Ce matin-là, quand elle vit quel jour on était sur le calendrier, Riza se dit que la journée n'allait pas être de tout repos. Et pour cause : aujourd'hui c'était le jour de la St-Valentin. Une date qu'elle n'attendait pas avec impatience en général. Car à chaque fois, les admiratrices de Mustang redoublaient d'effort pour un peu de son attention. Traduction : pintades et pimbêches à volonté au téléphone. Youpiya. Sans parler de la parade annuelle du paon de service, vous-savez-qui, qui va lui bourrer le crâne avec son succès auprès des femmes. Ah là là là. C'était vraiment le genre de jour où Riza resterait volontiers couchée. Elle se rendit donc au Q.G, des têtes de morts, des bombes sur le point d'exploser et des nuages avec un éclair noirs voletants autour de la tête ( Ndla : comme la pub pour la Ricorée ou un truc dans ce genre.)
Naturellement, ses collègues savaient très bien que le lieutenant serait d'humeur massacrante, comme à chaque St-Valentin. L'année dernière, Havoc avait eu le malheur de lui suggérer de se trouver un mec. Le pauvre, il avait eu droit à de l'art brut made in Hawkeye : sa silhouette dessinée sur le mur à coup de balles. Très décoratif, mais mauvais pour le coeur. En tout cas il avait retenu la leçon, et le sujet n'était plus jamais revenu sur le tapis. N'empêche qu'il n'en pensait pas moins.
" 'jour." dit-elle en entrant.
" Bonjour lieutenant. Belle journ ... euh ... il fait beau non ?" dit Fuery.
Un peu plus et il allait déjà l'agacer.
" Mmroui."
Riza s'installa à son bureau le visage fermé. Roy fit son entrée comme un conquérant parcours son domaine : avec hauteur. Riza le salua à peine, il ne s'en formalisa pas. Sa majesté alla poser son royal postérieur sur son trône, et contempla avec satisfaction son bureau vierge de toute paperasse. Aavant que Riza ne lui apporte son travail, on frappa à la porte.
" Entrez !" lança Mustang.
Le préposé au courrier entra, portant un lourd sac. Il posa les enveloppes sur le bureau du lieutenant Hawkeye, et enfin entreposa le sac sur le bureau du colonel.
" Votre courrier ... mon colonel." souffla-t-il.
" Merci Ryan. Bonne journée." répondit Roy indifférent.
Le jeunot salua, et quitta le bureau. Mustang ouvrit le sac, et une floppée de lettres parfumées s'en échappèrent, ainsi que des boîtes de chocolats en forme de coeur.
" Oh là là là ! Y'a au moins une vingtaine de boîtes, et j'ai même pas fini celles de l'année dernière." dit-il en se penchant pour regarder dans le sac.
" Oh le pauvre chéri ! Vraiment c'est ce qui s'appelle une tragédie." pensa Riza avec dégoût.
Roy sortit toutes boîtes. Une pile impressionnante à dire vrai.
" Bon : vous en voulez ?" demanda-t-il à ses collègues.
" Avec plaisir !" répondit Breda.
Ben tiens ! Roy fila une boîte à chacun. Riza se résolut à en prendre une, le chocolat l'aiderait à se changer les idées. Roy commença à décacheter une enveloppe, et lut la lettre en piochant un chocolat. Son lieutenant se leva, des dossiers dans les bras. Elle les posa bruyamment sur un coin du bureau, arracha la lettre des mains de son supérieur et la déchira.
" Hé ! Mais ça va pas non !" s'exclama Mustang.
" Au boulot et en vitesse." répliqua Riza en sortant un flingue.
Son regard caramel était congelé. Roy soupira, et rangea ses lettres. Riza flanqua le sac directos à la poubelle, et retourna à son bureau. Le reste de la matinée se passa calmement, chacun ayant saisi l'importance vitale de ne pas contrarier la jeune femme. La pause déjeuner arriva, soulageant l'équipe. Dans les couloirs, les filles se bousculèrent pour inviter Mustang à déjeuner. Un coup de feu claqua, et elles se dipersèrent comme une envolée de moineaux. Stupéfait, Roy découvrit Riza, qui rangeait son pistolet.
" Vous êtes sûre que ça va Hawkeye ? Ca peut vous coûter cher ce genre d'initiative." demanda-t-il.
" Et à qui la faute ? Je sais merci." répondit-elle sèchement en passant devant lui.
Roy soupira. Chaque année c'était la même chose. Qu'avait-elle donc contre la St-Valentin ? Quoi qu'il en soit, il entra dans le réfectoire et se joignit à son équipe. Riza pour sa part, alla s'installer près de sa meilleure amie, Maria Ross.
" Salut. Comment vas-tu ?" demanda la brune.
Maria savait très bien de quoi il retournait, mais bon.
" Bof. Comme un 14 février." répondit Riza.
" Je vois. Mais dis-moi, pourquoi tu ne lui écris pas une lettre toi aussi ?" demanda le second lieutenant.
" C'est ça ! Pour qu'il se fiche de moi ? Et puis vu le tas de lettre qu'il reçoit, la probabilité qu'il lise la mienne est vraiment mince."
" Qu'est-ce qui te fait croire que Roy se moquera de toi ? Il se peut très bien que ça le touche au contraire." fit Maria.
" Non j'en doute. Il est persuadé que je suis insensible, alors si je me mets à montrer un signe d'émotivité ou autre, c'est comme si les martiens débarquaient."
Maria la regarda en silence. Riza était éperdument amoureuse de Roy, et la St-Valentin était synonyme de martyre. Le déjeuner fut donc amer pour la jeune femme. Elle ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'oeil à la table où mangeait son supérieur.
" Il est si beau ... et il a un coeur en or. Seulement, je ne suis que la simple subordonnée pour lui. Ni plus ... ni moins." se dit-elle.
Le repas terminé, elle dut retourner à son bureau, et donc à ses idées moroses.
" Oh ? Y'a une nouvelle disparition." annonça Roy.
" Ah oui ? Du même genre que les autres ?" demanda Falman.
" Oui, un autre mannequin. Shania McFly, 26 ans, elle a disparu il y a trois jours. répondit Roy.
" Shania McFly ? Elle est belle celle-là. Vraiment sexy." commenta Havoc.
" Ca fait la cinquième en deux mois. Personne ne comprends ce qui se passe. On va devoir reprendre l'affaire."
Les hommes affichèrent un grand sourire. Une mission avec les plus belles femmes de Central, que demande le peuple ?
" Je viens de battre mon record de la pire journée. J'ai intérêt à apporter des serpillères, parce qu'avec ces guignolos ça va y aller la bave." pensa Riza les yeux en billes.
L'équipe fit donc route vers l'immeuble où travaillaient les mannequins. Riza eut le plaisir de retrouver son amie Maria, accompagnée comme toujours du sergent Dennis Brosch. Et les voilà donc devant le fameux immeuble. Un portier leur ouvre. Ils montent quelques étages, et c'est un monde complètement différent qui se présentent à eux.
" Lucchi ? C'est quoi ça ?" demanda Jean devant un cadre.
" C'est un des plus grands couturiers." répondit Maria.
" Brada aussi ?" demanda Kain.
" Oui."
Ils arrivèrent en pleine scéance photo. Une belle jeune femme rousse prenait des poses aguichantes, pour le plus grand plaisir des militaires. Un homme assez efféminé, et très chic les rejoignit.
" Bonjour, Jean-Paul Moriani, directeur marketing. Vous êtes les militaires qu'on a demandé ?" dit-il d'une voix très ... aristo.
" C'est bien nous. Colonel Roy Mustang." répondit le brun en lui serrant la main.
" Enchanté. Suivez-moi dans mon bureau, que l'on parle affaire." répondit Jean-Paul.
La troupe quitta donc le plateau, avec regrets pour qui vous savez. Dans le grand bureau du directeur, ce dernier leur montra des photos des mannequins disparus. Un régal pour les hommes.
" Tout se passe toujours dans la plus grande discrétion. Nous n'avons jamais rien pu surprendre. Généralement, l'enlèvement a lieu pendant un défilé. Chacune des filles se trouvait seule dans sa loge, histoire de reposer par exemple, et elle disparaît. On ne sait plus quoi faire." expliqua Moriani.
" Des indices ?" demanda le colonel.
" Pas le moindre."
" Pourrions-nous voir l'endroit où mlle McFly a été kidnappée ?"
" Eh bien ... c'est en Toscalie que ça eut lieu. Donc bon."
" D'accord. Avez-vous reçu des lettres de menaces, ou quelque chose dans ce genre." continua Roy.
" Nous en recevons souvent à vrai dire. La plupart sont sans suite heureusement. Toutefois, je peux vous montrer celles adressées à Shania ou Linette. A ce propos, vous pourrez aussi voir la loge où se trouvait Linette avant de disparaître."
La troupe de bleus et le dirlo quittèrent le bureau, hé ho hé ho, et se rendirent à la loge quelques étages plus bas. Moriani les laissa inspecter le coin.
" Tout a l'air en ordre." dit Dennis.
" Nous n'avons touché à rien pourtant." fit le directeur.
De leur côté, Fuery, Breda et Falman lisaient les lettres de menaces.
" Franchement, faut être frappadingue pour s'en prendre à des mannequins." dit Kain.
" Ouais, mais en même temps tout le monde voudrait avoir ce genre de beauté pour soit." sourit Breda.
" Ouais. Si ça se trouve le ravisseur voulait se faire un harem." ajouta Falman.
" C'est pas drôle les gars." reprit Kain.
Leur lecture terminée, ils rejoignirent les autres.
" Alors ?" demanda Breda.
" Rien, que dalle, pas le moindre indice." répondit Havoc en sortant une cigarette.
Elle lui fut ôté des mains par Moriani, qui lui lança un regard fâché. Jean soupira. Les militaires passèrent trois jours à enquêter dans cet immeuble, sans rien trouver. Ils se réunirent dans une petite salle pour faire le point.
" Il faut admettre qu'on ne connaît rien à ce milieu. Sans parler de l'absence d'indices." commença Roy.
" Je crois qu'on ne trouvera rien par les méthodes classiques. Faut essayer autre chose." ajouta Dennis.
" Dans ce cas, pourquoi ne pas tenter une infiltration ?" suggéra Kain.
Toues les têtes se tournèrent vers lui. Chacun considéra l'idée.
" Hm ça paraît une bonne idée. Mais pourriez-vous développer sergent ?" demanda Roy.
" Eh bien, des militaires pourraient tenter de devenir mannequin. Ainsi on pourrait enquêter de l'intérieur."
" Oui, ça peut marcher. Mais qui s'infiltrerait ?" demanda Havoc.
Roy tourna la tête vers les deux filles présentes. Petit à petit, tout le monde les regarda.
" Non ! Oh non ! Certainement pas !" dit Riza.
" Vous plaisantez j'espère ?" ajouta Maria.
Moriani arriva à ce moment-là, pour leur demander où ils en étaient.
" Nous avons pensé que deux nos agents pourraient s'infiltrer, et devenir mannequins." annonça Roy.
Moriani observa les filles un instant.
" Elles sont un peu petites, mais on doit pouvoir en faire quelque chose." dit-il.
" Hé ho ! Nous avons notre mot à dire il me semble !" intervint Maria.
Une fille entra comme une trombe, un chapeau à la main.
" Monsieur Moriani, vite j'ai besoin de votre avis ! Avec le chapeau - elle le mit - ou sans le chapeau ? Avec le chapeau ou sans le chapeau ?" dit-elle en penchant la tête au fur et à mesure.
" Sans ma petite." répondit le directeur.
" Merci beaucoup !"
Elle repartit aussi vite qu'elle était venue.
" Avec le cerveau ou sans le cerveau ? Avec le cerveau ou sans le cerveau ? Très peu pour moi ! " imita Riza.
" Je vois. Est-ce que tout le monde hormis les filles et monsieur Moriani pourrait sortir ?" lança Roy.
Les autres soldats obtempérèrent.
" Ecoutez, je sais que ça ne vous plaît guère, mais il n'y a que vous qui puissiez le faire. En plus d'après monsieur Moriani, vous pouvez facilement être mannequins, n'est-ce pas ?" dit Roy en se tournant vers le directeur.
" Facilement facilement, faut voir. Pourriez-vous ôter vos vestes mesdames ?" dit-il.
" Pourquoi faire ?" demanda Maria.
" J'ai besoin d'avoir une idée du travail qu'il va falloir pour que vous soyez crédibles. Pour le reste, on verra plus tard."
Riza et Mari échangèrent un regard, puis tombèrent la veste. Moriani s'avança et leur tourna autour.
" Moui. La blonde n'est pas bien grande, mais elle a largement les formes qu'il faut. Aussi bien devant que derrière. La brune est aussi bien proportionnée. Ca va demander pas mal d'efforts, mais nous devrions pouvoir les transformer en reines de beauté." dit-il.
" Excellent. Mesdames, il ne manque plus que votre accord. Sachant évidemment que tout refus serait préjudiciable pour votre carrière." dit Roy un sourire en coin.
" Vous avez toujours les mots qu'il faut colonel. Très bien, puisqu'il le faut je suis partante." céda Riza.
" Moi aussi." ajouta Maria.
" Bon alors dans ce cas, rendez-vous ici demain matin, à 8h30 très précies." conclut Moriani.
La décision prise, les militaires rentrèrent au Q.G. Riza se dit que cette fois, elle avait touché le fonds. Mannequin et puis quoi encore ? Pourquoi pas Miss Amestris tant qu'on y est ? Ce Mustang, il abusait de son pouvoir. Ca promettait quand il serait généralissime. Le point positif était qu'elle ne serait pas seule dans cette galère.
