.
-Je ne vous permets pas ! »
Harry avait crié cette phrase, faisant se tourner du monde vers eux alors qu'il retournait chez lui d'un pas rageur. Dans sa petite chambre, il ôta on déguisement et se jeta sur son lit. Quelle aide ? Il n'avait pas besoin d'aide ! Pour qui se prenait-il, cet… Ariel ? En plus, il ne lui avait même pas donné son vrai nom ! Bon, lui non plus, mais bon… Lui, au moins, il avait une bonne raison ! Sûrement que l'autre aussi, d'un côté. Il pesa longuement le pour et le contre (il tritura son malheureux cerveau sur les trois ou quatre arguments toutes causes confondues qu'il avait) avant de se rappeler ce qui avait engagé cette dispute : il crevait littéralement la dalle. Il descendit à la cuisine et se fit un sandwiche au rosbif. Ça allait déjà mieux. Et puis, en y repensant, Ariel n'avait pas paru rempli d'animosité. Ces cornichons non plus, d'ailleurs il en goba un. Peut-être devrait-il retourner le voir pour lui demander des explications ? (à Ariel, pas au cornichon) Il se fit un autre sandwiche qu'il emporta dans sa chambre. Oui, c'était une bonne idée qu'il avait eu là : il allait retourner voir Ariel. Dans le même temps, il se fit une note mentale qu'il ne fallait jamais sous-estimer l'énergie positive que dégageaient deux sandwiches au rosbif et un cornichon ils avaient quand même à eux trois réussi à le faire changer d'avis sur quelqu'un qu'il ne connaissait pas !
Il jeta un coup d'œil à la fenêtre et se rendit compte que le crépuscule tombait déjà. Il engloutit le reste de son repas en deux bouchées, remis son déguisement, et retourna sue le chemin de Traverse. Hélas, Ariel n'était plus au café. Il fut un peu déçu : il aurait pensé que l'autre serait resté dans les parages ? D'un autre côté, il avait sûrement une vie à lui. Il soupira et décida de flâner encore un peu. Il n'avait pas envie de supporter sa famille. Il remonta le Chemin de Traverse, puis continua avec l'Allée des Embrumes. Un homme essaya de l'accoster, mais il se détourner. L'autre le retourna alors violemment et commença à l'invectiver, menaçant. Une main se posa sur l'épaule d'Harry, et l'autre, avec un coup d'œil et un couinement effrayés, s'enfuit.
« Voyons, Oronte, tu n'es pas prudent.
-Je ne crois pas vous avoir permis de me tutoyer, et je maîtrisais parfaitement la situation.
-Bien sûr ! Et c'est pour cette raison que vous ne vous étiez pas dégagé, railla Ariel, ironique.
-Humpf !
-Enfin bon, trêve de plaisanteries, pourquoi êtes-vous revenu, et pourquoi vous baladiez-vous dans l'Allée des Embrumes, la tête dans les nuages ? Me… cherchiez-vous, par hasard ?
-Je ne suis pas certain que le lieu où nous nous trouvons actuellement soit un bon endroit pour palabrer.
-Vous avez tout à fait raison… il n'y a pas que les murs qui ont des oreilles et des yeux, ici, Oronte. Suivez-moi.
-Et pourquoi devrais-je vous faire confiance, monsieur S…
-Ariel. Il n'est jamais bon de trop en dire, surtout dans des endroits comme celui-ci, Oronte, et considérez mon offre comme un moyen de me racheter après vous avoir froissé cette matinée. Au fait, avez-vous mangé, entretemps ?
-Tsss ! Condusez-moi et gardez vos sarcasmes pour qui les apprécierai, c'est-à-dire personne. »
Seul un léger rire lui répondit, et il suivit Ariel dans un dédale de ruelles plus petites, plus sombres et plus mal fréquentées les unes que les autres. Il le fit passer dans des passages dérobés, derrière des faux murs, et l'aida même à en escalader un vrai. Ils arrivèrent enfin à un immeuble austère de granit sale. Ariel pénétra dans le vestibule, et prit les escaliers qui montèrent très, très, très haut, sans aucune interruption, ni pallier, ni porte. Enfin, Ariel s'arrêta, un pied sur une marche, l'autre sur celle du dessous, face à un pan de mur semblable à tous ceux qu'ils avaient dépassé jusqu'à présent. Il sortit de sa poche une petite clef qui disparut dans le mur. Il prit ensuite Harry par la main, et ils passèrent au travers.
La paire se retrouva dans un petit salon/salle à manger où une cheminée ronflait, éclairant un petit canapé qui se réchauffait devant elle et faisait dos à une petite table carrée encadrée de quatre chaises. Une minuscule fenêtre laissait passer la lumière perpétuellement grisâtre du quartier malfamé, légèrement obstruée par un fin rideau taupe. La pièce était d'ailleurs dans les tons chameau, brun, écru, gris souris, s'accordant à merveille avec le bois blond de la table, des chaises et des deux portes contigües qui leur faisait face. Ariel s'assit dans le canapé et désigna à Harry la place à ses côtés. Après que son invité se fut installé, il commença :
« Et bien, de quoi vouliez-vous me parler exactement ?
-Qu'aviez-vous précisément voulu dire ce matin ? Pourquoi aurais-je besoin de votre aide et vous de la mienne ?
-Tout simplement parce que, comme tu le vois, j'essaie de me camoufler, mais que, pour des raisons diverses, je ne puis le faire par magie. Et vous, vous ne savez pas du tout camoufler votre aura.
-Pardon ?
-Elle ne correspond pas le moins du monde à votre image. De plus, n'avez-vous pas remarqué que vous étiez filé ?
-Comment ça ?
-Le ministère a récemment mis e place un système de surveillance sur le chemin de Traverse. Un des aurors de garde a dû en arriver aux mêmes conclusions que moi à votre encontre : vous n'êtes pas ce que vous voulez faire croire. Ni votre manière de bouger, ni votre façon de vous comporter ne sont tout à fait naturelles, comme si vous n'aviez pas ce corps depuis très longtemps. »
Harry pâlit. Merde !
« Donc, si je résume bien, vous êtes quelqu'un qui a besoin de moi pour passer inaperçu, et selon vous, j'ai besoin de vous pour faire la même chose ? Qu'est-ce qui me dit que vous ne vous payez pas ma tête ? »
Ariel soupira puis se concentra sur son vis-à-vis.
« En vrai, vous êtes plutôt petit… chétif… mm… brun… les yeux…
-Stop ! C'est bon ! Je vous crois ! Mais je n'accepte le marché qu'à une condition !
-Laquelle ?
-Vous n'essayez pas de découvrir qui je suis, et je ne vous montre pas ma véritable apparence.
-Cette clause me paraît honnête. Puis-je demander la même chose ?
-Evidemment, pourquoi vous refuserais-je cela ? C'est plus juste, si, tous deux, nous avons les mêmes droits et obligations. Mais y a-t-il un moyen pour que nous soyons sûrs que l'autre respecte sa parole ?
-Malheureusement, pas dans notre cas. Les différents moyens de s'assurer la fidélité de la parole donnée, tels que les Serments Inviolables, ou les Parchemins Enchantés, nécessitent les vrais noms des protagonistes engagés.
-Ah…
-Oui, nous allons devoir nous faire confiance.
-Tss…
-Si nous commencions ?
-Mm…
-Bon, premièrement, vous allez devoir vous essayer à la méditation.
-… C'est une blague ?
-Pas du tout. Il faut que vous appreniez à maîtriser votre magie sur le bout des doigts… de la baguette, plutôt. C'est déjà un miracle que vous soyez encore entier alors que vous vous êtes changé plain de fois sans vraiment de précaution, et je n'ai pas vraiment envie de me retrouver en… quelque chose… de bizarre…
-Hmpf !
-D'ailleurs, vous devriez enlever votre déguisement, je vais vous passer des vêtements couvrants. »
Il passa l'une des portes de bois clair et revint avec une ample cape noire et un masque couvant la totalité du visage. Harry attendit que l'autre se soit tourné pour retrouver son apparence originelle et enfiler la cape et le masque.
« C'est bon. »
Ariel se retourna et planta ses yeux dans ceux d'Harry.
« Bien. Je ne pense pas que vous puissiez prendre le risque de sortir actuellement. Il va falloir que vous fassiez des progrès si vous voulez que nous puissions aller à l'extérieur sans danger, Oronte.
-C'est du séquestrage !
-De la prévention.
-A la moindre entourloupe, je vous jure que je vous…
-Pas de menaces entre nous. Cela mettrait une mauvaise ambiance et nous allons devoir cohabiter un certain moment ensemble.
-Qui vous dit que je suis d'accord avec ça ?
-Vous passez énormément de temps en extérieur, seul, et, à moins que nous ne supportiez vraiment pas d'être en intérieur, ou que vous soyez féru de shopping, vous n'avez que peu de choses qui vous retiennent chez vous.
-Mes affaires, entre autres.
-Vous pourrez y aller par cheminette, ainsi, vous constaterez que je ne vous prive pas de liberté.
-Je ne reste ici que si j'ai la parole que je pourrai rentrer chez moi par cheminée dès que je le souhaiterai, et que vous n'essaierez jamais, au grand jamais, ni de m'en empêcher, ni de me suivre.
-Et bien, d'accord, mais je te prierai de ne fréquenter que la cuisine, la chambre, la salle-de bain et la partie de bibliothèque non-couverte par le drap lorsque tu résideras ici.
-Bien.
-Marché conclu, Oronte.
-Marché conclu, Ariel. »
Aucun des deux ne se doutait que ce pacte bancal allait complètement changer leurs destinées respectives, mais aussi celle du monde entier.
