特別な誕生 / Une naissance particulière

Akimitsu Hime se sentait enfin heureuse pour la seconde fois de son interminable existence.
Oui, heureuse et vivante avec vraiment quelqu'un sur qui veiller. L'une des déesses du monde céleste était malgré tout partagée entre joie et crainte.
Après tous ces jours, ces mois, années, siècles passés, figée dans la même rengaine, son quotidien changeait enfin.
Cette nouvelle existence proche d'elle, si faible et vulnérable lui donnait enfin l'envie de veiller et de protéger quelqu'un .

Oui...
Depuis ce fameux jour où exaspérée par ce morne train train, Akimitsu déesse, avait osé transgresser un premier interdit en descendant sur terre.
En quittant le royaume céleste se moquant complétement des conséquences de toutes façons malgré son statut de femme, elle appartenait à la famille royale. Elle s'en tirerait donc à bon compte, quoi qu'il arrive.
Le Togenkyô était un monde si intéressant et si différent, si vivant ! Guerres, conflits, humains animaux, végétaux et monstres dans ce même monde.
Des créatures qui lui ressemblaient, normal puisqu'elles avaient été crées à l'image des dieux pour les divertir.
Mais tellement plus étranges, tellement plus amusants à observer et manifestement naifs mais pourtant... Attachants.

Comme ces enfants qui s'amusaient, ou ces hommes se démenant aux champs pour nourrir leur famille...
La déesse n'avait pas vraiment envie de revenir, mais elle n'était pas sotte. Elle savait que son escapade ne passerait pas inaperçue très longtemps.
Qu'importe de rentrer ! Elle pourrait revenir quand bon lui semblerait dans ce monde.

De retour dans ses appartements, Akimitsu Hime s'enferma, se saisit d'une serviette humidifiée et d'une fiole de parfum.
Elle retira aussi ses vêtements, enfila un peignoir puis déposa du parfum sur ses vêtements et son corps. Personne ne pourrait sentir l'odeur des humains et douter de sa fugue.
Avec un sourire, elle chercha son maquillage, se préparant pour une einième fête au palais.

Il y avait décidément bien plus de changements au Togenkyo qu'au Royaume Céleste ! Pour commencer, il y avait ce que les humains appelaient les saisons : le paysage changeait, comme le temps. Ensuite il y avait des morts et donc des endroits où reposaient les défunts qu'on appelait cimetière. Sans parler des forces déchaînées de la nature : ouragans, raz de marée, séismes...
Cette fois, hors de question de repartir sans s'être gorgée de bons souvenirs !
Akimitsu Hime avait pu à plusieurs reprises revenir sur ce monde mais pour très peu de temps à chaque fois.
Même si elle aimait jouer avec le feu, elle savait qu'elle finirait par être découverte, avant de le payer trop cher, il fallait rapidement mettre un terme à ce jeu.
Elle était donc revenue une ultime fois alors que les arbres perdaient leurs feuilles, qu'il y avait des averses, comment les humains appelaient donc cette époque déjà ? Ah oui, l'automne ! C'était plutôt beau ces feuilles d'un rouge écarlate, ces champignons multicolores ou ces fruits aux branches des arbres.
C'était décidé : elle resterait ici, jusqu'au prochain automne.
De toutes façons, une année terrestre équivalait un jour et une nuit céleste peu de chances de découvrir son absence.
L'année qu'elle passa dans ce « bas royaume »dépassa toutes ses espérances : non seulement elle découvrait de nouvelles choses, mais aussi quelqu'un à aimer.
Un simple mortel sans réel prestige, juste un tisserand on ne peut plus quelconque qui pourtant s'était épris d'elle, lui avait offert gîte et couvert sans exiger quelque chose en retour.
Touchée par cette gentillesse, Akimitsu s'était elle aussi éprise de cet homme, s'arrangeant discrétement pour que son existence soit prosprère, embellissant magiquement ses étoffes, l'aidant chaque jour.
Même si ça ressemblait à son quotidien divin, tout ceci était tellement plus agréable, chaque événement avait une douce saveur, comme les kakis qu'elle aimait manger.
Pourtant, les humains sont faibles. Peu avant le retour de l'automne, son bien aimé commença à dépérir rongé par la maladie.
Si ils devaient vraiment cesser de se voir, alors qu'ils gardent une trace de leur amour ! C'est ce qu'ils avaient tous deux dû penser. Et la mort ne tarda pas à frapper, le temps imparti s'acheva.
Plus jamais elle ne pourrait revenir dans ce royaume qu'elle avait tant aimé.

Le regard d'Akimitsu se posa sur le petit paquet posé sur son lit.
C'était la première fois qu'elle éprouvait autant d'amour pour quelqu'un, qu'elle était heureuse de cette présence.
Le nouveau né jusqu'ici paisiblement endormi ouvrit difficilement ses yeux, cet endroit l'inquiétait un peu, mais il était dans les bras de sa maman, donc tout se passerait bien.
Réussissant à voir distinctement un doigt, le bébé s'en saisit avec un gazouillement de triomphe.

« Homura chan... » Murmura Akimitsu attendrie devant son fils tout en se demandant si elle devrait jouer la carte de la prudence ou annoncer aux membres de sa famille cette naissance particulière.
Elle l'avait tout de suite su que son fils serait particulier. Le jour où il était né elle s'était aperçu que ses yeux étaient vairons au lieu d'être du bleu foncé caractéristique.
Un œil droit doré, un œil gauche bleu comme les siens.
Etait ce la marque du tabou qu'elle avait osé transgresser ? Et puis quoi encore ? Il n' y avait rien de tabou à vouloir un enfant de celui qu'on aimait peu importe sa race !

Depuis bien longtemps, il y avait enfin ce qu'on pouvait qualifier de « Belle journée »

la jeune déesse avait demandé à son père la permission de sortir admirer les fleurs.

Finalement, elle avait préféré garder le secret. C'était mieux ainsi seule sa jeune sœur connaissait l'existence de l'enfant.
Même si elle le trouvait mignon, elle ne pouvait s'empêcher de croire qu'il apporterait des calamités à cause de son œil !
Maudites superstitions ! Pauvres idiots intolérants , songeait elle furieuse devant les propos que tenaient les dieux et même sa propre sœur.
Et comme toujours, Homura lui faisait oublier sa rancoeur. Le bébé d'à présent neuf mois était fasciné par les fleurs multicolores, rampant d'une fleur à l'autre, les touchant, portant à la bouche enchanté par ce qu'il découvrait.
Ce qui était encore plus étrange, c'est ces droles de taches qui bougeaient dans le ciel, elles ne restaient pas en place ! C'était peut être des fleurs, comme avait dit sa maman.
Alors, il y en avait qui bougeaient et d'autres pas... Content de cette dévouverte et fatigué, Homura revînt à quatre pattes vers sa mère.
Ils réussiraient peut être à être heureux, à mener une vie sereine finalement...

Mais ce qui devait arriver arriva : Le secret fût divulgué.
Pas besoin de savoir qui avait parlé. Akimitsu ne pouvait pas le croire : même sa propre sœur la méprisait à ce point elle et son fils ?
Le sourire triomphant de cette garce, ce n'était plus sa sœur, parlait clairement pour elle.
Enchaînée face à sa famille, toute une foule de curieux l'observait avec dégoût, mépris pas la moindre trace de pitié.
La sentence ne se fit pas attendre : Akimitsu Hime fût déchue de son titre de princesse, de son appartenance à la famille royale. Quant au reste de son existence, comme ce vulgaire Togenkyô lui avait plu, elle ne pourrait pas y retourner et se réincarner. Non elle serait offerte aux tourments éternels du Jigoku, l'Enfer redouté des damnés aux milles et une cruelles tortures.
Plus question non plus de compter encore à la compagnie de ce batard ! De cette abomination qui osait dormir sans se soucier de ses méfaits...

Il était une aberration, une horreur même si il était à demi céleste. Qu'importe, ils trouveraient une solution pour que les dieux ne subissent pas sa présence.
Tout ceci, Homura simple enfant, ne le savait pas encore...
Tout comme il ne savait pas non plus que ce n'était que le commencement...